Lettre à un jeune prof

?2013/08/21/222-lettre-a-un-jeune-prof

  • Lettre à un jeune prof (Eveline Charmeux)
    http://www.charmeux.fr/blog/index.php?2013/08/21/222-lettre-a-un-jeune-prof

    Nous travaillons avec des personnes, les élèves, qui sont absolument nos égaux en droit […]. Cela veut dire qu’un enseignant a certes des responsabilités à leur égard, mais n’a aucun pouvoir sur eux. La fameuse « autorité », dont on va te rebattre les oreilles, n’a rien à voir avec le fait d’exiger de l’obéissance, au besoin par la peur.

    […]

    Notre tâche est de faire en sorte que les élèves apprennent.
    Il est donc impossible de leur demander d’effectuer des activités qui n’ont pas fait l’objet d’un apprentissage précis préalable. […]
    De la même manière, si tu veux qu’ils puissent les réussir, tu devras prévoir des moments d’apprentissage de la lecture des consignes d’exercices : la première cause d’échecs des élèves dans les diverses disciplines est en effet qu’ils n’ont pas compris ce qu’on leur demandait de faire dans la consigne.

    […]

    Ce qui définit un apprentissage réussi, c’est la possibilité de réinvestir ce qui a été appris en commun dans des situations diverses. Or, pour obtenir ce résultat, il faut que l’élève ait été actif : il faut qu’il ait travaillé à partir de ce qu’il a entendu ou observé. Actif et coopératif : qu’il ait travaillé en collaboration avec ses pairs. Pour qu’il soit coopératif il faut qu’il puisse échanger librement avec ses camarades de travail. S’entraider n’est pas tricher. Collaborer est éducatif.
    […]
    En fait, un cours magistral ne peut aider que les enfants qui se sont posé des questions avant d’arriver... Et tu vois aisément de quels enfants il peut s’agir. Si bien que le système que tu as connu — le Maître parle, les élèves apprennent ce qu’il vient de dire, ils font les exercices que le Maître leur demande de faire et ils ont droit ensuite à une correction qui leur dit (trop tard) ce qu’il aurait fallu faire — est en réalité celui d’une école d’élite sociale qui favorise ceux qui savent déjà, et laisse sur le palier ceux qui sont là pour apprendre ce qu’ils ne peuvent apprendre qu’à l’école.

    […]

    Je voudrais seulement en ajouter une, la dernière, apparemment secondaire aux yeux de beaucoup mais absolument essentielle aux miens.
    Je te la dis comme une prière :
    Mets du soleil dans ta classe !! De la beauté sur ses murs, dans les textes que tu fais lire, dans les musiques que tu fais écouter — souvent ! — , dans les poèmes que l’on savoure chaque matin. Que la vie de tes élèves avec toi, grâce à toi, vibre d’émotions qui les marqueront pour toujours, frémisse d’enthousiasmes, d’admiration, de rires et d’humour. Que l’on s’y amuse à créer, à détourner, à transformer, à ne pas obéir. Que disparaisse définitivement ce qui depuis des années tue lentement l’école : l’ennui, la peur, les menaces, les classements et les notes.

    #éducation #apprentissage #école #pédagogie

  • Lettre à un jeune prof
    http://www.charmeux.fr/blog/index.php?2013/08/21/222-lettre-a-un-jeune-prof

    Nous travaillons avec des personnes, les élèves, qui sont absolument nos égaux en droit, comme le dit si bien la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen. Cela veut dire qu’un enseignant a certes des responsabilités à leur égard, mais n’a aucun pouvoir sur eux. La fameuse « autorité », dont on va te rebattre les oreilles, n’a rien à voir avec le fait d’exiger de l’obéissance, au besoin par la peur. Le « maitre » n’est pas le directeur de conscience des enfants.
    Ta vraie tâche, c’est de faire en sorte que tes élèves adhèrent au projet d’apprentissage, mais tu n’as pas à les y forcer (c’est impossible !). Je te rappelle au passage que le respect (autre tarte à la crème dont on va te rassasier) est mutuel — ou n’est pas — et que ce sont les adultes qui doivent « commencer » pour donner l’exemple : les élèves te respecteront, si tu les respectes.
    Cela signifie aussi que tu n’as aucunement à les juger, avec cette psychologie moralisatrice de comptoir que révèlent tant d’appréciations de carnets trimestriels. Evaluer n’est pas juger, c’est mesurer. Et ce que tu as à mesurer, ce sont les progrès que tu as provoqués chez tes élèves. Or, cette mesure-là ne peut être traduite par des chiffres. Pourquoi ? Si tu veux le comprendre, tu as intérêt à te rapprocher de tous ceux qui demandent la suppression des notes chiffrées en classe(1). Sache que, pour apprendre il faut tâtonner et se tromper, car l’erreur est instructive si on la dédramatise et si l’on travaille à partir du raisonnement qui l’a provoquée. Alors elle devient provisoire : c’est même un tremplin pour le progrès. La note qui sanctionne la « faute » interdit l’apprentissage. Elle trompe les parents autant que pour les élèves : sous une fallacieuse couverture de scientificité, qui la rend particulièrement dangereuses, elle est largement subjective, dépendante de la rumeur. De la pure pifométrie !

    • Bravo Mme Charmeux, membre il fut un temps du Groupe Français d’Education Nouvelle (GFEN). C’est bien de remettre les pendules à l’heure. C’est pourtant ce que j’ai appris à l’Ecole Normale en 1977-79 pendant ma formation et tous ces préceptes, j’ai essayé de les mettre en oeuvre dans mon métier. Maintenant, les priorités de l’institution ont si souvent changé dans le temps de ma carrière que votre message a été brouillé voire perdu de vue.

      Une prise de position sur la l’apprentissage de la lecture par approche uniquement syllabique.
      http://gfen.asso.fr/fr/apprendre_a_lire_par_le_b.a._ba

      Qu’en est-il de la fameuse « méthode globale » (qui n’a jamais pris la place de l’analyse syllabique) ?
      http://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9thode_globale
      A noter que la méthode dite globale a été appelée « méthode naturelle » par les instits Freinet.

    • http://www.angers.maville.com/actu/actudet_-Angers.-Ces-eleves-qui-reprennent-l-ecole-ce-lundi_fil-2387

      La deuxième école Montessori d’Angers effectue sa rentrée aujourd’hui.
      Installée dans les anciens locaux de l’établissement Maurice-Ravel, rue Haute-de-Reculée, elle propose un enseignement alternatif basé sur une pédagogie active. L’enfant y évolue de manière autonome, guidé par un éducateur.

      Et voilà le travail : aujourd’hui il faut payer (plutôt cher) si on veut que nos enfants bénéficient de méthodes pédagogiques adaptées alors que l’institution aurait dû faire peau neuve depuis plusieurs décennies. Mais il fallait compter avec la force d’inertie du corps enseignant (ce « grand corps malade ») et de ses hiérarques.
      #monde_de_oufs