• Dans Rue89 Week-end : la belle bataille de Lili et « son p’tit café » - Le nouvel Observateur
    http://rue89.nouvelobs.com/2014/04/10/rue89-weekend-belle-bataille-lili-petit-cafe-251417

    « Bonjour, je m’appelle Lili et je tiens un p’tit café sur un port dans le Morbihan. Je travaille sept jours sur sept, pas pour les sous, mais parce que l’ambiance est bonne ici.

    Les gens sont bosseurs, respectueux et le vent ne leur fait pas peur.

    Mon p’tit café marche bien, même très bien puisque j’emploie une personne en saison.

    Je suis ouverte dès 7 heures car les p’tits cafés de mes retraités et marins
    sont remplis de rire et de planification.

    Je ferme à 21 heures, parfois plus quand on danse car ils sont rentrés de la marée et qu’on a envie de rigoler.

    Dans mon petit coin, je ne vois pas les heures passer devant ces hommes et femmes (parce qu’il existe des matelotes) dévoués à leur métier. Les jeunes femmes s’y sentent en sécurité et nos jeunes écoutent notre doyen de 90 ans.

    Cela fait deux ans qu’ils ont bien voulu me donner leur confiance et que nous partageons une vie dense, loin des gros titres.

    Maintenant mon bail précaire se finit.

    Le proprio m’aime bien et est même étonné de mon succès, moi qui paraissais si Bisounours avec mon bac + 4 et mes vingt ans d’expérience pro. Mais il ne veut pas se déposséder des murs avec un bail de neuf ans. Je dois rendre les clés.

    Cependant... La petite maison en face est à vendre. Alors pour la première fois de ma vie, je me dis : “Ça vaut le coup d’investir.”

    Mes clients devenus amis pour la majorité doivent continuer à rire sur le port.

    A ce jour, trois banques sur cinq ont refusé le prêt. “ Votre commerce est charmant, ça me fait mal au cœur, etc. ” MAIS, vous dépassez le taux d’endettement.

    Ma vie a été riche en changements, découvertes et rock ’n’ roll. Mes supérieurs ont toujours été contents de moi et certains “ pleurent ” de m’avoir laissé partir. Le boulot était là. Je n’ai jamais aimé être ancrée quelque part, mais cette histoire est ancienne.

    Maintenant, j’ai trouvé mon monde et je sais que l’investissement est gagnant. Je pose ma coquille d’escargot pour le sourire qu’ils me donnent ou me rendent tous.

    Dans les sphères des banques, peuvent-ils comprendre ? Réalisent-ils que leur frilosité de Français va procurer un chômeur et demi en plus alors qu’il suffisait simplement de dire oui. Comprennent-ils qu’on peut vivre avec un petit revenu du moment que le sens de la vie est là ? Et qu’on n’a pas le droit de se plaindre face à leur fameuse crise ?

    Comprennent-ils que c’est une entreprise qui marche et qui est utile ? Comprennent-ils que la vie d’un village-port va s’éteindre ?
    Comprennent-ils qu’ils créent eux-mêmes la morosité ?

    La bataille n’est pas finie. »

    #banksters
    #banques