Des citations de ce livre sur les #montagnes :
- « Expliquez-nous pourquoi, Karadzic a choisi Pale, qui n’était alors qu’un petit village de montagne, pour installer le gouvernement des Serbes de Bosnie, plutôt qu’une ville digne de ce nom, comme Banja Luka par exemple. Que ce village de montagne soit devenu une ville, c’est incompréhensible.
– Avant la guerre, Karadzic avait déjà des affaires, ici, à Pale. Des affaires un peu louches. Dans une entreprise de Sarajevo où il intervenait comme médecin, il avait donné des congés maladie fictive à des ouvriers, en échange de quoi les ouvriers lui avaient construit gratuitement une maison à Pale. Il avait pas mal de choses, ici, c’est pourquoi il a choisi Pale plutôt que Banja Luka »
Lionel Duroy, L’hiver des hommes, Editions Julliard, 2012, p.138
- « Oui. Nous avons prétendument gagné la guerre, mais pendant que les Musulmans vivent tranquillement à Sarajevo dans les maisons des Serbes, nous, les vainqueurs, nous mourons de faim et froid sur notre montagne »
Lionel Duroy, L’hiver des hommes, Editions Julliard, 2012, p.144.
- « Les oustachis ne sont pas seulement ’venus’, ils ont occupé Pale durant quatre ans.
– Pardonnez-moi, je savais que les Allemands étaient présents dans tout le massif montagneux, autour de Sarajevo, mais je ne savais pas que les oustachis étaient à Pale précisément.
– Ici, ce sont eux qui ont commis tous les massacres. Les Allemands et les Italiens étaient présents, dans des forteresses, mais ils étaient plutôt corrects. Il est même arrivé qu’ils interviennent pour nous défendre contre les oustachis. C’est un officier italien qui a sauvé la vie de ma mère alors qu’un groupe d’oustachis s’apprêtait à l’emmener.
De nouveau, je songe à Malaparte, officier italien engagé au côté de la Wehrmacht, sur le front de l’Est, comme correspondant de guerre, et sauvant quelques familles juives à Jassy, en Moldavie, avec l’aide du consul d’Italie, tandis que débute le pogrome. Un instant, je suis tenté de demander à notre hôte s’il a lu Malaparte, mais il reprend, sortant soudain de sa méditation :
– L’esprit de la guerre animait les Allemands, mais les Croates poursuivaient un objectif différent. Les Croates avaient en tête d’exterminer les Serbes. Vous comprenez cela ?
– Je vous écoute.
– Ils menaient à l’intérieur de la guerre une autre guerre. Une guerre indigne, criminelle.
Puis il se tait et m’observe, comme s’il doutait encore que je puisse comprendre. Mais j’acquiesce.
– J’avais trois ans en 1941, reprend-il, je n’ai donc aucun souvenir de mon père ni de sa disparition. Je sais que le plus âgé des quatre frères, mon oncle Jovo, a été tué dans les heures qui ont suivi l’arrivée des Oustachis. Le lendemain, ou le jour même, mon père et ses deux frères ont rejoint la Résistance dans les montagnes ».
Lionel Duroy, L’hiver des hommes, Editions Julliard, 2012, pp.166-167.
- « Le siège du parti serbe était à l’Holiday Inn de Sarajevo. Nous avons senti monter le danger. Les bérets verts musulmans étaient partout dans les rues, et nous savions que parmi eux figuraient beaucoup de criminels, des détenus qui avaient été libérés parce qu’ils connaissaient le maniement des armes. Quand les premières barricades sont apparues, Karadzic a décidé de déménager le siège du parti de Sarajevo à Pale. C’était plus sûr. Ici, nous serions entre Serbes, protégés par les montagnes et les forêts »
Lionel Duroy, L’hiver des hommes, Editions Julliard, 2012, p.172.
« ’Je suis chez les fous furieux [des Serbes de la Republique serbe de Bosnie], Hélène, des gens qui s’imaginent nous protéger des Musulmans depuis un plateau perdu de haute montagne. Je ne leur ai pas dit que nous habitions Belleville, au-dessus d’une mosquée, et que nous ne souhaitons pas être protégés des Musulmans’ »
Lionel Duroy, L’hiver des hommes, Editions Julliard, 2012, p.178.
- « Elle le pense, oui. Je me souviens qu’un jour elle a dit une drôle de phrase, du genre : ’Nous, les Serbes, prétendons avoir gagné la guerre, mais pendant que les Musulmans vivent tranquillement à Sarajevo, nous mourons de faim et de froid sur notre montagne »
Lionel Duroy, L’hiver des hommes, Editions Julliard, 2012, p.182.
- "Nous sommes dans les montagnes de Romanija, remarque-t-il avec une solennité voulue et tandis qu’on entend le vent siffler sous le plancher de tôle. On dit que c’est ici qu’est née l’âme serbe aux premiers jours du monde.
– Dans cette immense solitude.
– Oui, confirme-t-il, la solitude est destin. Chaque fois, dans l’histoire, que nous avons cru pouvoir compter sur un ami, cet ami nous a trahi. Le dernier en date est Mitterand, votre Président. Pendant la guerre, j’étais stationné sur l’aéroport de Sarajevo et j’ai été témoin du jour où les Français ont décidé de faire alliance avec les Musulmans.
Lionel Duroy, L’hiver des hommes, Editions Julliard, 2012, p.197.
- « Il [Ratko] était très intelligent, très doué. Il était la fierté de l’instituteur. Nous, les montagnards, sommes plus intelligents que les gens des villes. La montagne nous oblige à être plus perspicaces pour survivre, tandis que dans la plaine ils n’ont pas besoin de développer leur intelligence, ils ont tout le confort sous la main »
Lionel Duroy, L’hiver des hommes, Editions Julliard, 2012, p.252.
- « Si les Serbes veulent se priver de Sarajevo, ça les regarde. Qu’ils restent sur leur montagne, ou à Lukavica. Après tout, nous vivons très bien sans eux »
Lionel Duroy, L’hiver des hommes, Editions Julliard, 2012, p.347.
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