Le nouveau statu quo : contenir l’EI mais maintenir la menace - Scarlett HADDAD

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  • Pas encore de compromis régional à l’horizon... - Scarlett HADDAD - L’Orient-Le Jour
    http://www.lorientlejour.com/article/883349/pas-encore-de-compromis-regional-a-lhorizon.html

    Des sources libanaises proches du 8 Mars estiment à cet égard qu’en dépit des déclarations officielles, la position des pays du Golfe, dont l’Arabie et le Qatar, reste ambiguë au sujet de l’EI.

    Selon ces sources, l’argent continue d’affluer dans les caisses de l’EI, en provenance des pays du Golfe, notamment le Koweït, le Qatar et l’Arabie, sachant que le million de dollars quotidien gagné par ce groupe grâce à la vente du pétrole, via la Turquie, suffit à peine à acheter les munitions, l’EI ayant besoin d’autres revenus pour assurer la survie de l’État islamique qu’il a fondé. Selon les sources proches du 8 Mars, l’origine de la pensée takfiriste vient d’ailleurs de l’Arabie, dont plusieurs milliers de combattants ont rejoint l’EI. D’ailleurs, la récente attaque contre un bâtiment sécuritaire officiel saoudien, dans la ville de Charoura à la frontière avec le Yémen, a montré à quel point l’esprit takfiriste est bien implanté dans le royaume.

    Selon les quotidiens saoudiens, les membres du commando sont saoudiens, même s’ils sont venus par le Yémen pour faire sauter le bâtiment, dans un attentat-suicide spectaculaire. Malgré cela, les ulémas dans les mosquées n’ont pas condamné cette attaque. Aujourd’hui, les autorités saoudiennes exercent de fortes pressions sur les ulémas dans une tentative de les pousser à promouvoir la « modération », décrétée par le roi Abdallah dans son dernier discours à la nation. Elles ont même annoncé l’arrestation d’une dizaine d’ulémas qui ne se sont pas conformés à cette injonction, mais lorsque la presse saoudienne annonce l’arrestation d’une dizaine d’ulémas, c’est qu’il y en a beaucoup d’autres qui sont dans la même situation, mais les autorités cherchent à leur faire peur. Par exemple, aux Émirats arabes unis, les autorités ont carrément ordonné aux ulémas qui prêchent dans les mosquées de s’inspirer de la doctrine d’al-Azhar en Égypte, au lieu de la ligne religieuse wahhabite. C’est dire combien « le mal takfiriste » est bien ancré au sein de la hiérarchie religieuse saoudienne et au sein de la base populaire. Même chose au Koweït, où des manifestations pro-EI ont eu lieu, et en Jordanie, où la province de Maan est quasiment acquise aux thèses extrémistes.

    • Les sources proches du 8 Mars sont convaincues que tant que les fonds continueront à affluer vers l’EI cela signifiera que la guerre contre ce groupe n’est pas sérieuse. Même la résolution 2170 du Conseil de sécurité qui condamne l’EI ne prévoit pas un mécanisme de lutte contre ce phénomène. Il s’agirait encore d’une position de principe qui ne s’est pas vraiment concrétisée. D’une part, parce que dans les pays du Golfe, cet esprit est largement implanté et qu’il faut du temps pour le combattre et, d’autre part, parce que certains États régionaux et internationaux continuent à croire que l’EI, s’il est contenu, peut être utile dans la lutte contre l’Iran et ses alliés dans la région. Tant que cette idée continuera à prévaloir, précisent les sources du 8 Mars, il y a peu de chances d’aboutir à des compromis qui seraient de nature à soulager la région. L’heure des solutions, au Liban et ailleurs, n’a donc pas encore sonné. Reste à savoir si l’EI pourra être contenu ou bien s’il lancera une nouvelle attaque-surprise là où on ne l’attend pas.

    • « certains États régionaux et internationaux continuent à croire que l’EI, s’il est contenu, peut être utile dans la lutte contre l’Iran et ses alliés dans la région », cette idée est d’ailleurs développée dans un article précédent de la même :
      http://www.lorientlejour.com/article/882944/le-nouveau-statu-quo-contenir-lei-mais-maintenir-la-menace.html

      Aujourd’hui, le monde entier parle de combattre l’EI, mais derrière les déclarations officielles, certaines attitudes restent ambiguës. La source diplomatique arabe précitée précise ainsi qu’il est à craindre que l’EI soit entré dans le bazar des négociations internationales. Les États-Unis se sont contentés de fixer les limites de cette « Daoula islamiya », à la porte d’Erbil, et sur une large portion du territoire syrien, dont les provinces de Raqqa, de Hassaka et une partie de la province d’Alep. De la sorte, la menace demeure, mais elle reste limitée à un territoire bien précis et dirigée contre le régime syrien et l’Iran via le régime irakien. Les pays du Golfe sont rassurés parce que la menace est contenue et ils peuvent continuer leur bataille contre le régime syrien... Israël, qui n’arrive pas à défaire le Hamas, peut au moins être tranquille sur l’incapacité de « l’axe de la résistance » à réchauffer certains fronts, et les États-Unis continuent à avoir l’initiative et les atouts dans les négociations à venir. Le problème c’est que la dynamique de l’EI est lancée et elle pourrait échapper à tout contrôle...

    • Il y avait aussi un article la semaine dernière, dans lequel l’Arabie séoudite semble mettre ses conditions avant de réellement s’engager :
      http://seenthis.net/messages/286149

      Saudi Arabia is prepared, Abdulrahman suggests to confront ISIS, but only – and only if - “a political solution [is] imposed in Syria and Iraq” — a regime change that leads to wider Sunni mobilization. The sectarian policies of Assad and Maliki “triggered this chaos. Therefore, the solution lies in strong central governments in both Baghdad and Damascus with American, Western and regional support.”