Nidal

“You know what I did? I left troops to take the oil. I took the oil. The only troops I have are taking the oil, they’re protecting the oil. I took over the oil.”

  • À quoi sert la hasbara (propagande israélienne) ? Je ne partage pas du tout le point de vue de Gilles Paris :
    http://israelpalestine.blog.lemonde.fr/2012/11/16/la-hasbara-lautre-arme-disrael

    Quel impact cette guerre médiatique peut-elle avoir réellement ? Outre le fait qu’elle reste à la merci de la moindre bavure immédiatement répercutée […], cette guerre se heurte au profond clivage que génère le conflit israélo-palestinien, l’une des rares questions internationales pour laquelle il existe des opinions très tranchées.

    Je pense que c’est l’erreur classique que d’évoquer, en Europe, « des opinions très tranchées », et une opinion publique qui serait sensible « à la moindre bavure ». Et je pense justement que la hasbara ne sert en Europe qu’à cela : à prétendre qu’il existe deux opinions opposées sur la Palestine.

    En réalité, tous les sondages successifs en Europe (et la France est dans la moyenne européenne) montrent que les populations européennes ont très majoritairement une image très négative d’Israël, que seule une très petite minorité en a une image positive, et que la majorité des Européens considèrent Israël comme le pays le plus agressif et dangereux de la planète. Etc. À chaque sondage, on constate que l’image d’Israël est détestable et que la propagande n’a finalement qu’une prise minime sur l’opinion. Paris avait lui-même relevé un tel sondage en avril 2010 :
    http://israelpalestine.blog.lemonde.fr/2010/04/23/une-image-disrael-problematique
    Même sondage même punition deux ans plus tard :
    http://www.ism-france.org/communiques/Sondage-BBC-L-image-d-Israel-toujours-majoritairement-negative-dans-le-m
    Et on avait déjà les mêmes chiffres dix ans plus tôt :
    http://tempsreel.nouvelobs.com/monde/20031102.OBS9081/un-sondage-europeenscandalise-israel.html

    Mais à l’inverse :
    – les politiciens européens semblent persuadés que leur intérêt est dans l’alignement pur et simple sur toutes les lubies israéliennes, y compris lorsque ces lubies nuisent directement aux intérêts européens ;
    – les politiciens européens passent leur temps à professer leur « amour » pour Israël, leur « lien éternel », alors même que pas plus de 9 à 18% de leurs électeurs ont une image simplement positive de ce pays.

    Mais aussi : les gens ont une très mauvaise image d’Israël, mais tous sont persuadés qu’ils sont un peu seuls à penser comme cela, et que la propagande permanente en faveur d’Israël serait finalement efficace (syndrôme : je dois bien être le seul à penser quelque chose d’aussi original et courageux que ce que je pense, et à ne pas être sensible à cette omniprésente propagande). Dans les milieux militants, on passe son temps à se demander « mais comment peut-on convaincre/informer les gens ? », ce qui est bien inutile (les gens sont déjà convaincus).

    Ainsi, je pense que le principal intérêt de la hasbara n’est pas de réellement convaincre les européens (ça ne marche, ça n’a jamais marché, et ça ne marchera jamais), mais simplement faire croire que, à force de vivre dans un environnement saturé d’une telle propagande, « nos concitoyens européens » (« tout le monde sauf moi »), eux, y seraient sensibles et n’auraient pas, ultra-majoritairement, une image totalement négative d’Israël. Ce qui permet de prétendre que nos politiciens suivent simplement leurs électeurs (dont une grosse partie serait, contrairement à la réalité, très favorables à Israël). Genre… c’est malheureux mais c’est un peu la démocratie.

    Quand Gilles Paris évoque « des opinions très tranchées », il se trompe, sauf à considérer que les 60% d’Européens ayant une image vraiment pourrie d’Israël (considéré comme le pays le plus dangereux pour la paix dans le monde) peuvent être comparés aux 9 à 18% de gens qui en ont une image positive. C’est très simple : tout le monde est d’accord, sauf une minuscule minorité.

    La hasbara n’est destinée qu’à faire écrire ça à Paris : suggérer qu’il y aurait deux points de vue d’égal poids démocratique. Méthode typiquement médiatique : quand tout le monde est d’accord sauf une infime minorité et que le point de vue ultra-majoritaire entre en contradiction avec les intérêts de l’élite politico-économique, monter en épingle la minorité (et la rendre aussi bruyante que possible) et prétendre que « le sujet est polémique » – la seule raison de prétendre que le sujet est polémique étant justement qu’il ne l’est pas du tout. Et donc permettre aux dirigeants européens de soustraire cet aspect de la politique étrangère de l’Union au jugement de la démocratie.