• "Au démarrage de notre enquête, les réactions étaient doubles. Les uns - intellectuels, universitaires, chercheurs - nous disaient : « Pourquoi vous embêter à travailler sur ce type ? Tout le monde sait qu’il est mauvais. C’est un clown. Ça fait trente ans qu’il raconte n’importe quoi. » Aujourd’hui que paraît, en France et dans le monde anglo-saxon, cette édition très largement actualisée, notre réponse est toujours la même : peut-être BHL ne marquera-t-il pas l’histoire de la pensée, mais son rôle n’est pas nul. Il est lu, il s’exprime partout, sur tout, et tout le temps. Certains, par méconnaissance ou intérêt, le prennent au sérieux. Pourquoi faudrait-il que la critique de BernardHenri Lévy soit réservée à ceux qui savent ? Comment expliquer qu’un directeur de journal, qui dit en privé toutes les limites qu’il trouve à BHL, lui ouvre néanmoins ses colonnes ? Quels intérêts personnels, politiques, idéologiques Bernard-Henri Lévy sert-il ? Ces questions renvoient à l’histoire des intellectuels français depuis les années 1970.

    Les autres - journalistes souvent, mais pas seulement -s’inquiétaient : « Vous êtes fous ? Vous ne pourrez plus jamais travailler nulle part après ça. Il va vous écraser. » Aussi étrange que cela puisse paraître, Bernard-Henri Lévy inspire la crainte en France. Non par la puissance de sa pensée, mais par celle de son entregent. Par sa proximité avec presque tout ce que la presse et le monde de l’édition comptent de patrons et de directeurs, par sa propension à passer des coups de fil menaçants quand il s’estime maltraité, à engager des représailles contre des articles qui lui sont hostiles. Cette crainte, nous n’avons cessé de la vérifier pendant notre première enquête en 2003-2004, et nous l’avons encore observée pendant les mois consacrés à travailler sur cette édition actualisée. Combien d’interlocuteurs nous ont raconté des faits accablants, cocasses ou graves, tout en refusant d’être cités. A quoi bon se mettre â dos sa direction ou ses amis pour dénoncer ce qui, au regard de l’Histoire, n’est qu’une imposture mineure et un danger relatif ? « BHL, ce n’est pas Ben Laden », nous a-t-on dit. Certes. Mais dans certains milieux, le critiquer, c’est risquer une « rupture de ban », c’est donner le signe qu’on refuse le fonctionnement d’un monde. Et ce monde, c’est le nôtre. "

    [ Xavier de La Porte, Jade Lindgaard , Le B.A. BA du BHL ]

    http://books.google.be/books?id=8l0FZpuUJNgC&pg=PT195&lpg=PT195&dq=le+syst%C3%A8me+BHL&source=