• « Tout le monde savait » : Claude Lévêque, une omerta au nom de l’art
    https://www.lemonde.fr/culture/article/2021/01/15/tout-le-monde-savait-claude-leveque-une-omerta-au-nom-de-l-art_6066318_3246.

    Qui n’a jamais aperçu l’artiste entouré d’adolescents plus ou moins jeunes, à un vernissage, un dîner de galerie ? Qui n’a jamais entendu de rumeurs ? « C’était comme un nuage flottant autour de lui, reconnaît une conseillère de collectionneurs qui le connaît, et s’en méfie, depuis trente ans. Tout le monde savait qu’il aimait s’entourer de jeunes éphèbes, et un bon nombre craignait le pire. Mais comment agir contre un homme qui a une telle aura, quand on n’a que des rumeurs, et qu’on n’est pas témoin de ses manœuvres ? Contre un artiste qui exerce une telle fascination, car il a produit une œuvre incroyable ? »

    • Claude Lévêque, une omerta au nom de l’#art

      Alors qu’une partie du milieu est sidérée d’apprendre que le plasticien fait l’objet, depuis 2019, d’une enquête préliminaire pour « #viols et #agressions_sexuelles sur mineurs », d’autres semblent moins surpris.

      Alors qu’une partie du milieu est sidérée d’apprendre que le plasticien fait l’objet, depuis 2019, d’une enquête préliminaire pour « viols et agressions sexuelles sur mineurs », d’autres semblent moins surpris.

      Au milieu des années 1980, une artiste qui préfère rester anonyme s’était aventurée à demander à un galeriste parisien qui exposait Claude Lévêque pourquoi il ne représentait aucune femme artiste : « Je n’ai peut-être pas d’artiste femme, mais j’ai un pédophile », s’était-elle entendu rétorquer. Plaisanterie tordue, aveu, provocation ? « En tout cas, ça résume bien le contexte, raconte-t-elle aujourd’hui. Je m’étais tue, mais, quand je visitais les expositions, je vous assure que je ne lâchais pas mon petit garçon de l’oeil. »

      « Comment une telle carrière est-elle possible, alors que depuis des années "ÇA SE SAVAIT ?" », interroge la critique d’art Marie Chênel dans un Tweet très relayé. Il résume la sidération du milieu de l’art depuis les révélations du Monde, le 10 janvier, concernant la plainte du plasticien Laurent Faulon contre l’artiste Claude Lévêque et l’enquête ouverte par le parquet de Bobigny (Seine-Saint-Denis), en mai 2019, pour « viols et agressions sexuelles sur mineurs de moins de 15 ans . M. Faulon, un sculpteur de 51 ans, dénonce des « abus sexuels » subis entre ses 10 et 17 ans de la part de M. Lévêque, assurant qu’il était, comme sa famille, sous son « emprise . Le journal en ligne Mediapart a lui aussi publié une longue enquête, le 13 janvier, qui accable l’artiste.

      L’enquête judiciaire est en cours, et la présomption d’innocence prévaut. Mais dans le milieu de l’art, où Claude Lévêque était si connu, chacun s’interroge. Qui n’a jamais aperçu l’artiste entouré d’adolescents plus ou moins jeunes, à un vernissage, un dîner de galerie ? Qui n’a jamais entendu de rumeurs ? « C’était comme un nuage flottant autour de lui, reconnaît une conseillère de collectionneurs qui le connaît, et s’en méfie, depuis trente ans. Tout le monde savait qu’il aimait s’entourer de jeunes éphèbes, et un bon nombre craignait le pire. Mais comment agir contre un homme qui a une telle aura, quand on n’a que des rumeurs, et qu’on n’est pas témoin de ses manoeuvres ? Contre un artiste qui exerce une telle fascination, car il a produit une oeuvre incroyable ? »

      Filleuls, neveux, assistants...

      Ces adolescents qui l’entourent, Claude Lévêque les présente comme ses filleuls, ses neveux, ses assistants, voir comme ses « fils . Ces doudous et nounours qu’il trimballe autour du monde, qu’il sort en plein repas, qu’il déploie dans chaque recoin de ses deux maisons, ont été, selon l’artiste, dans ses interviews, « donnés par des amis, souvenirs trop intimes pour en parler . Son obsession pour le monde de l’enfance est considérée comme une « sublimation artistique », la part de fantasme d’un adulte qui est bien plus à l’aise avec les enfants qu’avec le monde des grands.

      Et puis, comment condamner sur la base de « racontars » ? « On lui aurait donné le bon Dieu sans confession », admet l’artiste Jonathan Loppin, dont la compagne, Julie Faitot, a envoyé un signalement à la justice concernant Claude Lévêque en février 2019. Pendant les quinze ans que dura leur amitié, il avoue avoir été subjugué par cette star prête à défendre corps et âme le moindre squat, toujours disposée à prendre fait et cause pour la veuve et l’orphelin : « Claude apparaît comme un nounours au charisme fort, et un vrai aimant à enfants. En fait, il sait les ferrer. Quand j’ai compris que ces doudous étaient sans doute ceux de ses victimes, des trophées, j’ai pris une énorme claque. »

      « Je l’ai toujours vu bouleversé par la beauté des jeunes garçons, elle le secouait, et il l’assumait, ses premières oeuvres en témoignent », souligne un habitant de Nevers (Nièvre), proche des Faulon. Enfant, il a connu Lévêque comme moniteur de centre aéré dans les années 1970, sans jamais entendre de rumeurs pouvant l’incriminer. Depuis quelques jours, il fouille dans sa mémoire. « J’essaie d’analyser le phénomène d’emprise, détaille-t-il. En abordant l’environnement de cet adulte entouré de jeunes hommes, on avait d’abord un sentiment de malaise, mais la situation était ensuite validée par les proches ; familles, amis, tous semblaient acter ce qui se passait. Le trouble ressenti était alors étouffé par cette validation collective. En outre, j’en ai été témoin à deux reprises, Claude entretient aussi une relation très forte avec les mères des enfants, dont je ne sais comment elle s’articule, une relation presque amoureuse. Mécanique qu’il semble, hélas, avoir affinée avec le temps. »

      Collectionneurs, experts, galeristes, conservateurs, critiques, artistes : cette validation a été tout aussi collective dans le milieu de l’art, même si certains tenaient scrupuleusement leurs distances. « Les institutions lui ont fait confiance, à cause de la fascination qu’exerce son oeuvre, mais aussi de son engagement pour les causes sociales, politiques, analyse une directrice de musée. Tout cela était-il un écran de fumée ? Tout comme ces références à l’enfance, sans cesse convoquée, sacralisée, sanctuarisée : elles faisaient la beauté et la pureté de son travail ; désormais, elles peuvent ressembler à un sacrifice. »

      « Si c’est vrai, c’est un séisme, auquel je peine à me résoudre, glisse un autre conservateur. Ses oeuvres des années 2000, pleines d’un danger punk qui fascine, ont été un choc esthétique pour toute une génération. Nous nous sommes construits en partie avec elles. » Un artiste éperdu d’admiration pour Claude Lévêque, « bouleversé par le témoignage de Laurent Faulon », s’avoue tout autant « blessé, et en colère » : « J’ai la sensation d’avoir été manipulé, comme tout le monde de l’art l’a été. J’ai aujourd’hui l’impression que, avec toutes ces oeuvres mettant en scène l’enfance, il nous disait : "Regardez, je vous mets ça sous le nez, et vous ne voyez rien !" »

      Qu’il mette la même énergie à préparer la Biennale de Venise (2009) qu’à exposer à l’école élémentaire Pierre-Budin, à la Goutte d’Or (Paris 18e), lors d’une résidence artistique en 2012 ? Cela relevait de son engagement social. Qu’il peigne de noir les fenêtres de l’appartement mis à disposition par l’école, juste au-dessus des salles de classe ? On y voyait sa marque punk. Qu’il se déclare, un an après, toujours ami avec l’un des bambins de 8 ou 9 ans qui collabora au projet, le plus curieux, le plus créatif ? On l’admirait alors pour n’avoir pas pris la grosse tête. Tout cela peut aujourd’hui faire frémir.

      Dans les archives du Quotidien de l’art, nous avons retrouvé les paroles de l’enfant que nous avions rencontré au sein de l’école pendant la préparation de leur exposition « Seasons in the Abyss . Il interpellait ainsi l’artiste : « Je t’ai amené mon nounours, parce que je lui ai percé le cerveau. Avant, il bougeait dans son Jacuzzi, il faisait très chaud, c’était le feu, et je lui ai percé la tête ... « Le trou dans la tête », c’est aussi une phrase gravée par Lévêque sur un lit tout rouillé d’enfant, dans une oeuvre de 1986.

      #Aveuglement_collectif

      Pour comprendre aujourd’hui ce qui a pu relever d’un aveuglement collectif, les témoignages affluent, chacun s’employant à replacer une pièce dans un puzzle qui, trop longtemps, n’a pas fait sens. L’un se rappelle cette chambre d’enfant, dans la maison de Montreuil (Seine-Saint-Denis) de #Lévêque, « avec ses petites bagnoles sur les étagères », qu’il disait destinée « aux amis qui venaient avec leurs petits . L’autre, ces manèges abandonnés dans sa maison de campagne. Une troisième, l’aveu de cette mère « manifestement perdue, dans un monde parallèle, qui me racontait que Claude Lévêque dormait dans la chambre de son fils de 15 ans, et qui semblait comme flattée qu’il ait été "choisi". J’ai pris mes distances, désespérée qu’il soit impossible de lui faire comprendre que son môme était en danger .

      Galeriste et commissaire d’exposition, Stéphane Corréard dénonce aujourd’hui ce qu’il considère comme une omerta. « Beaucoup savaient, tout le monde pouvait se douter, personne n’est surpris, résume-t-il. Alors pourquoi avons-nous toléré, abrité, protégé, pendant des décennies, un supposé prédateur sexuel, un pédocriminel récidiviste ? Parce que, dans notre milieu, personne ne dit rien, jamais. La parole est cadenassée, le fonctionnement clanique. »

      Comment l’expliquer ? « La tolérance de notre milieu pour la transgression, y compris sexuelle, y est pour beaucoup », suggère-t-il. Un artiste pourrait donc franchir toutes les lignes rouges ? Laurent Faulon se souvient en tout cas très bien « des commissaires et artistes qui venaient dîner à la maison : avec Lévêque, on était comme un couple recevant des invités. Sauf que j’avais 15-16 ans. Tous découvraient les bricolages que j’avais faits dans l’atelier, et me disaient : "Tu as une oeuvre incroyable, ne t’embête pas à faire les Beaux-Arts, tu sais déjà tout !" . C’est ainsi que Laurent Faulon s’est retrouvé exposé à la Fondation Cartier de Jouy-en-Josas (Yvelines) ou au Magasin de Grenoble, à pas même 18 ans. Sans plus de questions, juste pour la reconnaissance de son talent naissant.

      Poursuivant son analyse, Stéphane Corréard évoque aussi le « souvenir de l’époque glorieuse où l’avant-garde était menacée de toute part, notamment par les réactionnaires et l’extrême droite. Nous avons alors pris le pli d’une opposition facile entre "pro" et "anti" art contemporain qui est devenue factice, mais qui continue de structurer largement le fonctionnement de notre monde de l’art . Impossible de dénoncer sur la foi de racontars, certes. « Mais ces directeurs de musée, qui racontent de façon anonyme avoir refusé que Lévêque partage une chambre d’hôtel avec un ado, n’avaient-ils pas obligation, en tant que fonctionnaires, de dénoncer des crimes dont ils avaient eu connaissance dans le cadre de leurs fonctions ? »

      Comme tous, il en est cependant conscient : la mécanique à l’oeuvre est complexe à déconstruire. Qu’un artiste puissant s’écroule, et tout un système s’effondre : ceux qui le collectionnent, le louent, l’honorent, le capitalisent. « Les relations entre les acteurs organisent la valeur de l’oeuvre en mettant l’artiste sur un piédestal, dans une relation romantique à l’art, explique ainsi un directeur d’institution. Les jeux de pouvoir sont réels, et pas seulement financiers, à tous les maillons de la chaîne, on ne peut se permettre que l’image de l’auteur soit entachée. Les liens d’interdépendance et les rapports de domination organisent le silence, à quoi s’ajoute la peur d’être blacklisté du milieu. Ils neutralisent toute possibilité de prise de parole. L’autocensure est forte, jusqu’à se frapper soi-même de cécité. La structure protège son capital. »

      Averti de la plainte de Laurent Faulon peu après son dépôt, le Mamco de Genève a pris position dès 2020, en faisant disparaître de son site toute mention de Claude Lévêque, qui y a exposé en 2003. Il est, pour l’instant, le seul. « Avec l’équipe de conservation, nous avons décidé un moratoire immédiat sur la présence de ses oeuvres en nos murs, explicite Lionel Bovier, son actuel directeur. Je n’ai jamais travaillé avec cet artiste, ni avec ses oeuvres d’ailleurs. Mais, de mon point de vue, le discrédit qui est aujourd’hui jeté sur son travail sera absolument irrémédiable si les accusations se révèlent fondées. Il ne m’appartient pas de me prononcer sur les conséquences légales des actes qui sont relatés, mais je peux témoigner de cela : je ne pourrai plus jamais regarder ce travail sans y trouver des indices des crimes qui lui sont reprochés. Par conséquent, le musée que je dirige ne montrera ni ne diffusera son travail dans le futur. »

      #pédophilie #pédocriminalité #Laurent_Faulon #abus_sexuels #emprise #rumeurs #fantasme #validation_collective #enfance #omerta #silence #impunité #transgression #domination #pouvoir #autocensure #cécité

    • Affaire Claude Lévêque : collectionneurs et musées s’accrochent aux œuvres devenues embarrassantes

      https://www.lemonde.fr/culture/article/2021/01/15/affaire-claude-leveque-collectionneurs-et-musees-s-accrochent-aux-uvres-deve

      https://www.lalsace.fr/culture-loisirs/2021/01/16/l-embarrassant-claude-leveque

      #censure #appel_à_la_censure

      Je tiens à rappeler que Springora n’ a jamais exigé la disparition des livres de Matzneff, c’est Gallimard qui s’achète une conscience en le faisant.

      Par ailleurs, le type doit répondre des ses actes, et il mériterait surtout des soins et une gigantesque psychothérapie (plutôt que la taule et la censure), mais il me semble au contraire très important de pouvoir continuer à voir ses oeuvres, même et surtout les pires, en sachant ce que l’on savait déjà, certes plus ou moins, mais en sachant au moins que le type n’était pas là pour rigoler et qu’il nous parlait bien de choses sombres et dégueulasses.

    • Dager je déteste et je comprend pas pk on le voie dans toutes les expos d’art brut. Sinon par rapport à la censure de Matzneff et Leveque le plus ahurissant c’est qu’on accusera les victimes d’etre #cancel_culture alors que ce sont les liberaux qui en sont les instigateurs dans un geste revisionniste. Parfois ce sont aussi les pedosexuels qui censurent pour être « les cowboys de leur sujet ».

  • Contre la #récupération du #handicap par les personnes anti-#écriture_inclusive

    « billet pour dénoncer la récupération du handicap par les personnes qui s’opposent à l’écriture inclusive. Écrit par les personnes concernées par le validisme et le sexisme, ce billet demande aux personnes non concernées de cesser de brandir l’argument de la #cécité, de la #dyslexie ou de la #dyspraxie pour justifier leur position, et aux personnes concernées mais réactionnaires d’arrêter de parler au nom de toute la communauté handie » (Efigies Lyon, 15 décembre 2020 : https://efigies-ateliers.hypotheses.org/5274).

    –-> par les membres du Réseau d’Études HandiFéministes (REHF)
    Publié originellement sur Efigies, 15 décembre 2020

    Les membres du Réseau d’Études HandiFéministes (REHF), concernées pour la plupart par le sexisme et le validisme et chercheurses à l’université ou ailleurs, exprimons aujourd’hui notre désaccord et dénonçons la récupération du handicap pour justifier des positions anti- écriture inclusive, par des personnes généralement concernées ni par le sexisme, ni par le validisme. Au nom de la cécité, de la dyslexie ou de la dyspraxie, certain-e-x-s s’opposent à l’usage et au développement de l’écriture inclusive. Pour le REHF, il s’agit d’un argument doublement fallacieux.

    En premier lieu, cet argument tend à homogénéiser l’opinion de l’ensemble des personnes déficientes visuelles et avec des troubles dys. Il existe assurément des handi-e-x-s qui défendent l’écriture inclusive. Il est donc problématique que des personnes non concernées ne consultent pas ou s’expriment à la place des personnes concernées par le validisme, tout comme il est problématique que des personnes concernées ne considèrent pas la pluralité des discours sur ces débats. En effet, l’argumentation s’appuie parfois sur des textes publiés par des personnes handicapées, à l’instar de la lettre de la Fédération des Aveugles de France, intitulée « Les aveugles disent non au mélange des genres ». Le REHF doute fortement que l’ensemble des aveugles de France aient été interrogé-e-s sur la question. Par ailleurs, le REHF s’oppose aux points suivants1 :

    « […] Nous ne saurions pas mélanger les genres : si l’on peut dire et faire de la question de la construction de la langue un sujet qui aurait rapport avec une quelconque discrimination sexuelle, c’est là faire preuve d’une inculture incroyable et de confusion redoutable. »

    « C’est donc un bien pitoyable combat que celui de se battre à peu de frais contre une règle arbitraire, en la faisant passer pour le symbole d’une discrimination sociale. »

    Le mépris pour l’écriture inclusive dans ces deux extraits fait fi de toute une littérature scientifique sur la question. Tout d’abord, la sociolinguistique s’échine à montrer, depuis le XIXe siècle, qu’une langue est socialement construite et, à ce titre, qu’elle reflète les rapports sociaux dans leur ensemble. Donc lorsqu’il est dit que le masculin l’emporte sur le féminin, ce n’est pas sans raison, ni sans incidence. Loin d’être une règle arbitraire, cette oppression organisée discrimine et dissimule des populations dominées. Ensuite, l’histoire et la grammaire ont également révélé que cette hégémonie masculine au sein de la langue française est très récente (seconde moitié du XVIIe siècle), et qu’elle a entraîné une perte de vocabulaire, un vocabulaire aujourd’hui réinvesti par les défenseurses de l’écriture inclusive. Enfin, les études du discours ont expliqué que l’écriture inclusive n’est pas qu’une simple histoire de « mélange des genres ». Sur tous ces sujets, nous invitons nos interlocuteurices à se renseigner.

    En second lieu, l’argument du handicap pour les positions anti écriture inclusive n’est pas valide au niveau technique, et ce, à double titre. Premièrement, c’est placer le problème au mauvais endroit. Le souci, ce n’est pas l’écriture inclusive en tant que telle, mais, d’un côté, c’est la programmation des logiciels de synthèse vocale utilisés par les personnes déficientes visuelles, et, de l’autre, c’est l’absence d’éducation à ce sujet. De fait, lire un point médian avec un lecteur d’écran est, à l’heure actuelle, quelque chose de désagréable, voire d’incompréhensible. Mais si les programmateurices travaillaient à modifier cela, il n’y aurait plus de problème. Donc nous préférons condamner le sexisme qui préside à la programmation des logiciels, plutôt que l’antisexisme qui motive l’usage de l’écriture inclusive.

    Deuxièmement, il existe, dans l’état actuel des choses, de nombreux procédés qui permettent aux logiciels de synthèse vocale de lire confortablement l’écriture inclusive. Par exemple, il suffit d’intervenir dans le terminal du logiciel pour modifier la verbalisation du point médian, à condition d’avoir quelques compétences en informatique, ou d’avoir un·e valide sous la main qui daigne s’abaisser à cette tâche. Nous n’avons pas l’outrecuidance de dire que l’inculture n’est pas là où il paraît. Par exemple encore, il existe d’autres outils que le point médian, parfaitement lisibles par des lecteurs d’écran. C’est le cas des traits d’union (jusqu’à maintenant, nous croyons savoir que les déficient-e-s visuel-le-s n’ont pas demandé à supprimer les mots composés de la langue française), des points normaux ou des slashs, des répétitions de termes avec un accord en genre différent, des néologismes, etc. Nous pouvons donc écrire « auteurs et autrices », ou bien « auteurs-trices », ou encore « auteurices », et nos synthèses vocales, de même que nos oreilles, s’en portent très bien.

    Par ailleurs, la complexité de la langue française pour les dyslexiques (causée, en partie, par son opacité, c’est-à-dire par sa non-correspondance entre orthographe et phonologie) est une question qui doit être traitée dans son ensemble, et non pas à l’aune de l’écriture inclusive. Chercher à rendre la langue française accessible aux personnes dys est un travail qui, d’une part, mérite tout notre intérêt et, d’autre part, ne doit pas servir à évincer d’autres réformes linguistiques, telles que l’écriture inclusive, permettant de lutter contre d’autres discriminations, en l’occurrence le sexisme. Le REHF soutient donc la création de solutions ou alternatives non discriminantes.

    Nous notons aussi la manière dont les personnes neuro-atypiques (ou neuro-diverses), d’ordinaire évacuées de la plupart des discours dominants, se retrouvent souvent utilisées dès qu’il s’agit de contrarier l’utilisation de l’écriture inclusive ; notamment dans les sphères intellectuelles, scolaires ou encore universitaires, etc., et ce, malgré la méconnaissance évidente des enjeux neurologiques, neurocognitifs, neurocomportementaux, sociaux, de même que l’ignorance des précarités et des discriminations auxquels ces personnes font face au quotidien.

    Si l’utilisation de l’écriture inclusive et sa lecture représentent effectivement, pour les personnes dys et multi-dys, des enjeux et des efforts supplémentaires, c’est précisément parce que la langue française est sexiste. Et c’est pour pallier ces manquements qu’elle nous oblige à faire cette gymnastique, afin de faire exister, par les mots, celleux qu’elle oublie.

    Pour toutes ces raisons, le REHF défend l’usage d’une écriture inclusive pour toustes et par toustes. Pour une présentation détaillée des enjeux et des formes d’écriture inclusive, nous conseillons à nos interlocuteurices de cliquer sur le lien suivant : https://fondation-phi.org/fr/article/discriminations-liees-genre-langue-francaise

    Pour aller plus loin

    « Les discriminations liées au genre dans la langue française.Vers une plus grande inclusion des femmes et des personnes non binaires », par Anna Hains-Lucht, Fondation Phi, 2 novembre 2020 : https://fondation-phi.org/fr/article/discriminations-liees-genre-langue-francaise/#six

    https://academia.hypotheses.org/29829

  • Le fait que vous n’ayez pas repéré le gorille dans cette image expliquerait pourquoi nous n’avons toujours pas trouvé d’extraterrestres

    http://www.gurumed.org/2018/04/20/le-fait-que-vous-nayez-pas-repr-le-gorille-dans-cette-image-expliquerait-po

    C’est bizarre d’être humain. Il y a tellement d’informations à traiter par notre cerveau que celui-ci ne s’encombre pas d’éléments qu’il estime sans intérêts et qui sont pourtant devant nous. Ce concept s’appelle la « cécité d’inattention« , et c’est l’une des plus célèbres excentricités que les scientifiques cognitifs aient jamais découvertes, notamment parce qu’elle est étonnamment facile à démontrer dans une vidéo, comme vous pouvez le voir ci-dessous :

    https://www.youtube.com/watch?time_continue=2&v=IGQmdoK_ZfY


    Les sujets doivent compter les passes faites par une des équipes, ou encore distinguer le nombre de passes aériennes de celles comportant un rebond. Durant les échanges, une femme déguisée en gorille traverse la scène. Après qu’ils ont exécuté leur tâche, on demande aux sujets s’ils ont remarqué quelque chose sortant de l’ordinaire. Dans la plupart des groupes testés, 50 % des sujets n’ont pas remarqué le gorille.

    Inspirés par cette singularité bien connue, deux psychologues de l’université de Cadix, en Espagne, ont utilisé une version de ce test du gorille pour explorer les raisons pour lesquelles les scientifiques n’ont toujours pas trouvé de signes de vie extraterrestre intelligente.

    Les chercheurs Gabriel de la Torre et Manuel Garcia se demandent dans leur nouveau document de recherche :
    Et si des facteurs humains ou des aspects biopsychologiques biaisaient cette tâche scientifique ?

    Pour tester leur idée, le duo a fait passer un test à 137 participants sur leurs capacités cognitives, en utilisant un questionnaire à 3 questions qui permet de déterminer si une personne est encline à des réponses rapides sans y réfléchir (connu sous le nom de « système 1 »), ou si elle prend le temps de réfléchir consciemment aux choses (« système 2 »).
    Après avoir complété ce test ainsi qu’un questionnaire mesurant l’attention des sujets, on leur a demandé de regarder des photos aériennes de notre planète, en cherchant soit des structures artificielles comme des bâtiments, soit des éléments naturels comme des rivières et des chaînes de montagnes.

    C’est là que le gorille entre en jeu, l’une des photos comportait un petit gorille de 3 mm de haut. Les chercheurs ont prédit que les personnes qui pensent « système 2 » seraient plus à même de repérer la figure cachée, mais cela ne s’est même pas avéré être le cas.
    Seulement 32,8 % des participants ont remarqué le gorille, et presque tous se sont avérés posséder le style cognitif « système 1 », ce qui signifie qu’ils étaient des « individus plus impulsifs/intuitifs », selon les chercheurs qui concluent :

    Il semble que le fait d’être centré sur une tâche de recherche déterminée, par exemple la recherche de signaux radio d’origine extraterrestre, peut nous aveugler par rapport à d’autres possibilités.
    Nous pouvons même rater le gorille dans la tâche. La question ici est de savoir combien de gorilles nous avons déjà manqués dans notre recherche de signes ETI (Extraterrestrial intelligence) ou NTI (Non Extraterrestrial Intelligence).

    #cécité_d_'_inattention

    #They_live

  • The legally blind photographer capturing refugee life

    A legally blind Syrian refugee photographs life in the camps of Lebanon and his family’s new start in Canada.

    But what Hani’s photos don’t reveal is that he is legally blind.

    He struggles to recognise people standing more than 10 feet away from him and doesn’t see all colours. Photographing moving objects is difficult, so he mostly focuses on still subjects and has memorised more than 10 exposure settings.


    http://www.aljazeera.com/indepth/inpictures/2017/07/legally-blind-photographer-capturing-refugee-life-170731072559385.html
    #photographie #camps_de_réfugiés #Liban #réfugiés #asile #migrations #réfugiés_syriens #aveugle #cécité
    via @albertocampiphoto
    cc @philippe_de_jonckheere

  • La saillance et le discours sur le #relief

    Samia Ounoughi
    La saillance et le discours sur le relief [Texte intégral]
    Une introduction
    Salience and Relief-Related Discourse [Texte intégral | traduction]
    An introduction
    Aurélie Tremblet
    Du Sublime de la montagne chez #Philip_James_de_Loutherbourg et #Joseph_Mallord_William_Turner [Texte intégral]
    The Mountain Sublime of Philip James de Loutherbourg and Joseph Mallord William Turner [Texte intégral | traduction]
    Laurence Roussillon-Constanty
    La #topographie selon #Ruskin : saillance du visible et du lisible dans Modern Painters [Texte intégral]
    Of Ruskinian Topography : Visible and Legible Salience in Modern Painters [Texte intégral | traduction]
    André Dodeman
    L’ascension de l’artiste dans The Mountain and the Valley (1952) d’#Ernest_Buckler [Texte intégral]
    The Ascent of the Artist in Ernest Buckler’s The Mountain and the Valley (1952) [Texte intégral | traduction]
    Alexandra Baudinault
    « Relief » et « montagne » : les enseignants de l’école élémentaire confrontés à la mise en mots et en images de la saillance [Texte intégral]
    “Relief” and “Mountains” : Primary School Teachers Confronted with Discursive and Visual Framing of Salience [Texte intégral | traduction]
    Marie-Dominique Garnier
    Saillance et #cécité : parcours haptique sur le #Mont_Gins [Texte intégral]
    Sur HelenKeller Or Arakawa de Madeline Gins
    Salience and Blindness : A Haptic Hike on Gins Mountain [Texte intégral | traduction]
    A Reading of Madeline Gins’s Helen Keller or Arakawa

    http://rga.revues.org/3380
    #art #peinture
    #revue #Alpes #montagne

  • Glaucome

    Le terme de glaucome désigne tout un groupe de maladie oculaire associées à une pression intraoculaire trop élevée et caractérisées par une atteinte du nerf optique et une réduction progressive de l’espace de l’œil.

    Deuxième cause de #cécité dans le monde, le #glaucome touche environ 3% des personnes de plus de 40 ans : Dans la majorité des cas, cette affection se développe de manière insidieuse. Elle est indolore, et c’est seulement à un stade très avancé qu’elle entraine une altération de la vue.

    https://www.youtube.com/watch?v=8AdVz-qHF3Q

    Simulation d’un trajet en ville par Ligue braille
    Pathologie visuelle : glaucome

    http://www.braille.be/fr

    Bon, faites gaffe les amis, c’est indolore et on s’en aperçoit souvent trop tard.

  • HCR | Reportage sur des Syriens #aveugles traversant la #Méditerranée

    Les réfugiés risquent leur vie pour traverser la Méditerranée. Pour un couple d’aveugles syriens, la quête d’asile a apporté une nouvelle douleur...


    http://www.asile.ch/vivre-ensemble/2015/03/23/hcr-reportage-sur-des-syriens-aveugles-traversant-la-mediterranee
    #migration #Syrie #asile #migration #cécité

  • Vous êtes-vous déjà demandé à quoi ressemblait Internet pour les aveugles ? - Le nouvel Observateur
    http://rue89.nouvelobs.com/2014/10/09/etes-deja-demande-a-quoi-ressemblait-internet-les-aveugles-255380

    Hélène, 39 ans, est aveugle. Elle nous raconte son utilisation d’Internet

    L’iPhone de Hélène et sa plage braille

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    Quand je vais sur un site, si c’est la première fois, il va me falloir un certain temps pour l’explorer, pour en comprendre le fonctionnement. Disons que je me fie à la façon dont une page est codée. Je vais chercher sa structure et les différents objets sur lesquels je peux tomber : un menu, un titre, une photo, un formulaire… Il faut que j’en fasse le tour avec mon logiciel de synthèse vocale. Ça peut prendre pas mal de temps ! Par exemple, je vais buter sur chaque pub et mettre beaucoup plus de temps que vous à la contourner.

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    Un site bien fait, pour moi, c’est quand il y a une structure claire et pas de rafraîchissement intempestif. Ça c’est atroce, vous êtes obligé de recommencer à trouver des repères. Les sites chargés sont aussi un enfer, mais j’imagine que visuellement, ça doit être la même sensation s’il y a trop de choses, ou si c’est fouillis, vous allez avoir du mal à trouver ce que vous souhaitez. Pour moi, c’est pareil.

    Après, comme tout le monde, cela se passe bien plus vite sur des sites que je fréquente régulièrement. J’en ai mémorisé la structure et ça se passe très bien. Mais on n’est jamais à l’abri d’un changement sur un site ou une application. Là, ça chamboule tout. Vous pensiez que vous alliez pouvoir faire vos courses rapidement, et non. Il faut réapprendre tout et c’est assez pénible.

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    Il y a des choses qui sont typiques d’Internet qui, pour moi, sont complètement absurdes. Comme les smileys : au début, je ne comprenais pas ce que c’était. Pourquoi c’étaient ces caractères-là qu’on utilisait, pour signifier quoi ? Jusqu’à ce qu’un ami me montre avec des Lego. Là j’ai pu visualiser, il m’a expliqué le sourire, les yeux.

    #cécité #internet

  • Les aveugles font quatre fois plus de cauchemars que les voyants | Slate.fr
    http://www.slate.fr/story/93111/aveugles-cauchemar

    Selon des chercheurs de l’Université de Copenhague cités par Science Nordic, 25% des rêves que font les aveugles sont des cauchemars, alors que la moyenne n’est que de 6% de cauchemars pour les personnes qui voient.

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    Les aveugles de naissance faisaient quatre fois plus de cauchemars que les autres, et leurs mauvais rêves étaient souvent liés aux menaces qu’ils devaient gérer au quotidien, comme avoir peur de se faire écraser par une voiture, de se perdre dans la rue, ou de renverser des objets, relève la BBC.

    Les rêves des aveugles de naissance n’avaient aucun contenu visuel, et se définissaient plutôt par des goûts, des sons, des odeurs et des expériences de toucher.

    En ce qui concerne les personnes devenues aveugles au cours de leur vie, leur taux de cauchemar était de 7%, très proche de celui des voyants (6%). Selon les chercheurs, cette différence avec les aveugles de naissance pourrait être liée au fait que ces personnes ont déjà vu l’espace dans lequel ils circulent, et qu’ils se sentent donc moins menacés par leur environnement. « Pour cette raison, ils n’ont peut-être pas autant besoin de gérer ces impressions quotidiennes en faisant des cauchemars », explique Amani Meaidi.

    L’idée sous-jacente est que les cauchemars permettent de se préparer à affronter des moments difficiles (comme une sorte de répétition générale), notamment en aidant à développer des mécanismes de gestion du stress.

    #cécité

  • Je suis aveugle et je vais vous parler de cinéma - Le nouvel Observateur - Romain Villet
    http://rue89.nouvelobs.com/2014/04/16/suis-aveugle-vais-parler-cinema-251511

    Sans voir au cinéma, restent bien sûr la musique et les mots, reste au mieux le parfum de celle qui vous y accompagne, mais manque l’essentiel : manque la danse des images qui se prend pour la vie.

    On me rétorquera que j’aurais pu me faire décrire ce ballet de visions qui m’échappent. C’est une fausse bonne idée qu’ont toujours eu les autres. Vouloir que les aveugles jouissent du VIIe art (six ne suffiraient-ils pas ?) c’est faire preuve d’un genre de bienveillance totalitaire qui vise à leur faire vivre, malgré leurs yeux foireux, la même vie que tout le monde.

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    Non, merci bien, j’ai du beau plein les livres, j’ai du beau plein les disques, j’ai du beau sous les doigts, j’en ai dans les oreilles, pourquoi m’entêter à goûter ce qui n’est pas pour moi ? Pourquoi courir derrière le beau des autres ?

    #cinéma #cécité