• « Faire du brevet l’examen de l’entrée en seconde, c’est la fin programmée du collège unique », Claude Lelièvre

    Invité à préciser ce qu’il entendait par « libéralisme avancé », le président de la République Valéry Giscard d’Estaing (« VGE ») déclarait, sur RTL, le 20 mai 1975 : « Il y a dans la pensée de gauche des éléments positifs importants dont je compte bien m’inspirer ; ce qui fait que, dans l’action libérale avancée, il y a beaucoup d’idées de gauche qui doivent être mises en œuvre. »

    Quelques-unes d’entre elles ont alors défrayé la chronique : création d’un secrétariat à la condition féminine, loi Veil sur l’IVG, abaissement de l’âge de la majorité à 18 ans, regroupement familial pour les immigrés, collège unique.

    On aurait pu penser qu’avec son antienne du « en même temps », la présidence d’Emmanuel Macron s’inscrirait dans cette filiation. On voit clairement qu’il n’en est rien. La loi Veil sur l’IVG a été adoptée avec l’appui de l’ensemble des députés de gauche le 20 décembre 1974 et une minorité de parlementaires de droite.

    A contrario, la récente loi sur l’immigration a été adoptée avec l’appui de l’ensemble des députés du Rassemblement national. Par ailleurs, Michelle Perrot, la grande spécialiste de l’histoire des femmes, a pu se dire « scandalisée » par les propos d’Emmanuel Macron concernant l’affaire Depardieu.

    Rupture avec la « tradition républicaine »

    La conception du « collège unique » est une version française de l’« école de base » suédoise (sociale-démocrate), de la « comprehensive school » (travailliste), de la « Gesamtschule » (sociale-démocrate). Dans le cadre du « libéralisme avancé », le collège unique a été voulu et porté personnellement par Valéry Giscard d’Estaing, mais a rencontré de nombreuses oppositions, en particulier dans son propre camp politique. Encore en octobre 1991, Alain Juppé (alors secrétaire général du RPR) proclamait qu’il fallait « casser le collège unique ». Mais, dans son livre paru en vue de la campagne présidentielle de 2017, il ne prônait plus que quelques aménagements.

    Marine Le Pen, elle, a proposé dans son programme pour l’élection présidentielle de 2022 une arme de « destruction massive » afin d’en finir avec le collège unique : « Le diplôme national du brevet deviendra un examen d’orientation post-troisième. » L’ex-ministre de l’éducation nationale, Gabriel Attal, a repris pour l’essentiel cette prescription en annonçant que le brevet serait désormais une condition nécessaire pour entrer en seconde (générale et/ou technologique ?), ce qu’il n’a jamais été jusque-là. Faire du brevet l’examen de l’entrée en seconde, c’est choisir sans appel que le collège doit être une propédeutique au lycée, et non pas la deuxième phase d’une instruction obligatoire (pour tous).

    C’est la fin programmée du collège unique et de son sens originel initié dans le cadre du libéralisme « avancé ». « VGE » avait été très net, en 2001 : « Le débat doit se concentrer sur cette question : quels savoirs donner à cet ensemble de jeunes qui constituent un acquis culturel commun ? On n’a guère avancé depuis vingt-cinq ans. Au lieu d’avoir rabattu tout l’enseignement des collèges vers l’enseignement général, les rapprochant des classes de la 6e à la 3e des lycées d’autrefois, en un peu dégradé, il aurait mieux valu en faire une nouvelle étape de la construction du cycle scolaire. »

    Le renoncement aux ambitions portées par le libéralisme « avancé » dans certains domaines peut parfois aller plus loin et rompre non seulement avec le « libéralisme avancé » mais même avec la simple « tradition républicaine ». On peut en prendre pour exemple significatif la volonté réitérée constamment ces derniers mois par l’ex-ministre de l’éducation nationale d’aller vers une forte « labellisation » ministérielle des manuels scolaires.

    Le choix des manuels scolaires, question vive

    La question du choix des manuels scolaires a été une question vive lors de l’instauration de l’école républicaine et laïque, sous la IIIe République. Le 6 novembre 1879, le directeur de l’enseignement primaire, Ferdinand Buisson, dans une note adressée à Jules Ferry, indique qu’« il y aurait de graves inconvénients à imposer aux maîtres leurs instruments d’enseignement » et qu’« il n’y en a aucun à leur laisser librement indiquer ce qu’ils préfèrent ».

    En conséquence, Jules Ferry signe, le 16 juin 1880, un arrêté qui fait largement appel au concours des maîtres et il souligne que « cet examen en commun deviendra un des moyens les plus efficaces pour accoutumer les enseignants à prendre eux-mêmes l’initiative, la responsabilité et la direction des réformes dont leur enseignement est susceptible ». Le 13 octobre 1881, une circulaire établit, pour les professeurs de collèges et lycées, des réunions mensuelles en leur confiant le choix des livres de classe.

    L’école républicaine instituée sous la IIIe République s’est ainsi distinguée nettement de ce qui l’a précédée et de ce qui l’a suivie dans ce domaine. Par exemple, François Guizot, ministre de l’instruction publique en 1833, a fait paraître des manuels scolaires officiels dans les cinq matières principales de l’école primaire. Et, dès l’arrivée de Philippe Pétain au pouvoir, un décret du 21 août 1940 a mis un terme à l’attitude libérale qui avait prévalu : ce décret ne traite plus de la liste « des livres propres à être mis en usage » mais de celle « des livres dont l’usage est exclusivement autorisé ».

    A la Libération, le 9 août 1944, une ordonnance annule « tous les actes relatifs à l’interdiction de livres scolaires ou instituant des commissions à l’effet d’interdire certains livres ».

    En miroir, on peut rappeler la réponse du ministre de l’éducation nationale Alain Savary à une question écrite de parlementaires en avril 1984 à propos d’un manuel incriminé : « Le ministre ne dispose pas du pouvoir d’injonction lui permettant de faire retirer ni même de faire amender un ouvrage. Il n’exerce aucun contrôle a priori sur le contenu des manuels scolaires et il n’a pas l’intention de modifier la politique traditionnellement suivie à cet égard. Il n’existe pas de manuels officiels, pas plus qu’il n’existe de manuels recommandés ou agréés par le ministère de l’éducation nationale. Il y a eu dans le passé des tentatives allant dans ce sens, avec risques de censure. »

    Oui, dans bien des domaines, on est désormais loin de l’horizon d’un certain libéralisme « avancé » qui se voulait « moderniste » : ce qui se profile, c’est presque sans fard un libéralisme « d’attardés » plus ou moins assumé.

    Claude Lelièvre est l’auteur de L’Ecole d’aujourd’hui à la lumière de l’histoire (Odile Jacob, 2021).

    https://www.lemonde.fr/education/article/2024/01/16/faire-du-brevet-l-examen-de-l-entree-en-seconde-c-est-la-fin-programmee-du-c

    #école #BEPC #collège

    • « Si le récit égalitaire perdure, l’Etat organise une forme d’optimisation scolaire », Laurent Frajerman
      https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/01/16/si-le-recit-egalitaire-perdure-l-etat-organise-une-forme-d-optimisation-scol

      L’ancien ministre Gabriel Attal avait annoncé, en novembre 2023, avant sa nomination comme premier ministre le 9 janvier, un important train de mesures pour réformer l’éducation nationale, incluant d’aborder la « question du tabou du #redoublement » et de créer des #groupes_de_niveau au collège. Au regard des enquêtes internationales, personne ne conteste plus la baisse du niveau des #élèves français, même de ceux qui figurent parmi les meilleurs.

      L’ex-ministre en avait conclu que l’#enseignement doit se montrer plus exigeant, ce qui correspond à un sentiment très majoritaire. Outre les menaces qu’elles font peser sur la liberté pédagogique, on peut douter que les mesures soient à la hauteur de l’enjeu. Toutefois, ces critiques ne peuvent dissimuler que cela fait plus de dix ans que la dynamique positive qui a démocratisé l’école française a disparu. La panne du modèle actuel, miné par la #ségrégation_sociale et des cures d’#austérité à répétition, impose des changements. Tout l’enjeu étant de savoir si c’est pour revenir aux années 1950 ou pour relancer sa démocratisation.

      Les politiques éducatives menées depuis le général de Gaulle œuvraient pour la scolarisation de tous les élèves du même âge dans une structure identique, dans l’objectif de leur délivrer le même enseignement. En conséquence, les classes ont été marquées par une hétérogénéité croissante, avec son corollaire : une baisse d’exigence, afin de faciliter l’accès de tous les élèves aux anciennes filières élitistes.

      Avec succès, puisque l’#accès_aux_études a été considérablement élargi. Cela s’accompagne du passage presque automatique en classe supérieure. A la fin des années 1960, le redoublement constituait la règle : un tiers des élèves redoublait la classe de CP, contre 1,3 % aujourd’hui. En 2021, seulement 12 % des élèves arrivaient en seconde avec du retard. Devenu résiduel, le redoublement a changé de nature, ne concernant plus que des élèves en forte difficulté, qu’elle soit structurelle ou conjoncturelle.

      Classes moyennes supérieures

      Les enseignants affichent leur scepticisme. Ils ne considèrent pas le redoublement comme une recette miracle, car il peut générer ennui et découragement. Toutefois, ils se trouvent démunis devant l’écart grandissant entre les meilleurs élèves, qu’il faut stimuler, et ceux qui cumulent les difficultés de compréhension. Ils constatent que plus les années de scolarité passent, plus l’échec s’enkyste, moins la notion de travail scolaire ne revêt de sens, générant quelquefois une attitude perturbatrice.

      Gabriel Attal en a tiré d’ailleurs argument pour dénoncer l’absurdité de cette situation et la souffrance qu’elle génère pour les élèves. Nombre d’enseignants vivent une situation d’autant plus ingérable que, paradoxalement, si l’affichage est homogène, le rêve de l’école commune s’éloigne.

      Jusque-là, la sociologie de l’éducation dénonçait les limites de cette politique de massification. Les inégalités sociales étant structurelles, le système est d’abord soumis aux effets de la #ségrégation-spatiale. Quoi de commun entre un collège en éducation prioritaire et un autre situé en centre-ville d’une métropole ?

      Quatre types d’école cohabitent, donc : l’#école_publique normale, celle en #éducation_prioritaire, l’école publique élitiste, et l’#école_privée. Aujourd’hui, avec le développement d’un #marché_scolaire, nous vivons une nouvelle phase. L’Etat aggrave la fracture existante en créant des établissements dérogatoires et de nouvelles #filières_élitistes sélectionnant par les langues, critère socialement discriminant. Pire, il subventionne massivement sa propre concurrence, l’enseignement privé.

      Le privé accueille de plus en plus d’élèves des milieux favorisés, au détriment de la mixité sociale. Les difficultés se concentrent alors dans l’école publique « normale ». Seule à supporter réellement les contraintes de la démocratisation, celle-ci n’en est que plus répulsive pour les classes moyennes et supérieures, générant un terrible cercle vicieux. Si le récit égalitaire perdure, l’Etat organise en réalité une forme d’#optimisation_scolaire au détriment de ceux qui n’ont pas d’échappatoire.

      Depuis une quinzaine d’années, les enquêtes internationales nous alertent sur l’aggravation du poids des #inégalités_sociales dans les résultats scolaires. Ce constat est dissimulé par l’invisibilisation de la #compétition. D’un côté, les notes ont été remplacées par les compétences, de l’autre, elles connaissent une inflation qui, malheureusement, ne reflète pas une hausse du niveau réel. En 2022, 59 % des bacheliers ont obtenu une mention. Ils étaient moins de 25 % en 1997… Le flou qui en résulte bénéficie aux familles les plus informées sur la règle du jeu, ou capables de payer coachs et cours particuliers.

      Politique éducative « discount »

      Le second vice de fabrication de la démocratisation scolaire est son caractère « discount ». Par exemple, l’argent économisé par la quasi-suppression du redoublement n’a guère été réinvesti dans des dispositifs permettant d’épauler les élèves en difficulté. Autrefois, les enseignants encadraient les élèves dans leurs exercices et l’apprentissage du cours en dehors des heures de classe. Aujourd’hui, ce type de travail est généralement confié à des étudiants bénévoles ou à des animateurs ou surveillants peu qualifiés. Même dans le dispositif « Devoirs faits » en collège, la présence d’enseignants est optionnelle.

      De nombreux choix proviennent de la #rationalisation_budgétaire : chasse aux options, suppression progressive des dédoublements de classe. Par exemple, en 2010, un élève de 1re L avait obligatoirement six heures de cours en demi-groupe (en français, langues, éducation civique, mathématiques et sciences). Aujourd’hui, les établissements ont toujours la latitude de créer de tels groupes, mais en prenant dans une enveloppe globale qui se réduit d’année en année et sans qu’un nombre maximum d’élèves ne soit prévu.
      Le pouvoir d’achat des #enseignants a baissé d’environ 20 %, source d’économie massive sur les salaires. Les effets commencent seulement à en être perçus : crise du recrutement, hausse exponentielle des démissions et professeurs en place démotivés par le déclassement de leur métier. Les promoteurs de cette politique leur préfèrent des enseignants précaires et sous-qualifiés, sommés de suivre les injonctions pédagogiques du moment. Remarquons que ces #contractuels sont nettement plus nombreux dans les établissements difficiles de l’enseignement public…

      Depuis 2002, les gouvernements de droite et de centre droit suppriment des postes d’enseignant. Malgré le redressement opéré sous François Hollande, le solde reste négatif, avec moins 36 500 postes. Le second degré a été particulièrement affecté, avec un solde de moins 54 700 postes, au nom de la priorité au primaire. Un maillon essentiel de la chaîne éducative a donc été fragilisé, alors que c’est le lieu de maturation des contradictions du système. Quel sens cela a-t-il d’habituer un élève de REP + à des classes de quinze élèves pour, devenu adolescent, le mettre dans une classe de vingt-cinq au collège ? Ces politiques de ciblage, censées produire des résultats visibles à un moindre coût, créent souvent inégalités et incohérences.

      Aujourd’hui, la France dépense 1 point de moins du PIB pour l’éducation qu’en 1995. Si on appliquait aujourd’hui les ratios en usage à l’époque, le budget consacré à l’avenir du pays augmenterait de 24 milliards d’euros, dont 15,5 milliards d’euros dépensés par l’Etat. Ce sous-investissement chronique se paie par la crise de notre #système_scolaire. Un débat sans arguments d’autorité s’impose donc, sous peine que les idéaux généreux et les politiques cyniques aboutissent définitivement à une école à plusieurs vitesses, dans laquelle les #classes_populaires seront assignées à un enseignement public dégradé.

      Laurent Fajermann est professeur agrégé d’histoire au lycée Lamartine, sociologue, chercheur associé au Centre de recherches sur les liens sociaux, du CNRS

    • Philippe Mangeot (philippe.duke ) sur Instagram :

      Lecture effarée du rapport de l’enquête administrative de l’Inspection générale sur le collège Stanislas, que publie dans son intégralité @mediapart. Toutes les informations qui circulaient sur les pratiques de cet établissement privé sous contrat sont corroborées et objectivées : contournement de la loi et de Parcoursup, pédagogie brutale et assumée comme telle, programmes non respectés, enseignement sexiste et homophobe..

      À ce stade, le scandale n’est pas seulement que la ministre de l’Éducation nationale ait choisi d’y inscrire ses enfants, contournant l’enseignement public au profit d’une école privée où se cultive l’entre-soi. Il est que le ministère dirigé à l’époque par Gabriel Attal a mis ce rapport sous le boisseau depuis qu’il lui a été rendu en juillet dernier, refusant de le rendre public.

      Mais il est également que cette institution privée, qui viole en toute impunité le contrat qui la lie à l’État, est mieux dotée, sur fonds publics, que la quasi-totalité des établissements scolaires publics de Paris, comme l’a révélé en janvier dernier une enquête de @lemondefr. L’argent public favorise Stanislas, c’est-à-dire les familles les plus fortunées : les « trois petits garçons » de Madame Oudéa-Castéra ont coûté plus cher à l’État.que les élèves du public.

      L’anagramme de Stanislas dit une vérité : la complaïisäncé : des pouvoirs publics à l’égard d’un établissement qui devrait n’avoir aucune place dans « l’École de la République », comme dit la ministre, nous salit tous et toutes.

  • #Emmanuel_Lechypre, journaliste à BFM Business :

    « L’#échec des #politiques_de_la_ville, une quinzaine de #plans_banlieues depuis 1977. 100 milliards d’euro sur la table, et pas de résultats. La réalité c’est que la situation est bien plus difficile pour ces 7,5% de la population qui vivent dans les #banlieues que pour le reste du pays. Le taux de #chômage y est 2 fois plus élevé. La moitié des jeunes n’y a pas d’emploi, 4 habitants sur 10 n’ont aucun #diplôme, c’est le double de la moyenne nationale, et le taux de #pauvreté est 3 fois plus élevé que dans l’ensemble du pays.
    Quand vous regardez, est-ce que les habitants des #quartiers_pauvres reçoivent plus de #transferts_sociaux que les autres ? Non, en France métropolitaine on est à 6800 euros en moyenne par an. Là c’est 6100 euros dans les banlieues.
    Est-ce que ces territoires, plus pauvres, reçoivent beaucoup plus de la #solidarité_nationale qu’ils ne contribuent ? Ce n’est pas vrai. La Seine-Saint-Denis est le 3ème département en France le plus pauvre de France, et pourtant c’est le 8ème contributeur en termes de #cotisations_sociales.
    Est-ce que les quartiers pauvres sont mieux traités par l’Etat que la France périphérique ? Non, si on regarde les chiffres en matière de #santé, les quartiers populaires comptent moins de 250 professionnels offrant des #soins de proximité. C’est 400 en moyenne en France. Et même quand l’Etat dépense plus, les chiffres sont trompeurs. C’est vrai sur le coût moyen d’un élève accueilli en #éducation_prioritaire, il est plus élevé, sauf que la qualité de l’#enseignement qui est dispensé est moins bonne. »

    https://twitter.com/Laurent_Potelle/status/1675463787221008387
    https://www.bfmtv.com/economie/replay-emissions/good-morning-business/emmanuel-lechypre-banlieues-trop-peu-d-argent-trop-mal-depense-30-06_VN-20230
    #chiffres #statistiques #préjugés #idées_reçues #quartiers_populaires #réalité #Nahel #politique_de_la_ville

    ping @karine4 @isskein @cede

    • Violences en banlieue : la politique de la ville, une cible trop facile

      Depuis la mort de Nahel, l’extrême droite s’indigne des milliards qui auraient irrigué en vain les quartiers populaires. Mais avec des plans banlieues délaissés depuis des années, le problème semble surtout résider dans les rapports entre la jeunesse et la police.

      C’est une petite musique qui monte, après cinq nuits d’émeutes qui laissent le pays groggy. Une rage de justice, pour venger la mort de Nahel, 17 ans, tué par un tir policer le 27 juin, qui a tout emporté sur son passage : mairies, commissariats, écoles, centres des impôts ou de santé, médiathèques, boutiques et centres commerciaux, voitures et mobilier urbain. Jusqu’à cette tentative de mettre le feu à la mairie de Clichy-sous-Bois, tout un symbole : foyer des précédentes violences de 2005, la ville a longtemps été dirigée par l’actuel ministre de la Ville, Olivier Klein.

      Cette petite musique, le Rassemblement national la fredonne depuis des années, mais c’est Eric Zemmour qui l’a entonnée vendredi sur Twitter : « On a dépensé 40 milliards d’euros pour reconstruire ces quartiers avec le #plan_Borloo, 40 milliards ! Vous voyez le résultat aujourd’hui ? » Un discours démagogique : le #programme_national_de_rénovation_urbaine (#PNRU, 2004-2021), créé par la loi Borloo du 1er août 2003, n’a pas coûté 40 milliards, mais 12. Lesquels ont été financés aux deux tiers par #Action_Logement, l’organisme paritaire qui collecte le 1 % logement, un prélèvement sur la masse salariale. Le reste par les collectivités locales et l’Etat. Ces 12 milliards d’euros ont généré 48 milliards d’euros de travaux, une manne qui a surtout profité au BTP. En outre, le PNRU a généré 4 milliards de TVA, 6 milliards de cotisations et 40 000 emplois pendant dix ans. Merci la banlieue. Un deuxième programme, le #NPNRU (N pour nouveau), est en route. D’un montant identique, il court jusqu’en 2030.

      « Plus grand chantier civil de l’histoire »

      Trop d’argent aurait été déversé pour les quartiers populaires ? « Franchement, vous n’imaginez pas à quoi ressemblait leur #état_d’abandon, de #misère, l’#enfermement : la police ne rentrait pas dans ces quartiers, les poubelles n’étaient pas ramassées, personne n’y rentrait ! » s’énervait #Jean-Louis_Borloo mardi 27 juin. Avant d’engueuler Libération, qui l’interrogeait sur son bilan  : « A quoi ça a servi ? Avant le PNRU, qui est quand même le plus grand chantier civil de l’histoire de France, il y avait des émeutes sporadiques dans les quartiers, quasiment tous les jours, jusqu’au grand embrasement de 2005. »

      C’était quelques heures avant que Nanterre ne s’embrase. Hasard cruel du calendrier, le père de la #rénovation_urbaine se trouvait à la Grande Borne à Grigny (Essonne), dans le cadre d’un déplacement censé donner le coup d’envoi des « célébrations » des 20 ans de l’#Agence_nationale_pour_la_rénovation_urbaine (#Anru) et à quelques jours d’un Comité interministériel des villes présidé par Elisabeth Borne, qui devait enfin dévoiler le contenu du plan « Quartiers 2030 ». Issue de la loi la loi Borloo, l’Anru est aujourd’hui présidée par Catherine Vautrin, présidente LR du Grand Reims, qui a succédé à Olivier Klein.

      Si le plan Borloo a permis de pacifier les banlieues, il a été par la suite « victime de son succès ». « Quand ça a commencé à aller mieux, on a arrêté de s’occuper des banlieues, ce n’était plus un problème », explique l’ex-maire de Valenciennes. Il aura fallu l’« appel de Grigny » en 2017 suivi d’un rapport également signé par Borloo en 2018 et une déambulation d’Emmanuel Macron en Seine-Saint-Denis, en plein Covid, pour que le chef de l’Etat ne se décide enfin à lancer l’acte II de la rénovation urbaine.

      Entretemps, une génération aura été sacrifiée. « Les 15-17 ans qui constituent le gros des émeutiers, ce sont les oubliés de la politique de la ville, estime un ex-préfet de Seine-Saint-Denis. Ce mouvement doit engendrer une révolution des dispositifs permettant d’appréhender socialement cette classe d’âge, dont personne ne s’occupe, de Toulouse à Sevran. » L’éducation y joue un rôle central, et l’annonce faite le 26 juin par le chef de l’Etat à Marseille d’étendre les heures d’ouverture des collèges a été saluée par les acteurs de la politique de la ville, qui ne se résume pas à la rénovation urbaine.

      « La question, c’est la police, la police, la police »

      On en fait trop pour les banlieues, vraiment ? Quelques chiffres récents compilés par l’Insee : dans les 1 514 « quartiers prioritaires de la politique de la ville » (QPV), où vit 8 % de la population, le taux de pauvreté est trois fois plus élevé (43 %) que dans le reste des unités urbaines et le revenu médian plafonne à 13 770 euros par an et par foyer. Avec un taux de chômage de 18,6 %, plus du double du niveau national. Bref, « dans les QPV, les communes ont plus de besoins mais moins de ressources : 30 % de capacité financière en moins », rappelait Borloo dans son plan de « réconciliation nationale ». La politique de la ville n’est pas la charité, ou une faveur faite aux plus précaires.

      Dans ces quartiers, plus de la moitié des enfants vivent en situation de pauvreté : 57 %, contre 21 % en France métropolitaine. Ils grandissent la rage au ventre à force de se faire contrôler : dans ces quartiers dont souvent un quart des habitants ne sont pas nés en France, un jeune homme noir ou arabe a une probabilité vingt fois plus élevée d’être contrôlé que l’ensemble de la population, selon un rapport du Défenseur des droits de 2017. Pour le sociologue Renaud Epstein, on se trompe donc en imputant la révolte actuelle à l’échec de la rénovation urbaine. « La question, c’est la police, la police, la police, et éventuellement la justice. La rénovation urbaine n’a rien à voir là-dedans. Si ça chauffe à Pablo-Picasso [le quartier de Nanterre où vivait Nahel, épicentre des violences, ndlr], ce n’est pas parce qu’on va leur enlever leur mosaïque pour pouvoir rénover les tours Nuages ! »

      Elu municipal à Bobigny (Seine-Saint-Denis) et infatigable militant des quartiers populaires, Fouad Ben Ahmed peut dater la bascule au jour près. Le 3 février 2003, quand Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur, se rend à Toulouse et lance : « La police n’est pas là pour organiser des tournois sportifs, mais pour arrêter les délinquants, vous n’êtes pas des travailleurs sociaux. » Dans la foulée, le directeur de la police toulousaine est limogé. « Dès lors, la police n’a plus été là pour protéger les jeunes, mais pour les interpeller. » L’élu socialiste n’oublie pas non plus la dimension économique des violences actuelles, qu’il qualifie d’« émeutes du pouvoir d’achat ». Ce dont témoignent les pillages de supermarchés de hard discount comme Aldi. A Grigny, le maire, Philipe Rio, le rejoint : « Depuis 2005, la pauvreté a explosé à Grigny, et la crise du Covid et l’inflation ont été un accélérateur d’inégalités et d’injustices. »

      Alors que Mohamed Mechmache, figure des révoltes urbaines de 2005 à travers son association ACLeFeu, réclamait ce dimanche « un vrai Grenelle pour les quartiers », certains craignent que ces émeutes ne plantent le dernier clou dans le cercueil de la politique de la ville. En clair : il n’y aura pas de PNRU 3 ni de 18e plan banlieue. « Vu l’état de sécession de la jeunesse, et en face la force de l’extrême droite, il n’y aura plus un sou pour les quartiers, c’est mort », confie un militant. Rencontrée samedi soir à Bobigny, Nassima, qui condamne les violences mais comprend la colère, le dit avec ses mots et la sagesse de ses 15 ans : « Déjà qu’on était délaissés, mais on va l’être encore plus car les Français vont se dire : “Ces gens, on les aide, pour qu’au final ils pillent.” »

      https://www.liberation.fr/societe/ville/violences-en-banlieue-la-politique-de-la-ville-une-cible-trop-facile-2023

    • Trop d’argent public dans les banlieues ? « Un vaste mensonge à des fins racistes et anti-pauvres »

      Après les révoltes urbaines, des commentateurs ont accusé les banlieues d’engloutir les #fonds_publics. La réalité ce sont plutôt des #services_publics moins bien dotés qu’ailleurs, et des travailleurs essentiels plus nombreux dans ces quartiers.

      Les banlieues seraient « gorgées d’#allocations_sociales », a dit Éric Zemmour. Ou bien encore seraient dépendantes du « trafic de drogues », a affirmé le patron du Medef au sujet de la Seine-Saint-Denis, avant de s’excuser. « Quand on regarde la réalité de près, le fantasme des milliards d’argent public déversés, d’habitants qui seraient gorgés de subventions est un vaste #mensonge », réagit Stéphane Troussel, président, socialiste, du département en question. La Seine-Saint-Denis, « c’est un département dans le top 10 des créations d’entreprises, en 20 ans, l’emploi y a bondi de 30 %», met par exemple en avant l’élu pour contredire les #préjugés.

      « Je ne suis ni angélique ni naïf, je sais aussi les difficultés, le niveau de chômage, le nombre d’allocataires du RSA, le taux de délinquance et de criminalité élevé, ajoute-t-il. Mais les clichés et caricatures exploités par les réactionnaires et l’extrême droite le sont à des fins politiques, à des fins racistes et anti-pauvres, pour exacerber le clivage entre ce que nous représentons en Seine-Saint-Denis, qui est un peu l’emblème des banlieues, et le reste de la France. »

      Des quartiers de travailleuses et travailleurs

      Les affirmations discriminatoires de quelques figures politiques depuis les émeutes qui ont secoué les quartiers populaires sont en grande partie contredites par la réalité. Dans la symbolique Seine-Saint-Denis, la population dispose « du plus faible niveau de vie de la France métropolitaine », pointait un rapport parlementaire en 2018. Le département présente aussi le taux de #chômage le plus élevé de la région Île-de-France : à 9,8% contre 5,4 % à Paris début 2023. Mais la Seine-Saint-Denis est aussi le département d’Île-de-France, « où la part des travailleurs clés dans l’ensemble des actifs résidents est la plus élevée », relevait l’Insee dans une étude en 2021.

      Les « #travailleurs-clés » de Seine-Saint-Denis sont entre autres aides à domicile, caissières et caissiers, ou encore vendeurs de commerces essentiels. Des #métiers dont tout le monde a perçu l’importance vitale pendant les confinements. L’atelier parisien d’urbanisme s’est aussi demandé où vivent les actifs des professions essentielles d’Île-de-France : personnel hospitalier, caissiers, ouvriers de la logistique, de la maintenance, aides à domicile, personnel de l’éducation…

      Sans surprise, du fait des prix de l’immobilier, elles et ils sont peu à vivre à Paris et beaucoup plus dans les départements des banlieues populaires. Les auxiliaires de vie, par exemple, résident plus fréquemment en Seine-Saint-Denis. Les livreurs sont sous-représentés à Paris, dans les Hauts-de-Seine et dans les Yvelines, mais surreprésentés dans les autres départements franciliens, principalement en Seine-Saint-Denis, dans le Val-d’Oise et le Val-de-Marne.

      Justice, police : #sous-dotation à tous les étages

      « Tous ceux qui ont étudié un peu la situation et essayé de la regarder objectivement ont constaté le #sous-équipement de notre département, notamment en termes de grands services publics, en matière de #justice, de #police, d’#éducation, de #santé », dit aussi Stéphane Troussel. L’élu cite le rapport parlementaire « sur l’évaluation de l’action de l’État dans l’exercice de ses missions régaliennes en #Seine-Saint-Denis » rédigé en 2018 par un élu du parti de Macron et un élu LR.

      Le rapport pointe notamment l’inégalité d’accès à la justice. Par exemple, la durée de traitement des affaires au tribunal d’instance est de 8,6 mois en moyenne en Seine-Saint-Denis, contre moins de 5 mois pour ceux du 18e arrondissement ou du 15e arrondissement de Paris. La Seine-Saint-Denis dispose aussi de beaucoup moins d’officiers de police judiciaire, ceux et celles chargés d’enquêter, que Paris et les Hauts-de-Seine.

      « La police, dans un département populaire comme le nôtre, n’est pas assez dotée en moyens, qu’ils soient humains ou immobiliers, estime Stéphane Troussel. L’état des commissariats est scandaleux. » L’élu pense aussi qu’il faut changer la police. « Il faut un débat sur la doctrine d’intervention, les contrôles aux faciès, les conséquences des modifications législatives de 2017 [sur l’usage de leur arme par les policiers en cas de refus d’obtempérer, ndlr], sur la formation des policiers… Mais en attendant, je suis pour une police qui est un service public, qui rassure et protège d’abord les plus fragiles et les plus modestes, les femmes seules, les enfants et les jeunes, les personnes âgées. Aujourd’hui, je considère que la police n’a pas les moyens de cette action dans un département comme le nôtre. »

      Éducation : des milliers d’heures de cours perdues

      La situation n’est pas meilleure dans l’éducation. Il existe en Seine-Saint-Denis « une forme subie d’#exclusion_scolaire : l’absence d’enseignant devant les élèves », pointait le rapport parlementaire de députés LR et LREM. « En dépit des postes créés depuis cinq ans, la continuité de l’enseignement n’est toujours pas assurée en Seine-Saint-Denis, pour une raison “mécanique” qui tient à l’inefficacité du dispositif de remplacement des absences de courte durée », ajoutaient les deux parlementaires.

      L’an dernier, Mediapart avait comptabilisé 259 heures perdues en un mois dans un collège de Seine-Saint-Denis faute d’enseignants pour faire cours. Dans les Hauts-de-Seine, la Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE) recensait ce printemps déjà plus de 800 heures de cours perdues à Bagneux, commune populaire des Hauts-de-Seine.

      Pourtant, nombre d’établissements scolaires des banlieues populaires d’Île-de-France sont classés « réseau d’éducation prioritaire », Rep ou Rep+. Ce qui devrait signifier des moyens supplémentaires. 58 % des écoliers et 62 % des collégiens de Seine-Saint-Denis sont inscrits dans un établissement de ce type.

      « Dans les établissements Rep et Rep+, les moyens ne sont absolument pas à la hauteur des besoins, accuse Fatna Seghrouchni, professeure de français en collège dans le Val-d’Oise et cosecrétaire de la fédération Sud Éducation. « On entasse les élèves dans les classes, on surcharge les classes. » Quand elle est arrivée dans son collège il y a 17 ans, l’enseignante avait « 20 à 22 élèves par classe », témoigne-t-elle. « Alors que mon collège n’était pas encore classé #Rep. Aujourd’hui, on est à 26-28 tout en étant classé Rep. Cinq élèves en plus par classe, c’est oppressant pour les élèves eux-mêmes. Et l’établissement n’est pas fait pour accueillir autant d’élèves. »

      La responsable syndicale salue les programmes de soutien pour les établissements classés prioritaires, d’aides aux devoirs, les enveloppes budgétaires pour proposer des activités culturelles et sportives. Mais tout cela reste « du saupoudrage, dit-elle. Nous, nous demandons surtout moins d’élèves dans les classes, plus d’établissements scolaires, pour mieux accueillir tous les élèves, plus d’enseignants, plus de personnel en général, et une meilleure rémunération de tous les personnels. »

      Des grands projets qui ne profitent pas aux habitants

      Au cours des nuits de tensions fin juin et début juillet, Yohan Salès, conseiller municipal à Pierrefitte-sur-Seine pour la France insoumise, a arpenté les rues de sa ville à la rencontre des jeunes et des médiateurs. « On a discuté des débats des plateaux télé des derniers jours. Ce que disent les gens, c’est que l’argent de la politique de la ville, on ne le voit pas, rapporte-t-il. Dire que la Seine-Saint-Denis engloutit des millions d’argent public, c’est une lubie de la droite. L’investissement est en fait largement insuffisant. »

      Pour lui, beaucoup des grands projets menés par l’État dans le département de Seine-Saint-Denis ne profitent pas à la population des quartiers. « La vérité, c’est que sur la Plaine-Saint-Denis par exemple, que l’État veut transformer en un nouveau quartier d’affaires, il n’y a pas de volonté politique pour que les habitants du département puissent y travailler. Le chantier d’un site des Jeux olympiques (JO) a brûlé à Aubervilliers, mais ces JO ne vont pas profiter aux habitants du département ! Aucun habitant ne pourra se permettre le prix du billet d’un événement sportif de ces Jeux. » Le premier tarif démarre à 24 euros pour les JO et 15 euros pour les Jeux paralympiques, pour les places avec le moins de visibilité. Les tarifs vont jusqu’à frôler les 1000 euros pour les meilleures places.

      Comment se payer des places, même à quelques dizaines d’euros, quand « une situation de détresse alimentaire frappe les habitants » des banlieues, comme l’alertaient quelques semaines avant la mort de Nahel et les émeutes, des dizaines d’élus locaux des quartiers populaires de différents horizons politiques ? « Les banlieues sont au bord de l’#asphyxie », leurs habitants ont « le sentiment d’être abandonnés par la République », écrivaient aussi ces édiles. Face à cette situation, le président de la Seine-Saint-Denis Stéphane Troussel en appelle à « une action publique de remise à niveau qui porte un choc structurel d’égalité. Sans cela, ma crainte, c’est que les écarts ne cessent de s’accroître ». Dans son département, en Île-de-France, et au-delà.

      https://basta.media/trop-d-argent-public-dans-les-banlieues-un-vaste-mensonge-a-des-fins-racist

      ici aussi :
      https://seenthis.net/messages/1010259

  • Inégalités sociales et territoriales et éducation prioritaire (Revue de presse)

    Le CNESCO (Conseil National d’Évaluation du Système Scolaire) a publié une étude détaillée intitulée “Panorama des inégalités scolaires d’origine territoriale en France” dont les principaux enseignements ont été repris dans les médias :

    - La composition sociale des collèges reflète globalement celle des territoires sur lesquels ils sont localisés.
    – Les ressources humaines de l’Éducation nationale sont inégalement réparties en Île-de-France.
    – Les résultats aux épreuves écrites du diplôme national du brevet (DNB) révèlent des inégalités territoriales de réussite importantes.
    – Les territoires défavorisés concentrent les taux les plus élevés d’enseignants de moins de 30 ans et de non-titulaires.
    – Les ressources scolaires sont inégalement réparties sur le territoire français : le cas des langues vivantes.
    – Des inégalités dans la réussite aux examens.
    Source : http://www.cnesco.fr/fr/panorama-des-inegalites-scolaires-dorigine-territoriale-en-france

    Quelques reprises dans les médias :
    – L’Education nationale donne t-elle vraiment plus aux élèves défavorisés ? (Marie Piquemal, Libération)
    https://www.liberation.fr/france/2018/10/24/l-education-nationale-donne-t-elle-vraiment-plus-aux-eleves-defavorises_1
    – En Ile-de-France, une école pauvre pour les quartiers pauvres (Mattea Battaglia, Le Monde)
    https://www.lemonde.fr/education/article/2018/10/24/en-ile-de-france-une-ecole-pauvre-pour-les-quartiers-pauvres_5373799_1473685

    Ô surprise, il s’agissait du dernier rapport de cette institution indépendante, que le Ministre, J.-M. Blanquer a décidé de supprimer :
    – Education : le ministre Blanquer n’aime pas les instances indépendantes (Faïza Zerouala, Médiapart)
    https://www.mediapart.fr/journal/france/221018/education-le-ministre-blanquer-n-aime-pas-les-instances-independantes
    – Le putsch de Blanquer : quand le ministre évaluateur se soustrait aux évaluations (Gurvan Le Guellec, L’Obs)
    https://www.nouvelobs.com/education/20181012.OBS3883/le-putsch-de-blanquer-quand-le-ministre-evaluateur-se-soustrait-aux-evalu

    Pendant ce temps-là (et en même temps), la Cour des Comptes a publié un rapport éponyme sur “L’éducation prioritaire”. Elle y fait 17 recommandations réparties en 6 grandes orientations :

    Orientation n°1 : fortifier l’autonomie, la responsabilité et l’évaluation des réseaux de l’éducation prioritaire renforcée
    1. Renforcer le pilotage académique en intégrant au projet stratégique un volet « éducation prioritaire », en exigeant des bilans annuels de sa mise en œuvre et l’élaboration d’un référentiel académique de l’éducation prioritaire ;
    2. Expérimenter la constitution d’établissements publics de réseau ; établir des contrats permettant de leur allouer des moyens conditionnés à la mise en œuvre d’actions et attribuer au chef d’établissement, responsable du réseau, les marges de manœuvre nécessaires à la bonne utilisation de ces moyens.
    Orientation n°2 : doter l’éducation prioritaire d’outils d’évaluation plus performants
    3. Systématiser les évaluations des élèves du socle commun de connaissance, de compétences et de culture (au début et à la fin des trois cycles, puis à l’entrée et à la sortie de chaque année) par des tests standardisés dématérialisés ;
    4. Alimenter des bases de données exhaustives sur les élèves, les écoles et les établissements et produire des indicateurs de valeur ajoutée des collèges et des réseaux ;
    5. Utiliser ces données pour conduire de manière systématique des analyses de la performance des dispositifs mis en œuvre en éducation prioritaire.
    Orientation n°3 : concentrer l’action publique sur le premier degré en mobilisant les leviers à fort rendement
    6. Cibler les moyens enseignants sur le premier degré ;
    7. Étendre le dédoublement des classes à l’ensemble du cycle des apprentissages fondamentaux (grande section de l’école maternelle et deux premières années de l’école élémentaire) ou à l’ensemble des classes du cycle 2 dans les écoles qui concentrent de manière aiguë les difficultés sociales et scolaires (équivalent REP+) ; mettre en œuvre une réduction de moindre intensité dans les autres classes (équivalent REP).
    Orientation n°4 : ajuster la gestion des enseignants aux besoins de l’éducation prioritaire
    8. N’affecter en éducation prioritaire que les enseignants disposant d’au moins deux ans d’ancienneté ;
    9. Élargir la capacité des chefs d’établissement à recruter sur profils pour les postes d’enseignant situés en éducation prioritaire ;
    10. Ouvrir la possibilité d’une affectation temporaire d’une durée de trois à cinq ans sur les postes en éducation prioritaire assortie de la garantie de retour à l’affectation d’origine ;
    11. Améliorer le régime indemnitaire des enseignants en éducation prioritaire en introduisant des éléments variables d’une part liés à l’investissement individuel et à l’implication au sein des équipes pédagogiques, d’autre part modulés en fonction de l’attractivité de l’académie ;
    12. Renforcer la place de l’éducation prioritaire dans la formation initiale des enseignants et accentuer l’effort de formation continue des enseignants affectés en éducation prioritaire ;
    13. Faciliter le remplacement dans les établissements et les écoles qui
    concentrent les difficultés en leur donnant une priorité et en privilégiant le recours aux titulaires remplaçants.
    Orientation n°5 : revoir le processus d’identification des bénéficiaires et réviser les mécanismes d’allocation des ressources
    14. Répartir l’ensemble des établissements (et des écoles lorsque les données le permettront) en plusieurs catégories homogènes, définies en fonction d’un indice synthétique de difficulté tenant compte de leurs caractéristiques propres ;
    15. Utiliser ces catégories pour allouer les moyens spécifiques de l’éducation prioritaire et distribuer les moyens non spécifiques à l’ensemble des écoles et des établissements en tenant compte du profil des élèves scolarisés, afin d’introduire un continuum dans le dispositif d’allocation et réduire les effets de seuil des mécanismes actuels.
    Orientation n°6 : favoriser la mixité scolaire en renouvelant
    les mécanismes d’affectation des élèves

    16. En partenariat avec les collectivités territoriales, faire évoluer la carte scolaire et les modalités d’affectation des élèves afin de favoriser la mixité et créer un observatoire de la mixité auprès du recteur chargé de rédiger un rapport sur la mixité dans l’académie tous les deux ans ;
    17. Associer les établissements privés sous contrat concernés aux processus d’évolution de la carte scolaire et inciter à scolariser des élèves qui reflètent mieux les caractéristiques sociales et scolaires de la population de la zone de recrutement.
    Source : https://www.ccomptes.fr/fr/publications/leducation-prioritaire

    De fait la plupart de ces recommandations valident les premières décisions de "l’ère Blanquer” ou prépare la réforme annoncée (pour dans quelques mois) de l’éducation prioritaire, pour le reste ces orientations collent comme d’habitude à l’agenda néolibéral sur l’éducation.

    Ce rapport a eu aussi quelques échos médiatiques :
    – Education prioritaire : la Cour des comptes propose d’en finir avec l’étiquette REP ou REP+ (Marie Piquemal, Libération)
    https://www.liberation.fr/france/2018/10/17/education-prioritaire-la-cour-des-comptes-propose-d-en-finir-avec-l-etiqu
    – La Cour des comptes signe l’aveu d’échec des politiques d’éducation prioritaire (Violaine Morin, Le Monde)
    – La Cour des Comptes pointe l’échec criant de l’éducation prioritaire (Alice Mérieux, Challenges)
    https://www.challenges.fr/politique/la-cour-des-comptes-tacle-l-education-prioritaire_619935

    La remise à plat de l’éducation prioritaire par le ministère Banquer pourra donc s’appuyer sur deux faits répétés à l’envi dans les médias :
    – Les politiques d’éducation prioritaire sont un échec
    – Les élèves défavorisés sont majoritairement hors dispositif éducation prioritaire (cf. https://seenthis.net/messages/637255)
    Ces deux faits sont exacts, reste qu’ils serviront sans doute à justifier le démantèlement de dispositifs imparfaits au profit de l’idéologie portée par le libéralisme : la responsabilité individuelle dans les parcours de chacun. Il y a fort à parier que la prochaine réforme enterrera les analyses sociologiques pour allouer quelques moyens aux "individus qui s’en donnent la peine".

    Pour faire fonctionner un système éducatif moins inégalitaire, ce sont d’autres analyses et d’autres orientations qu’il faudrait convoquer.
    Outre les pistes ouvertes par les analyses du CNESCO mettant en lumière des mécanismes institutionnels inégalitaires dans l’allocation des moyens allant à l’encontre de la discrimination positive censée profiter aux quartiers prioritaires, un point, par exemple, soulevé dans le rapport de cette même cour des comptes en 2012, aurait mérité d’être mentionné et commenté : le fait que les "crédits spécifiques" viennent se substituer aux "crédits de droit commun" au lieu de s’y ajouter :

    Dans ces conclusions, la Cours des comptes rejoint les avis de nombreux experts ou d’associations : alors que les crédits spécifiques sont censés venir en renfort des crédits de droit commun pour jouer un effet de levier, il apparait dans certains cas, et particulièrement dans les domaines prioritaires de l’emploi et l’éducation, qu’ils se substituent à ces derniers, sans être alors suffisants pour financer des actions qui relèvent normalement des politiques de chaque ministère concerné.
    Source : http://centre-alain-savary.ens-lyon.fr/CAS/education-prioritaire/actualites-de-leducation-prioritaire-1/cour-des-comptes-urgence-coordonination

    Ici comme ailleurs, faute de s’être réellement donné les moyens des ambitions affichées, on décide d’y renoncer…

    #éducation #éducation_prioritaire #inégalités

  • L’école en banlieue : « Territoires vivants de la république » (Le Café Pédagogique)
    http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2018/08/24082018Article636706973525101475.aspx

    Dans ce livre, les nombreux auteurs rappellent tout simplement que l’école poursuit son travail dans les territoires si souvent stigmatisés par le discours ambiant. Ils rappellent qu’enseigner en éducation prioritaire, dans les banlieues, c’est possible. Que les enseignants n’y vont pas contraints et forcés. Malgré les difficultés que le livre ne nie pas, ils prennent même plaisir à le faire. La parole est donnée à tous les acteurs, même les élèves.
    […]
    Parce que ce livre n’est pas rédigé par des prêcheurs de salon mais par des praticiens il montre le travail, souvent invisible, des enseignants. Et il ne nous épargne rien. « Territoires vivants de la République » parle de l’importance de l’accueil des parents dans les établissements. Il décrit les gestes qui tissent la confiance entre les élèves et l’école. Et il aborde de façon frontale, au ras du vécu quotidien des classes, les questions chaudes, celles qui dérangent : enseigner les sciences face au discours religieux, les conflits de mémoire, l’enseignement du colonialisme, de la guerre d’Algérie, de la Shoah et aussi les questions de genre. Oui on peut enseigner tout cela en banlieue.

    #éducation #REP #éducation_prioritaire #banlieues #stigmatisation

  • Les #écoles de #Seine-Saint-Denis réclament davantage de moyens
    https://www.mediapart.fr/journal/france/220318/les-ecoles-de-seine-saint-denis-reclament-davantage-de-moyens

    Les parents, les enseignants et syndicalistes de Seine-Saint-Denis ont lancé cette semaine une mobilisation. Ils veulent être entendus par le ministère de l’éducation nationale pour obtenir des moyens supplémentaires. Selon les grévistes, la situation empire d’année en année, ce que dément la direction académique de Créteil.

    #France #collèges #éducation_prioritaire #lycées #Touche_pas_ma_ZEP

  • L’école des villes contre l’école des champs (France 3 Nouvelle-Aquitaine)
    https://france3-regions.francetvinfo.fr/nouvelle-aquitaine/haute-vienne/ecole-villes-contre-ecole-champs-1436105.html

    200 à 300 classes vont être fermées à la rentrée prochaine en zones rurales en France, pour permettre notamment le dédoublement des classes en réseau prioritaire, en ville. La priorité fixée par le gouvernement laisse un goût amer à la campagne.

    Avec ce titre, tout est dit : la gestion comptable de la pénurie se traduit concrètement par la mise en concurrence des territoires et notamment des territoires délaissés : quartiers populaires et zones rurales.

    Le ministre a beau démentir avec l’agacement de l’expert omniscient, l’effet ressenti sur le terrain se confirme de semaine en semaine :
    – Education : pourquoi tant de fermetures de classes ? (Le Parisien)
    http://www.leparisien.fr/societe/education-pourquoi-tant-de-fermetures-de-classes-07-03-2018-7594245.php
    – Fermeture de classes en milieu rural : l’offensive contre Blanquer monte (Les Échos)
    https://www.lesechos.fr/politique-societe/societe/0301382654089-fermeture-de-classes-en-milieu-rural-loffensive-contre-blanqu

    Comme l’indiquaient Marion Audrain et Sylvain Grandserre, cette gestion des uns contre les autres est une bombe à retardement politique aux effets prévisibles désastreux :

    Dès lors, chacun comprend que le généreux principe du dédoublement ne pourra se faire qu’au détriment d’autres écoles, et donc d’autres enfants. […] Monte le sentiment que ce sont les écoles rurales qui vont faire les frais de l’apparente générosité ministérielle en direction des classes en difficulté. Bref, l’impression que l’on déshabille la campagne pour habiller la banlieue. […]
    Visiblement, la menace d’un éclatement de nos territoires semble peu prise au sérieux par des décideurs politiques urbains, souvent parisiens, qui n’ont vu aucun bureau de vote de la capitale placer le FN en tête du 1er tour des élections présidentielles (avec une moyenne de 5 % des votes pour ce parti à Paris).
    Rappelons-leur qu’au 2nd tour, dans nombre de nos campagnes, Marine Le Pen a été portée à des scores qui devraient appeler une toute autre vigilance, avec des villages atteignant les 70 % ! Comment expliquer à cet électorat - qui ne connaît des banlieues en général, et de l’immigration en particulier, que ce qu’en montre le journal télévisé - que l’école centenaire va fermer pour donner plus de moyens à des enfants qu’ils considèrent comme « étrangers » et « pas de chez nous » ?
    […] Et selon l’UNICEF, 2,5 à 3 millions d’enfants de notre pays vivent sous le seuil de pauvreté. Est-il bien raisonnable de vouloir ainsi les opposer, les mettre en concurrence ? […]
    Nous, enseignants en quartier sensible ou à la campagne, refusons qu’on nous oppose, qu’on oppose nos familles, qu’on oppose nos élèves.
    Source : “Carte Scolaire : la bombe à retardement (Marion Audrain et Sylvain Grandserre)”
    https://seenthis.net/messages/671269

    C’est bien cela qu’illustre le panneau sur cette image issue d’une mobilisation en milieu rurale…

    Le plus terrible c’est qu’il n’y a pas « 12 élèves par classe dans les quartiers » comme indiqué sur cette affiche :
    – seuls les CP et CE1 sont concernés avec déploiement progressif sur 3 ans (2017 : CP dédoublés en REP+ ; 2018 : CP dédoublés en REP et CE1 en REP+ ; 2019 : CE1 dédoublés en REP) donc les CE2-CM1-CM2 des quartiers classés « éducation prioritaire » ne sont et ne seront pas concernés.
    – la communication ministérielle a glissé de « CP à 12 élèves » à « CP dédoublés » et dans la réalité les classes peuvent tendre plutôt vers 16 (ce qui est moins que 28 mais 30% de plus que 12)
    – la contrainte du « à moyens constants » avant de venir pénaliser les écoles rurales s’applique d’abord aux écoles populaires concernées par les dédoublements de classes : (i) fermeture des dispositifs (maîtres supplémentaires voire RASED) dont elles bénéficiaient et (ii) augmentation à la marge des effectifs des autres classes de l’école accueillant des élèves avec un profil identique mais âgés de 2-3 ans de plus avec ce que ça implique en terme d’accompagnement et de gestion de classe.

    Ainsi, les deux territoires les plus fragiles de la République vont souffrir du manque d’ambition scolaire et de la doxa indépassable du « à moyens constants »… et pourtant mis en concurrence leurs habitant.e.s vont construire le fantasme de l’Autre qui captent tous les moyens… nourrissant en retour un double sentiment « d’abandon » pour le plus grands profits de l’extrême-droite.

    NB : sur @seenthis ces dernières semaines :
    – Enseignement : les écoles rurales sacrifiées pour ouvrir des doubles classes en ville   ? (Sud Ouest.fr)
    https://seenthis.net/messages/668582
    – Maternelles et écoles rurales risquent de payer le prix des CP et CE1 à douze élèves (Le Monde)
    https://seenthis.net/messages/670352
    – Les #écoles_rurales se sentent sacrifiées par l’Éducation nationale (@mediapart)
    https://seenthis.net/messages/670914
    – Classes à 12 élèves : le prix à payer (Blog L’instit’humeurs)
    https://seenthis.net/messages/671739
    – Classes de CP à douze élèves : une réforme à marche forcée (Le Monde)
    https://seenthis.net/messages/672283

    #éducation #école #dédoublement_CP #territoires #ruralité #école_rurale #carte_scolaire #quartiers_populaires #éducation_prioritaire #moyens_constants #mise_en_concurrence_des_territoires

  • Carte Scolaire : la bombe à retardement (Marion Audrain et Sylvain Grandserre)
    http://www.meirieu.com/FORUM/carte_scolaire_bombe_retardement.pdf

    Dès lors, chacun comprend que le généreux principe du dédoublement ne pourra se faire qu’au détriment d’autres écoles, et donc d’autres enfants. Au-delà des traditionnelles fermetures de classes, il va falloir renoncer aux dispositifs ambitieux du « plus de maîtres que de classes » ou à la « scolarisation dès 2 ans », mais aussi revoir les effectifs des enseignants des Réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficulté (RASED), sans parler des postes de remplaçants. Du coup, l’effet de « vase communicant » crée un réel malaise dont atteste la presse locale. Monte le sentiment que ce sont les écoles rurales qui vont faire les frais de l’apparente générosité ministérielle en direction des classes en difficulté. Bref, l’impression que l’on déshabille la campagne pour habiller la banlieue. C’est d’autant plus dommage que le contraire avait été affirmé par le Président de la République (17/07/2017) lors
    de la première conférence nationale des territoires : « Il n’y aura plus aucune fermeture de classes dans les zones rurales ».

    Visiblement, la menace d’un éclatement de nos territoires semble peu prise au sérieux par des décideurs politiques urbains, souvent parisiens, qui n’ont vu aucun bureau de vote de la capitale placer le FN en tête du 1er tour des élections présidentielles (avec une moyenne de 5 % des votes pour ce parti à Paris).
    Rappelons-leur qu’au 2nd tour, dans nombre de nos campagnes, Marine Le Pen a été portée à des scores qui devraient appeler une toute autre vigilance, avec des villages atteignant les 70 % ! Comment expliquer à cet électorat - qui ne connaît des banlieues en général, et de l’immigration en particulier, que ce qu’en montre le journal télévisé - que l’école centenaire va fermer pour donner plus de moyens à des enfants qu’ils considèrent comme « étrangers » et « pas de chez nous » ? Comment lutter contre le sentiment d’abandon quand ces populations ont vu fermer tour à tour un tribunal, la maternité, le bureau de Poste, les bureaux d’EDF ou de GDF, l’hôpital, la gare ? Depuis plusieurs années - avec une troublante continuation des gouvernements successifs de droite comme de gauche - un lent mouvement de concentration est à l’œuvre qui voit disparaître les petites structures à taille humaine au bénéfice de plus grands ensembles où il n’est guère prouvé que l’on apprendrait mieux. Le saviez-vous : désormais près de 40 % des communes n’ont plus d’école !
    Pourtant, le débat, bien que relevant d’un vrai choix de société, n’a jamais été rendu
    public. L’Observatoire des inégalités constate que les trois quarts des élèves défavorisés n’étudient pas dans des établissements de zones prioritaires. Et selon
    l’UNICEF, 2,5 à 3 millions d’enfants de notre pays vivent sous le seuil de pauvreté.
    Est-il bien raisonnable de vouloir ainsi les opposer, les mettre en concurrence ?
    […]
    Nous, enseignants en quartier sensible ou à la campagne, refusons qu’on nous oppose, qu’on oppose nos familles, qu’on oppose nos élèves. D’où qu’ils soient, ces enfants sont nos élèves. Ils méritent respect, attention, considération, ambition, loin des effets d’annonce et des tactiques politiciennes. Que notre système éducatif se donne les moyens de ses ambitions. Nous appelons le ministère de l’Éducation nationale à réagir d’urgence pour désamorcer la bombe à retardement qu’il a lui-même enclenchée. A quoi vont servir nos leçons de grammaire et de calculs si nos jeunes grandissent dans la haine les uns des autres ?

    #éducation #école #carte_scolaire #territoires #éducation_prioritaire #école_rurale #moyens_constants #mise_en_concurrence_des_territoires

  • Ecole et parents : comment renouer le dialogue (Alternatives Economiques)
    https://www.alternatives-economiques.fr/ecole-parents-renouer-dialogue/00082590

    Voilà vingt ans que le mouvement ATD Quart monde met en œuvre son « croisement des savoirs », une méthodologie de débat entre groupes de pairs, pour créer le dialogue entre des personnes en situation de pauvreté et des professionnels. Depuis 2015, il le développe aussi dans des écoles du Nord de la France, avec l’Éducation nationale et des centres socio-culturels : pendant trois jours, des enseignants, des acteurs du quartier, des parents ayant un bon souvenir de l’école et des parents en ayant gardé un mauvais souvenir discutent, d’abord par groupes de personnes partageant la même expérience, puis entre eux. « L’idée est de mettre les acteurs à égalité, précise Sreng Truong, d’ATD Quart monde. Il s’agit pour chacun d’entrer dans l’univers de l’autre. »

    #éducation #ATD_Quart_monde #éducation_prioritaire #relations_école_famille #relations_parents_enseignant.e.s

  • Dans un CP dédoublé: «Les enfants progressent plus vite»
    https://www.mediapart.fr/journal/france/230118/dans-un-cp-dedouble-les-enfants-progressent-plus-vite

    L’une des premières mesures du ministre de l’éducation nationale a été de dédoubler les classes de CP dans les zones d’éducation prioritaire renforcée, les REP+, afin d’aider les plus fragilisés à mieux apprendre et maîtriser les fondamentaux. À l’école André-Boulloche, de Montpellier, les deux classes de CP bénéficient du dispositif. Près de six mois après, les enseignants jugent l’idée efficace.

    #France #CP_dédoublés #éducation_prioritaire #jean-Michel_Blanquer #REP_+

  • Les trois quarts des élèves défavorisés étudient hors de l’#éducation prioritaire
    https://www.inegalites.fr/Les-trois-quarts-des-eleves-defavorises-etudient-hors-de-l-education

    Au bout du compte, un quart des élèves défavorisés étudient dans des établissements de l’éducation prioritaire, soit 870 000. Heureusement : cela signifie qu’il existe encore de la #mixité sociale en France, que des enfants de milieu modeste habitent dans des quartiers qui le sont moins. Cela veut aussi dire que les dispositifs de l’éducation prioritaire (comme le dédoublement des classes de CP), quoi qu’on pense de leurs effets [3], ne répondent en rien aux trois quarts des élèves issus de milieux défavorisés. Si l’on souhaite que les politiques publiques soutiennent ces jeunes qui n’ont pas les mêmes atouts que les autres en poche, il faut donc agir au-delà des établissements de l’éducation prioritaire. Celle-ci n’est qu’un moyen très incomplet pour lutter contre les #inégalités sociales à l’école. Cette remarque est valable pour l’action territoriale (la politique des quartiers prioritaires) en général. Elle peut être utile localement, mais c’est un outil qui ne touche qu’une part réduite des milieux populaires.

    #territoires @heautontimoroumenos

  • Les trois quarts des élèves défavorisés étudient hors de l’éducation prioritaire (Centre d’observation de la société)
    http://www.observationsociete.fr/education/donnees-generales/les-trois-quarts-des-eleves-defavorises-etudient-hors-de-leducati

    Les trois quarts des 3,2 millions d’élèves issus de milieux défavorisés étudient dans des établissements classiques, qui ne sont pas intégrés aux réseaux dits « prioritaires » de l’éducation, selon les données du tableau de bord national publié par le ministère de l’Education nationale.

    NB : Pas trouvé de comparatif permettant de voir l’évolution depuis la redéfinition des Zones d’Éducation Prioritaire sous le précédent gouvernement.

    #éducation #mixité_sociale #inégalités #éducation_prioritaire #territoires

  • #cantines_scolaires : les élèves défavorisés y ont moins accès que les autres
    https://www.mediapart.fr/journal/france/041017/cantines-scolaires-les-eleves-defavorises-y-ont-moins-acces-que-les-autres

    Une étude du #CNESCO met en évidence les disparités d’accès à la cantine selon les catégories socioprofessionnelles des parents. Les plus vulnérables, scolarisés en #éducation_prioritaire, fréquentent peu les restaurants scolaires. 60 % des collégiens inscrits dans des établissements en éducation prioritaire n’y mangent pas. 75 % des élèves se trouvent dans ce cas en REP+.

    #France #bien-être #inégalités_scolaires

  • Collège et #Rythmes_scolaires : le ministre Blanquer veut passer l’effaceur
    https://www.mediapart.fr/journal/france/290817/college-et-rythmes-scolaires-le-ministre-blanquer-veut-passer-l-effaceur

    Jean-Michel Blanquer, le 24 mai 2017 © Reuters Pour sa première rentrée en tant que ministre de l’éducation nationale, #jean-Michel_Blanquer a partagé sa vision de l’école devant la presse. Il entend d’ores et déjà, seulement trois mois après sa nomination, défaire ce que la gauche a fait en matière d’éducation, au nom du « pragmatisme ».

    #France #éducation_prioritaire #lecture #réforme_du_collège #rentrée_scolaire

  • Collège et #Rythmes_scolaires : le ministre Blanquer veut déjà passer l’effaceur
    https://www.mediapart.fr/journal/france/290817/college-et-rythmes-scolaires-le-ministre-blanquer-veut-deja-passer-l-effac

    Jean-Michel Blanquer, le 24 mai 2017 © Reuters Pour sa première rentrée en tant que ministre de l’éducation nationale, #jean-Michel_Blanquer a partagé sa vision de l’école devant la presse. Il entend d’ores et déjà, seulement trois mois après sa nomination, défaire ce que la gauche a fait en matière d’éducation, au nom du « pragmatisme ».

    #France #éducation_prioritaire #lecture #réforme_du_collège #rentrée_scolaire

  • Collège et #Rythmes_scolaires : le ministre Blanquer veut déjà passer l’effaceur
    https://www.mediapart.fr/journal/france/290817/college-et-rythmes-scolaires-le-ministre-blanquer-veut-deja-passer-lefface

    Pour sa première rentrée en tant que ministre de l’éducation nationale, #jean-Michel_Blanquer a partagé sa vision de l’école lors de la traditionnelle conférence de presse. Il entend d’ores et déjà, seulement trois mois après sa nomination, défaire ce que la gauche a fait en matière d’éducation, au nom du « pragmatisme ».

    #France #éducation_prioritaire #lecture #réforme_du_collège #rentrée_scolaire

  • En #Seine-Saint-Denis, des enseignants protestent contre le CP à 12 élèves
    https://www.mediapart.fr/journal/france/240617/en-seine-saint-denis-des-enseignants-protestent-contre-le-cp-12-eleves

    Des enseignants de Seine-Saint-Denis se sont mobilisés vendredi pour protester contre la mise en œuvre de la réforme « 100 % de réussite au CP », mesure phare du programme d’Emmanuel Macron. Une quarantaine d’écoles ont été fermées. Pour eux, cela ne permettra pas de remédier aux difficultés d’apprentissage des enfants dans un département déjà fragilisé.

    #France #éducation_prioritaire #jean-Michel_Blanquer #Plus_de_maîtres_que_de_classes #REP #REP_+

  • Tutorat lycéen.ne.s-écolier.e.s autour de la réalisation d’un documentaire sur leur quartier

    Après trois ans de tutorat entre les 1ère L (option CAV) et les élèves de CP et CE1 pour réaliser des fictions sur ce quartier populaire où est implantée l’école, le projet fut cette année de s’essayer au documentaire.

    Le résultat est double. D’une part un très-court-métrage issu d’un échange épistolaire avec des mamies du quartier réalisé par les élèves en collaboration avec un plasticien, permettant de se réapproprier une histoire du quartier datant de 2 ou 3 générations avant les élèves. D’autre part, la réalisation d’entretiens illustrés, où au-delà du quartier, c’est les parcours de ses habitant.e.s de tous âges qui apparaissent dans leur diversité, et - c’était une des motivation initiale -, non sans faire écho à celui des élèves. Histoire familiale souvent non dite et histoire du quartier à raconter se mêlent.

    Ces réalisations ne sont pas sans défaut, mais leurs imperfections sont les marques du chemin pris et de celui qui reste à parcourir, y compris pédagogiquement. J’espère que toute cette richesse humaine sera perceptible pour des yeux extérieurs au projet.

    Le résultat est source d’une grande joie pour moi, car en 15 ans d’enseignement, dont 9 ans sur le quartier, je n’ai jamais touché d’aussi près ce qui m’a amené à ce métier.

    “Les mamies de la rue du Bourget”
    https://vimeo.com/221005030

    “Le Garros et les souvenirs de ses habitants”
    http://parlemtv.fr/Le-Garros-et-les-souvenirs-de-ses-habitants

    #éducation #école #lycée #audiovisuel #tutorat #éducation_prioritaire #quartiers #territoires #empowerment #exils #Histoire_de_proximité #histoires

  • #Rythmes_scolaires, allègement des classes, #réforme_du_collège... sur le bureau du ministre de l’éducation
    https://www.mediapart.fr/journal/france/230517/rythmes-scolaires-allegement-des-classes-reforme-du-college-sur-le-bureau-

    Jean-Michel Blanquer, nouveau ministre de l’éducation nationale, a effectué son premier déplacement dans une école ce mardi. Sans vouloir tout réformer, il a promis de prendre le temps d’évaluer les réformes et les dispositifs initiés par ses prédécesseurs. Revue des chantiers qui l’attendent.

    #France #éducation_prioritaire #jean-Michel_Blanquer #Najat_Vallaud-Belkacem #Plus_de_maîtres_que_de_classes

  • Au programme (12). L’éducation prioritaire clive droite et gauche
    https://www.mediapart.fr/journal/france/200417/au-programme-12-l-education-prioritaire-clive-droite-et-gauche

    L’éducation prioritaire apparaît peu dans les #programmes_des_candidats. À droite, la plupart des prétendants à l’Élysée préfèrent promouvoir une école élitiste. À gauche et chez Emmanuel Macron, le sujet est pris en compte mais les propositions s’inscrivent dans la continuité de la politique impulsée par le gouvernement depuis cinq ans.

    #France #éducation_prioritaire #REP #REP+

  • Au programme (12). L’éducation prioritaire clive toujours droite et gauche
    https://www.mediapart.fr/journal/france/200417/au-programme-12-l-education-prioritaire-clive-toujours-droite-et-gauche

    L’éducation prioritaire apparaît peu dans les #programmes_des_candidats. À droite, la plupart des prétendants à l’Élysée préfèrent promouvoir une école élitiste. À gauche et chez Emmanuel Macron, le sujet est pris en compte mais les propositions s’inscrivent dans la continuité de la politique impulsée par le gouvernement depuis cinq ans.

    #France #éducation_prioritaire #REP #REP+

  • A #Marseille, un collège est abandonné à la violence
    https://www.mediapart.fr/journal/france/020117/marseille-un-college-est-abandonne-la-violence

    Des #flèches et des balles de 22 long rifle ont été retrouvées dans le #collège_Versailles du 3e arrondissement. Face à l’émoi des enseignants et des parents, les autorités académiques estiment urgent de ne pas trop en faire. Jusqu’à demander que la présence policière devant le collège « ne perdure pas trop » afin de ne pas « gêner » le réseau de drogue du quartier. Enquête et reportage audio en partenariat avec #France Culture.

    #éducation #éducation_prioritaire #quartiers_défavorisés #violences

  • L’invisible Vincent Peillon au #Parlement_européen
    https://www.mediapart.fr/journal/international/111216/l-invisible-vincent-peillon-au-parlement-europeen

    Vincent Peillon a annoncé sa candidature à la primaire socialiste. Depuis 2014, l’eurodéputé évite les couloirs du Parlement à Bruxelles, reste à distance de ses collègues socialistes et refuse de parler aux journalistes accrédités. Son bilan à mi-mandat : un rapport, passé inaperçu.

    #International #France #éducation_prioritaire ;_Vincent_Peillon ;_ZEP #Emmanuel_Maurel #europe #Jean-Luc_Mélenchon #Pervenche_Bérès #primaires #PS

  • Les lycées d’éducation prioritaire réclament un statut
    https://www.mediapart.fr/journal/france/291116/les-lycees-deducation-prioritaire-reclament-un-statut

    Pour sa quatrième journée de grève, ce 29 novembre, le collectif #Touche_pas_ma_ZEP s’est réuni à Paris pour réclamer un véritable statut pour les lycées relevant de l’éducation prioritaire. La ministre de l’éducation annonce 450 postes supplémentaires pour la rentrée 2017 mais promet que la réforme profonde sera effectuée à la « prochaine mandature ».

    #France #éducation #éducation_prioritaire ;_ZEP #Najat_Vallaud-Belkacem

  • L’un d’eux (Monsieur Samovar)
    https://monsieursamovar.wordpress.com/2016/10/12/lun-deux

    Je suis l’un de ces profs qui travaillent là où les voitures brûlent. Là où des policiers sont mutilés. Là où il se chuchote que les règles de la République ne s’appliquent plus.
    […]
    Je suis l’un de ces profs qui voient les élèves des « Territoires » mettre en place des projets photos délirants, s’investir dans la ventes de babioles plastique pour partir en voyage. Je suis l’un de ces profs qui pense que c’est ainsi, en projetant cette immense envie d’ambition et de rigueur sur ceux qui viennent, que les flammes s’apaiseront.

    Nous pouvons aider, nous pouvons demander à ces mômes que nous fréquentons chaque jour d’allumer leurs petites lumières, ces lueurs qui dévoileront que les actions abominables ne sont qu’une atroce exception. Une exception que nous pouvons éradique, par l’instruction, par l’ambition, par une éducation en lien avec tout le reste de la vie de ces mômes. Parents, associations, clubs, municipalité, justice.

    Si vous saviez, si vous voyiez tout ce qu’ils font de beau, de bon dans la ville où des ombres dealeuses se dissimulent dans les discours asthmatiques de responsables politiques, dans les cris de haine et dans la peur.

    Je suis l’un de ces profs qui ne détourne pas les yeux de la réalité, mais qui voit dans le travail de ses collègues, qui voit dans la rigueur, l’ambition et le beau, la porte de sortie.

    #éducation #secondaire #éducation_prioritaire #effet_pygmalion #élèves #territoires #inégalités #discriminations #discours_politiques #témoignages