• Gilles Kepel, l’islamo-gauchisme, la CGT et les hooligans

    On savait que Gilles Kepel avait deux obsessions. La première est le livre écrit en 2005 par Abou Moussab al- Suri, qui permettrait d’expliquer l’ensemble du phénomène djihadiste actuel ; si ce texte n’avait pas été conçu, nul doute que le monde actuel serait tranquille et que le terrorisme n’existerait pas. Seconde obsession, l’islamo-gauchisme, auquel il attribue la responsabilité d’avoir inventé une « soi-disant islamophobie », qui divise la société française et prépare la guerre civile.

    Il vient de franchir une étape dans son analyse, puisqu’il associe désormais la CGT à la stratégie des islamistes. Dans un entretien accordé à L’Express cette semaine, où il réitère une fois de plus ses attaques contre Olivier Roy (en fait, pratiquement personne dans la communauté scientifique ne trouve grâce à ses yeux), il revient sur la stratégie des djihadistes.

    Parmi les objectifs du djihadisme de troisième génération (...) figure une intention bien précise : faire en sorte que, par la multiplication des actions, les forces de sécurité soient épuisées. J’ai été frappé, le 14 juin, alors que France était sidérée par le double assassinat de Magnanville, que les forces de l’ordre soient mobilisées par les manifestations conduites par M. Philippe Martinez, clope au bec, mais qui a donné lieu à des débordements au cours desquels des casseurs se sont rués contre l’hôpital Necker.(...) Ajoutons que l’Euro de football a donné lieu également à une forte implication face aux hooligans. La survenue simultanée des trois phénomènes est sidérante. Face à eux, la France – l’Europe – ne montre, pour l’instant, que sa faiblesse et l’absence de figure d’autorité.

    Une photo de l’hôpital Necker, avec des policiers en première ligne, est accompagnée de cette citation :

    La survenue simultanée des trois phénomènes est sidérante. L’épuisement des fonctionnaires de sécurité est clairement recherché par les djihadistes.

    (rappelons que les images tournées lors de la manifestation montrent deux personnes, je dis bien deux, qui s’en prennent à Necker, sans que la police, sans doute trop fatiguée, intervienne)

    Si l’on comprend bien, les djihadistes sont tellement forts qu’ils manipulent la CGT – qui n’a, pour Gilles Kepel, aucune raison de défiler avec six autres syndicats – et les hooligans (ou peut-être même les organisateurs de l’Euro de football). Effectivement, face à une telle puissance des djihadistes, il faut que la France s’arme et qu’elle apprenne enfin à imposer une figure d’ordre. Et Gilles Kepel, qui dénonce la doxa politico-médiatique, alors qu’aucun chercheur n’est autant invité dans toutes les émissions de radio, télévision et dans la presse (même dans L’Humanité ), est prêt à fournir à la République et à sa police toutes les clefs pour venir à bout de cette menace. N’ayant pas obtenu de son ami Manuel Valls la création d’un grand institut (sous son égide bien sûr), nul doute qu’il se tournera vers Bernard Cazeneuve pour lui offrir ses recettes destinées à éviter le surmenage des policiers.