• L’appel au secours des domestiques philippines maltraitées en Arabie saoudite - France 24 Observateurs

    http://observers.france24.com/fr/observers.france24.com/fr/node/592278/philippines-domestiques-arabie-Saoudite-abus-employeur-kafala

    Nargelene Mendez, une employée domestique philippine maltraitée par son employeur saoudien, a publié une vidéo sur sa page Facebook appelant à l’aide. La vidéo est devenue virale, ce qui a incité l’ambassade des Philippines en Arabie saoudite à intervenir pour la secourir. Mais toutes n’osent pas appeler à l’aide aussi publiquement. C’est là qu’intervient notre Observateur, un Philippin à la tête d’une organisation clandestine en Arabie saoudite, reconnue comme syndicat légal aux Philippines.

    C’est dans une buanderie que Nargelene Mendez était contrainte de dormir chez son employeur, un officier de police saoudien à la retraite. Dans la vidéo qu’elle a eu le courage de publier sur Facebook, on découvre l’étroitesse du lieu qu’elle partage avec ses collègues. Elle évoque également les maltraitances qu’elle subit au quotidien : « Ils ont frappé ma collègue hier. Ils me frappent aussi. Aidez-nous, s’il vous plaît. Je vous en supplie. » L’appel à l’aide a été entendu, notamment grâce à la mobilisation des internautes sur les réseaux sociaux. La vidéo a été partagée plus de 40 000 fois sur Facebook.

    Plus de 1,1 million de Philippins travaillent en Arabie saoudite. Certains sont ingénieurs ou employés de bureaux. D’autres sont domestiques, en très grande majorité des femmes, issues de milieux ruraux, pauvres et peu éduquées. Ce sont elles qui subissent les plus grands abus de la part de leurs employeurs, sponsors de leur permis de travail et de résidence dans le cadre du système de parrainage ("kafala") en vigueur en Arabie saoudite. Très fréquemment, les employées voient leur passeport confisqué et sont enfermées chez leur employeur, ce qui les rend plus facilement sujettes à des violences physiques, psychologiques et sexuelles, selon Human Rights Watch, qui a recensé plusieurs cas s’apparentant à du travail forcé et à de l’esclavage. Ces abus font de l’Arabie saoudite une destination à éviter pour les travailleurs domestiques, selon les recommandations du COWA, Comité philippin des affaires des travailleurs à l’étranger.

    Selon Human Rights Watch, une domestique qui parvient à échapper au contrôle de son employeur et à quitter le confinement de sa chambre a souvent bien du mal à être entendue. Si elle parvient à se rendre au commissariat de police pour témoigner des abus qu’elle subit, elle peut être arrêtée si son employeur l’a signalée comme étant en fuite ou s’il s’est livré à de fausses accusations. Elle peut même être passible de poursuites. En cause, le système de parrainage « kafala » qui lie entièrement les travailleurs domestiques à leur employeur tant que le contrat n’a pas pris fin.

    Les travailleurs domestiques ont aussi la possibilité de se rendre dans leur ambassade. Certaines ambassades disposent de refuges pour ces travailleurs et ont les capacités de les aider pour quitter le pays. Mais tout dépend du personnel de l’ambassade et des moyens dont ils disposent.

    Le plus souvent, indique Human Rights Watch, les travailleuses domestiques cherchent de l’aide dans la rue. Mais ceux qui tentent de les aider ou de leur offrir un refuge peuvent aussi être poursuivis par la justice. Récemment, un homme a été arrêté pour avoir essayé d’aider un travailleur domestique à quitter son employeur.

    Des organisations de défense des droits des migrants basées aux Philippines tentent d’agir à distance pour améliorer la situation des travailleurs domestiques en Arabie saoudite, notamment en faisant pression sur le gouvernement philippin pour qu’entre enfin en vigueur le « mémorandum of understanding », signé entre les gouvernements saoudien et philippin. Le texte garantit des droits minimaux aux travailleurs domestiques (jour de repos, salaire minimum, temps de travail limité). Mais ces organisations sont également en étroit contact avec des représentants philippins à la tête d’organisations clandestines en Arabie saoudite qui documentent les abus et vont au secours de leurs compatriotes.