Renversé

Site collaboratif d’information et de luttes en Suisse romande

    • Des tags contestataires viennent horner les murs dès le départ du cortège, annonçant la couleur du défilé. Au fur et à mesure que le cortège s’approche du quartier de la Cité, les vitrines des banques et commerces de luxe sont impitoyablement détruites ou recouvertes de slogans à consonance révolutionnaire. De telles scènes n’ont pas été vues à #Genève depuis la #manifestation contre l’OMC du 28 novembre 2009. Il est d’ailleurs notables que les déprédations matérielles n’ont pas découragé la fraction plus pacifique des manifestants, loin s’en faut. En réalité le cortège a continué de grandir, des passants rejoignant le cortège tout au long du parcours avec un pic de participation à l’arrivée dans le quartier de la Jonction.

      Des modes d’expression très différents, à l’image de la composition sociale de la manifestation, ont su cohabiter durant le cortège. On peut par exemple mentionner l’organisation d’une performance artistico-humoristique sur la Place Neuve pendant qu’une partie des manifestants ravalaient la façade du Grand Théâtre, symbole de la culture bourgeoise s’il en est. Le cortège a témoigné d’une grande capacité de régénération après chaque pic de conflictualité. L’un des moments les plus intenses a sans doute été quand les policiers anti-émeute se sont fait copieusement caillasser devant l’Hôtel de police du boulevard Carl-Vogt qu’ils tentaient tant bien que mal de défendre. En guise d’épilogue, c’est le magasin de cigarettes électroniques du poujadiste Eric Stauffer qui a fait les frais de la colère des manifestants.

      Action directe et contestation

      La mise à sac du centre-ville de Genève constitue un véritable affront pour les élites politiques et sociales, et l’on comprend aisément pourquoi. Leur plan d’action économique consiste à présenter la Suisse non seulement comme un paradis fiscal, mais comme un havre de paix sociale intégrale à l’écart des antagonismes déchirant le reste du monde. Il est à souligner que cette vision transcende aujourd’hui le fumeux clivage entre “gauche” et “droite”. Avec l’évolution du rapport de force de ces dernières années, aucun politicien n’oserait aujourd’hui dire comme le bureaucrate écologiste David Hiler en 1998, qu’il préfère “un million de dégâts à Genève que le FN à 15%”. Tous participent au contraire à la vaste entreprise visant à jeter le discrédit sur les manifestants les plus offensifs en les accusant de tous les maux. L’impensé de ce discours #citoyenniste qui condamne la violence pour des raisons purement idéologique (“ça ne résoud rien”, comme si voter servait à quelque chose...). Une question tout de même : la Reitschule de Berne aurait-elle pu faire face aux multiples assauts de la mairie sans le rapport de force régulièrement imposé par les Chaoten depuis une vingtaine d’années dans la capitale ?

      Il est ainsi inexact de dire que la manifestation du 19 décembre a “dégénéré”, les personnes qui ont participé aux affrontements savaient très bien ce qu’ils faisaient et contre quoi ils se battent. Dans ce contexte, l’action directe est essentiellement un moyen d’expression du mécontement social. Contrairement à ce qu’avance la vulgate pacifiste, l’action directe ne peut pas toujours préfigurer l’utopie d’un monde meilleur à venir. Les bureaux de la haute finance ne peuvent pas (encore) être transformés en crèches, nous n’en sommes pas là. L’heure n’est pas à la révolution mais à l’affirmation d’un #antagonisme, d’une incompatibilité radicale face au rouleau compresseur du capitalisme mondialisé.

      À Genève, une manifestation pour la culture dégénère
      http://culturebox.francetvinfo.fr/scenes/theatre/a-geneve-une-manifestation-pour-la-culture-degenere-232591

      La #police est intervenue pour bloquer l’avancée des manifestants, mais n’a procédé à aucune interpellation. « Pas pour l’instant, a précisé le porte-parole de la police, parce que sur le moment c’est très compliqué d’arrêter. Maintenant, il y aura un travail d’enquête pour essayer de retomber sur les participants principaux ».