• La libération sexuelle : une supercherie pour exploiter sexuellement les femmes — Andrea DWORKIN
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    En termes empiriques, la libération sexuelle fut pratiquée à une vaste échelle par les femmes durant les années soixante, et elle échoua : c’est-à-dire qu’elle ne les libéra pas. Son but – découvrit-on – était de libérer les hommes afin qu’ils puissent utiliser les femmes hors des contraintes bourgeoises, et en cela elle a réussi. Une de ses conséquences pour les femmes fut d’intensifier l’expérience d’être sexuellement typées comme femmes – précisément le contraire de ce que ces filles idéalistes avaient envisagé comme avenir. En faisant l’expérience d’une vaste panoplie d’hommes dans des circonstances très diverses, les femmes qui n’étaient pas prostituées découvrirent le caractère impersonnel de leur rôle sexuel, déterminé par leur classe de sexe. Elles découvrirent dans la pratique sexuelle des hommes une indifférence totale à l’égard de leurs intérêts personnels, esthétiques, éthiques ou politiques (que les hommes qualifiaient alternativement de féminins, bourgeois ou puritains). La norme sexuelle était la baise de la femme par l’homme, et les femmes furent au service de cette norme – qui ne leur rendit pas la pareille.

    #Dworkin #sexualité #hétérosexualité

    • Elles tirèrent de leur expérience – notamment celle d’avoir été forcées et échangées – une première prémisse pour leur mouvement politique : que la liberté d’une femme passe d’abord et nécessairement par la maîtrise absolue de son corps dans le sexe et dans la procréation. Cette maîtrise inclut non seulement le droit de mettre fin à une grossesse mais aussi le droit de dire non au sexe, de ne pas être baisée.
      Cela amena les femmes à faire plusieurs découvertes sur la nature et la dimension politique de leur propre désir ; mais pour les hommes, ce fut une impasse – la plupart d’entre eux ne virent jamais le #féminisme autrement que sous l’angle de leur privation sexuelle ; les féministes leur enlevaient la baise facile. Ils firent tout ce qu’ils purent pour briser les reins du mouvement des femmes – et continuent à le faire aujourd’hui. On nota surtout leur changement d’attitude et de politique en matière d’avortement. Défini comme partie intégrante de la révolution sexuelle, le droit à l’avortement avait été pour eux un enjeu essentiel : qui pouvait supporter l’horreur, la cruauté et la stupidité d’un avortement illégal ? Mais défini comme partie intégrante du droit d’une femme à la maîtrise de son corps, y compris dans le sexe, ce droit leur devint suprêmement indifférent.

      Les ressources matérielles se tarirent. C’est avec un soutien des hommes considérablement réduit que les féministes menèrent la bataille pour la décriminalisation de l’avortement – la suppression des lois en ce domaine – dans la rue et devant les tribunaux. En 1973, la Cour suprême des États-Unis accorda aux femmes l’avortement légalisé, l’avortement régi par l’État.

      (…)

      Aujourd’hui, face à des projets qualifiés d’Amendement sur la vie humaine et de Loi sur la vie humaine – un amendement à la Constitution et un projet de loi qui définissent tout ovule fécondé comme un être humain –, la gauche masculine se contente de faire le mort.