city:durkheim

  • Does the news reflect what we die from?

    The major standout here – I had to break the scale on the y-axis since it’s several orders of magnitude higher than everything else – is terrorism: it is overrepresented in the news by almost a factor of 4000.

    Homicides are also very overrepresented in the news, by a factor of 31. The most underrepresented in the media are kidney disease (11-fold), heart disease (10-fold), and, perhaps surprisingly, drug overdoses (7-fold). Stroke and diabetes are the two causes most accurately represented.

    https://ourworldindata.org/does-the-news-reflect-what-we-die-from
    #data #visualization #media

  • #impressionnant

    Ben Norton sur Twitter : “This graph is interesting in many ways. But notice something even more insidious about it: It shows that the NY Times and Guardian cover the same things in the same proportions! Those columns are identical! The corporate media is a carefully managed apparatus of social control.” / Twitter
    https://twitter.com/BenjaminNorton/status/1134478565725151233

    #MSM #couverture #identique #fabrique_du_consentement #controle_social
    #statistiques

  • « Crépuscule », de Juan Branco, met l’oligarchie à nu | Hervé Kempf
    https://reporterre.net/Crepuscule-de-Juan-Branco-met-l-oligarchie-a-nu

    Un décorticage des mécanismes par lequel le système oligarchique a placé Emmanuel Macron au pouvoir : c’est ce qu’opère le livre de Juan Branco, en flagellant les médias serviles qui servent l’oligarchie. Ils répondent par le silence. Mais le public a adopté un livre utile et qui mérite d’être lu.

    Voici un livre politique qui est en tête des ventes ou à peu près, dès sa sortie il y a deux semaines, et dont pourtant personne — enfin, aucun « grand média » — ne parle. Il y a là un mystère. Ce livre est-il inintéressant ? Non. Manque-t-il d’originalité ? Point. Mal écrit ? La plume n’est pas des plus légères, mais on a lu largement pire. Serait-il abracadabrant, inepte, mensonger, idiot, benêt, déraisonnable, fade ? Que nenni, on vous dit.

    Il n’y a qu’une explication au lourd silence des Joffrin, Fressoz, Apathie, Barbier, Jeudy, Calvi, politologues de tout poil et éditorialistes de toute domesticité : le livre les dérange. Il dérange leur monde, leurs liens, leurs asservissements, leurs idées, leur subordination. Car Crépuscule n’y va pas de mainmorte. Dans l’entreprise, non pas de démolition, mais d’élucidation qu’il mène à propos du système macronien, il décrit avec précision les plus ou moins subtiles façons dont quelques oligarques — au premier rang desquels Xavier Niel, copropriétaire du Monde et de L’Obs, Bernard Arnault, propriétaire d’Aujourd’hui-Le Parisien et des Échos, Patrick Drahi, propriétaire (jusqu’à il y a peu) de Libération, de L’Express et de BFM-RMC —, dont quelques oligarques, donc, ont organisé la résistible ascension de leur brillante marionnette, Emmanuel Macron, en usant et abusant de leurs valets médiatiques. Signer une recension de Crépuscule dans un de ces désolants médias serait donc soit s’exposer à une douloureuse censure interne ou à quelque vicieuse réprimande, soit se livrer à des contorsions tartuffiennes dont ce qui reste d’honneur à l’un ou l’une de ces plumitifs leur interdit le ridicule de s’y livrer...

    • Fascinante campagne de délégitimation en cours dans les rédactions parisiennes, où les chefs justifient la non-couverture de Crépuscule, en tête des ventes, en inventant pêle-mêle séjours en HP, fortune cachée et autres délires que l’Express avait oublié de recenser.

      La première tentative d’éviction de l’espace social bourgeois, « l’enquête » de l’Express qui, suivant de quelques jours mon signalement par le pouvoir auprès de la justice, avait plongé dans les tréfonds de mon adolescence pour tenter de m’éliminer, n’avait rien donné.

      Alors sont venues les salissures pures et dures. Après l’accusation en homophobie, puis celle encore plus risible de néofascisme, on a basculé sur la question de l’intégrité personnelle, ironisant sur le RSA, harcelant pour alimenter l’excitation,multipliant les rumeurs infondées

      Ce qui est formidable, c’est que ça confirme mot pour mot le propos de l’enquête, qui dénonce un marché de l’information vérolé au sein du petit Paris, où tout est bon pour défendre ses intérêts. Les petits vassaux à la manoeuvre ont une source dont ils prétendront être déliés.

      Cela aurait pu suffire dans l’ancien monde, effrayant les grands éditeurs parisiens, de Laffont à Fayard (dont on appréciera la dernière compromission avec Emelien, et ce plan comm’ délirant organisé avec Lagardère... pour rien). Mais cela n’a, cette fois, pas suffit.

      Car les gens sont lassés. Lassés d’être instrumentalisés et manipulés. Lassés de voir que dès que quelqu’un a le courage de dénoncer les manœuvres de ceux censés les diriger, celui-ci se trouve immédiatement stigmatisé. Cette leçon, c’est Assange qui le premier me l’a partagée.

      A l’Elysée, d’où proviennent en fait ces rumeurs, l’heure est à la machination. La stratégie d’étouffement ne prenant pas, les faux comptes créés pour me harceler restant sans effet (coucou @winniah), le conseiller presse de Macron, commence à s’énerver.


      Leur obsession, s’assurer que l’ouvrage ne pénètre pas l’espace social bourgeois, quitte pour cela à tout détruire, commence à vaciller. La technique qui, depuis des décennies fonctionnait, l’omerta médiatique accompagnée de campagnes de dénigrement, se prend un mur violent.

      Eux qui sont arrivés au pouvoir en jouant de ces jeux de corruption passive, échange d’informations et de services qui vous permettent pas à pas de vous élever au prix de la vérité, se voient pris à contre-pied et savent plus comment avancer.

      Les chiffres parlent d’eux-mêmes : le livre est un carton. L’ouvrage, enfin publié, arrive à point nommé pour faire jonction entre ceux qui ne supportaient plus d’être instrumentalisés et ceux qui sont enfin prêts à leur donner les clefs.

      Ce qui ne leur était jamais arrivé, c’est-à-dire qu’un petit soldat du système gardant des entrées partout et continuant donc de recevoir les intox qu’autrefois ils s’amusaient à faire circuler, les rend fou. Eux qui complotent en permanence cherchent à me descendre.

      Les premiers concernés crient au complot, et continuent de comploter. Quelques erreurs seront peut-être signalées. Mais les mois d’enquête qui ont nourri ce livre, mes navigations allant de leurs amantes à leurs cousins en passant par leurs amis et employés, s’imposeront.

      Et cette vérité, publiée malgré leurs immenses résistances, ne pourra plus être étouffée. Pour la première fois, quelqu’un qui avait accès à leur espace intime, si violemment protégé jusqu’alors, vient de rompre les digues qui jusqu’alors les protégeaient.

      Le livre, dès lors restera, et la violence avec laquelle ils le recevront les humiliera. Chaque pas qu’ils feront, contre eux se retournera.

      A leurs entrailles, celles d’où ce texte est né. A ces entrailles, que ce texte achèvera.
      https://www.actualitte.com/article/livres/comment-les-fortunes-de-france-auront-invente-emmanuel-macron/94137
      https://twitter.com/anatolium/status/1114190000873201664

    • J’aime beaucoup les « checks news » de Libé. La première idée qui me vient quand je lis celle de ce matin, c’est qu’on ne peut pas avoir le beurre et l’argent du beurre. Autrement dit : on ne peut pas écrire un livre qui dénonce la censure et en même temps s’étonner ou communiquer sur cette censure une fois le livre sorti. Sauf que cette affaire mérite développement. J’en suis partie prenante, dans la mesure où j’ai aidé Juan à publier son livre. Dans la mesure où j’en ai écrit la préface. Dans la mesure où je touche un pourcentage sur les ventes. 2% jusque 40000. 3% au-delà. On pourra donc objecter que ce que j’écris est orienté et sujet à caution. Sauf que non. Mais vous n’êtes pas obligé de me croire. Sauf que je ne suis pas Juan. Là, vous êtes obligé de me croire. Et que je suis même en désaccord sur certains aspect de son (formidable) manuscrit. Ceux qui ont lu ma préface me comprennent. Ceci étant, je note que Juan, contrairement à ce qu’induit le texte, n’a pas directement invoqué une censure. Il parle « d’ostracisation » et évoque des interventions de la direction de plusieurs journaux quand des journalistes (de base) ont proposé un sujet le concernant. Plusieurs titres sont cités, de Mediapart au Quotidien, de l’Obs à Paris Match, de RTL à RMC… Juan ne mégote pas. Je ne vais pas les reprendre un à un. Mais pour avoir été le témoin et l’intermédiaire dans deux de ces histoires, je ne peux, contrairement aux cris d’orfraie poussés par mes congénères, qu’accréditer les propos de Juan. Effectivement, pour deux de ces titres, des journalistes -enthousiastes et préoccupés par le fait que le livre est en tête des ventes depuis trois semaines sans une ligne dans leurs journaux- ont proposé des portraits critiques sur le livre et sa saga et se sont faits jeter par leur rédaction en chef. C’est un peu parole contre parole. Et comme ces journalistes sont aussi des salariés, difficile d’aller plus loin… Peut-on pour autant parler de censure ? Non. D’autocensure ? Ben même pas. De connerie, d’erreur monumentale, d’absence totale de professionnalisme ? Euh, oui. Assurément. Dans les arguments qui, en coulisse, sont opposés pour ne pas évoquer le livre, j’ai entendu tout et son contraire. Style ampoulé, jargon de normalien, militantisme politique, aveuglement, mélenchonisme, absence d’infos, amalgames insupportables, erreurs à chaque page, etc… Pourquoi pas ? Mais dans ce cas, messieurs les non censeurs, qu’attendez-vous pour les écrire ces foutus papiers ? Qu’attendez-vous pour inviter Juan et le démonter, lui dire où il se plante ? Qu’attendez-vous pour en débattre ? Un dernier argument est opposé : « On ne va pas en plus lui faire de la publicité ». Ultime idiotie qui -elle- se pose là. Il suffit de regarder le classement data de Libé ce matin pour noter que « Crépuscule », en tête des ventes toutes catégories, n’a pas besoin de publicité. Ce serait même de la contre publicité que ces journalistes disent du bien (ou du mal) du livre. On peut surtout relever -et si j’étais à leur place, j’en serais inquiet- que le livre vit parce qu’ils n’en parlent pas. Surtout ne rien demander Juan, ne s’offusquer de rien. Individuellement, on peut entendre – d’Edwy Plenel à Bruno Jeudy, d’Yves Calvi à Olivier Truchot- ce que chacun dit. Ce qui fait sens pourtant, c’est l’effet de masse et cette très cruelle réalité. Cruelle pour eux, pas pour nous. « Crépuscule » dénonce le lien endémique, financier, de subordination entre ces stars du journalisme ou de la parlote avec leurs patrons ou sponsors. Il pose un problème de liberté publique, de détournement démocratique. Maintenant, relisez ce check news et entendez leur cacophonique défense : « On n’a pas le temps, on n’a pas que ça à foutre, maintenant qu’il a dit des méchancetés sur nous on ne va pas l’inviter, on est encore libre d’écrire ce qu’on veut, c’est pas parce que Xavier Niel nous file de la thune qu’on ne va pas le mettre en cause, etc… ». Je ne sais pas vous, mais moi je me dis que plus ils parlent, plus ils s’enfoncent. Laisse pisser Juan…

      Denis Robert

      https://www.liberation.fr/checknews/2019/04/13/juan-branco-a-t-il-ete-censure-par-plusieurs-grands-medias-francais_17210

      https://twitter.com/anatolium/status/1117022023270785026

    • Pour moi c’est très simple le Duc Geofrey de Lannerie faisant partie intégrante du système corrompu se fait le complice du macronisme car il va de soi que lui est un véritable « progressiste » qui se bat contre les « éléments de langage d’une perception fascisante »…
      Sans aucun doute il déborde d’intelligence et a choisi son camp.
      https://blogs.mediapart.fr/juan-branco/blog/140419/sur-le-fascisme-de-crepuscule-reponse-pascale-fautrier
      https://twitter.com/gdelagasnerie/status/1117028284984954886
      JB empêche tout le monde de dormir... https://www.facebook.com/deniroro57/posts/10155953902006960
      https://twitter.com/Denis_Robert_/status/1117566310043590656

    • Autant le dire d’entrée de jeu : j’ai de la sympathie pour Juan Branco, non pas parce qu’il a été mon étudiant à Sciences Po mais parce qu’il vise juste, pour Assange comme pour l’oligarchie française. Je dis bien « viser » parce que c’est cela qui semble insupportable à ceux qui voudraient qu’on se contente de parler de « structure » ( effets structurels), de « système », tous discours fort nobles et savants mais qui ne permettent jamais de nommer l’ennemi. Déjà parvenir à nommer la finance ( et non l’Europe, la mondialisation, l’individualisme ou je ne sais quoi sans parler des immigrés ou des illuminati), c’est déjà un bel effort que j’avais conseillé en 2003 dans mon bouquin « déboussolés de tous les pays » et en suivant Attac. Regardez tous les discours qui se débrouillent pour ne jamais mentionner la finance, et vous savez d’emblée que ce sont des discours qui organisent l’impuissance. Faiblesse de l’analyse et impasse du programme d’action.

      Dans le cas de Juan Branco, Crépuscule ( que j’ai lu dans sa version en ligne) permet de cibler des personnes, c’est-à-dire d’arrêter de jongler avec des abstractions comme l’oligarchie ou la caste, ou le 1% etc., et de donner les noms des personnes en chair et en os qui organisent cette politique de prédation massive des richesses et de confiscation du pouvoir. Mais ça , ça ne fait pas très poli, pas très convenable, parce qu’après tout, ces gens-là, dans l’entre-soi parisien, on va les côtoyer sur un plateau télé, dans une brasserie célèbre et on ne peut pas leur cracher à la gueule quand même... La bonne éducation des plus critiques finit par paralyser tout le monde et surtout par empêcher de nommer, de cibler. Or, il faut nommer, « name et shame » est la seule stratégie, celle qui reste aux plus faibles avant la violence directe. Et on voudrait leur enlever ça ? et on voudrait rapporter cela à des paroles d’avant guerre fascisantes ? Mais la guerre est commencée, elle est même gagnée comme disait Warren Buffett en parlant de la lutte des classes , gagnée par les ploutocrates. Mais non, en fait, elle continue. Et le levier de la réputation est essentiel, car toute l’économie financière repose sur des jeux de réputation amplifiés par le numérique qui mesure tout cela jusqu’à l’obsession. M. Feher l’a montré, on cherche tous des investisseurs, on vit tous à crédit, Macron le premier, devenu le larbin de ceux qui ont investi dans sa candidature. Et si on lui « fout la honte », internationalement (avec les Champs démolis), auprès de ses copains, si on met à jour ces connivences, comme le fait Juan Branco, oui, sa réputation en prend un coup.

      C’est aussi ce qu’Assange a toujours fait. Mais là, même rengaine, la personne n’est pas très convenable, regardez sa « déchéance » : voilà comment le libéralisme autoritaire organise le discrédit, casse la réputation et rend impossible toute solidarité traitée comme complicité, de quel crime d’ailleurs si ce n’est d’avoir saboté la réputation des menteurs et des tricheurs qui gouvernent ? Donc, oui il faut faire avec des personnes, en chair et en os, bien vifs comme dirait Damasio, qui donc ont des aspérités, des débordements, et ne sont pas toujours « dans la ligne » (je croyais les partis disqualifiés pour ça précisément), mais qui au moins osent nommer et humilier, car c’est bien le but , oui, humilier la caste qui nous gouverne, lui casser sa réputation, elle qui passe son temps à le faire avec les gilets jaunes que l’on traite de tous les noms.

      La bataille de la réputation est clé dans notre société de crédit généralisé en réseaux, il ne faudrait pas la perdre en sabotant la réputation de ceux qui sont au front contre une oligarchie qui a des noms et des visages désormais ( au cas où on l’aurait oublié !) grâce à Juan.

      Dominique G Boullier

    • Il s’agit d’un excellent commentaire 15/04/2019 14:35 Par Dominique G Boullier en réponse à Pascale Fautrier :
      https://blogs.mediapart.fr/pascale-fautrier/blog/140419/crepuscule-de-j-branco-un-pamphlet-fascisant-reponse-geoffroy-de-lagasnerie/commentaires
      https://blogs.mediapart.fr/pascale-fautrier/blog/140419/crepuscule-de-j-branco-un-pamphlet-fascisant-reponse-geoffroy-de-lag
      https://seenthis.net/messages/774715 @sombre

      Dominique Boullier, sociologue français né à Rennes en 1954, rédacteur en chef de la revue Cosmopolitiques, professeur des universités est spécialiste des usages du numérique et des technologies cognitives.
      Il a mis en place durant l’année 2015 à la Fondation Maison des Sciences de l’Homme un séminaire sur les « sciences humaines et sociales troisième génération » qui rassemble des chercheurs soucieux de comprendre ce que le Big Data fait aux sciences sociales. L’invention de la société puis de l’opinion doivent être complétées par l’invention d’une théorie des répliques (ou vibrations en anglais) capables de traiter les traces innombrables désormais collectées sur les plates-formes du web. La comparaison avec l’époque de Durkheim et le triomphe des statistiques pour penser « la Société » (première génération) et avec l’époque de Gallup et le lancement des sondages pour produire « l’Opinion publique » (seconde génération) permet de fixer les tâches nécessaires pour produire une nouvelle convention pour la réinvention d’autres sciences sociales, qui complètent les précédentes.

  • Francis Dupuis-Déri : « Les hommes sont en crise dès que les femmes avancent vers plus d’égalité et de liberté » - Libération
    https://www.liberation.fr/debats/2019/02/01/francis-dupuis-deri-les-hommes-sont-en-crise-des-que-les-femmes-avancent-

    Quelle que soit l’époque, quel que soit le lieu, la règle semble immuable : dès que les femmes s’affranchissent un tant soit peu des rôles qui leur sont assignés, les hommes se déclarent perdus, déstabilisés, en danger… Le chercheur québécois déconstruit ce mythe qui est avant tout une manipulation rhétorique pour préserver la domination masculine.

    • Francis Dupuis-Déri : « Les hommes sont en crise dès que les femmes avancent vers plus d’égalité et de liberté »
      Erwan Cario, Libération, le 1 février 2019
      https://www.liberation.fr/debats/2019/02/01/francis-dupuis-deri-les-hommes-sont-en-crise-des-que-les-femmes-avancent-

      Quelle que soit l’époque, quel que soit le lieu, la règle semble immuable : dès que les femmes s’affranchissent un tant soit peu des rôles qui leur sont assignés, les hommes se déclarent perdus, déstabilisés, en danger… Le chercheur québécois déconstruit ce mythe qui est avant tout une manipulation rhétorique pour préserver la domination masculine.

      Qui a écrit : « Les femmes sont devenues si puissantes que notre indépendance est compromise à l’intérieur même de nos foyers, qu’elle est ridiculisée et foulée aux pieds en public » ? Non, pas Eric Zemmour, mais Caton l’Ancien, en 195 avant J.-C., alors que les Romaines se mobilisaient contre une loi leur interdisant de conduire des chars et de porter des vêtements colorés. Le polémiste réac, lui, constatait en 2006, dans son ouvrage le Premier Sexe, que « face à cette pression féminisante, indifférenciée et égalitariste, l’homme a perdu ses repères ». Vingt-deux siècles n’ont donc pas suffi pour que l’homme, le pauvre, trouve sa place dans une société par trop féminisée. Dans son dernier essaila Crise de la masculinité, autopsie d’un mythe tenace, qui sortira jeudi en France (Editions du remue-ménage), Francis Dupuis-Déri, professeur de science politique à l’Université du Quebec à Montréal, est remonté aux origines de ce discours pour mettre en lumière ses rouages antiféministes.

      Comment cette crise de la masculinité se définit-elle à travers les âges ?

      C’est tout à fait cyclique, avec une intensification en période de crise politique ou économique. Mais elle a toujours à peu près le même canevas et elle est portée par des hommes qui occupent des positions privilégiées. Il y a cinq siècles, par exemple, au sein des cours royales, en Angleterre et en France, le roi, des évêques et des intellectuels considèrent que les hommes de la cour commencent à avoir des comportements efféminés. En parallèle - et c’est toujours comme ça avec ce discours de crise -, les femmes ne restent pas à leur place. Elles empiètent sur des domaines qui sont considérés comme masculins. C’est très élastique, cela va des modes vestimentaires et des coiffures aux métiers réservés aux hommes, en passant par la vie intime, et comment se comportent les conjointes. Cette crise concerne donc, à une époque donnée, la perception des hommes et la perception des transgressions des femmes. A partir de là, on déclare que les hommes sont déstabilisés, en danger, désespérés, perturbés, perdus, parce qu’ils n’auraient plus de modèle. C’est une rhétorique qui porte fondamentalement sur la différence entre les sexes, elle réaffirme une opposition sociale, une opposition économique, une opposition politique. On veut surtout réaffirmer une suprématie masculine dans ces domaines.

      La crise de la masculinité, c’est donc avant tout une mécanique d’autodéfense pour la domination masculine ?

      Tout à fait. On pourrait faire l’exercice avec d’autres discours de crise. D’une manière générale, quand on dit qu’il y a une crise, on appelle à l’aide et on identifie la source du problème qui doit être neutralisée. Quand c’est un incendie ou une inondation, il n’y a pas de débat politique quant à la nature de la menace, mais quand il s’agit d’un sujet social, culturel, économique ou politique, ça oppose des groupes, des catégories ou des classes entre elles. Dans ce cas-là, donc, les hommes appellent les autorités à agir en leur faveur.

      Le problème n’est donc pas la masculinité en crise, mais les femmes qui cherchent à s’émanciper…

      C’est un des multiples registres des discours antiféministes. Certains vont parler de l’ordre divin qui impose telle répartition des rôles, d’autres auront un discours plus nationaliste, axé sur la natalité, comme à la fin du XIXe et au début du XXe où, en France, il fallait des enfants pour la prochaine guerre. On peut aussi avoir de l’antiféminisme à l’extrême gauche, quand on établit que l’ennemi principal, c’est le capitalisme et que le féminisme divise les forces syndicales ou ouvrières. Ma thèse, c’est donc que la crise de la masculinité est une forme rhétorique spécifique qui s’exprime quand les femmes avancent collectivement vers plus d’égalité et de liberté.

      Ce discours de crise connaît-il une grande variation dans le temps et selon les pays ?

      Je suis politologue et, au quotidien, je travaille surtout sur des pays comme la France, le Québec, un peu les Etats-Unis. Quand j’ai projeté d’approfondir le sujet, je suis allé voir les collègues en histoire et j’ai voulu sortir de l’Occident pour voir ce qui se passe ailleurs. Et, des deux côtés, cela a été pour moi une découverte, basée sur le travail d’autres chercheuses et chercheurs. J’ai été complètement éberlué par ce que je trouvais : ça se répète presque toujours à l’identique, dans l’histoire et sur toute la planète. Sur cinq cents ans, en Occident, à des époques où l’égalité n’était pas d’actualité, et aujourd’hui dans des pays où on ne peut soupçonner une prise de contrôle par les féministes, comme la Russie, le Qatar, ou certains pays d’Amérique latine ou d’Asie, le masculin est toujours en crise. Cela peut presque suffire pour établir qu’il y a quelque chose de fallacieux là-dedans.

      Comment est définie cette masculinité en crise ?

      Ce sont toujours un peu les mêmes clichés et les mêmes raisonnements circulaires. Ce sont d’immenses généralités qui cherchent des références hors contexte, que ce soit Dieu qui nous a faits comme ça, ou la nature, avec la chasse au mammouth et la préhistoire, ou la biologie, avec la taille des crânes. Selon qui parle et où on se trouve, il y aura toujours une bonne explication. Et les femmes sont toujours comme on veut qu’elles soient : douces, passives, attentives, attentionnées, surtout pas combattantes, car la compétition est évidemment une caractéristique masculine. Ce qui est inquiétant dans cette conception, c’est que s’il y a un conflit entre les deux sexes, on annonce déjà qui va gagner, puisque le combat et la force ne sont que d’un seul côté. Le comble de l’absurde, c’est qu’on va finir par associer le principe même de l’égalité à la féminité et celui de la hiérarchie et de la structuration organisationnelle à la masculinité. Donc l’égalité provoque mécaniquement une crise de la masculinité, ce qui est incroyable au niveau politique, et ce qui ne laisse pas beaucoup d’espoir.

      Vous expliquez que le discours actuel de la crise de la masculinité prend naissance dans les années 60 avec l’apparition de groupes d’hommes proféministes…

      C’est surtout en termes de réseaux et d’organisation que ça se passe, ce ne sont pas nécessairement les mêmes individus. A cette époque, les féministes radicales s’organisent en groupes de conscience où elles se retrouvent, en non-mixité, à déconstruire leur propre socialisation. Elles commencent d’ailleurs à critiquer sérieusement les réseaux d’extrême gauche comme étant machistes et sexistes. Mais dans ces réseaux, il y a des hommes solidaires qui se disent « qu’est-ce qu’on peut faire pour soutenir ce mouvement ? ». Par effet de mimétisme, ils vont créer des groupes, non mixtes, d’hommes très progressistes en solidarité avec le mouvement féministe. Le problème c’est que, rapidement, ils commencent à développer des discours de moins en moins solidaires avec les femmes et de plus en plus préoccupés par leur nombril. Ils commencent par retourner la réflexion sur eux-mêmes, dans une perspective antisexiste, en parlant du système d’oppression des normes patriarcales sur les hommes. Rapidement, ils vont parler de leurs ex, de leurs conjointes, de leurs mères, etc. Les hommes proféministes vont finalement se retrouver minoritaires. A partir de ce moment, certaines organisations vont commencer à parler uniquement de la question de la paternité. On finit, dans certains congrès, par avoir des ateliers pour trouver un bon avocat ou un bon détective privé destinés aux pères divorcés en conflit au sujet de la garde de leur enfant.

      Sur quoi se base le discours de crise aujourd’hui ?

      Les époques induisent des problématiques particulières. Dans ma recherche, j’ai isolé quatre axes. Le premier, c’est que les hommes ne peuvent plus séduire car les femmes ont pris le contrôle de la sexualité. Le deuxième, c’est la question du suicide des hommes qui est, par exemple, très présente au Québec depuis dix ou quinze ans. Le troisième concerne les difficultés scolaires des garçons, et on termine avec la question de la pension alimentaire et de la garde des enfants qui est directement liée à la question des violences conjugales. En effet, certains prétendent que les femmes « instrumentalisent » ces violences pour obtenir la garde et affirment qu’il y a une symétrie dans la violence entre les sexes, même si celle des femmes serait avant tout « psychologique et verbale ».

      Comment expliquer la facilité avec laquelle ce type de discours se propage ?

      On a l’impression, en surface, que tout ça relève du sens commun. Les gens sont convaincus qu’il y a une crise de la masculinité. On le voit sur les blogs, sur les commentaires d’articles en ligne, ce sont toujours les mêmes arguments qui reviennent. Il est possible très facilement de les déconstruire. Sur l’éducation, par exemple, les inégalités économiques jouent un rôle beaucoup plus important sur la réussite que le sexe des élèves. J’ai découvert, par ailleurs, une citation de John Locke au XVIIe siècle qui se plaint que les garçons réussissent moins bien en apprentissage des langues que les filles…

      Concernant le suicide, on peut remonter à la fin du XIXe siècle et l’étude de Durkheim, où il trouvait, déjà à l’époque, un taux de suicide environ trois fois plus élevé chez les hommes que chez les femmes.

      Vous écrivez que ce mythe est « ridicule et risible, absurde et faux, scandaleux et dangereux »…

      Je voudrais appuyer le terme « dangereux », car c’est un mot que j’ai pesé quand je l’ai écrit. Ce discours de la crise de la masculinité peut aller dans certains cas jusqu’à la glorification de l’assassinat et des meurtres de masse de femmes pour se venger de cette crise qu’elles feraient subir aux hommes, comme avec les attentats en Amérique du Nord des involontary celibats, les incels (1), qui vont jusqu’à tuer car ils n’auraient pas eu une sexualité qui leur reviendrait de droit. Il faut aussi toujours déconstruire ces discours sur la symétrie des violences, car on voit même, aux Etats-Unis, des plaintes déposées contre les refuges pour les femmes victimes de violences, en expliquant que c’est discriminatoire car il n’existe pas d’équivalents pour les hommes, et demandant la fin des subventions.

      Finalement, vous dénoncez le mythe et le discours, mais vous l’attendez, cette crise…

      Si on est dans une société injuste, inégalitaire, dominatrice, si on veut mettre en acte des principes de solidarité, d’égalité et de liberté, on ne peut qu’espérer une crise. Et une vraie, cette fois !

      (1) Le dernier en date remonte au 23 avril 2018, à Toronto. Il a fait 10 morts et 14 blessés. Son auteur, Alek Minassian, a publié sur Facebook un message évoquant « la rébellion des incels ».

      #Francis_Dupuis-Déri #Hommes #Femmes #domination_masculine #masculinité #paywall

  • Quand l’#histoire chante un air #populaire (#Gérard_Noiriel)
    https://grozeille.co/quand-lhistoire-chante-un-air-populaire-gerard-noiriel

    « Le populaire dans tous ses états »
    https://noiriel.wordpress.com

    je me situerais moi-même suivant un troisième profil qui a été historiquement incarné par des sociologues comme #Durkheim ou #Bourdieu, #Foucault également. C’est d’ailleurs de lui que vient la formule pour le nommer : « intellectuel spécifique ». Je conçois donc mon engagement dans la mesure où je ne me contente pas de produire des connaissances, chose que je suis censé faire suivant ma profession d’enseignant-chercheur. J’essaye aussi de transmettre les connaissances que j’ai produites, dans un langage adapté à des publics qui ne sont pas spécialistes. Beaucoup de chercheurs restent dans la sphère universitaire : ils sont ce que j’appelle des « savants purs ».

    Je trouve cela très clair dans un passage où Bourdieu explique pourquoi, dans les années 1970, les syndicats privilégiaient les revendications salariales. En disant « j’ai mal au salaire » au lieu de dire « j’ai mal partout », ils cherchaient à unifier, grâce au langage, les souffrances multiples qui affectent les classes populaires. Au XVIe siècle par contre, les classes populaires ne disaient pas « j’ai mal au salaire » mais « j’ai mal à la foi ». La Réforme 3 ouvre la voie à toute une série de révoltes qui, si elles n’expriment pas forcément un malaise chrétien, passent par les canaux religieux.

    Ce qui se passe dans la sphère domestique, c’est très important. Dans mon livre sur le clown Chocolat, j’avais essayé de montrer que, dès qu’on rentre dans la sphère domestique, on rentre aussi dans une logique de familiarité. Les catégories construites rationnellement et intellectuellement explosent : vous ne verrez plus seulement des « races » : le nègre, ou le noir, ou le juif, parce que vous faites face à une personne qui est définie par de multiples critères. C’est là où je suis en désaccord avec d’autres courants de la recherche sur ces questions : ce qui compte pour moi, ce sont les individus, « la société des individus » comme disait Norbert #Elias. De ce fait, je pars aussi de la diversité des critères identitaires. Chacun d’entre nous est le produit de nombreux critères identitaires qui se combinent différemment à chaque fois. Si l’on ne s’intéresse qu’à l’un d’entre eux, on tombe dans le piège de l’essentialisme. Essentialisme que l’on retrouve autant dans l’extrême droite que dans l’extrême gauche identitaire. J’ai donc choisi de parler de ces formes paradoxales de résistance plutôt que d’autres formes plus connues, comme le marronnage (fuite d’un esclave hors de la propriété de son maître).

    J’étais content de voir que Jürgen #Habermas, dans un texte que j’ai lu il y a peu, disait qu’au lieu d’être « ni de droite ni de gauche », il fallait que les partis se repositionnent clairement sur les deux pôles qui structurent le champ politique. Car cette tendance au « ni de droite ni de gauche » a correspondu à une évolution malheureuse de la sociale-démocratie en Europe : Schroeder en Allemagne, Tony Blair en Angleterre. Ces gens-là ont repositionné la gauche du côté du libéralisme. Je crois qu’on est en train de sortir de cette phase. Même une fraction du capitalisme se rend compte qu’on va droit dans le mur. C’est qu’il y a aussi des tensions internes au capitalisme, les dominants ne sont pas tous unis, ils ont des intérêts divergents ! Et donc il y a des opportunités qui peuvent s’avérer positives pour ceux qui aspirent à ce que le monde change et soit moins injuste…

  • L’#habitus pour les nuls : plonger dans un lycée élitiste pour comprendre (enfin) de quoi parlait Bourdieu

    Si la notion d’habitus vous a souvent intimidé ou collé la migraine quand on cite Bourdieu ou même Durkheim, découvrez le #documentaire de #Julie_Gavras au #lycée parisien Victor Duruy, qui donne à voir des réussites scolaires ou des façons de parler comme des héritages limpides.


    https://www.franceculture.fr/sociologie/lhabitus-pour-les-nuls
    #élite #France #éducation #enseignement #lycée_Victor_Duruy #Paris #film

    • Les bonnes conditions

      Pendant près de quinze ans, la réalisatrice Julie Gavras a suivi huit adolescents des quartiers chics. Un portrait par l’intime des futures élites, à rebrousse-poil des #stéréotypes.

      Ils sont enfants de bijoutiers, de publicitaires ou de directeurs financiers. Nés avec une cuillère en argent dans la bouche, ils en ont aussi les #problèmes spécifiques : pression de la réussite, exemple intimidant de leurs parents, activités extrascolaires chronophages… Quelle est la part de #déterminisme_social dans leurs pensées, leurs #aspirations, leur quotidien ? Que leur a-t-on transmis, que veulent-ils perpétuer ? Pendant près de quinze ans, Julie Gavras a suivi d’anciens élèves du lycée Victor-Duruy dans le très chic 7e arrondissement de Paris, accompagnée d’Emmanuelle Tricoire, leur professeure d’histoire-géographie. De leurs 16 ans jusqu’à la veille de leurs 30 ans, la réalisatrice les a retrouvés chaque année, de 2003 à 2016, pour consigner leurs confidences, donnant à voir – de l’intérieur – une facette de la reproduction des élites.

      Premières fois
      D’une durée exceptionnelle, le tournage a favorisé le rapport de confiance et le libre cours de la parole, permettant de filmer au plus près ces « primo-arrivants » dans la vie active. D’où la variété des portraits, bienveillants sans être complaisants, intimes sans voyeurisme. À travers eux, le documentaire donne à voir cette décennie déterminante de la vie, période universelle des « premières fois » : amours, voyages, appartements, travail... Chaque fragment de vie s’insère dans un puzzle, dessinant peu à peu les contours d’une classe sociale aisée, rarement représentée à l’écran de façon juste. Tout autant miroir d’une époque, avec ses tendances et son contexte particulier, ce travail de longue haleine s’attaque aux stéréotypes et se regarde comme une saga miniature, ménageant un certain suspense : seront-ils fidèles à leur « bonne condition » ?

      https://www.arte.tv/fr/videos/066346-000-A/les-bonnes-conditions
      #classes_sociales #reproduction_sociale #adolescence #héritage #bourgeoisie

  • À quoi sert l’analyse des controverses ?
    https://www.cairn.info/revue-mil-neuf-cent-2007-1-page-191.htm

    Initiée par les science studies une seconde approche consiste à voir dans les processus de dispute des phénomènes sui generis et, plus précisément, des actions collectives conduisant à la transformation du monde social. Affaires, scandales, polémiques et controverses sont envisagés ici comme des « moments effervescents » au sens de Durkheim ou, si l’on préfère, comme des occasions pour les acteurs sociaux de remettre en question certains rapports de force et certaines croyances jusqu’alors institués, de redistribuer entre eux « grandeurs » et positions de pouvoir, et d’inventer de nouveaux dispositifs organisationnels et techniques appelés à contraindre différemment leurs futures relations. Le chercheur qui se place dans cette perspective insiste sur la dimension performative ou, pour mieux dire, instituante des processus conflictuels qu’il étudie, se préoccupant finalement moins de ce qu’ils peuvent lui révéler d’une structure préexistante réputée avoir été leur cause que de ce qu’ils engendrent, qui ne leur préexistait pas, et de la façon dont ils l’engendrent. La question qu’il introduit au cœur de son enquête devient la suivante : que fait le processus conflictuel aux acteurs et aux institutions qui s’y impliquent ? Que fait-il à l’ordre social ou socio-technique lui-même ? Comment les change-t-il ?

  • Durkheim’s types of suicide and social capital: a cross-national comparison of 53 countries.
    http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/issj.12111/full?hootPostID=d1c5d15899f9ee77d9e275cd04bf3d8e

    Abstract
    Emile Durkheim conceptualised four types of suicide depending on the level of regulation and integration of society. Many studies have been conducted using his types of suicide as a model. Recently, social capital has produced a wide range of studies examining the benefits that the concept has to social and economic outcomes in a community. Durkheim’s conceptualisation of egoistic, altruistic, and anomic suicide may be viewed as different forms of social capital. The current analysis examines Durkheim’s different types of suicide using a social capital model. The findings demonstrate that suicide increases in countries where the individual is too integrated into society (altruistic suicide) and decreases in countries where the individual does not feel part of society (egoistic suicide). The findings illustrate that social capital can increase or decrease suicide depending on the amount of social capital present in the country.

    • C’est quand même assez ahurissant qu’il n’y ait pas un mot sur la fiabilité et la comparabilité des données pour les 53 pays étudiés !

      La question se pose en général pour la fiabilité des #causes_de_décès mais avec encore plus d’acuité pour le #suicide.

      cf. p.ex. Eurostat

      Les causes de décès - Statistics Explained
      http://ec.europa.eu/eurostat/statistics-explained/index.php/Causes_of_death_statistics/fr

      • dans la partie spécifique (c’est moi qui graisse) :

      Bien que le suicide ne soit pas une cause de décès majeure et que les données de certains États membres de l’Union puissent être faussées par une sous-déclaration, il est souvent considéré comme un indicateur important de problèmes, auxquels la société doit s’intéresser.

      • dans les remarques générales sur les sources

      La validité et la fiabilité des statistiques sur les causes de décès dépendent, dans une certaine mesure, de la qualité des données fournies par les médecins qui établissent les certificats. Plusieurs facteurs peuvent être à l’origine d’imprécisions, parmi lesquels :
      • les erreurs éventuelles lors de la délivrance du certificat de décès,
      • les problèmes liés au diagnostic médical,
      • la désignation de la cause principale du décès,
      • l’encodage de la cause du décès.

    • On ne peut que renvoyer à ce constat (de 2002) :

      The registration of causes of death : Problems of comparability | SpringerLink
      https://link.springer.com/chapter/10.1007/978-94-017-3381-6_8

      Abstract
      Cause-of death statistics are usually available in tables which present for some items of the International Classification of Diseases (ICD) annual numbers of deaths by age and sex. Most of the research on mortality by cause is based on these tables which are published by the National Statistical or Medical Institutes as well as by WHO. Very few studies take into account the previous steps of elaboration of cause-of-death statistics to evaluate the quality of the data production from the death of an individual to the addition of one more death in the specific cell of a table.

      Les deux premières pages du chapitre (de 20 pages) sont consultables sur ce site

      Meslé F. (2002) The registration of causes of death : Problems of comparability. In : Wunsch G., Mouchart M., Duchêne J. (eds) The Life Table. European Studies of Population, vol 11. Springer, Dordrecht

      https://doi.org/10.1007/978-94-017-3381-6_8

  • Janvier 2017.
    L’Europe à l’épreuve du populisme
    PDF : file :///C :/Users/REVE011/Downloads/InstitutOpenDiplomacy-Populisme-VoyGillisBonati%20(1).pdf

    Le XIXe siècle fut celui des Nations, le XXe celui des totalitarismes et des démocraties. Le XXIe sera-t-il celui des populismes, notamment en Europe ? La crise de la représentation politique, la forte abstention, le sentiment de déclin, la peur des migrations, le contexte géopolitique sont autant d’éléments qui peuvent le laisser supposer.
    Le populisme, « mot-valise », désigne une réalité difficile à cerner. Il ne correspond pas à une doctrine cohérente – à l’opposé par exemple du communisme ou du socialisme. Aussi, le problème est davantage ce qui rend possible le populisme, que le populisme lui-même. Le populisme représente davantage un « syndrome » (Wiles 1969[1]), qui opère par simplification du monde, ou encore, telle la dialectique ami / ennemi chère à Carl Schmitt[2], par opposition et dichotomie.
    Quoi qu’il en soit, le populisme est l’expression « politique » de ceux qui souffrent, ou pour reprendre Durkheim (1928)[3] – à propos certes du socialisme – leur « cri de douleur ». Les partis populistes (ou « contestataires », pour employer une terminologie plus neutre) constituent désormais la principale forme d’opposition politique.
    Les résultats des dernières élections en France, en Autriche et en Italie montrent une progression des partis populistes en Europe. Généralement, ces partis sont plutôt classés à l’extrême-droite de l’échiquier politique. Ils portent souvent un message commun sur les questions migratoires et d’identité, et formulent une critique commune des élites nationales et européennes. En parallèle de la progression de ces partis, on constate également la croissance de partis plus inclassables comme le Mouvement 5 Etoiles en Italie. A contrario, en Amérique du Sud, la notion de populisme est souvent rattachée à des partis et des mouvements de gauche ou d’extrême gauche.
    Le terme populisme semble devenu à la mode pour qualifier – voire discréditer – les représentants politiques qui se positionnent en marge du système actuel et le critiquent. Il est devenu si galvaudé que personne n’est vraiment en mesure de le définir. Face à ce constat, plusieurs questions méritent d’être soulevées : qu’est-ce que le populisme ? Quelle typologie des partis pouvons-nous faire ? Les partis d’extrême-droite ou de droite radicale présentent une unité de façade dans les discours : quels sont leurs points d’accord et leurs divergences ?

  • Cachez ces #inégalités que je ne saurais voir - Une heure de peine...
    http://uneheuredepeine.blogspot.fr/2017/10/cachez-ces-inegalites-que-je-ne-saurais.html

    Mais le plus étrange est que, même si l’on prend cet exemple dans le sens que lui prête B&G, on se demande bien où est la #sociologie dans cette histoire. Faut-il croire que les enfants de l’immigration non-asiatique sont abreuvés de Bourdieu à la maison ? Les parents lisent-ils Bernard Lahire à leurs enfants pour les endormir le soir ? Font-il un pèlerinage annuel sur la tombe de Durkheim ? Ecrivent-ils « l’ennemi principal » sur le dos de leurs blousons ? Ce que l’exemple permettrait éventuellement de montrer, c’est qu’il n’y a guère besoin des explications sociologiques pour croire au « #déterminisme » : en faire l’expérience quotidienne, par les interactions avec l’école, par la « matérialité du monde » comme disent les sociologues pragmatiques (étonnamment absents de l’ouvrage, alors qu’ils constituent l’un des courants les plus importants de la sociologie française...), par l’expérience pratique que l’on acquiert semble bien suffisant. Si les acteurs perçoivent le monde où ils vivent comme plus ou moins fermé, plus ou moins déterminé, c’est sans doute moins à cause de la sociologie que du fait de la vie qu’ils mènent, de l’expérience qu’ils ont du monde qui les entoure. Qu’ils ne soient pas des « idiots culturels », la sociologie s’en est précisément rendue compte depuis un certain temps...

    Mais surtout la mobilisation de cet exemple pose une question grave quant aux conséquences que l’on pourrait tirer du bouquin de B&G, et révèle peut-être un enjeu plus profond et non explicité. En effet, en disant que présenter un « récit déterministe » risque d’avoir un effet performatif (risque qui, comme je viens de le montrer, n’est guère convaincant), B&G amènent naturellement à penser qu’il vaudrait mieux taire l’existence de ces déterministes, fussent-ils simplement probabilistes. Que la mobilité sociale soit faible est sans doute plus marquant que de savoir si cela s’explique par les différences de capital culturel - à la Bourdieu - ou par les stratégies rationnelles des acteurs - à la Boudon (Boudon qui, d’ailleurs, est à mon sens encore plus « fataliste » que Bourdieu puisqu’il ne laisse littéralement aucun échappatoire, toute tentative pour favoriser l’égalité des chances étant destinée à échouer du fait des calculs rationnels des acteurs...). De fait, ce qui est, si l’on suit le raisonnement de B&G, gênant, c’est que la sociologie mette à jour l’existence de ces inégalités, beaucoup plus que comment elle les explique. Et on en vient à avoir deux auteurs, sociologues de profession, déclarant aimer et vouloir défendre leur discipline, défendant la science et la neutralité axiologique, qui viennent suggérer qu’il ne faudrait pas parler d’un résultat scientifique comme le niveau de mobilité ou de reproduction sociale au nom de... au nom de quoi finalement ? D’un « politiquement correct », d’une « bien pensance », d’une croyance aveugle dans l’égalité des chances qui, bien que statistiquement fausse, scientifiquement irrationnelle, serait préférable pour les acteurs à la connaissance.

    « Cachez ces inégalités que je ne saurais voir » : pris au sérieux, c’est à cela que mène le raisonnement de B&G. Parler des inégalités, dire leur existence, dire que les chances ne sont pas égales, serait au pire une mauvaise chose, au mieux un savoir qu’il faudrait réserver à une petite élite, celle qui un jour se lancera dans des études de sociologie ou de sciences sociales et qui, alors, sera peut-être prête à recevoir ce secret qui brûlerait les yeux et les oreilles des profanes. Il m’est difficile de savoir si c’est là une intention des auteurs ou un simple « effet émergent » ou « pervers » (je suis taquin) de leur positionnement. Mais il y a là un problème à soulever.

  • « Un mathématicien aurait-il plus de valeur qu’un historien ou un artiste ? »
    http://www.lemonde.fr/campus/article/2017/10/18/arretons-cette-suprematie-de-la-filiere-scientifique-au-lycee_5202720_440146

    On peut se demander si le bagage scientifique permet réellement de s’adapter à tous types de filières. Moi-même, cet été, je me suis posé cette question. Ayant été admis dans une filière pluridisciplinaire centrée sur les sciences économiques, sociales et juridiques, après un baccalauréat économique et social, quelle ne fut pas ma surprise de découvrir que je devais rattraper certains points du programme de terminale S en mathématiques, tandis que dans le même temps, les élèves issus de cette même terminale S n’avaient, eux, absolument aucun rattrapage à faire en économie ou en sociologie.

    Inimaginable d’entrer dans ce type de filières sans connaître les formes indéterminées des limites de fonctions en maths, mais normal d’y entrer sans connaître Bourdieu, Durkheim ou Keynes ? Je m’interroge toujours. Malgré la diversification toujours plus importante des parcours scolaires proposés et les déclarations de l’éducation nationale sur le fait que toutes les filières se valent et offrent de multiples débouchés, il existe toujours une hypocrisie au sein même du système scolaire.

    Nouvel exemple personnel : lors du troisième trimestre de ma seconde, avec la meilleure moyenne générale de la classe, j’étais le seul élève au-dessus de 13 de moyenne à demander la filière ES. La proviseure du lycée, s’étonnait : « Il ne veut vraiment que ES ? », alors même qu’elle déclarait quelques semaines auparavant devant des parents d’élèves qu’il « n’existe aucune hiérarchie des filières, que chacun doit choisir en fonction de ses goûts et pas parce que telle ou telle filière est réputée d’excellence ». Cette réaction traduit parfaitement à quel point cette hiérarchisation est ancrée dans le système éducatif et caricature bien l’idée selon laquelle les « bons » élèves devraient devenir mathématiciens ou ingénieurs.

    Comme de nombreux étudiants que j’ai rencontrés au cours de mes études, je pense qu’il faut en finir avec cette vision des choses. En finir avec l’admiration béate que l’on voue à la « rigueur », à l’« esprit de synthèse et de logique » qu’offre la filière scientifique, et valoriser à leur juste niveau les compétences diverses qu’offrent les autres filières.

    Le dicton populaire a coutume de dire « il n’y a pas de sot métier ». Il serait désormais temps de l’appliquer au système scolaire et de montrer, une fois pour toutes, qu’« il n’y pas de sotte filière ».

    cc @heautontimoroumenos
    Au passage je mentionne que les filières scientifiques sont celles discriminant le plus les filles et les femmes. D’ou les nombreuses initiatives "femmes et mathématiques"

    • Merci pour cet article avec un témoignage très pertinent.

      Malgré la diversification toujours plus importante des parcours scolaires proposés et les déclarations de l’éducation nationale sur le fait que toutes les filières se valent et offrent de multiples débouchés, il existe toujours une hypocrisie au sein même du système scolaire.

      J’ai été confronté à ça récemment via mes enfants. En fin de 3ème, le discours des officiels côté collège comme côté lycée est la « diversité » des parcours et surtout les « passerelles ». Je suis ressorti enchanté, persuadé que les choix d’orientation seraient moins engageants qu’à mon époque. Sauf que ce discours n’est pas confirmé par les profs des établissements qui disent qu’en ’vrai’ il faut toujours le bon parcours, les bonnes options, la bonne filière voire le bon établissement. Pire : plusieurs jeunes de ma connaissance qui ont suivi un bac L CAV se retrouvent en difficulté à l’entrée des écoles d’audiovisuelles en raison de leur niveau en sciences et voient que les S répondent davantage aux critères de sélection alors même qu’il n’y a pas d’option CAV en S. Ils se retrouvent à faire des stages de remise à niveau (payants) pendant les vacances. On nage donc en pleine hypocrisie.

      La remarque sur le « genre » des filière n’est pas anodine.
      On peut ajouter aussi que pour contrer cette hypocrisie, il faut la décoder, avoir les « bonnes » infos et donc être un ’insider’ d’où une sélection sociale qui ne dit pas son nom.

      Le dicton populaire a coutume de dire « il n’y a pas de sot métier ». Il serait désormais temps de l’appliquer au système scolaire et de montrer, une fois pour toutes, qu’« il n’y pas de sotte filière ».

      Comme pour certains liens postés récemment, on trouve l’idée qu’il faut changer l’école pour changer la société, ce qui n’est pas faux, mais qui fait l’impasse sur le fait qu’il va bien falloir changer la société si on veut changer l’école. En effet, si ’pour de vrai’ il n’y avait pas de « sots métiers » ou considérés comme tels par la société, les questions d’orientations au sein du système scolaire seraient moins tendues.
      Il y a une schizophrénie constante à reporter sur le monde scolaire ce qu’on est incapable de porter dans la société, pour ensuite reprocher à l’école de n’être pas en phase avec celle-ci. Exemple, cette histoire de bienveillance dans un monde hyper-compétitif qui ne l’est pas du tout.
      Évidemment tout ça ne dédouane en rien le système scolaire et ceux qui y sont.

    • Je confirme pour l’audiovisuel. C’est même écrit dans un document d’information remis à ma fille par son lycée : Poursuites d’études avec un bac S= formations d’audiovisuel (sic) .
      Dans ce lycée les options arts-plastiques, théâtre et cinéma sont proposés aux....L.
      Cherchez l’erreur.

  • Sociologie : le danger de la (pseudo) neutralité | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/culture-idees/071017/sociologie-le-danger-de-la-pseudo-neutralite?onglet=full

    Par Joseph Confavreux

    Gérald Bronner prétend, dans son dernier livre, Le Danger sociologique, vouloir sauver la sociologie, au nom de la (neuro)science et de la neutralité idéologique. Son refus d’en faire un « sport de combat » cache plutôt une volonté de la transformer en exercice de soumission à l’ordre existant.

    Dans ce nouveau livre, abondamment relayé dans les médias, les auteurs développent une stratégie pernicieuse consistant, sous couvert de défendre la sociologie, prétendûment menacée par l’idéologie et le manque de scientificité, à tout faire pour lui couper les ailes, en la sommant de renoncer à sa dimension critique et de se soumettre au nouvel impérialisme neuronal.

    La charge politique est d’autant plus forte que les auteurs accusent « le récit sociologique déterministe » de « déresponsabiliser les individus qui acceptent d’en être les accueillants destinataires » et de les « condamner à une forme de prophétie auto-réalisatrice ». Par un étrange retournement, les sociologues qui s’attachent à mettre en lumière les ressorts de l’ordre existant se trouvent ainsi accusés d’aggraver les inégalités ! Mais les auteurs ne s’arrêtent pas en si bon chemin, puisqu’ils jugent la sociologie de Bourdieu responsable de la montée du complotisme, en estimant qu’il « existe un continuum cognitif ou, si l’on veut, une pente glissante, entre la convocation inconséquente d’entités collectives, le biais d’agentivité, le finalisme, les arguments du cui prodest (à qui profite le crime) et les théories du complot ».

    Mais sous la plume de Bronner et Géhin, cette volonté de transformer la sociologie, jugée défaillante, grâce à l’apport des neurosciences pose au moins deux problèmes majeurs. En premier lieu, cette volonté de solliciter la biologie pour comprendre la vie sociale de l’homme est tout sauf nouvelle, alors qu’elle se présente comme un parangon de modernité ; ensuite, elle est aussi tout sauf neutre, contrairement à ce qu’elle prétend. Les neurosciences sociales ne sont en effet que l’ultime avatar d’une longue lignée de travaux visant à étudier le comportement humain et, en particulier, sa vie en société, comme celui d’un animal biologique, dont l’histoire est problématique.

    Si l’on s’interdit ainsi de comprendre que le tout n’est pas que la somme des parties, et que le social n’est pas la simple juxtaposition d’interactions bilatérales entre individus, on plonge dans un réductionnisme où les notions d’institutions, d’agencement collectif, de contrats ou de structures sociales n’entrent pas en ligne de compte. À ce titre, Gérald Bronner et Étienne Géhin s’apparentent à des Margaret Thatcher des sciences sociales, convaincus, comme la Dame de fer, que « there is no such thing as society ». Un paradoxe, pour des chercheurs qui revendiquent encore le titre de sociologues…

    #Sociologie

    • oui et merci @bug_in d’avoir souligné ce texte, j’étais passé à coté.
      Les #neurosciences sont en pleine action de nuisance tout azimutes en ce moment (transhumanisme, sexisme, classisme). Cette tendance réactive le naturalisme sociale du XIX et c’est impressionnant mais malheureusement pas étonnant de voire à quel point ceci est promu partout dans les médias dominants.

      L’aspect scientifique de ces études dites neuroscientifique est bien plus discutable que les études sociologiques. La sociologie étudie de grands ensembles pour en faire des statistiques et voire apparaître les systèmes (ce que les #neuroscientistes appellent « complot »), alors que les neuroscientistes scannent deux abrutis chopé à la sortie d’une fac et font de ces résultats des lois sois disant biologiques indiscutables lorsque ca valide l’ordre sociale de leur agenda politique.

    • Je ne partage pas la critique de cette manière. Je pense juste que les études en neurosciences mises en avant sont surtout extrapolés dans un contexte d’analyse libérale, au lieu d’en rester stricto-sensu a un cadre descriptif qui révélerai par ailleurs surtout que nous savons peu de chose sur le fonctionnement du cerveau.

    • Oui mais celleux qui n’extrapolent pas et disent qu’ils ne savent rien sur le cerveau et refusent que leur travail servent à de la politique, c’est pas celleux qui s’attaquent à la sociologie et dont on parle ici. Par rapport aux pseudo neurosciences sur le genre que je connais mieux vu le décryptage fait par Odile Fillod sur le sujet cf http://allodoxia.blog.lemonde.fr , c’est pas de l’extrapolation des medias vulgarisateurs ou des politiques, c’est vraiment des pseudoscientifiques misogynes et homophobes qui veulent prouvé biologiquement la hiérarchie sociale.

    • Gérald Bronner dans une interview au Figaro :

      Le titre est à double sens. La sociologie est une science en danger. Certains discours qui émanent de la sociologie, qui ne sont pas représentatifs des avancées scientifiques, sont devenus envahissants dans l’espace public. Mais la sociologie est aussi un danger, lorsqu’elle devient une idéologie et qu’elle produit des effets de déresponsabilisation dans la société. Ce que nous voulons dire dans notre livre, c’est tout simplement que la sociologie ne doit pas être « un sport de combat » (selon le titre d’un documentaire dédié à Bourdieu), mais une science. La vocation de la sociologie doit être modeste. Elle ne doit pas se donner une mission politique. Par exemple, elle n’a pas pour ambition de réduire les inégalités, mais de démontrer qu’il existe des inégalités. La science démontre que la terre est ronde et pas plate, elle n’a pas à dire si c’est bien ou mal ! En tant que citoyens, nous sommes porteurs de valeurs, mais ce n’est pas le rôle de la sociologie de les porter ! La neutralité axiologique, c’est la liberté par rapport aux valeurs.

      Le point de vue de Frédérique Lordon :

      En plus d’être celle des marrons, l’automne serait-il également la saison des petits pâtés éradicateurs-scientistes ? 2016 nous avait gratifiés du « négationnisme économique » de Cahuc et Zylberberg qui entrait incontestablement dans la catégorie, avec même, disons-le, une légère tendance à la déjection. Sans aller jusque-là, 2017 sera-t-elle, avec Bronner et Géhin, l’année de la sociologie — ou disons de la sociologie du Point ?

      Économistes nettoyeurs ou sociologues de régime, dans les deux cas les épistémologues du dimanche sont lâchés. Pour l’économie, ça n’avait rien d’une nouvelle. Nous savons maintenant que ça « gagne ». En réalité c’est moins une affaire de disciplines différentes que d’inclinations communes à déclarer, au nom de la science, toute contestation de l’ordre social égarée, et ce dernier, partant, irréprochable. Avec bien sûr tout ce que cette folle prise de risque emporte de justes rétributions matérielles et symboliques — jusqu’à toucher la main du roi.

      On voit sur Internet des montages mettant en vis-à-vis des portraits de Bourdieu et de Gérald Bronner, énorme blague suggérant qu’il pourrait y avoir le moindre plain-pied, même polémique, entre celui qui fut peut-être le plus grand sociologue du XXe siècle et l’ambianceur sociologique du macronisme et de la presse de droite. Car c’est là toute l’ironie d’une opération qui, finalement semblable à celle des économistes de 2016, et identiquement compromise avec tous les pouvoirs temporels, n’hésite pourtant pas à donner des leçons de « neutralité axiologique », ce lieu commun épistémologique dont la date de péremption ne peut normalement pas excéder la fin d’un L2, et qui veut faire croire que les sciences sociales ont pour règle quasiment morale de demeurer dans une parfaite virginité politique. Cette façon particulièrement indigente de poser le problème — lui réel et profond — des rapports de la science sociale et de la politique n’a en réalité pour fonction que d’orchestrer la dénonciation du « biais » des autres — « idéologique » bien sûr. Quant à la neutralité, de Cahuc-Zylberberg à Bronner, qui pourrait avoir à l’idée de poser la moindre question ? : toute leur trajectoire parle pour eux…

      On notera au passage, et peut-être sans surprise, la remarquable convergence en cette matière de la sociologie médiatique et du discours médiatique lui-même, l’antinomie des « sociologues scientifiques » et des « sociologues militants » faisant parfaitement écho à celle, signée du chef Décodeur, des « journalistes neutres » et des journalistes… « militants ». Quand un sociologue se met à avoir l’épistémologie spontanée du Decodex, il est normalement temps de commencer à se poser quelques questions...

      http://blog.mondediplo.net/2017-10-13-Le-Nobel-l-economie-et-les-neurosciences
      #sociologie_du_Point #sociologues_de_régime

    • Un article sur Acrimed :
      http://www.acrimed.org/Le-Point-et-Pour-la-science-mettent-de-l-ordre

      La thèse des auteurs est simple : la sociologie est une discipline gangrenée par des courants de pensée qui feraient prévaloir des a priori idéologiques sur toute considération scientifique. Principalement visés, et boutés hors-la-science : Bourdieu et ceux qui s’en inspirent, ainsi que tous les tenants d’une sociologie critique. Mais emportés par leur élan, les auteurs disqualifient aussi Durkheim – considéré pourtant comme l’un des « pères fondateurs » de la sociologie – et plus largement tous les chercheurs – soit l’essentiel d’entre eux – proposant des explications proprement sociales aux phénomènes sociaux – c’est l’hydre « déterministe » –, plutôt que d’en faire des produits des conduites individuelles. De leur côté, Bronner et Géhin entendent (re)fonder empiriquement la sociologie autour des neurosciences et de la psychologie expérimentale. Un diagnostic et un positionnement scientifique qui les placent à la marge du débat académique et de la communauté des sociologues.

  • Le suicide, une question sociale
    https://www.franceculture.fr/emissions/avoir-raison-avec-emile-durkheim/le-suicide-une-question-sociale

    Ceux qui ne connaissent rien à Durkheim connaissent son ouvrage sur le Suicide. Connaissent ou croient connaître, car ce tour de force scientifique ne se laisse pas aisément approcher. Ecrit il y a plus d’un siècle, il a profondément influencé notre vision, non pas seulement de la mort volontaire, mais plus généralement de la société. Aujourd’hui, il peut même nous aider à penser des phénomènes qui se situent au cœur de l’actualité, à l’instar des attentats suicides.

    #suicide #Durkheim #radio

  • L’école des soignant.e.s : Pourquoi je vais continuer à défriser un certain nombre de #médecins - par Martin Winckler
    https://ecoledessoignants.blogspot.fr/2017/07/pourquoi-je-vais-continuer-defriser-un.html

    J’ai entendu beaucoup d’enseignants déclarer « Je le fais », mais aucun dire « Tout le monde le fait ». Car ils savent que tout le monde ne le fait pas. Affirmer par conséquent « On n’enseigne plus la médecine comme ça » n’est pas seulement inexact, c’est aussi se fourrer le doigt dans l’oeil jusqu’au coude. Le biologiste Robert Trivers appelle ça Self Deception et a écrit un livre passionnant sur le sujet. (Traduit en espagnol, en italien et en allemand.)

    La #digitoendooculopraxie (activité consistant à se fourrer le doigt dans l’oeil) est un acquis évolutif indispensable à notre survie : mieux vaut croire que le bruit dans le buisson est produit par un lion plutôt que par le vent. Dans le premier cas on s’écarte pour rien ; dans le second on risque de servir de repas.

    Mais elle contribue aussi - et c’est plus regrettable - à la survie des systèmes de pensée les plus arbitraires. Il est très difficile d’admettre que la personne à qui on fait confiance est une brute. C’est pour cela que beaucoup d’enfants battus ne luttent pas contre, voire défendent leur parents batteurs. Il en va de même pour les médecins éduqués violemment par leurs maîtres. Reconnaître qu’ils ont été violentés ça peut être très déstabilisant : ça veut dire qu’on a respecté des brutes et qu’on a appris son métier de ces brutes.

    Il est de plus très périlleux de remettre en question l’institution dont on fait partie. J’ai rencontré un certain nombre de profs de faculté rebelles (y compris pendant mes études) mais aucun n’avait la vie facile. Et ils étaient une minorité. Critiquer l’institution c’est en être éjecté ou rester marginalisé.

    L’absence d’esprit critique concerne les membres de toutes les institutions élitistes : les grandes écoles, l’armée, l’Eglise, les sectes, les clubs exclusifs... Et les institutions fermées ont furieusement tendance - et intérêt - à se reproduire.

    Alors, prétendre que les facultés de médecine françaises ne sont pas (plus) élitistes et se sont transformées en parangon de bienveillance au cours des quarante dernières années, c’est... désarmant.

    • Mon commentaire sur le site :

      Les réflexes corporatistes ont toujours de grandes convergences avec le trollisme de bas étage.
      Puisqu’on ne peut pas argumenter posément, attaquons le messager pour balayer d’un revers de la main le message et surtout, surtout n’en discutons pas, n’y réfléchissons jamais.

      Je me souviens d’un généraliste à Paris qui soignait tout le monde et tout en prescrivant du chocolat. Certes, c’était un cas isolé, comme on dit. Mais ce qui m’inquiétait, malgré la relative innocuité de son obsession (relative, parce qu’il n’est pas dit qu’il n’aurait pas drastiquement compromis l’espérance de vie de quelques patients diabétiques ou autre), c’est que le gus continuait d’exercer depuis des années sans que jamais que les confrères ou les institutions en charge de la santé s’en émeuvent.

      Si mon prescripteur de chocolat était une exception, l’omerta autour des mauvais médecins, elle, semble la règle. Or, je suis toujours très dubitative envers toute profession qui refuse de faire le ménage chez elle.

      Et que dire quand la répétition d’un problème indique qu’en tout été de chose, nous n’avons plus affaire à des cas isolés, des exceptions, mais bien à des comportements qui font système et qui ne viennent pas de nulle part ou de la faute à pas de chance.

      Il y a 120 ans, Durkheim fondait la sociologie française en démontrant que le suicide — considéré jusque là comme un acte profondément individuel et relevant de la psychologie — était un fait social, c’est à dire quelque chose de global qui fait agir les individus en dehors de leur conscience propre.

      Quand il y a un obèse pour 2000 personnes, on peut parler de phénomène individuel, de pas de chance, mais quand l’obésité touche 10% de la population, on peut alors parler de fait social, d’une convergence de mode de vie, de conditions sociales et sanitaires communes et néfastes.

      De la même manière, quand tomber sur un médecin bienveillant n’est pas la norme, une question de chance, que pour certaines populations de patients (gros, femmes, homosexuels et trans, etc.), la maltraitance est la norme, alors, il est temps de reconnaitre que les fondements de la profession sont mauvais et font système.

      Et ne parlons pas des questions qui fâchent vraiment comme la iatrogenèse !

    • C’est vrai que ce texte de Winckler est une réponse à 40 ans de troll.
      Je relève la partie sur la Iatrogénèse car j’avais jamais entendu parlé de cette spécialité médicale. Y a t’il des medecins spécialistes dans cette branche ou est-ce seulement une approche de chercheurs ?

      Car soigner impose aussi de soigner le mal qu’on peut être amené (à tort ou à raison) à provoquer soi-même. Ca s’appelle la #iatrogénie - les maux provoqués par les traitements médicaux - , et c’est bien étudié depuis longtemps, mais très peu enseigné aux premiers concernés.

      #troll #victimisation #deni_du_dominant #maltraitances_médicales #deni #caste #corporatisme

    • @mad_meg Normalement tous les professionnels de santé suceptibles de prescrire/délivrer des médocs sont formés sur la iatrogénèse (aka effets et interactions entre médicaments). Cela suppose de se tenir au courant (donc continuer à se former, de façon indépendante...) et poser les bonnes questions aux patients...

    • Merci pour les précisions @alexcorp mais du coup la iatrogènèse semble ne pas prendre en compte les facteurs psychologiques comme décrits dans le texte de Winckler.

      sinon ce matin il y a ceci :

      Violences obstétricales : des gynécologues contestent les chiffres de Marlène Schiappa

      La secrétaire d’Etat chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes avait affirmé, jeudi, que le taux de recours à l’épisiotomie atteignait 75 % en France.

      http://www.lemonde.fr/sante/article/2017/07/24/violences-obstetricales-des-gynecologues-contestent-les-chiffres-de-marlene-
      Pour rappel Israël Nisand est un un grand habitué des prises de position misogynes :
      https://seenthis.net/messages/607291
      https://seenthis.net/messages/606906
      https://seenthis.net/messages/544819
      https://seenthis.net/messages/60888
      https://seenthis.net/messages/57801

    • J’ai vu que bcp de médecins veulent soigner des patients bien portants.
      Ce qui est déjà grave.
      Mais en fait, non.
      Bcp de médecins vont rendre malades des gens bien portants.
      Juste pour exister par l’exercice de leur pouvoir, du pouvoir de leur ignorance.

      Tant que la connaissance ne sera pas partagée, tant qu’on croira ces charlatans, et tant que le patient ne sera pas écouté et ne prendra pas assez confiance en lui pour exprimer son ressenti.

    • @mad_meg Concernant l’impact psychologique je ne pense pas que cela soit spécifique à la iatrogénèse, cela devrait irriguer en permanence le cerveau de tout soignant que de prendre en compte la psychologie de ses patients, quel que soit l’origine des troubles (maladie ou effets secondaires de médicaments). Bon, tout le monde n’est pas Martin Winckler malheureusement...

  • Destin d’un sociologue dans la Grande Guerre
    http://www.laviedesidees.fr/Destin-d-un-sociologue-dans-la-Grande-Guerre.html

    Robert Hertz, disciple de Durkheim, est tombé au front le 13 avril 1915. Sa #correspondance avec sa femme Alice a permis à Nicolas Mariot de suivre au jour le jour son chemin vers le sacrifice suprême. Hertz avance ses raisons : il est juif, socialiste, sociologue. Mais elles ne suffisent pas à comprendre comment le piège se referme lui.

    Livres & études

    / #guerre_mondiale, #sociologie, correspondance, #judaïsme

    #Livres_&_études

    • Le concept d’état général me paraît effectivement aussi tordu que ce que tu dis du chat... Utiliser le concept d’etat de manière transhistorique, pour en faire un synonyme d’institution politique, voire de société, semble n’avoir pas d’autre objectif que de créer une distanciation critique artificielle avec la critique libertaire de l’état... Et fonctionne alors comme un anti-concept : jetter le flou
      , rendre confus plutôt que de préciser, d’outiller la réflexion...

    • Le concept d’état général me paraît effectivement aussi tordu que ce que tu dis du chat... Utiliser le concept d’etat de manière transhistorique, pour en faire un synonyme d’institution politique, voire de société, semble n’avoir pas d’autre objectif que de créer une distanciation critique artificielle avec la critique libertaire de l’état... Et fonctionne alors comme un anti-concept : jetter le flou
      , rendre confus plutôt que de préciser, d’outiller la réflexion...

      Sur la critique dont tu proposes le lien, elle me paraît s’enliser, de la même manière que lordon lorsqu’il pretend « asticoter » les anarchistes, dans une caricature dont la virulence passionnée fait perdre en pertinence ce qu’elle obtient d’impertinence... Les réactions épidermiques que produit lordon, proportionnelles, comme il se doit, à son audience, semble devoir produire en retour le même type de malhonnêteté intellectuelle plus ou moins inconscientes et d’approximations qu’il convient de reprocher à lordon. Pour exemple, réduire a un simple keynésien quelqu’un qui defend la fermeture de la bourse, un défaut generalisé sur les dettes nationale, etc, ou qui justifie et légitime émeutes et insurrections, plus que de mettre en lumière le fond d’un désaccord réfléchi, apparaît plutôt comme l’esquive d’un véritable affrontement. Terrible tactique de l’homme de paille, celle la même que l’on doit lui reprocher lorsqu’il pense s’en prendre aux libertaires.
      J’ai personnellement bien plus apprécié la critique de bachet sur imperium : http://www.revue-ballast.fr/frederic-lordon-au-chiapas

    • Pseudo conceptualisation de l’Etat (général), de la nation, et... de l’horizontalité/verticalité, puisqu’après avoir posé une conception de l’horizontalité comme absolue et pure, il déduit qu’il y a toujours verticalité (donc Etat...) dans une société, celle-ci désignant alors aussi bien les hiérarchies sociales actuelles que les formes traditionnellement désignées comme horizontales ou autogestionnaires (mandat impératif et revocable, etc), allant jusqu’à dire, apparemment, qu’il y a verticalité dès qu’un groupe partage une idée : la verticalité ne qualifiant plus un rapport hiérarchique entre humains, mais aussi un rapport a une idée...

      Pour autant, dire qu’il n’y a pas chez Lordon de critique de l’Etat (dans sa forme actuelle, donc), du travail, ou encore de remise en cause sérieuse du capitalisme, est loin d’être exact, pour ne pas dire plus. On peut bien sûr considérer que sa critique est insuffisante ou déficiente, mais c’est autre chose.
      Dans l’entretien ici partagé :

      "l’État présent doit être dépassé pour deux raisons profondes. En premier lieu, il a – c’est là sa caractéristique historique – profondément partie liée au capital. Sortir du capitalisme suppose donc de sortir de l’État du capital. Il n’y a pas de sortie du capitalisme pensable au sein de la forme « État du capital ». En second lieu, il est une puissance séparée si lointaine que ses effets d’asservissement passent les bornes. Il se trouve que le tournant autoritaire, pour ne pas dire plus, du néolibéralisme un peu partout en Europe, mais spécialement en France, tombe assez bien pour aider à former le désir d’une autre forme d’État, c’est-à-dire d’organisation du collectif nombreux."

      Sur le travail, le capitalisme et, d’une certaine façon, la valeur (via la propriété lucrative) :

      "Pour en finir avec le salariat comme rapport de chantage, il faut en finir avec la propriété lucrative des moyens de production, or cette propriété est sanctuarisée dans les textes constitutionnels. Pour en finir avec l’empire du capital, qui est un empire constitutionnalisé, il faut refaire une Constitution. Une Constitutions qui abolisse la propriété privée des moyens de production et institue la propriété d’usage : les moyens de production appartiennent à ceux qui s’en servent et qui s’en serviront pour autre chose que la valorisation d’un capital."
      ( https://www.crashdebug.fr/actualites-france/11606-il-faut-cesser-de-dire-ce-que-nous-ne-voulons-pas-pour-commencer-a- )

      Il est devenu de mode de cracher sur Lordon de manière peu rigoureuse, afin de marquer son manque de radicalité et du même geste, de démontrer la sienne... Cela devrait être le fruit d’une véritable lecture critique, faute de quoi l’on tire à côté, et ne demontrons que notre mauvaise foi ou notre mauvaise compréhension. (Il me semble qu’on peut observer le meme phénomène avec b. Friot.)

    • Plutot d’accord. Je visais d’autres types de critiques, notamment celles qui ignorent ou feignent d’ignorer leur positionnements sur la proprieté, qui reduisent Lordon à un economiste contre la finance et Friot à un partisan du revenu de base, par exemple... Ceci dit, parler de société marchande pour qualifier une société sans propriété lucrative, et donc sans accumulation du capital, me fait un peu tiquer.

      Après, j’avoue que je n’ai jamais veritablement saisie clairement les principes économiques autour de la valeur et de la « théorie de la valeur ». Autant « Le manifeste contre le travail » de Krisis m’avais beaucoup plu, et influencé dans mes choix de vie, autant le concept même de valeur à tendance à m’échapper : j’ai toujours l’impression soit que l’on parle du prix d’une marchandise (qui de fait est aujourd’hui tres souvent décorélé du temps de travail moyen nécessaire à sa production), soit de... je ne sais pas quoi, justement.

    • Ouaip, ca me rafraîchi les idées.. Mais aussi ce que je trouve très bancal dans cette conception de la valeur. Comment réduire ce qui fait la valeur, la survaleur et le prix des marchandises au travail abstrait lorsqu’interviennent des subventions publiques (directes ou pas), lorsqu’un même paquet de pâtes (produit dans la même usine) aura un prix différent en fonction de sa marque de distribution ("grande" marque ou marque distributeur par ex), ou encore lorsque le prix du pétrole, qui se répercute partout, depends d’enjeux géopolitiques ? ... Ou lorsque parmi les plus grosses multinationales on compte celles dont la valeur dépend uniquement de nos « données personnelles » et de la vente de publicités ? Que l’on critique la subordination de l’ensemble de nos sociétés et vies a la création de valeur/capital, je suis d’accord, mais réduire cette création de valeur au travail (abstrait), ca me paraît occulter plein de choses (ou bien y a quelque chose qui m’échappe..). Et c’est d’autant plus vrai de nos jours ou la dimension psychologique / sociologique de la consommation est flagrante, que donc la « valeur » subjective/marketing d’une marque définie bien plus le prix d’un produit que ses conditions de production...

      Si je trouve la proposition de friot, consistant a définir la valeur par la qualification, assez détestable en ce qu’elle propose de maintenir la hiérarchie économique (et donc une distortion de la demande, et donc de la production, du travail a effectuer, etc, au bénéfice et selon les désirs/depenses d’une élite ), j’ai tendance à le rejoindre concernant la conception de la valeur qui la soutien : la valeur comme convention sociale, et non pas comme une sorte de substance (travail abstrait) incorporé aux marchandises.

  • « Punir. Une passion contemporaine », audacieuse enquête sur l’emballement carcéral

    http://www.lemonde.fr/livres/article/2017/01/04/surveiller-et-faire-souffrir_5057711_3260.html

    Le sociologue Didier Fassin enquête sur « la passion du châtiment » qui touche le monde entier et sur ce qu’il révèle.

    Voici un ouvrage qui arrive après dix ans de recherches menées sur la police, la justice et la prison, dix années d’études empiriques qui font de Didier Fassin l’un des sociologues les plus au fait du fonctionnement de ces institutions, capable de mener des comparaisons internationales (notamment entre la France et les Etats-Unis), d’analyser des évolutions globales et d’exhumer des logiques souterraines. Dans La Force de l’ordre. Une anthropologie de la police des quartiers, puis L’Ombre du monde. Une anthropologie de la condition carcérale (Seuil, 2011 et 2015), il avait mis au jour la réalité des pratiques masquée par les discours, débusqué les croyances cachées derrière les certitudes.

    Avec Punir. Une passion contemporaine, son nouvel essai, il quitte le genre de l’enquête ethnographique pour un livre d’une autre nature, dont l’ambition est d’« interroger les fondements de l’acte de punir ». Court, resserré, celui-ci manifeste une ambition théorique. Disons d’emblée qu’il faut saluer l’entreprise, tant pour son audace intellectuelle que pour sa portée politique.
    La prison ne sert à rien

    Tout commence par un constat. Celui de la « passion contemporaine » pour le châtiment. Il suffit de regarder les chiffres de l’emballement carcéral. Tous les continents sont touchés par une inflation sans précédent : à titre d’exemple, pendant la décennie 1990, le nombre de personnes sous écrous double en Italie et aux Pays-Bas. L’entrée dans le XXIe siècle change peu la donne : le nombre de prisonniers augmente de 145 % en Turquie, de 115 % au Brésil. A l’échelle planétaire, c’est un fait majeur. Or il y a là un mystère, du moins une inconséquence : la prison ne sert à rien. Pire, elle aggrave la situation. De solution qu’était le châtiment, il est devenu problème, remarque judicieusement Didier Fassin, « à cause du prix qu’il fait payer [aux] familles et [aux] communautés, à cause du coût économique et humain qu’il entraîne pour la collectivité, à cause de la production et la reproduction d’inégalités qu’il favorise, à cause de l’accroissement de la criminalité et de l’insécurité qu’il génère, à cause enfin de la perte de légitimité qui résulte de son application discriminatoire ou arbitraire ».

    Bref, nous traversons un « moment punitif », qui voit une rétorsion inappropriée tenue pour seule issue possible. De cette séquence paradoxale, ni le droit ni la philosophie, disciplines que l’on convoque quand il est question de penser la peine, ne nous disent rien. C’est donc avec elles que le sociologue va batailler. Lui dit « dialoguer » : c’est en effet par un « dialogue critique » avec les définitions juridiques et philosophiques de la juste peine que le livre progresse, en convoquant deux types d’approche. La première est anthropologique (elle consiste à montrer que bien souvent ce qui devrait être n’est pas et que la réalité dément les principes avancés) et la seconde généalogique (elle tente de comprendre « comment on en est venu à punir comme on le fait aujourd’hui »).

    Une cruauté presque archaïque

    Alors, qu’est-ce que punir ? Essentiellement une chose, démontre Didier Fassin : l’infliction d’une souffrance. Cela ne va pas de soi, puisque certaines sociétés ont préféré d’autres formes de réparation. Aujourd’hui, néanmoins, la souffrance est le seul élément de la conception classique de la peine qui résiste à « l’épreuve empirique ». Au lecteur de rentrer dans l’argumentation méticuleuse ici déployée. Nous dirons pour notre part ce qui frappe : cette façon inédite de dévoiler la cruauté. Car personne ne tient vraiment à dénuder le châtiment des justifications juridiques et philosophiques dont il est paré. Quand Didier Fassin le fait, c’est après avoir constaté que « la rationalité n’épuise pas les raisons qui poussent les agents à punir ». Il exhume donc, armé des réflexions de Durkheim et de Nietzsche sur la sanction comme vengeance, une cruauté presque archaïque, « une pulsion, plus ou moins refoulée, dont la société délègue les effets à certaines institutions et professions ». Ça déborde. Et en conséquence, pourrions-nous ajouter, les prisons aussi.

    Sans compter que l’on punit toujours davantage alors même que le nombre de crimes et délits est en baisse. C’est bien à tout cela que se heurte l’idéal de la peine : à son absence de lien avec le taux de criminalité, à sa corrélation (troublante) avec la montée des inégalités, à l’inégale distribution sociale des peines – qui n’est pas un mince chapitre. La prison touche de façon disproportionnée les catégories les plus dévalorisées de la population : « Selon que vous serez puissant ou misérable », selon que l’on cible la consommation de cannabis ou l’abus de biens sociaux… En somme, à l’épreuve de cette puissante lecture ethnographique et généalogique, la peine n’est rien de ce que l’on voudrait qu’elle soit. Elle apparaît comme une manifestation crue de la violence politique à l’œuvre dans nos sociétés inégalitaires.

    Extrait de « Punir »

    « “Celui d’entre nous qui dit qu’il juge uniquement en fonction des faits et du détenu ne dit pas la vérité.” Commentant une série de peines de quartier disciplinaire récemment décidées pour des fautes mineures qui se sont produites dans un contexte de tensions au sein de l’établissement [pénitentiaire], [le directeur adjoint] ajoute que punir les prisonniers, même lorsqu’il est évident qu’ils n’ont fait que répondre aux provocations d’un agent, permet de satisfaire et d’apaiser le personnel : “Ça évite aux surveillants de vouloir se venger sur les détenus”, conclut-il sans ambages. (…)

    En m’en tenant à ces brefs récits, je veux montrer la difficulté de répondre à la question “pourquoi ­punit-on ?” dès lors qu’on est confronté non pas à des dilemmes imaginaires mais à des faits réels. »

    Punir, pages 100-101

  • 60. Economie : Frédéric Lordon, loup ou mouton ?
    http://www.alternativelibertaire.org/?Economie-Frederic-Lordon-loup-ou

    Economie : Frédéric Lordon, loup ou mouton ?
    19 octobre 2016 par Commission Journal (mensuel) / 1537 vues

    Dans son dernier livre, Imperium, Frédéric Lordon se donne pour ambition de « dégriser les libertaires », de leur montrer la voie du « réalisme » et de « l’âge adulte ». Une réponse en défense de l’internationalisme et de l’anticapitalisme radical.

    Frédéric Lordon prétend renouveler la pensée de gauche, en devenant l’intellectuel quasi officiel de Nuit debout. De ce point de vue il amorce de son dernier ouvrage, Imperium, d’une bien étrange façon : en affirmant que le principe de la verticalité est nécessaire dans toute société organisée. Il se réfère essentiellement à la sociologie holiste de Durkheim, selon laquelle, dans une société organisée, le tout est plus que la somme de ses parties, et cette forme de transcendance impliquerait, nécessairement, une verticalité au sein de la société.

    Les normes morales ou légales découlant de cette supériorité du tout sur ses parties, seraient inévitables, nécessaires. Il nie ainsi le fait qu’elles sont le fruit d’une construction autoritaire. L’idée spinoziste d’un « affect commun » rassemblant les individus en société vient compléter l’analyse.
    Caricature de la pensée libertaire

    En considérant que transcendance et verticalité sont indissociables du social, et que transcendance, verticalité, et État sont synonymes, Lordon énonce son axiome : l’État est inévitable dans toute société politiquement organisée. Il appelle « État général » cette entité abstraite propre à toute société, dont l’État républicain moderne en régime capitaliste ne serait qu’une forme particulière parmi d’autres.

    Le problème, c’est que cette notion d’État général est trop floue, non historique. Lordon va jusqu’à supposer que les expériences de communes libertaires auraient elles aussi mis en place des formes d’État, dans la mesure où elles reposaient sur des instances fédérales régulatrices. Il méconnaît ainsi la spécificité des formes politiques libertaires.

    Il pense discréditer la pensée libertaire et sa recherche d’horizontalité pure. Mais il caricature cette pensée, qui admet des formes de verticalité au niveau des fédérations de communes, sans pour autant assimiler ces verticalités à des formes d’État. C’est cela qui manque à Lordon : penser une verticalité qui parte de la base, et qui ne repose plus sur une captation du pouvoir par un État séparé des individus.

  • Commentaires sur le livre de #Frédéric_Lordon : Imperium, Structures et affects des corps politiques
    Suivi de commentaires de #René_Berthier aux objections parues sur Médiapart.

    Frédéric Lordon est une « icône intellectuelle du moment », le « prince de la vie connectée », un « rebelle médiatique » pour ceux qui ne l’aiment pas. Lui-même se décrit comme un économiste « hétérodoxe ». Il veut rapprocher la science économique de la sociologie. Spinoza, le philosophe du XVIIe siècle, lui sert de fil conducteur, ou de grille de lecture, dans ses travaux.
    Le moins qu’on puisse dire est que son dernier ouvrage est dense – un peu trop dense, peut-être, car on en saisit mal le fil conducteur. C’est pourquoi je n’aborderai dans ce commentaire de lecture que quelques aspects des développements de l’auteur, au risque de ne rendre compte que de manière extrêmement partielle de son ouvrage. Dans la mesure où Lordon évoque souvent la « pensée libertaire » – d’une manière singulièrement fragmentaire et déformée – les lecteurs du #Monde_Libertaire ne s’étonneront pas que je m’attarde un peu sur cet aspect de l’ouvrage.
    Ce sont des forces passionnelles collectives qui conduisent les hommes à s’assembler – ce que Frédéric Lordon définit par « imperium », « ce droit que définit la puissance de la multitude ». Lordon remet en cause l’internationalisme, s’en prend à l’« horizontalité », au dépérissement de l’Etat. Il pense que nous sommes condamnés à la « verticalité » et que le pouvoir est voué à être « capté », mais il précise que ce n’est pas une raison pour abandonner le combat pour l’émancipation. Une chose est certaine : Imperium ne servira pas d’ouvrage de référence pour les masses populaires en marche vers leur émancipation, à moins de trouver pour ce livre extrêmement obscur un très bon traducteur.

    http://monde-nouveau.net/IMG/pdf/lordon_bonne_version_05-06-2016.pdf
    http://monde-nouveau.net/spip.php?article616

  • #suicide – Madjid Ben Chikh, Tokyo | Le Blog de Suppaiku
    http://madjidbenchikh.fr/suicide

    Je sais que l’idée de la mort volontaire est une idée contraire à tous les principes moraux du monothéisme, et que le bouddhisme est lui-même très intransigeant à l’égard de la mort volontaire, et pourtant nous sommes environnés de telles violences déclenchées par les activités de nos sociétés qu’il y a là quelque chose de paradoxal, puisque nous donnons la mort à grande échelle à l’aide d’engins de morts qui représentent l’un des secteur économique les plus important, on célèbrera Hiroshima dans quelques jours, et on trouve anormal qu’un individu quitte le monde pour la raison de son choix et au moment de son choix.

    En réalité, la mort volontaire devrait être un sujet de conversation banal, ordinaire, et nous devrions accepter que le suicide ne soit en rien un échec de la société ou un échec social, car il est avant tout un choix individuel.

    • et nous devrions accepter que le suicide ne soit en rien un échec de la société ou un échec social, car il est avant tout un choix individuel

      C’est tellement l’exact contraire de ce qui a été montré par de nombreuses analyses sociologiques mais aussi anthropologiques ! Il y a, ou en tout cas il fut, des sociétés où le suicide était quasiment inexistant. Cette vision de choix individuel est donc une manière toute libérale de parler du suicide.

    • « J’ai plein de copains qui se sont suicidés. Je peux citer un paquet de gens qu’on a connus aux Halles et qui ne sont plus là. Pareil dans ma cité ; des amis d’enfance, j’en ai plus beaucoup. SIDA, suicides, overdoses… C’est ce que tu as quand tu soulèves le rideau d’une petite cité, tranquille. J’en arrive souvent à penser que si l’enfer existe, il est ici sur Terre. On est en plein dedans. Tout être humain qui a de la sensibilité a envie de se foutre en l’air. »

      Helno 1963-1993
      http://fr.wikipedia.org/wiki/Helno#cite_ref-lib.C3.A9_1-0

    • Cela est totalement théorique, le fait est, comme dit précédemment, qu’il y a de multiples sociétés passées et quelques présentes restantes, qui ont été étudiées anthropologiquement ou sociologiquement, et où le suicide n’existe à peu près pas. Et que donc c’est à peu près certain que c’est un fait de société, et non pas un fait individuel de sensibilité, qui vaudrait quelque soit la manière dont on vit au quotidien.

    • Même si on en parlait tous les jours au café, la mort (volontaire ou non), resterait terrifiante, monstrueuse, choquante, impensable. Je trouve maladroit que l’auteur propose d’amoindrir ce qu’est la mort (une démarche très « monothéiste »), en quelque sorte de la banaliser, pour défendre le droit à mourir quand on veut.

      Je ne sais pas si je suis clair, mais on va tous mourir, c’est un fait, et c’est horrible. Il n’y a pas grand chose à dire de plus. Et il n’y aura pas de société capable de produire une moindre mort, une mort « gérée » sans devenir monstrueuse à son tour.

      Je serais assez intéressé par une société capable de nous faire accepter ce fait sans détour, notamment en nous faisant comprendre que c’est la mort qui donne tout son sens à la vie, et que notre mort a donc un sens, que nous sommes libre de choisir. Comme nous sommes libre de choisir le sens de notre vie.

    • L’Etat démocratique de l’époque contemporaine représente une variété tout à fait nouvelle d’inhumanité.

      Stig Dagerman
      L’homme qui va bientôt mourir.
      http://plusloin.org/acontretemps/n12/AC12DagermanTexte.pdf
      http://www.acontretemps.org/spip.php?article193
      Notre besoin de consolation est impossible à rassasier

      Depuis la découverte, en 1981, de ce texte où Stig Dagerman, avant de sombrer dans le silence et de se donner la mort, fait une ultime démonstration des pouvoirs secrètement accordés à son écriture, le succès ne s’est jamais démenti. On peut donc, aujourd’hui, à l’occasion d’une nouvelle édition de ce « testament », parler d’un véritable classique, un de ces écrits brefs dont le temps a cristallisé la transparence et l’inoubliable éclat.

      http://www.actes-sud.fr/catalogue/litterature-etrangere/notre-besoin-de-consolation-est-impossible-rassasier


      #Stig_Dagerman #testament #acontretemps

    • “... Il y a là un problème..."
      Un système fini face à une demande infinie, entretien avec M.F, historien extradisciplinaire et philosophe (≠ expert).
      http://1libertaire.free.fr/MFoucault276.html

      - Comment, en définitive, la Sécurité sociale peut-elle contribuer à une éthique de la personne humaine ?

      – Sans compter tous les éléments de réponse à cette question apportés dans le courant de cet entretien, je dirai qu’elle y contribue au moins en posant un certain nombre de problèmes, et notamment en posant la question de ce que vaut la vie et de la manière dont on peut affronter la mort.

      L’idée d’un rapprochement entre les individus et les centres de décision devrait impliquer, à titre de conséquence au moins, le droit enfin reconnu à chacun de se tuer quand il voudra dans des conditions décentes... Si je gagnais quelques milliards au Loto, je créerais un institut où les gens qui voudraient mourir viendraient passer un week-end, une semaine ou un mois dans le plaisir, dans la drogue peut-être, pour disparaître ensuite, comme par effacement...

      – Un droit au suicide ?

      – Oui.

      - Que dire de la manière dont on meurt aujourd’hui ? Que penser de cette mort aseptisée, à l’hôpital souvent, sans accompagnement familiaI ?

      – La mort devient un non-événement. La plupart du temps, les gens meurent sous une chape de médicaments, si ce n’est pas par accident, de sorte qu’ils perdent entièrement conscience en quelques heures, quelques jours ou quelques semaines : ils s’effacent. Nous vivons dans un monde où l’accompagnement médical et pharmaceutique de la mort lui ôte beaucoup de sa souffrance et de sa dramaticité.

      Je n’adhère pas tellement à tout ce qui se dit sur l’« aseptisation » de la mort, renvoyée à quelque chose comme un grand rituel intégratif et dramatique. Les pleurs bruyants autour du cercueil n’étaient pas toujours exempts d’un certain cynisme : la joie de l’héritage pouvait s’y mêler. Je préfère la tristesse douce de la disparition à cette sorte de cérémonial.

      La manière dont on meurt maintenant me paraît significative d’une sensibilité, d’un système de valeurs qui ont cours aujourd’hui.

      Il y aurait quelque chose de chimérique à vouloir réactualiser, dans un élan nostalgique, des pratiques qui n’ont plus aucun sens.

      Essayons plutôt de donner sens et beauté à la mort-effacement.

    • « La vie est propre à celui qui la vit, avait écrit #Nelly_Arcan. Et s’il est vrai que le suicide est un legs terrible qu’il faut absolument prévenir, c’est aussi vrai que ne pas faire souffrir son entourage ne peut constituer, du moins à long terme, une raison suffisante pour vivre. »

      http://nellyarcan.com/pages/biographie.php
      http://www.lapresse.ca/arts/dossiers/deces-de-nelly-arcan/200909/26/01-905774-le-suicide-a-toujours-ete-son-obsession.php

    • Pour l’instant donner sens et beauté à la mort volontaire est affaire de gens riches et cultivés, sauf les cas de suicides qui se veulent critique en actes (djamal char), sauf dans les suicides homicides, ce dernier cas étant tout à fait le genre de sens et de beauté dont les déshérités et les autres auraient à se passer.
      Et non, il n’y a rien de facile à aller à l’encontre de toutes les saloperies dites sur #Foucault depuis 30 ans (nihiliste, nazi, libéral), ni à celles qui ont été faites à partir d’un renversement de son travail (refondation sociale patronale, à la Kessler Ewald), saloperies dont Michéa et R. Garcia ont proposé des avatars récents à l’usage de « critiques de la critique » auxquels l’antintellectualisme sert de fond de commerce.

      Il suffit de lire pour de bon quelques cours de M.F, dont Il faut défendre la société, Les anormaux, Sécurité, territoires, population pour le savoir inassignable, y compris à une CFDT devenue gestionnaire mais qui continuait de se piquer de réflexion (poser des problèmes nouveaux à nouveaux frais).
      Les attaques du PS au début des années 80 contre le « silence des intellectuels » visaient entre autre M.F dont le pouvoir attendait des arguments à son service.

      M.F dit dans l’entretien en question que la sécu pose des problèmes, pas qu’il va, du haut de son savoir, les solutionner.

      On peut aussi taxer de point de vue aristocratique le fait de se référer implicitement au stoïcisme quant à l’attitude devant la mort, on peut mettre en cause bien des aspects, mais le réflexe actuel de rejet vis-à-vis de Foucault, c’est jouer à faire le malin en adoptant une doxa, sans lire. M.F est multiple. Son Société punitive contredit sur bien des points l’approche qu’il adopte dans Surveiller et punir, publié peu après que le cours sur la société punitive ait été donné.

      Pour revenir au début, japonais, la mort volontaire y est, pour dire vite, à la fois adéquation à une contrainte sociale (honneur) et une preuve de liberté (affirmation). Durkheim (dont l’étude a été fréquemment critiquée depuis sa parution) n’y retrouve pas ses petits (l’anomie) lorsqu’il caractérise le seppuku comme suicide fataliste, dû à la rigueur des contraintes sociales.

      On peut lire à ce sujet, La Mort volontaire au Japon, de Maurice Pinguet.
      Edit. L’article qui ouvre ce fil valorise le « choix individuel », probablement sans avoir connaissance du livre de Pinguet et de ce pan de la réalité japonaise, que les avancées du capitalisme (individualisation) ont du modifier en grand.
      J’ai connu des « suicides communistes », une haute idée de la vie impliquant que le refus d’une vie dégradée se traduise par un acte.
      Parler de « choix individuel » a au moins pour vertu de préserver la part non analysable de tels gestes.

    • Jean-Marc Mandosio
      Longévité d’une imposture - Michel Foucault -
      suivi de Foucaultphiles et foucaulâtres
      #éditions_de_l'encyclopédie_des_nuisances. 2010.

      #J-M_Mandosio est un historien, spécialiste de magie et d’occultisme au Moyen-Âge et à la Renaissance, mais il a publié sur des sujets très divers allant du #Situationnisme de Guy Debord à l’histoire du Rock’n Roll ou (pour simplifier) la #critique_de_la_Technique.

      éditions de l’Encyclopédie des Nuisances en cohérence à leur critique du monde industriel, n’a pas de site Web.
      Mais j’ai trouvé ce blog : http://anniceris.blogspot.fr/2009/07/longevite-dune-imposture-michel.htm qui peut être t’apportera des réponses @colporteur

      saloperies dont Michéa et R. Garcia ont proposé des avatars récents à l’usage de « critiques de la critique » auxquels l’antintellectualisme sert de fond de commerce.

      Je me suis laissé prendre moi aussi par Michéa qui, pour le coup lui, est un imposteur.

    • Les (non)usages du travail de Foucault sont divers, le contre sens n’est pas rare. Exemple : Refondation sociale patronale : L’éthique du bouffon, Valérie Marange
      http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=3183

      Quand le philosophe François Ewald, colégataire de l’oeuvre de Foucault, et son compère Denis Kessler, numéro deux du Patronat, vilipendent en coeur la « démoralisation » contemporaine c’est pour faire l’éloge de l’« économie politique du risque » et du contrat social qui « trouve sa vérité dans l’assurance ». Dans le détournement de la référence à Foucault, l’éthique de la « refondation sociale » patronale se révèle ainsi une véritable éthique du bouffon.

      Un questionnement éthique n’est pas une prescription morale. M.F d’abord historien de la médecine et du pouvoir médical, n’a jamais que je sache pratiqué la prescription.

      Une sociologie foucaldienne est-elle possible ?
      http://www.morbleu.com/une-sociologie-foucaldienne-est-elle-possible/#more-828

      En tant qu’ils sont un savoir, il est tout à fait possible pour le pouvoir de faire un usage aliénant des textes de Foucault – tout comme il existe un usage émancipateur de ces mêmes textes.

      Sur Mandosio, et la grille de lecture anti-historique de l’EDN : DU TEMPS QUE LES SITUATIONNISTES AVAIENT RAISON
      http://lherbentrelespaves.fr/public/edn.pdf

    • L’abus de philosophie
      Comme la randonnée en montagne, la philosophie est une discipline qu’il vaut mieux pratiquer avec un solide équipement et un minimum d’entraînement. Il n’y a pas que les philosophes que la folie et le suicide menacent : un mauvais lecteur peut faire une bonne victime.

      Frédéric Pajak
      L’Imbécile. N°8 - janvier 2005

      @colporteur Au détour d’une recherche, je tombe sur votre très bon article. Pur hasard : je suis également l’auteur du texte de Morbleu ! cité en commentaire un peu plus haut.
      dans les commentaires de : http://anniceris.blogspot.fr/2009/07/longevite-dune-imposture-michel.html
      Je vais lire avec délectation la grille de lecture anti-historique de l’EDN : DU TEMPS QUE LES SITUATIONNISTES AVAIENT RAISON.
      @aude_v le blog se termine par .fr celui que tu signales est .my ( de mon pc, ça s’affiche quand même.)
      C’est dommage que tu n’y accèdes pas car les commentaires sont aussi intéressant que l’article.
      Sinon tu peux te procurer « Longévité d’une imposture » ici :
      http://www.librairie-quilombo.org/Longetivite-d-une-imposture-Michel-Foucault

      Ce texte est une reprise du chapitre V du recueil d’essais intitulé« D’or et de sable ». Il est révisé et augmenté d’une postface consacrée à divers exercices de foucaulâtries, en particulier celui publié par P. Veyne en 2008. J.-M. Mandosio dénonce l’imposture du discours de M. Foucault, qu’il qualifie de lourd et inconsistant, et plaide pour une réhabilitation de l’esprit critique.

    • la pensée du grand homme est si #complexe mais il doit être possible de se branler la nouille sur des sujets qui ont moins d’influence sur la vie des administréEs.

      J’aime bien ton expression @aude_v et c’est ce que je vais faire de ce pas. Bonne lecture.

    • @vanderling un complément (antérieur) à « Une sociologie foucaldienne est-elle possible ? »

      Une sociologie foucaldienne du néo-libéralisme est-elle possible ? Laurent Jeanpierre, 2006
      http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=4136

      Contrairement au libéralisme ou au dirigisme, le néo-libéralisme se caractérise par la mise en place d’une politique de société créant les conditions d’existence d’une forme idéale, parfaitement concurrentielle, de marché et d’être humain, plutôt que par des politiques de régulation par le marché ou bien de correction voire de substitution du marché. Le néo-libéralisme est un art de gouverner par la mise en concurrence. Son premier terrain d’application est l’Etat et l’action publique elle-même.

      Nous avons souligné l’importance de l’évolution des techniques intellectuelles - en particulier ce que Foucault appelle, au détour d’un propos oral sur le néo-libéralisme, les technologies de l’aléa - dans cette transformation de l’art de gouverner : plus que dans les rationalités politiques antérieures, la connaissance de l’aléa et la maîtrise rationalisée du futur sont en effet des problèmes primordiaux pour le libéralisme. Le dirigisme et le néo-libéralisme se sont développés au vingtième siècle comme des arts de gouverner offrant des instruments plus sophistiqués, non plus seulement de connaissance, mais de maîtrise, voire d’usage des aléas. Une sociologie des techniques intellectuelles du néo-libéralisme et de leurs liaisons avec d’autres technologies de pouvoir pourrait être développée sur un modèle comparable à la socio-histoire de ces techniques, telle qu’elle est simplement esquissée par Foucault et surtout reprise, depuis deux décennies, par des travaux d’histoire des statistiques et des probabilités. Cette sociologie foucaldienne des savoirs spécialisés ayant permis l’hégémonie contemporaine du néo-libéralisme devra s’appuyer sur la sociologie des sciences et surtout des sciences sociales ainsi que sur la sociologie politique des formes de quantification et des instruments de gouvernement.

      Du même Laurent Jeanpierre, et encore à partir de Foucault, La mort du libéralisme
      http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=3078

    • Suicide : changement de régime. Un observateur hors pair, Maurice Halbwachs, Christian Baudelot et Roger Establet
      http://www.liens-socio.org/Suicide-changement-de-regime-Un

      Quant à l’anomie, concept cardinal de la théorie durkheimienne du suicide, Maurice Halbwachs la soumet à une critique en règle. La nouvelle société qui émerge à la fin du 19ème siècle de tous les bouleversements induits par l’industrialisation, l’exode rural et le nouvel ordre économique n’est pas une société désordonnée qui ne serait régie que par les pulsions ou les initiatives individuelles. Loin d’être déréglée et anarchique, la vie sociale moderne est même plus normative que l’ancienne. Dominée par la loi du marché qui impose à chacun d’évaluer « ses prestations, ses travaux et ses efforts », elle est animée par ses rythmes propres, ses formes conventionnelles auxquelles nous devons nous plier. Les originalités dont elle ne s’accommode pas sont impitoyablement éliminées. Pire, selon Halbwachs, les gestes, les manières de pensée et de sentir des hommes sont réglementés sur un mode « plus tyrannique » aujourd’hui qu’hier et les passions sont coulées dans un moule unique. La vie sociale moderne n’est donc pas plus désordonnée aujourd’hui qu’hier, elle est seulement « plus compliquée ». Voilà qui condamne définitivement la vertu explicative du concept d’anomie, chargé chez Durkheim d’expliquer l’accroissement spectaculaire des suicides provoqués par le passage d’une société rurale, artisanale et religieuse à une société urbaine, industrielle et laïque.

      Mais c’est sans doute dans les dernières pages du livre, à propos du rôle explicatif des motivations personnelles, que se manifeste avec le plus de clarté la distance que prend Maurice Halbwachs à l’égard de Durkheim.

    • En #suisse, des associations comme #Exit et #Dignitas ont ouvert un espace de liberté autour de la #fin_de_vie, et l’aide au suicide n’est désormais punie que si elle est accordée pour un motif égoïste. Les pratiques qui se sont développées en Suisse semblent même davantage rassurer que choquer une population inquiétée par la médicalisation croissante de la mort. Les établissements médicaux-sociaux se montrent eux aussi de plus en plus ouverts sur cette question. Pourvu que l’aide soit désintéressée et que la personne souhaitant se suicider jouisse de ses pleines facultés de discernement, quelle justifie sa décision par une maladie incurable, des souffrances physiques ou psychiques intolérables, par un pronostic d’évolution fatale ou une invalidité importante, la voie est libre. Il suffit simplement de mettre par écrit sa demande de suicide, sous forme manuscrite, de trouver le médecin qui fournira l’ordonnance pour la solution mortelle (Exit et Dignitas sont là pour çà), et que le « départ » se fasse en présence de témoin(s) - le plus souvent, ce sont des membres de la famille. #Last_but_no_least - et c’est ce qui fait toute la différence avec l’euthanasie - il faut que la personne qui souhaite en finir soit capable de s’administrer elle-même la solution létale : boire une potion, tourner le robinet d’une sonde ou d’une perfusion.
      Le droit de #mourir_dans_la_dignité, le credo du docteur #Jérôme_Sobel, présentation :

      http://www.hebdo.ch/jerome_sobel_profession_docteur_40938_.html
      Exit A.D.M.D Suisse romande, Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité : http://www.exit-geneve.ch/index.html


      Exit, le film : http://youtu.be/7iNYTj_G03k

      http://dignitas.ch

      Jean-luc Roméro-Michel à propos du livre L’aide au suicide que son ami le docteur Jérôme Sobel à écrit avec Michel Thévoz

      http://www.romero-blog.fr/tag/jérôme+sobel


      Source : L’imbécile N°12 -2005 entretien avec le Dr Jérôme Sobel par Jean-François Duval

  • Le psychanalyste tunisien Fethi Benslama appelle à l’anonymat des auteurs d’attentats
    http://www.huffpostmaghreb.com/2016/07/22/attentats_n_11130574.html

    « Peut-être qu’il est temps...qu’il y ait entre les médias un pacte pour ne plus publier les noms et les images des auteurs de ces actes-là parce que c’est un ressort très important par rapport à ce qu’ils font pour être connu de toute la planète, alors même que leurs victimes sont anonymes et le resteront ».

    Selon lui, cette « glorification », incite d’autres personnes à en faire autant : « Eux ils vont avoir une gloire aux yeux de leurs commanditaires, de leurs amis(...) ça incite d’autres à y recourir », a-t-il indiqué avant d’ajouter : « Ils laissent leur cartes d’identités, ils veulent très vite être connus ».

    Yalla, enfin une bonne idée dans ce marmasme... #culture_du_psychopathe

  • Protéger les enseignant-es en stigmatisant des étudiantes ?
    http://contre-attaques.org/magazine/article/proteger-les

    Un universitaire propose d’interdire le voile à l’université pour éviter les triches aux examens et protéger les professeur-es de fac d’agressions. Des enseignant-es du CEAL lui répondent.

    Cher Christophe Leroy,

    Nous sommes enseignant-es en collèges et lycée en Seine-Saint-Denis, certain-es d’entre nous enseignons aussi à l’université. C’est à ce titre que nous avons lu votre tribune parue dans le Monde du 19 avril. Votre priorité y était de vous positionner contre le voile à l’université, et nous entendons ici vous répondre. Il n’est pas évident de saisir la logique de vos arguments tant ils sont obscurs et confus. Ils semblent cependant renvoyer à quatre problèmes que poserait le port du voile à l’université.

    Le premier cas qui semble justifier une interdiction est celui de la triche aux examens. C’est sous prétexte de ce genre d’arguments « pratiques » que vous prétendez nécessaire de légiférer sur le port du voile à l’université. Peut-être faudrait-il aussi prévoir une législation pour interdire les dreadlocks, les cheveux longs, les caches-cous, les écharpes ?

    Vous évoquez cet « épineux problème » en levant un lièvre qu’il ne vous intéresse pourtant pas de suivre : que tous les enseignants d’une discipline soient des hommes. Le seul problème que poserait cette absence de femmes serait d’entraver la fouille des étudiantes voilées, que vous jugez nécessaire.

    Comment est-il possible de n’y voir qu’un problème de surveillance des examens ? La possibilité qu’une étudiant.e refuse de vous adresser la parole parce que vous êtes un homme et qu’elle serait musulmane vous horripile, mais l’absence de mixité parmi les enseignants semble vous laisser de marbre. Allez, M. Leroy, un peu de courage, confrontez-vous à cet « épineux problème » ! Pourquoi ne pas écrire au Monde sur la sous-représentation des femmes parmi les enseignants de certaines disciplines universitaires ? Parce que cela désignerait le sexisme comme structurant notre société, alors que votre objectif est de réduire le sexisme à l’islam ? Vous qui vous donnez comme objectif de mettre vos étudiantes face à leur contradiction, n’arrivez pas à étudier celles de vos propres positions ?

    Votre second argument est que les enseignant.es doivent s’interroger sur le « degré d’implication d’une jeune femme voilée dans le strict respect des lois coraniques ». Cela semble vous tenir particulièrement à cœur puisque vous répétez cette même phrase, au mot près, à deux reprises. Vous réclamez même des formations à l’islam. C’est bien pourtant de formations à la laïcité dont vous avez besoin. Vous prenez d’ailleurs bien soin de ne jamais vous y référer pour justifier l’interdiction du voile à l’université. Cette interdiction répondrait à des exigences seulement pragmatiques.

    La laïcité vise à permettre l’expression libre des convictions, « mêmes religieuses » (comme disait la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen) et l’égalité des citoyen.nes. Elle suppose la neutralité des agents du service public, c’est-à-dire l’absence de jugement sur les convictions des usager.es et la non-expression de ses propres convictions. En d’autres termes, elle suppose précisément que les personnels ne jugent pas « le degré d’implication d’une jeune femme voilée dans le strict respect des lois coraniques ». Le faire, comme vous le faites, lorsque vous écrivez qu’ « une application stricte de ces lois fait qu’une femme voilée ne peut adresser la parole à un homme », c’est enfreindre le principe laïque.

    D’autre part, où avez-vous trouvé les règles intangibles et immuables qui régissent la pratique religieuse de 1,6 milliard de personnes ? Nous vous proposons de fréquenter plus assidûment les amphithéâtres de sociologie, ou les cours de nos collègues de sciences économiques et sociales en lycée : depuis Durkheim, on sait que les pratiques religieuses ne découlent pas mécaniquement de la théologie. S’ériger en interprète des textes sacrés, comme vous le faites, c’est faire profession de théologien.

    Venons-en à votre troisième argument. Vous prétendez que le port du voile aboutirait, en matière de surveillance des examens, à une inégalité de traitement des étudiant.es : les étudiantes voilées obtiendraient – grâce au laxisme de vos collègues – un traitement de faveur par rapport aux étudiant.es « ne portant pas de couvre-chefs ». Ou plutôt, vous vous cachez, avec un courage hors du commun, derrière les dires d’étudiant.es qui considéreraient qu’il y a là une enfreinte au principe d’égalité.

    L’argument fait ainsi porter aux seules étudiantes que vous stigmatisez la responsabilité de tensions dont vous seul, par votre refus d’appliquer les principes de la laïcité, êtes à l’origine. Cette stratégie n’a rien de nouveau : c’est la même qu’utilisèrent à partir de 1989, dans le secondaire, les défenseurs d’une loi interdisant le voile pour les collégiennes et les lycéennes. Alors même que le Conseil d’Etat, par une jurisprudence très claire, leur donnaient tort, ils promurent pourtant les exclusions d’élèves, et accusèrent celles-ci de semer le chaos quand elles demandaient à la justice de les soutenir. Ainsi, ils et elles ont pu faire passer la loi d’exclusion de 2004 comme une loi d’apaisement ! Ne soyez pas lâche : vous seul créez les tensions par vos propos.

    Vous décrivez « des étudiants venant sans voile ni couvre-chef quelconques (casquette, cagoule, capuche de survêtement) ». Cette énumération n’est pas sans nous surprendre.

    On voit bien à qui renvoie l’imaginaire de la casquette et de la capuche. Ajouter à cette liste la cagoule, c’est faire référence à un autre imaginaire : celui de la violence masquée du braqueur ou du terroriste. Cette assimilation du style vestimentaire de jeunes de quartiers populaires aux habits du crime organisé éclaire les présupposés de votre discours. Vous vous sentez victime d’une violence organisée, vous, chantre du « modèle occidental » pour reprendre vos propres mots.

    Finalement, votre texte a un intérêt. Un seul. Celui de témoigner de la terreur qui vous habite lorsque vous fréquentez certain.es de vos concitoyen.nes. Terreur dont le seul fondement est un racisme à peine masqué et un mépris de classe qui laisse peu d’espoir quand à vos capacités à jamais pouvoir enseigner, c’est-à-dire former des individus dont, par définition, les origines ethniques et sociales sont différentes des vôtres. Votre texte exprime une peur qui doit rendre votre enseignement difficile, voire insupportable. Remettez-vous en cause plutôt que d’accuser vos étudiantes.

    Venons-en enfin à votre quatrième « argument » – si l’on peut parler d’argument en cette matière. Il s’agit de la menace que feraient peser les étudiantes voilées sur les enseignant.e.s. par exemple par l’intermédiaire de leurs « tuteurs » . L’argument implicite est que les étudiantes voilées sont entourées de hordes d’hommes sauvages prêt à tout pour faire respecter la loi coranique (sans doute porte-t-il des casquettes, des capuches et plus sûrement des cagoules). M. Leroy, vos fantasmes paranoïaques ne prêteraient qu’à sourire s’ils ne devenaient pas une doxa qu’un ci-devant grand journal est désormais prêt à relayer. Cette menace suinte de votre texte. C’est la peur qui guide votre raisonnement.

    Votre colère et votre mépris pour vos étudiantes sont intolérables. Mais ce qui l’est autant, c’est la description que vous donnez de l’enseignement à l’université et votre indifférence à ce constat. Et cela nous affecte d’autant plus, nous professeurs de l’enseignement secondaire, que l’université est l’institution qui accueille le plus des élèves des quartiers populaires qui réussissent à intégrer l’enseignement supérieur.

    Quant à la relation pédagogique que vous décrivez, elle est réduite à un contrôle d’identité et une fouille au corps au moment de l’examen. Dans les classes préparatoires, où sont surreprésenté-es les enfants des catégories socio-professionnelles les plus favorisées, le taux d’encadrement est comparable à celui de l’enseignement secondaire. Les élèves y sont a minima connu-es, reconnu-es et accompagné-es dans leur projet d’études.

    Tandis que dans les premiers cycles d’université, étudiant-es et enseignant-es sont bien souvent condamné-es à un face-à-face anonyme dans des amphithéâtres surpeuplés, peu propice aux apprentissages. Votre témoignage en est le cruel reflet. Le taux d’échec des élèves issu-es des baccalauréats professionnels et technologiques y atteint des sommets. N’est-ce pas, comme le font, dans d’autres lieux, beaucoup de vos collègues, contre les conditions d’enseignement qui vous sont faites à vous et vos étudiant.es que vous auriez pu utiliser votre possibilité d’être publié dans Le Monde plutôt que de gloser contre des étudiant.e.s que manifestement vous ne connaissez pas ?

    Anaïs Flores, Paul Guillibert, Caroline Izambert, Florine Lepâtre et Jérôme Martin sont membres du CEAL.

  • Batman et Superman : une solution durkheimienne - Une heure de peine...
    http://uneheuredepeine.blogspot.fr/2016/03/batman-et-superman-une-solution.html

    Anomie et égoïsme : on ne s’étonnera pas, du coup, que Superman pète les plombs un épisode sur deux et décide de prendre le pouvoir et de réduire le reste de l’humanité en esclavage. Durkheim avait montré en son temps le lien entre insuffisance de l’intégration ou insuffisance de la régulation d’une part et taux de suicide d’autre part. Un individu seul, sans règles, est un individu fragile. Superman est donc un super-individu super-fragile. Les liens qui le tiennent et le protègent contre lui-même se comptent sur les doigts d’une main : Loïs Lane, les Kent... S’ils se brisent, le voilà en danger. Figure tragique, Superman passe son temps à s’interroger sur sa place dans ce mode et sur ce que c’est que d’être un héros. Sa position sociale nous permet de comprendre pourquoi. S’il passe son temps à chouiner, c’est là un fait social.

  • Gilles Kepel « L’émergence du salafisme est un signe des failles de notre société » | L’Humanité
    http://www.humanite.fr/gilles-kepel-lemergence-du-salafisme-est-un-signe-des-failles-de-notre-soci

    Dans l’entretien paru le 29 septembre 2014 dans le Monde, Olivier Roy note : « Il faut d’autant moins internationaliser le conflit que Daech a avant tout une stratégie locale, qu’il tente d’étendre à tout le Moyen-Orient, mais son objectif n’est ni New York ni Paris. » Alors que la messe est dite, les élucubrations coupées de la réalité continuent à circuler. Les idées d’Olivier Roy s’apparentent à des sophismes modernes, raison pour laquelle elles rencontrent du succès. Il justifie la paresse intellectuelle largement répandue sur cette question complexe. Tout le monde a l’impression de comprendre sans y avoir travaillé. Or, personne ne se rend en Syrie uniquement par le biais d’Internet. Cela passe par un réseau de pairs, par la progression du salafisme comme modèle de rupture en valeurs et culturelle. La porosité entre salafisme et djihadisme demeure grande, même si les salafistes affirment ne pas être violents. Culturellement, les djihadistes sont des salafistes. Parmi ces derniers, certains passent au combat armé, certains autres attendent les instructions de l’Arabie saoudite. Celle-ci pratiquait les accommodements avec ceux qui achetaient son pétrole, alors à 120 dollars le baril. À 27 dollars, il est possible qu’un certain nombre de cheikhs basculent dans la sympathie à l’égard de Daech et, ainsi, se débarrassent du régime saoudien. La réfutation des idées fausses, des sophismes et autres prénotions au sens de Durkheim, d’Olivier Roy et consorts est fondamentale. C’est un débat universitaire, un débat intellectuel, un débat éthique.
    ...
    Le processus de porosité entre les discours islamistes et gauchistes est exprimé en 1994 par The Prophet and the Proletariat, de Chris Harman, leader d’un mouvement trotskiste britannique, qui estime possible de pactiser avec l’islamisme dans certaines circonstances. Il trouvera sa prolongation en France avec l’engagement du Monde diplomatique et d’Alain Gresh, alors rédacteur en chef du mensuel, aux côtés de Tariq Ramadan au sein du Forum social européen (FSE) en 2003. Ramadan jouera un grand rôle dans ce rapprochement. Alors que la gauche traditionnelle n’arrivait plus à recruter la jeunesse, Ramadan participe aux divers rassemblements accompagné de ses adeptes de l’Union des jeunes musulmans, comprenant que cette alliance islamo-gauchiste était l’occasion espérée de pénétrer le système politique. Dans cette perspective, les croyances de ces nouveaux alliés ne sont pas susceptibles d’être critiquées, sous peine de rompre les liens instaurés à grand-peine entre l’ex-avant-garde marxiste, dont les soutiens populaires propres ont disparu, et les masses paupérisées des banlieues, désormais inéluctablement islamisées à leurs yeux. Le débat sur Charlie Hebdo pousse la rupture sur les valeurs au paroxysme. Ce journal satirique considère que la critique de la religion islamique est du même ordre que celle de la religion juive ou chrétienne. Alors qu’à l’autre bout du spectre, à l’image d’Emmanuel Todd, on estime que critiquer l’islam revient à cracher sur la religion des pauvres, des prolétaires. Or, il y a un hic dans ce raisonnement : une partie des islamistes n’a pas hésité à défiler lors des « manifs pour tous » avec des conservateurs et des réactionnaires.

    Dans le raisonnement de G. Kepel, je ne vois guère de place d’une part pour les alliances contre-nature (politique), manipulations et menées occidentales au Moyen Orient ; ni sur le travail de sape que notre modèle de développement socio-économique exerce contre la cohésion sociale et la solidarité.