city:kobané

  • Kobane Calling - Editions Cambourakis
    https://www.cambourakis.com/spip.php?article757

    Envoyé par l’Internationale (le Courrier International italien), Zerocalcare part aux confins de la Turquie, de l’Irak et du Kurdistan syrien pour rejoindre la ville de Kobané, à la rencontre de l’armée des femmes kurdes, en lutte contre l’avancée de l’État islamique. À partir de ce voyage, Zerocalcare livre un reportage d’une sincérité poignante, un témoignage indispensable et bouleversant qui s’efforce de retranscrire la complexité et les contradictions d’une guerre si souvent simplifiée par les médias internationaux et le discours politique. Le tout avec l’inimitable ton, extrêmement drôle et touchant, le langage et l’univers d’un auteur qui sait interpréter comme personne, le quotidien, les craintes et les aspirations de sa génération.

    Je lis beaucoup de choses sur le conflit syrien et notamment ici @nidal et @gonzo, qui m’ont ouvert à d’autres médias et points de vue. Ces derniers jours, la bagarre entre @lundimatin et #Le_Média me plonge dans des abîmes de perplexité...

    J’ai reçu récemment cette BD italienne. Elle m’a profondément touché et j’y ai découvert le #Rojava, peu souvent abordé ici.

    Vous l’avez lue ? Vous en pensez quoi ?

    #Syrie #Kurdistan #YPG #Zerocalcare #Kobane_Calling

  • Kurdistan révolutionnaire et communalisme
    Rencontres à Bure du 9 au 11 mars

    https://lavoiedujaguar.net/Kurdistan-revolutionnaire-et-communalisme-Rencontres-a-Bure-du-9-au-

    Depuis 2015 et la résistance des forces armées kurdes aux assauts de Daech à Kobané au Rojava (Syrie), la situation dans les différentes régions du Kurdistan a acquis une visibilité internationale nouvelle. Des centaines d’internationalistes (militant·e·s de gauche, anarchistes… ou pas) sont parti·e·s rejoindre les différents bataillons internationaux ou les projets de la société civile qui se développent au Rojava. Depuis 2012, dans le nord de la Syrie, se développe une expérience de transformation sociale de grande ampleur basée notamment sur les communes locales, le développement de coopératives et un modèle féministe, multiethnique et multiconfessionnel…

    Depuis le 20 janvier 2018, le Rojava est à nouveau attaqué, cette fois directement par l’armée de l’État turc (accompagnée de brigades islamistes supplétives), où Erdogan bâtit depuis quelques années les fondations d’une dictature implacable. Le canton d’Afrine, enserré à l’extrême ouest entre le régime d’Assad et l’armée turque, est à nouveau sous le feu des bombes. Partout en France et dans le monde des manifestations de soutien ont lieu. (...)

    #Bure #rencontres #Kurdistan #Rojava #Afrine #Syrie #Murray_Bookchin #communalisme #résistance #solidarité

  • #Agriculture and Autonomy in the Middle East

    In Rojava, a region in Syria also known as North #Kurdistan, a groundbreaking experiment in communal living, social justice, and ecological vitality is taking place. Devastated by civil war, Syria is a place where a cessation of hostilities often seems like the most that can be hoped for. But Rojava has set its sights much higher. What started as a movement for political autonomy in the city of Kobane has blossomed into an attempt to build a radical pluralist democracy on the principles of communal solidarity — with food security, equality for women, and a localized, anti-capitalist economy at its core.


    https://medium.com/planet-local/agriculture-autonomy-in-the-middle-east-bf9f0fa23a7d
    #autonomy #Moyen-Orient #Rojava #Mesopotamian_Ecology_Movement #résistance #coopératives #anti-capitalisme #économie_locale #économie

  • Dans le nord de la Syrie, le « laboratoire » kurde

    http://www.lemonde.fr/international/article/2017/12/29/dans-le-nord-de-la-syrie-le-laboratoire-kurde_5235529_3210.html

    « Après le califat » (4|5). Les Kurdes, qui ont joué un rôle central dans la bataille contre l’Etat islamique, mettent en place un modèle de gouvernance calqué sur l’idéologie du Parti des travailleurs.

    Voilà bien longtemps que l’on ne projette plus de films dans l’ancien cinéma d’Al-Thawra. La petite salle appartient au temps révolu où cette ville nouvelle syrienne des bords de l’Euphrate était appelée à devenir la cité idéale du baathisme autoritaire et triomphant des années 1970. Des ingénieurs soviétiques affectés à la construction du barrage voisin — un fleuron national, visible sur les anciens billets de 500 livres syriennes — y vivaient avec leurs familles et celles de leurs collègues locaux.

    Autour du cinéma, les rues sont tracées au cordeau, les immeubles d’habitation ressemblent à des blocs de béton brut de quatre étages. Des figures schématiques d’épis de blé et d’engrenages industriels servent d’ornement urbain. L’ensemble, construit selon les canons de l’urbanisme alors en vogue en URSS, alliée du régime syrien, raconte la promesse non tenue d’un avenir radieux.

    Quatre décennies après sa construction, ce songe architectural soviétique perdu aux confins de la Mésopotamie est tombée aux mains de l’organisation Etat islamique (EI), en même temps que le bourg voisin de Tabqa, en 2014. Rakka, l’ancienne capitale syrienne du « califat », est à une quarantaine de kilomètres en aval.

    Etrange rémanence de l’histoire… Ces quartiers ont accueilli un temps des djihadistes originaires d’ex-URSS. Mais leur utopie totalitaire, elle aussi, a vécu. Au printemps, les frappes de la coalition internationale, dirigée par les Etats-Unis, les ont chassés de ce paysage à l’optimisme décrépi, désormais ponctué de bâtiments effondrés. Aux djihadistes ont succédé, en mai, les Forces démocratiques syriennes (FDS), un groupement arabo-kurde allié au sol de la coalition dans sa guerre contre l’EI.

    Abdullah Öcalan, l’inspirateur

    Depuis, les murs du cinéma d’Al-Thawra ont été repeints. En ce matin gris du début du mois de novembre, la salle est pleine. Sur la scène, deux femmes et deux hommes, dont l’un porte une tenue traditionnelle de chef tribal, discourent. Au-dessus d’eux, cet écriteau : « Administration civile démocratique de Tabqa ». Cette nouvelle structure mise en place par l’encadrement kurde des FDS nomme ce jour-là son conseil exécutif, sous le regard bienveillant et vigilant des kadros, les commissaires politiques du mouvement kurde qui s’adressent à tous en donnant du « camarade ».

    Femmes et hommes au physique dur, marqués par leurs années de guérilla, combattants à la parole précise, forgée par une formation théorique implacable, ils sont présents partout où les FDS ont pris pied dans le nord de la Syrie. Leur rôle : superviser l’instauration, sur les décombres du « califat », d’institutions conformes à l’idéologie mise au point par Abdullah Öcalan, le fondateur du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK).

    Autrefois marxiste-léniniste, ce mouvement politique et militaire, en guerre contre l’Etat turc, a presque l’âge de la ville idéale d’Al-Thawra. Sa création remonte à 1978, au cours d’une réunion nocturne dans un village kurde reculé d’Anatolie orientale. Elle doit beaucoup à la volonté d’un groupe d’étudiants kurdes de Turquie. Formés aux méthodes de la gauche radicale locale, ils sont décidés à faire d’un nationalisme kurde, alors moribond, une force anticoloniale dirigée contre Ankara.


    Monument aux martyrs kurdes à Kamechliyé, ville syrienne située à la frontière turque, le 23 novembre.

    Près de quarante ans ont passé. Même s’il est toujours en conflit avec Ankara, le PKK a renoncé à la sécession et professe dorénavant un assemblage de principes autogestionnaires, féministes et écologistes. Il s’est éloigné du nationalisme kurde pour embrasser le projet d’une émancipation des peuples du Moyen-Orient par leur « autoadministration » et l’abandon du modèle de l’Etat-nation.

    Öcalan, le fondateur vénéré comme une icône, a beau être détenu sur une île-prison de la mer de Marmara, au large d’Istanbul, depuis son arrestation, en 1999 au Kenya par les forces spéciales turques, le PKK est plus puissant que jamais. L’organisation veille à entretenir son ancrage chez les Kurdes de Turquie, délocalisant ses bases de guérilla dans les zones montagneuses du Kurdistan d’Irak pour mieux les protéger et étendant ses ramifications au Moyen-Orient et en Europe. C’est pourtant le conflit syrien qui lui a permis d’ouvrir une nouvelle page de son histoire, et la lutte contre l’EI qui en a fait un acteur majeur de la scène régionale.

    Dès les premiers troubles révolutionnaires de 2011 en Syrie, les enclaves kurdes du nord du pays, qui avaient fourni à l’organisation d’Öcalan une part non négligeable de ses recrues depuis les années 1980, sont investies par des cadres du PKK. Le régime syrien ne conserve qu’une présence très limitée dans ces zones. Elles offrent ainsi au PKK et à ses cousins syriens un terrain idéal pour la mise en pratique de leur idéologie.

    De nouvelles institutions sont mises sur pied. La parité est imposée aux postes à responsabilités. Des komin — communes populaires — sont établies, censées être la cellule de base de l’écosystème sociopolitique qui voit le jour sous la houlette des kadros. Ils ne veulent pas prendre part à une révolution contre le régime syrien qu’ils estiment perdue d’avance, mais profiter de la vacance du pouvoir pour créer leur propre mode de gouvernance.

    Un appareil sécuritaire et militaire

    Dans le même temps, la machine politique se double d’un appareil sécuritaire et militaire structuré. Les Unités de protection du peuple (YPG) et les Unités de protection de la femme (YPJ) sont créées dans les trois « cantons kurdes » d’Afrine, dans le nord-ouest de la Syrie, de la Djezireh, dans le Nord-Est, et de Kobané, à la frontière turque. L’offensive de l’EI contre cette petite localité kurde isolée, à la fin de 2014, change la donne. Alors que Kobané est sur le point de tomber aux mains des djihadistes malgré la résistance acharnée de ses défenseurs — filmée par les caméras du monde entier de la Turquie voisine —, la coalition internationale à dominante américaine intervient dans les airs.

    Cette assistance apportée dans l’urgence se mue bientôt en un partenariat militaire durable. Les forces kurdes sont dotées d’un encadrement efficace, d’une idéologie forte qui les rend imperméables au radicalisme islamique. Au-delà, elles ne considèrent pas la lutte contre le régime de Damas comme une priorité. Dès lors, elles constituent le partenaire idéal qu’il manquait à la coalition pour vaincre l’EI en Syrie.

    « Kobané a tout changé pour nous », admet un haut kadro kurde, le « camarade » Badran. « Il y a eu un changement dans l’équilibre des forces, se souvient-il. Nous sommes devenus les partenaires de la coalition pour combattre le terrorisme. Et cela nous a permis de jouer un rôle plus important qu’avant sur le terrain. » Dès 2015, les unités YPG et YPJ sortent des enclaves kurdes et progressent le long de la frontière syro-turque, dont elles interdisent l’accès aux djihadistes, tout en se préparant à lancer l’offensive sur Rakka.

    L’aide de la coalition se renforce et les unités à dominante kurde, désormais regroupées avec leurs alliés arabes au sein des FDS, avancent vers le sud, finissant par s’emparer de Rakka en octobre 2017, avant de poursuivre leur progression vers la frontière irakienne, le long de l’Euphrate et à travers le désert de l’Est syrien.

    Femmes en uniformes et chefs tribaux arabes

    C’est ainsi qu’en Syrie, la guerre menée par la coalition a provoqué l’émergence dans son sillage d’un territoire politique dont l’étendue correspond grossièrement à la rive gauche de l’Euphrate. Ce sont les FDS, emmenés par un corps de cadres kurdes, qui l’ont organisé et se sont chargés de lui faire prendre forme. Ces hommes et ces femmes, inspirés par une organisation issue de l’extrême gauche turque et du nationalisme kurde convertie aujourd’hui à l’autogestion, ont organisé un vaste territoire à large majorité arabe à mesure qu’offensive après offensive, l’EI en était chassé.

    Dans l’ancienne salle de cinéma d’Al-Thawra, alors que l’Administration civile démocratique de Tabqa élit son conseil exécutif local et ses comités paritaires, l’avenir nébuleux de l’après-guerre se lit dans les travées et sur les murs. L’assistance composée de jeunes femmes kurdes en uniformes, de chefs tribaux arabes en habits traditionnels, de dames aux voiles fleuris et de garçons en tenues décontractées, approuve à main levée la nomination de ses délégués. La salle est décorée de banderoles couvertes de slogans : « La réalité de la nation démocratique est la coexistence entre les peuples » ; « Les femmes ont le droit de s’auto-organiser de manière indépendante »


    A Tabqa, certains quartiers ont été endommagés par la guerre. Malgré leurs habitations en partie détruites, les civils y vivent encore. Des enfants jouent à la guerre devant une de ces maisons ravagées.

    Ces slogans ont été écrits uniquement en arabe. La rhétorique est bien celle des cadres kurdes mais ici, à Al-Thawra et à Tabqa, il n’est pas opportun de mettre cette identité en avant. « Nous sommes d’abord syriens ! », dit une kadro kurde présente sur le parvis du cinéma alors que la réunion se termine et que l’assistance hétéroclite s’éparpille en petits groupes. « Nous participons à la construction d’une Syrie démocratique pour tous les peuples en suivant les idées du président Öcalan », précise cette femme d’une quarantaine d’années.

    Alliances de circonstances

    La mise sobre, voire ascétique, qu’elle arbore, son air militaire malgré les vêtements civils, son phrasé kurde, émaillé de néologismes propres au mouvement, racontent la nature d’une organisation en mesure de transformer le corps et l’esprit de celles et ceux qui la servent. Cette avant-garde, formée dans les bases reculées de l’organisation, au Kurdistan irakien, est déployée partout où le mouvement combat, gouverne ou maintient une présence. Ses membres ont perdu leurs noms de naissance, remplacés par des pseudonymes. Le mariage leur est interdit, de même que les possessions matérielles. Leur existence est vouée au PKK et à son implacable aspiration à transformer le réel.

    Leur présence tranche, devant l’ancien cinéma, avec celle de certaines personnalités tribales de la région, connues pour avoir frayé avec les anciens maîtres djihadistes de Tabqa. « Bien entendu, nombreux sont les chefs de tribu qui ont fait allégeance à Daech, reconnaît le cheikh Hamid Al-Freidj, coprésident du Conseil de Tabqa. Ils sont ensuite venus voir les camarades [des FDS] et il y a eu une procédure de réconciliation. Ils leur ont donné une nouvelle chance. » L’entrée de la salle, désormais vide, est surmontée d’un slogan qui semble sonner plus juste que les pétitions de principe affichées ailleurs avec grandiloquence : « Nos victoires ne sont pas définies par le nombre des ennemis tués mais par le nombre de ceux que nous rallions. »

    Alors que l’idéologie de l’encadrement kurde a remplacé celle des djihadistes de l’Etat islamique, les cheikhs tribaux collaborent au nouveau système comme ils s’étaient accommodés du précédent. « Il faut réunir les gens de bonne volonté pour avancer… », justifie un cadre kurde, le camarade Shiyar, face au paradoxe apparent de la politique menée par les FDS : proposer un changement révolutionnaire en s’appuyant sur les structures sociales les plus conservatrices.

    Pas seulement un projet kurde

    La cheville ouvrière de ce grand dessein paradoxal s’appelle Omar Allouche. Ancien homme d’affaires originaire de Kobané, M. Allouche n’est pas un cadre mais un compagnon de route du mouvement kurde. Il déclare avoir été l’un des premiers à accueillir Abdullah Öcalan, lorsqu’en 1979 celui-ci était venu se réfugier en Syrie pour échapper aux forces de sécurité turques. Depuis le retour de l’organisation dans le pays, il a mis à sa disposition son entregent et un vaste réseau de contacts parmi les notables arabes. « Depuis le début, nous savions qu’il allait falloir compter avec les populations arabes et que notre projet en Syrie ne pourrait pas être seulement un projet kurde », précise Omar Allouche.


    Statue à l’effigie d’un soldat kurde martyr mort au combat à Kobané, le 20 novembre. Le doigt sur la gâchette, car il est mort dans cette position.

    De fait, les trois enclaves kurdes du nord du pays que le mouvement aspirait à réunir en une bande territoriale continue sont séparées par de vastes zones de populations arabes. « Nous avons commencé par créer des partis politiques arabes, mais ça n’a pas fonctionné. La seule solution, c’était de s’appuyer sur les tribus », dit M. Allouche.

    Le début du partenariat entre les forces kurdes et la coalition internationale a conforté les dirigeants des FDS dans leur pari tribal. En reculant, les djihadistes laissaient derrière eux une société sinistrée où l’encadrement politique kurde pouvait faire émerger des intermédiaires. « Le politique ne peut pas se faire sans le militaire », confiait au printemps Omar Allouche dans la bourgade d’Aïn Issa, où se trouvent les locaux du Conseil civil de Rakka, alors que les FDS s’apprêtaient à lancer l’assaut sur la capitale djihadiste.

    Isolés par la Turquie

    « Avant chaque offensive, nous avons travaillé à la constitution de conseils locaux composés de personnes hostiles à Daech, tout en maintenant des contacts avec des notables présents à l’intérieur des zones qui étaient visées », expliquait-il alors. L’installation de ces institutions dans les zones reprises à l’EI va ensuite de pair avec le recrutement massif de jeunes hommes arabes dans des FDS, bien qu’elles demeurent encadrées par des commandants kurdes.

    La mise sur pied du Conseil civil de Rakka a suivi cette logique. Sa composition occupait déjà Omar Allouche plus d’un an avant le début des opérations militaires. « La coalition internationale considère que sa mission en Syrie est de détruire l’Etat islamique. Elle s’intéresse uniquement au militaire, pas au politique », dit-il, tout en regrettant le manque d’engagement en matière civile de la part des alliés occidentaux des FDS. Si le Conseil civil de Rakka a finalement été reconnu comme l’acteur de référence pour la gouvernance de cette ville et de ses environs, il ne bénéficie que d’un soutien diplomatique limité. En cause, la position de la Turquie. « Les pays occidentaux coopèrent avec nous militairement mais ils ne sont pas prêts à s’investir davantage en raison de leurs relations avec la Turquie », constate Omar Allouche.

    Du point de vue turc en effet, le territoire que se sont taillé les FDS dans le nord de la Syrie est perçu comme une menace existentielle, tandis que le PKK poursuit sa guérilla contre les forces armées d’Ankara dans les régions kurdes du sud-est du pays, contiguës du territoire des FDS. Pour cette raison, la nature révolutionnaire du mouvement, l’ampleur de son projet et sa vocation universaliste tendent à échapper à ses interlocuteurs étrangers. Souvent perçu comme un simple représentant des intérêts de la minorité kurde de Syrie, le mouvement entend se distinguer nettement de cette posture, ses revendications ne concernant pas les droits d’une population particulière mais un modèle de gouvernance.


    Un soldat des forces démocratiques syriennes, (FDS) chauffe de l’eau à Raqqah, le 17 novembre.

    Face au régime de Damas

    « Les gens qui dirigent ce projet pensent sincèrement que les Etats-nations ont échoué. Il faut qu’ils continuent à effacer toute trace de nationalisme dans leur pratique, estime à Kamechliyé, Hikmet Al-Habib, un membre arabe d’une des structures de gouvernance instaurées par les FDS. Mais ils font des efforts. Au début les Kurdes appelaient cette zone le “Kurdistan occidental”, ensuite le Rojava (« l’ouest » en kurde). Maintenant ils parlent du nord de la Syrie… »

    Si la direction des FDS demeure essentiellement kurde, la formation de cadres locaux a commencé. « Pas besoin de les envoyer dans les montagnes, assure Hikmet Al-Habib. Des académies ont été créées ici pour former des kadros arabes. » L’enseignement qui y est dispensé est directement inspiré de l’idéologie du mouvement et de son chef historique, Abdullah Öcalan.

    Avec le reflux de l’EI, l’ancien territoire du « califat » en Syrie est désormais partagé entre le mouvement kurde et ses alliés locaux d’une part, et le régime de Damas de l’autre. La vallée de l’Euphrate dessine la limite entre ces deux blocs. « En Syrie, aujourd’hui, il n’y a plus que nous et le régime », rappelait, après la chute de Rakka, la camarade Badran : « Soit on coopère, soit c’est le chaos. » De fait, le mouvement kurde et les FDS contrôlent non seulement le grenier à blé du pays mais également ses principales infrastructures hydroélectriques, ainsi que d’importantes ressources naturelles. A l’automne 2016, à la suite de la chute de Rakka, les FDS ont ainsi chassé les djihadistes des vastes champs d’hydrocarbures de la province de Deir ez-Zor, y compris le champ gazier d’Omar, le plus grand de Syrie.

    L’espoir d’une reconnaissance politique

    Bien que les deux parties aient un intérêt mutuel à coopérer, leur vision de l’avenir diffère. Le régime de Bachar Al-Assad entend reprendre possession de l’ensemble du territoire national et y restaurer son autorité. Les FDS, eux, entendent obtenir la reconnaissance formelle de leurs acquis politiques dans le Nord par une nouvelle Constitution. « Nous refusons tout arrangement ponctuel avec le régime sans cadre général », répondait en novembre Fawza Youssef, membre éminente du mouvement kurde en Syrie. « Il faut que nous négociions un accord global alors que nous sommes en position de force, ajoutait-elle. Les accords locaux donnent l’occasion au régime de se renforcer pour redevenir une menace dans quelques années. Nous voulons un changement de Constitution et la construction d’une Syrie fédérale et démocratique. Jusqu’à ce que cet accord soit trouvé, nous renforçons notre modèle : une autonomie géographique, qui n’est pas fondée sur l’appartenance ethnique. »

    En octobre et en décembre, des élections locales et législatives ont eu lieu dans les zones tenues par les FDS. Ces scrutins, qui n’avaient rien de déterminant du point de vue politique, visaient à approfondir un système qui continue d’évoluer et de se structurer tant qu’il a l’espace pour le faire.

    Face à Damas, la partie kurde est prête à négocier l’intégration des FDS, qui n’ont pas cessé de recruter depuis la bataille de Rakka, à une nouvelle armée syrienne, ainsi qu’à partager le contrôle des frontières et à organiser celui des revenus issus de l’exploitation des ressources naturelles. Le régime, en revanche, multiplie les signaux négatifs, révélateurs de son raidissement : le territoire en formation dans le nord de la Syrie est systématiquement désigné comme un espace à reconquérir et ceux qui le dirigent comme des « traîtres ».

    Sans le soutien de la coalition, que les FDS jugent dépourvue de vision politique en Syrie, le mouvement a placé ses espoirs dans un éventuel rôle de médiation de la Russie, alliée du régime et avec laquelle il coopère localement dans l’enclave kurde d’Afrine, dans le Nord-Ouest. La posture offensive du régime de Damas et la rhétorique de plus en plus incendiaire de ses responsables risquent cependant de semer le trouble parmi les alliés arabes du mouvement kurde. Hikmet Al-Habib, un cadre arabe des FDS, l’admettait récemment :

    « Beaucoup de chefs tribaux sont des opportunistes qui suivent le sens du vent. Maintenant que l’Etat islamique est vaincu et que le régime et nous sommes face à face, ils hésitent à choisir leur camp. »

  • Ce que révèle l’enquête judiciaire sur les agissements du cimentier Lafarge en Syrie

    http://www.lemonde.fr/international/article/2017/09/20/ce-que-revele-l-enquete-judiciaire-sur-les-agissements-du-cimentier-lafarge-

    « Le Monde » a eu accès à l’enquête sur les activités de Lafarge qui tentait de préserver sa cimenterie en Syrie pendant la guerre civile. Des responsables ont reconnu le versement de sommes à l’EI.

    Une date suffit à condenser le parfum de soufre qui émane de ce dossier. Le 29 juin 2014, l’organisation Etat islamique (EI) proclame l’instauration du « califat » : un immense territoire à cheval entre l’Irak et la Syrie bascule « officiellement » sous le joug de l’organisation terroriste. Le même jour, à Rakka (Syrie), un cadre d’une usine du cimentier français Lafarge, située dans le nord du pays, informe par mail ses supérieurs qu’il a pris rendez-vous avec un « responsable de l’Etat islamique » pour négocier la sécurité des employés du site.

    Ce rendez-vous surréaliste marque le point culminant d’un engrenage commencé trois ans plus tôt. Depuis son implantation en Syrie, fin 2010, Lafarge n’a qu’une obsession : maintenir coûte que coûte l’activité de son usine de Jalabiya, à 87 kilomètres de Rakka, quitte à financer indirectement des organisations terroristes. Une aventure industrielle hasardeuse qui se conclura de façon dramatique, le 19 septembre 2014, par la prise de la cimenterie par les troupes de l’EI.

    Après la révélation de ce scandale par Le Monde, en juin 2016, le parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire, en octobre 2016, faisant suite à une plainte du ministère des finances pour « relations financières illicites entre la France et la Syrie ». Dans cette enquête confiée aux douanes judiciaires, que Le Monde et Le Canard enchaîné ont pu consulter, les neuf principaux responsables de Lafarge – fusionné en 2015 avec le suisse Holcim – et de sa filiale Lafarge Cement Syria (LCS) ont été entendus.

    Leurs auditions décrivent de l’intérieur les mécanismes qui ont entraîné l’entreprise dans ce naufrage judiciaire et moral. Elles racontent, mois par mois, l’entêtement d’un groupe aveuglé par une obsession : ne pas abandonner la cimenterie LCS, promise à l’appétit destructeur des belligérants, afin de conserver un avantage stratégique dans la perspective de la reconstruction du pays.

    Cette enquête révèle deux faits majeurs. Tout d’abord, la décision du leader mondial des matériaux de construction de rester en Syrie a reçu l’aval des autorités françaises, avec lesquelles le groupe était en relation régulière entre 2011 et 2014. Ensuite, les responsables de l’usine ont omis de préciser aux diplomates le prix de leur acharnement : plusieurs centaines de milliers d’euros versés à divers groupes armés, dont 5 millions de livres syriennes (20 000 euros) par mois à l’EI.

    La conclusion des douanes est sans appel : Lafarge a « indirectement » financé des groupes « terroristes », par le truchement d’un intermédiaire, produisant au besoin « de fausses pièces comptables ». Et si seuls trois responsables ont avoué avoir eu connaissance de ces pratiques, « il est tout à fait vraisemblable que d’autres protagonistes aient couvert ces agissements », dont l’ex-PDG du groupe, Bruno Lafont, le « directeur sûreté », Jean-Claude Veillard, et « certains actionnaires ».

    Aucun de ces responsables n’a été amené à s’expliquer devant un tribunal à l’issue de cette enquête. Mais les investigations suivent leur cours. Une information judiciaire, ouverte le 9 juin 2017 pour « financement du terrorisme » et « mise en danger d’autrui » après une plainte déposée par l’ONG Sherpa, a été élargie, le 23 juin, aux faits visés par le travail des douanes.

    2008-2010 : le pari de Lafarge en Syrie

    L’engrenage qui a conduit Lafarge à se compromettre dans le conflit syrien débute à la fin des années 2000. En 2008, le cimentier, qui vient de racheter la société égyptienne Orascom afin de renforcer son implantation dans la région, valide la construction d’une usine dans le nord de la Syrie, près de la frontière turque. Deux ans plus tard, la cimenterie LCS sort de terre. L’investissement s’élève à 680 millions de dollars, l’amortissement est prévu sur vingt ans. Mais l’histoire va quelque peu bousculer ces prévisions comptables.

    Mars 2011 : le début des troubles

    L’usine vient à peine de commencer sa production de ciment quand d’importantes manifestations embrasent le sud du pays et se propagent rapidement aux principales agglomérations. En relation avec les autorités françaises, les responsables du groupe décident de rester.

    « On est informés, forcément. On avait vu ce qui s’était passé pour les “printemps arabes”, mais on était dans l’incapacité totale d’anticiper et de prévoir », explique l’ancien PDG de Lafarge Bruno Lafont, devant les enquêteurs des douanes judiciaires. « L’usine est au nord, près de la frontière turque, très isolée. Au début, et pendant toute l’année 2011, il ne se passe absolument rien », tempère Bruno Pescheux, PDG de LCS jusqu’en juin 2014.

    Tout au long de son aventure syrienne, Lafarge est resté en contact permanent avec l’ambassade de France à Damas – qui sera fermée par Nicolas Sarkozy en mars 2012 –, puis avec l’ambassade de France en Jordanie. Jean-Claude Veillard, un ancien fusilier marin dans les forces spéciales et les commandos, est également en relation avec la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE).

    « Jean-Claude avait de bons contacts avec les services, notamment la DGSE », explique Eric Olsen, ancien DRH, puis directeur général de Lafarge. Il « me tenait informé des mouvements des Kurdes et de l’Armée syrienne libre, poursuit-il. Je comptais sur l’expertise et la protection de l’Etat français pour nous tenir au courant ».

    Chaque mois, au siège de Lafarge à Paris, un comité de sûreté réunissant les opérationnels, le département juridique, l’assurance, le directeur du siège et les ressources humaines fait le point sur les pays où le groupe est implanté, dont la Syrie.

    Mai 2011 : les premières sanctions

    Le 9 mai 2011, le Conseil de l’Union européenne (UE) adopte un embargo sur les armes et le pétrole syriens. Celui-ci sera étendu le 18 janvier 2012 pour un ensemble élargi de matériaux, notamment certains ciments. A cette époque, Lafarge, dont le marché est local, ne s’estime pas concerné par les sanctions. « D’après ce que j’avais compris, explique Bruno Pescheux, il s’agissait essentiellement de prohibition d’exportations depuis la Syrie vers l’UE. Or, nous étions dans l’autre sens, on importait. »

    Décembre 2011 : Total quitte la Syrie

    Le 1er décembre, le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme déclare la Syrie en état de guerre civile. Quatre jours plus tard, le pétrolier Total annonce son départ du pays. Dans les mois qui suivent, Air liquide et les fromageries Bel plient bagages à leur tour. Fin 2012, Lafarge est le dernier groupe français présent en Syrie.

    « Pourquoi Lafarge reste en Syrie ?, demandent les enquêteurs aux responsables du cimentier.

    – On pouvait toujours fonctionner en sécurité et en conformité. Donc on a continué, répond laconiquement Bruno Lafont.

    – Mais en janvier 2012, la situation dégénérait…, intervient l’enquêteur.

    – Ce n’est pas ce que disait le Quai d’Orsay, insiste Christian Herrault, ancien directeur général adjoint opérationnel du groupe. Le Quai d’Orsay dit qu’il faut tenir, que ça va se régler. Et il faut voir qu’on ne peut pas faire des allers-retours, on est ancrés et, si on quitte, d’autres viendront à notre place… »

    Juillet 2012 : l’évacuation des expatriés
    A l’été 2012, l’armée du régime perd le contrôle de la frontière turque. A l’ouest, la zone passe sous l’emprise des Kurdes du Parti de l’union démocratique (PYD), à l’est, sous celle de l’Armée syrienne libre et de divers groupes islamistes. La ville de Kobané, à 55 kilomètres de l’usine, est tenue par les Kurdes, tandis que Manbij, à 66 kilomètres, est sous le contrôle des rebelles.

    « Cette nouvelle redistribution des cartes ne vous fait-elle pas craindre pour vos salariés et votre usine ?, s’enquiert l’agent des douanes.

    – Un peu, oui, répond M. Lafont. Mais, là encore, je me fie à ce que mes collaborateurs me disent. »

    Les « collaborateurs » de M. Lafont semblaient pourtant bien au fait des risques encourus par le personnel du site. « On a même interrompu l’usine à l’été 2012, faute de sûreté suffisante », relate M. Pescheux. Le directeur de la cimenterie demande alors aux employés chrétiens et alaouites de ne plus venir travailler, pour raison de sécurité. Les expatriés – une centaine de salariés sur plus de 300 – sont quant à eux exfiltrés du pays en juillet 2012.

    A partir de la fin de l’été, seuls les employés sunnites et kurdes sont autorisés à continuer à travailler sur le site. Afin de limiter les trajets, de plus en plus périlleux, leur patron leur demande de se domicilier à Manbij, ou d’emménager directement dans la cimenterie. M. Pescheux, lui, déménage ses bureaux de Damas au Caire, en Egypte, d’où il dirige l’usine à distance, en toute sécurité.

    Malgré la dégradation de la situation, le directeur de LCS justifie devant les enquêteurs la décision de maintenir l’activité du site avec le personnel local : « L’idée était de préserver l’intégrité de l’usine en la faisant fonctionner, même de manière discontinue. On voulait éviter la cannibalisation de l’usine, qui serait arrivée si elle avait été perçue comme à l’abandon. »

    Davantage que le profit immédiat – la production de ciment a rapidement chuté, passant de 2,3 millions de tonnes en 2011 à 800 000 tonnes en 2013 –, c’est la volonté acharnée d’occuper le site dans la perspective de la reconstruction du pays qui motivera les décisions du groupe. A cette date, personne, au sein de l’entreprise, pas plus qu’au Quai d’Orsay, ne semble anticiper la tragédie dans laquelle la Syrie est en train de sombrer.

    Septembre 2012 : une « économie de racket »

    A la fin de l’été 2012, la situation dégénère. « L’économie de racket a commencé en septembre ou octobre 2012 », se souvient M. Herrault. En septembre, deux responsables du groupe, Jean-Claude Veillard, le directeur de la sûreté, et Jacob Waerness, gestionnaire de risque sur le site de l’usine LCS, se rendent à Gaziantep, en Turquie, pour y rencontrer des milices de l’opposition syrienne.

    « Il était très clair qu’elles étaient indépendantes et ne voulaient pas se coordonner. Et il était très clair qu’elles voulaient taxer ce qui passait par les routes, poursuit M. Herrault. C’était clairement du racket, même si c’était les “bons” qui rackettaient. Tous les six mois, on allait voir le Quai d’Orsay, qui nous poussait à rester.

    – Vous vous souvenez du nom de ces milices ?, demande l’enquêteur.

    – Ah non, elles changent d’allégeance… Ce qui était un peu fou, c’est que toutes ces milices étaient alimentées en armes et argent par le Qatar et l’Arabie saoudite, sous le regard américain, sans aucun discernement. On aime bien mettre des noms sur les choses, mais là-bas rien n’est si simple… »

    A l’issue de la réunion de Gaziantep, LCS missionne un ancien actionnaire minoritaire de l’usine, Firas Tlass, pour monnayer la sécurité de ses employés sur les routes. Entre septembre 2012 et mai 2014, cet homme d’affaires – fils de l’ex-ministre de la défense du président Bachar Al-Assad, ayant fait défection au régime – se voit remettre entre 80 000 et 100 000 dollars par mois pour négocier avec les groupes armés qui tiennent les checkpoints autour de l’usine.

    A cette période, l’Etat islamique en Irak, ancêtre de l’EI, n’a pas encore fait irruption dans la guerre civile syrienne. L’usine est en revanche encerclée par les milices kurdes et des groupes islamistes, dont le Front Al-Nosra. Selon le directeur de l’usine, M. Pescheux, il n’existait pas de liste précise des destinataires des fonds versés par Firas Tlass : « Ceux qui gardaient un checkpoint pouvaient changer d’allégeance », assure-t-il.

    Octobre 2012 : neuf employés kidnappés

    En octobre 2012, neuf employés de l’usine sont pris en otage. Le directeur sûreté de Lafarge, M. Veillard, raconte : « Ces employés alaouites avaient été écartés de l’usine pour leur sécurité confessionnelle. Ils étaient au chômage technique, à Tartous [dans l’ouest de la Syrie]. Ils étaient payés jusqu’au jour où le DRH de l’usine leur a demandé de venir percevoir leur salaire à l’usine. Les neuf employés sont venus en bus, via Rakka, et se sont fait enlever par des Kurdes, puis [ont été] revendus à des milices locales. Lafarge a payé 200 000 euros, en livres syriennes. »

    Avril 2013 : Lafarge, « c’est le drapeau français »

    Début 2013, le pays bascule dans une nouvelle ère. Le 6 mars, Rakka est prise par différents groupes islamistes, dont le Front Al-Nosra, qui prête allégeance à Al-Qaida et tombe donc sous le coup des sanctions du Conseil de sécurité de l’ONU. Un mois plus tard, le 9 avril, l’Etat islamique en Irak, qui s’est implanté en Syrie, se rebaptise « Etat islamique en Irak et Levant » (EIIL). Le groupe prend le contrôle de Rakka le 13 juin.

    « Comment Lafarge peut-elle conserver une usine dans cette guerre qui devient de plus en plus sale, qui dégénère ? demande un enquêteur aux dirigeants du groupe.

    – C’est là où on se pose la question si on reste ou pas, répond le PDG, Bruno Lafont. On commence à penser qu’on va se replier. On a eu des feedbacks de nos gars. On pouvait visiblement continuer.

    – Ce qu’il faut comprendre, c’est que lorsque cette guerre a commencé, l’usine venait de démarrer, insiste le patron de l’usine, Bruno Pescheux. On pensait que quand tout serait fini, il y aurait au moins une cimenterie qui pourrait fournir du ciment pour reconstruire la Syrie…

    – On allait voir, tous les six mois, l’ambassadeur de France pour la Syrie [à Paris], et personne ne nous a dit : “Maintenant, il faut que vous partiez”, précise Christian Herrault. Le gouvernement français nous incite fortement à rester, c’est quand même le plus gros investissement français en Syrie et c’est le drapeau français. Donc oui, Bruno Lafont dit : “On reste.” »

    Octobre 2013 : « Daech s’inscrit dans le paysage »
    Le 11 octobre 2013, le Conseil européen confirme les sanctions à l’encontre de certaines entités terroristes, dont le Front Al-Nosra, Al-Qaida et l’EIIL. « Pourquoi Lafarge a pris le risque de rester en Syrie, où ces trois organisations sont présentes ? », demande l’enquêteur. La réponse du directeur général adjoint opérationnel est un pur modèle de rationalisation économique :

    « On gérait les risques par cette économie de racket, et il n’y a pas eu de phénomène marquant jusqu’à fin 2013 », explique Christian Herrault, oubliant au passage l’enlèvement de neuf employés alaouites de l’usine un an plus tôt.

    « Quel est ce phénomène marquant ?

    – Daech s’inscrit dans le paysage. Ils affichent la volonté de taxer les routes. Un des chefs se réclamant de Daech convoque Bruno [Pescheux] et Jacob [Waerness] à Rakka (…). C’est Firas [Tlass], ou un de ses hommes, qui y va et voit la situation. Daech vient dans la liste des racketteurs, ça fait 10 % des sommes, dont la moitié était pour les Kurdes.

    – A ce moment-là, que vous dit le Quai d’Orsay ?

    – Pas de changement de leur position. Encore une fois, pas de solution intermédiaire, soit on partait, soit on restait. Le rackettage de Daech, c’était l’équivalent de 500 tonnes… Sachant qu’on a trois silos de 20 000 tonnes… Est-ce qu’on va tout plier pour 500 tonnes ? »

    C’est l’ancien actionnaire minoritaire M. Tlass qui sera chargé de payer les groupes armés en utilisant le cash de l’usine. Pour entrer ces dépenses dans la comptabilité, « on utilisait des notes de frais que je signais “frais de représentation”, explique M. Herrault. Donc là, c’était les notes de Bruno [Pescheux], mais il n’y avait rien dessus, il n’y avait aucun nom de milice. »

    Bruno Pescheux, lui, se souvient avoir vu les noms de Daech et du Front Al-Nosra mentionnés sur des documents :

    « Avez-vous vu le nom de Daech ? demande l’enquêteur.

    – Oui, répond le directeur de l’usine.

    – Avez-vous une idée du montant prévu pour Daech ?

    – De l’ordre de 20 000 dollars par mois. »

    Juin 2014 : un rendez-vous avec l’organisation Etat islamique
    A l’été 2014, l’EIIL contrôle le nord-est de la Syrie et fait une percée vers l’ouest. Le 29 juin, l’organisation proclame le « califat » et se baptise « Etat islamique ». Au sud de l’usine, les combats font rage entre le Front Al-Nosra et l’EI, qui est aux prises avec les Kurdes au nord du site. L’étau se resserre : à 500 mètres de l’usine, un checkpoint marque la sortie de la zone kurde ; à 20 kilomètres, un barrage signale l’entrée de la zone contrôlée par l’EI.

    Ce 29 juin, le nouveau responsable sûreté de l’usine, un ancien des forces spéciales jordaniennes qui a remplacé M. Waerness, envoie un mail au DRH local, avec le directeur de LCS, M. Pescheux, en copie : « Je viens d’arriver de Rakka. Le responsable de l’Etat islamique est toujours là, il est à Mossoul en ce moment. Notre client de Rakka m’a arrangé un rendez-vous avec lui, concernant nos expatriés au Pakistan et en Egypte. Une fois que j’aurai l’autorisation, je vous informerai. »

    « Pourquoi aller voir cette personne de l’El ?, demande l’enquêteur au directeur de l’usine.

    – L’idée était de dire : pour faire fonctionner cette usine, les locaux ont beaucoup de mal. L’idée était de faire revenir des expats pour les épauler, mais il fallait garantir leur sûreté : pas de kidnapping ou de choses comme ça », répond M. Pescheux.

    Juillet 2014 : « La situation autour de l’usine a empiré »
    Début juillet, l’El attaque les Kurdes à Kobané, à 50 kilomètres de la cimenterie. Les combats font plusieurs centaines de morts. Le 8 juillet, le responsable jordanien de la sûreté de l’usine envoie un mail alarmiste à M. Pescheux, qui a été versé au dossier par la plainte de Sherpa :

    « La situation autour de l’usine a empiré après que le camion-suicide a explosé au checkpoint du PYD [parti kurde] hier, à minuit. C’était à 10 kilomètres à l’est de l’usine, les quatre passagers ont été tués. L’Etat islamique a commencé une campagne discrète contre le PYD dans notre région (…). Le PYD a établi de sérieuses mesures de sécurité autour de l’usine, et a demandé la fermeture et l’évacuation de l’usine. »

    « A ce moment-là, on me dit que la situation est de plus en plus difficile. Je sais, à ce moment-là, qu’on va partir », assure Bruno Lafont. Le directeur sûreté du groupe, M. Veillard, est moins alarmiste : « Pour moi, l’attentat à 10 kilomètres n’existe pas. Il n’y a rien autour de l’usine. Le premier village doit être à 30 kilomètres. Maintenant, c’est peut-être un type qui s’est fait sauter. En aucun cas, il n’y avait un risque pour les employés et l’usine. »

    Le 17 juillet, un responsable de l’usine envoie pourtant un nouveau mail sans équivoque au PDG de LCS : « Notre personnel à l’usine est très perturbé et inquiet. Ils se sentent comme des prisonniers au sein de l’usine (…). L’EI est en train de s’emparer du contrôle de l’entrée de l’usine et n’autorise personne à entrer ou sortir (…). Nous ne sommes pas capables de rassurer nos employés (…). Nous avons besoin de votre aide pour régler cette question avec nos voisins. »

    27 juillet 2014 : l’usine interrompt sa production

    A la fin du mois de juillet 2014, la dégradation de la situation militaire contraint la cimenterie à interrompre son activité. Malgré les injonctions du chef militaire kurde d’évacuer les lieux, LCS reprendra pourtant la production cinq semaines plus tard.

    15 août 2014 : « J’ai fait la recommandation de fermer l’usine »

    Le 15 août 2014, une résolution de l’ONU interdit toute relation financière avec les groupes terroristes présents en Syrie, pouvant être « considérée comme un appui financier à des organisations terroristes ». « Que s’est-il passé chez Lafarge à ce moment-là ? », s’enquiert un enquêteur des douanes.

    « Frédéric [Jolibois, qui a remplacé Bruno Pescheux à la tête de LCS] envoie un mail au service juridique pour la conduite à tenir. Il faut voir que Daech n’avait alors rien fait en dehors de la Syrie, il n’y avait pas eu Charlie, le Bataclan… C’était alors une affaire syrienne, relativise M. Herrault. Je précise au service juridique que Daech, vers le 16 août, est bel et bien une organisation terroriste. Ce que je sais, c’est que rien n’a été payé après le 15 août. »

    La directrice juridique de Lafarge est consultée. Elle explique aux douaniers : « J’ai été informée sur deux points (…). Le deuxième était : l’Etat islamique demande des taxes aux transporteurs. Peut-on traiter avec ces transporteurs ? C’était en août 2014. L’avis juridique a été rendu début septembre 2014 et était très clair : oui, il y a un risque juridique. J’ai fait la recommandation de fermer l’usine. »

    1er septembre 2014 : le laissez-passer de l’EI

    Malgré l’avis de la direction juridique, l’usine se prépare à reprendre ses activités. Un laissez-passer pour ses clients et transporteurs, daté du 1er septembre 2014 et tamponné par le gouverneur de l’El à Alep, a été versé au dossier. Son contenu laisse entendre que l’usine a passé un « accord » avec l’EI : « Au nom d’Allah le miséricordieux, les moudjahidine sont priés de laisser passer aux barrages ce véhicule transportant du ciment de l’usine Lafarge, après accord avec l’entreprise pour le commerce de cette matière. »

    9 septembre 2014 : reprise de l’activité

    Passant outre les injonctions du commandant kurde, l’usine reprend sa production le 9 septembre. Le lendemain, son nouveau directeur, M. Jolibois, se rend à l’ambassade de France en Jordanie. Selon le compte rendu qu’a fait l’ambassade de cet entretien, il réaffirme la volonté du groupe de se maintenir en Syrie pour « préserver ses actifs et ses activités futures ».

    Le directeur de LCS assure aux autorités françaises que Lafarge « ne verse rien au PYD ou à l’Etat islamique ». Il reconnaît seulement que les « transporteurs locaux » doivent obtenir des laissez-passer « sans impliquer l’usine ou Lafarge », ce qui semble contredit par l’exemplaire daté du 1er septembre qui a été retrouvé. Le compte rendu de l’ambassade conclut : « Jolibois ne semblait pas particulièrement inquiet des conséquences, pour la sécurité de l’usine et de son personnel, de la présence de l’Etat islamique à quelques kilomètres d’Aïn-Al-Arab [nom arabe de Kobané]. »

    « Nous sommes à cinq jours d’une attaque décisive de l’El dans la région. Comment pourrait-on caractériser ces déclarations : un manque de lucidité, la cupidité ou business as usual ?, s’enquiert l’agent des douanes.

    – Je ne suis pas au courant, élude le PDG, M. Lafont. Je pense qu’il faut poser la question à M. Jolibois. Je ne sais pas de quoi il était au courant. »

    Dans leur rapport de synthèse, les douanes s’étonnent des réponses systématiquement évasives du PDG de Lafarge : « Bruno Lafont disait tout ignorer des pratiques de son personnel en Syrie (…). Il serait tout à fait étonnant que M. Lafont n’ait pas demandé à son équipe de direction d’avoir un point précis de la situation d’une cimenterie dans un pays en guerre depuis plusieurs années. »

    Le jour de l’entretien de M. Jolibois à l’ambassade de France en Jordanie, ce dernier a en effet envoyé un mail à plusieurs responsables du groupe, à Paris, évoquant un plan d’évacuation de l’usine : « La semaine prochaine, Ahmad [le directeur sûreté de l’usine] partagera notre plan d’évacuation avec le département de sécurité de Lafarge, et il devrait être en mesure de nous envoyer la version à jour d’ici deux semaines. » L’usine sera attaquée dix jours plus tard…

    19 septembre 2014 : l’attaque de l’usine

    Le 18 septembre, un employé de l’usine est informé d’une attaque imminente de l’EI et en fait part à son patron. Le directeur de l’usine envoie par mail ses dernières consignes de sécurité. Il suggère de « préparer des matelas, de la nourriture, de l’eau, du sucre, dans les tunnels techniques de l’usine ». « Si les affrontements arrivent à l’usine, déplacer les équipes dans les tunnels et attendre », précise-t-il.

    Quelques heures plus tard, les troupes de l’EI sont aux portes de l’usine. La plupart des employés sont évacués en catastrophe par bus vers Manbij. Mais le plan d’évacuation est défaillant. Les bus ne reviennent pas à l’usine. Une trentaine d’employés bloqués sur place doivent s’enfuir par leurs propres moyens, entassés dans deux véhicules abandonnés sur le site. L’usine sera prise d’assaut dans la nuit.

    Quatre employés de Lafarge sont arrêtés par l’EI pendant l’évacuation, et retenus en otage une dizaine de jours. Parmi eux, deux chrétiens arrêtés dans un des bus affrétés par Lafarge sont contraints de se convertir à l’islam avant d’être relâchés.

    Le 21 septembre, un employé en colère écrit un mail au directeur de la cimenterie : « Nous vous demandons fermement de commencer une enquête afin de vérifier les faits suivants (…). Après plus de deux ans de réunions quotidiennes portant sur la sécurité, qui est responsable de l’absence de plan d’évacuation de l’usine de notre équipe, et qui a abandonné plus de trente de nos braves employés une heure avant l’attaque de l’El et l’explosion du réservoir de pétrole ? »

    Quelques jours plus tard, M. Jolibois se félicitera pourtant, dans un mail envoyé au groupe, du succès de l’évacuation : « Malgré la complexité de la situation et l’extrême urgence à laquelle nous avons été confrontés, nous avons réussi à sortir nos employés de l’usine sains et saufs. Les choses ne se sont probablement pas déroulées telles que nous les avions planifiées ; néanmoins, nous avons atteint le but principal. Lafarge Cement Syria n’est pas morte. Je suis convaincu que nous gagnerons la dernière bataille. »

  • 120 djihadistes en route vers Palmyre abattus par les forces aériennes russes
    https://fr.sputniknews.com/international/201705271031559676-djihadistes-abattus-raqqa-palmyre

    Le groupe militaire russe en Syrie a coupé la voie à des combattants de Daech qui quittaient Raqqa par un corridor offert par les soi-disant Forces démocratiques syriennes à condition qu’ils se dirigent vers Palmyre.

    A posteriori, cela confirme ce que certains avaient rappelé à l’époque de la prise de Palmyre il y a deux ans, à savoir que pour traverser pllusieurs centaines de kms de désert, il faut nécessairement bénéficier de complicités...

    #syrie

  • Que penser de cet article de Julien Salingue : serait-ce une nouvelle leçon d’humanisme ou un appel face au silence ?

    Massacres à Alep : lettre à un « camarade » qui s’obstine à justifier l’injustifiable
    http://resisteralairdutemps.blogspot.fr/2016/12/massacres-alep-lettre-un-camarade-qui.html#comment-for

    Il y a bien d’autres problèmes avec ton analyse, « camarade », mais je ne veux pas abuser de ton temps. D’ailleurs, pour avoir eu souvent l’occasion de discuter de vive voix avec toi de ces « problèmes d’analyse » en confrontant, à ta « géopolitique » et à ton « anti-impérialisme », les faits et la chronologie réelle des événements, je sais que tu n’aimes pas trop ça, les faits. Ils sont vraiment trop têtus.

    Car c’est beaucoup plus simple de venir provoquer ou semer le trouble via des posts/commentaires Facebook ou dans des forums de discussion que de prendre le temps d’avoir un échange un peu précis et argumenté.

    Alors au cas où tu serais quand même tenté de céder à la facilité et de vouloir jouer à ce petit jeu, je te soumets quelques remarques « préventives » :

    – Avant de me dire que je défends les mêmes positions que les États-Unis, la France, l’Arabie saoudite, le Qatar, BHL ou quelques autres « compagnons encombrants », souviens-toi que, si on raisonne de la sorte, tu défends de ton côté les mêmes positions que la Russie, l’Iran, le maréchal Sissi, François Fillon ou Marine Le Pen, et demande-toi si c’est un argument.

    – Avant de me dire qu’Israël a bombardé, depuis 2011, à une quinzaine de reprises, des positions du régime Assad, et que ceux qui sont contre Assad sont donc avec Israël, souviens-toi qu’en juin dernier Poutine déclarait, au terme d’une rencontre avec Netanyahu avec lequel il venait de signer plusieurs accords commerciaux, ce qui suit : « Nous avons évoqué la nécessité d’efforts conjoints dans la lutte contre le terrorisme international. Sur ce plan, nous sommes des alliés. Nos deux pays ont une expérience importante en matière de lutte contre l’extrémisme. Nous allons donc renforcer nos contacts avec nos partenaires israéliens dans ce domaine ». Et demande-toi si c’est un argument.

    – Avant de me dire que la rébellion syrienne en a appelé aux pays occidentaux pour recevoir des armes et bénéficier d’un appui militaire conséquent, notamment aérien, et que ça cache forcément quelque chose, souviens-toi que les forces kurdes que tu admires tant – à juste titre – depuis qu’elles ont repoussé Daech à Kobané ont fait exactement la même chose, et qu’elles ont, elles, obtenu cet appui, au point qu’elles ont remercié publiquement les États-Unis de leur soutien, et demande-toi si c’est un argument.

    – Avant de me dire que la rébellion syrienne, quand bien même on aurait pu avoir au départ de la sympathie pour elle, est aujourd’hui confisquée par des forces réactionnaires issues de l’islam politique, et que certaines de ces forces n’hésitent pas à s’en prendre violemment à des civils ou, variation sur le même thème, que c’est vraiment tragique de bombarder des civils mais que c’est parce que les terroristes se cachent parmi eux, quand ils ne les utilisent pas comme boucliers humains, souviens-toi que c’est le discours de ceux qui veulent justifier les campagnes de bombardements meurtriers sur Gaza, et demande-toi si c’est un argument.

    – Avant de me dire que les insurgés syriens sont des « alliés objectifs » de Daech, souviens-toi que Daech a été chassé d’Alep au début de l’année 2014 par ceux qui sont en train de se faire aujourd’hui massacrer par Assad, réfléchis ensuite au concept d’« allié objectif », et demande-toi si c’est un argument. Tu peux aussi repenser, si tu n’es pas convaincu, à ce qui a été rappelé plus haut à propos des véritables cibles des bombardements de la coalition, et te demander une deuxième fois si le coup de l’« allié objectif » est un argument.

    – Avant de me dire, enfin, que ceux qui dénoncent Assad et Poutine « oublient » de dénoncer les massacres commis par les grandes puissances occidentales et par leurs alliés, sache que parmi ceux qui se mobilisent pour Alep, nous sommes nombreux à nous être mobilisés pour Gaza, contre les interventions militaires en Afghanistan, en Iraq, en Libye ou ailleurs, et que nous ne renonçons pas, contrairement à toi qui as choisi de ne pas être dans la rue hier soir pour dénoncer la boucherie en cours, à notre cohérence politique, à nos idéaux et à l’anti-impérialisme. Et demande-toi si c’est un argument.

    • heuu il me semble avoir mis en ligne des archives américaines prouvant que les tchétchènes avaient été lancés par la CIA contre les russes et on m’accuse de « pro-poutinisme » parce qu’on peux trouver sur le net cia.gouv ou fbi.gouv des preuves de l’implication des Usa, CIA dans l’entrainement, financement des terroristes, djihadistes partout dans le monde et bien sur en Lybie, Syrie comme si nous étions des imbéciles ne sachant pas trouver les archives preuves qui l’expliquent très bien ? Dites les militants autorisés de ci ou de là, des vrais communistes ça existe et ceux là ne vont pas trainer avec des Martine Billard qui elle reçoit ces ordres du Crif d’abord jusqu’en 2009 puis en 2013 le 20 décembre (cela fera donc 3 ans le 20 ) de la part de Rudy Reichstadt lui enjoignant d’écrire un billet officiel aux militants de son parti ne plus fréquenter "Dieudonné, L’élu René Balme, finanlement lynché et rejeté du parti ou de lire le réseau voltaire, car « antisémite, négationniste, complotiste, anti-américainiste ou antisioniste » ?

      Fait pas ci fait pas ça ou sinon dégage voilà la méthode des dissidents de France et de Navarre ! Dites ceux qui ont la vérité infuse et menace les autres qui paie ces Martine Billard ? Clémentine Autain (je ne soutiens pas Valls le faux jeton hein) Ensemble, PdG ou autre NPA ?? Le savez vous au moins ?
      Qui paie l’orchestre paie la partition...!." Qui paie ces gens qui déroute de vrais citoyens responsables en s’alignant sur le plus fort et le pouvoir en place, l’otan et autres leaders d’opinion ? Etonnant mais utile dans ces moments de « crises » c’est là que l’on voit les vrais dissidents et « l’opposition controlée » comme Chomsky l’appelle. L’opposition fabriquée par le pouvoir avec l’aval des opposants hélas.

    • Silence ? Quel silence ? Celui de la tonitruante campagne qui nous somme d’être sensibles aux conséquences de la chute d’Alep ?

      Humanisme ? Quel humanisme ? Celui de ceux qui n’ont pas cessé d’appeler à bombarder les forces de Bachar El Assad ?

      La situation est dramatique, c’est évident. Au point d’éliminer toute réserve devant le très petit nombre de sources fiables, devant le poids et le crédit accordé à des témoignages dramatiques dont certains devraient légitimement appeler quelques précautions (twitter depuis un quartier où l’armée opère un nettoyage après la chute de la ville) ?

      On peut légitimement se demander si on n’est pas dangereusement proche de l’affaire des couveuses koweitiennes (pour ne citer que celle-là).

      Pointer ces questions entraîne l’utilisation obligatoire de guillemets au mot camarade, implique de se voir ranger, comme Eva Bartlett, dans le camp des pro-Poutine puisque « ses » médias reprennent aussi ces éléments de doute.

    • On a le droit de demander l’humanité pour les personnes coincées sous les bombes à Alep Est. Cela n’implique pas qu’on ignore que les Etats-Unis manipulent et tuent en masse.

      Julien Salingue a raison, on n’a pas à choisir entre les puissances vendeuses d’armes et fauteuses de guerre, Etats-Unis ou Russie. (ajouter France, Allemagne, Grande-Bretagne, même si plus petit faiseurs).

      Il faut dénoncer tous ceux qui massacrent en masse.
      Et il faut se méfier de la propagande. Tout lire, mais en sachant qui écrit. Russia Today ne peut pas à mon avis publier sans l’aval de Poutine. Pour moi c’est un média de propagande (ce qui ne signifie pas que tout ce qui est dit est faux, c’est une question de présentation, de biais, de mise en valeur de certains faits et d’omerta sur d’autres faits ; parfois il peut y avoir des mensonges aussi).
      La télé occidentale ne dérange qu’exceptionnellement les intérêts américains. Omerta sur la situation en Palestine et à Gaza. Ne jamais dire qu’il y a beaucoup d’américains parmis les colons. Ne jamais poser le problème des débouchés pour l’industrie des armes américaine que créent ces multiples guerre (cela vaut aussi pour la France, pour l’Allemagne et pour la Russie, qui tous on une importante industrie des armes).

      Il a certains journalistes occidentaux en qui on peut avoir avoir confiance, c’est difficile d’accorder sa confiance globalement à un média.

    • C’est vrai qu’on aimerait que la couverture médiatique occidentale soit la même que celle pour Alep, pour le Yémen, pour Gaza, etc...
      Mais cela ne veut pas dire qu’on trouve qu’il faille abandonner les habitants d’Alep-est à Assad et à Poutine.

    • J’entends bien votre point de vue et je le respecte. Personnellement je ne soutiens ni Assad, ni Poutine, ni Daesh ni les USA, ni Hollande Valls et tutti quanti, je partage en grande partie l’article de Philippe Marlière : l’internationalisme de gauche est un humanisme intégral, il est bien entendu anti-belliciste, anti-impérialiste et se range aux côtés des opprimés, fussent-ils citoyen-nes cubain-nes ou vénézuélien-nes... L’internationaliste de gauche ne choisit pas ses guerres, il les condamne toutes. À Alep, ce sont des hommes, des femmes et des enfants que l’on massacre devant nos yeux. Il faut se mobiliser pour les sauver et les protéger de toute urgence. Toute autre considération est sans intérêt en cette heure tragique.
      Non Poutine n’est pas mon idole, vous vous trompez je ne fais que m’interroger (serait ce désormais le sens de ratiociner ?). Et en refusant tout commentaire même des plus modérés vous exercez vous même malheureusement une forme de censure tout comme Poutine.
      Cordialement @le_bougnoulosophe

    • Que le Hezbollah essaie d’obtenir, dans la négociation sur Alep, que des gens assiégés ailleurs (près d’Idlib apparemment) par des rebelles, soient en échange libérés aussi, et qu’ils empêchent les autobus de passer pour l’obtenir, cela peut se comprendre et même se justifier.
      Mais quand Poutine refuse les observateurs de l’ONU à Alep, on ne peut que craindre qu’il ait des actes très graves à cacher.

    • Syrie : Mediapart dépublie puis republie un post de blog critique
      http://www.arretsurimages.net/breves/2016-12-31/Syrie-Mediapart-depublie-puis-republie-un-post-de-blog-critique-id20

      " Lettre ouverte aux journalistes de Mediapart (et à quelques autres) ". Le 19 décembre, Swank, abonné à Mediapart, publie un billet de blog dans "L’espace Club" du site. "Une lettre énervée d’un abonné dégoûté", précise-t-il dès introduction de son billet, son dixième sur le site. Avant d’expliquer la raison de sa colère : "Ce à quoi nous assistons depuis quelques jours, c’est une atlantisation du débat public à marche forcée (...) Mediapart, journal indépendant qui n’a même pas l’excuse d’être détenu par Patrick Drahi, verse tristement dans le même matraquage éditorial". Selon le blogueur, qui ne donne aucun exemple pour justifier ses propos,"depuis la reprise d’Alep par les forces armées syriennes, les articles du site nous imposent le récit manichéen conforme à la ligne politique de Washington et du Quai d’Orsay".Dans un article publié le 14 décembre 2016, Mediapart, sous la plume de son journaliste René Backmann, critiquait pourtant "la passivité de Barack Obama et des diplomaties occidentales" depuis le début du conflit en Syrie.

      Egalement dans le viseur du blogueur : le débat vidéo organisé par Mediapart le 14 décembre, intitulé "Le martyre du peuple syrien". "Pendant plus d’une heure donc, nos invités – dont certains n’avaient plus mis les pieds en Syrie depuis des décennies - déroulèrent en toute tranquillité et sans qu’aucune contradiction ne leur soit opposée, le récit romantique de la révolution syrienne de 2011", critique Swank, pour qui "s’allier avec des groupes terroristes – au premier rang duquel Al-Qaïda - pour renverser le régime, fut un jeu dangereux et inconscient auquel Poutine a définitivement mis fin il y a quelques jours".

      "Atlantiste", Mediapart ? Le 21 décembre, sur le plateau de Mediapart Live, le directeur éditorial du site, François Bonnet, répondait aux critiques, en égrenant la liste de tous les articles anti-Otan que le site avait publié depuis sa création.

      Un post supprimé puis republié

      Le débat aurait pu s’arrêter là. Mais le post du blogueur a ensuite été supprimé par les équipes de Mediapart, le week-end du 23-24 décembre. Une censure dénoncée par Swank dans un nouveau post le 25 décembre, intitulé "Juste une mise au point". Dans celui-ci, il s’interroge : "Quelques heures avant d’être effacé, mon article était relayé sur la page Facebook de Jean-Luc Mélenchon. Faut-il y voir un rapport de cause à effet ? Je l’ignore". "J’avais encore une croyance naïve dans la possibilité d’une presse libre, indépendante, critique, ouverte au dialogue et au débat. Cette illusion a disparu", ajoute-t-il, avant d’annoncer sa volonté de se désabonner de Mediapart. "Je ne peux décemment pas continuer à payer l’abonnement d’un organe de presse qui censure mes billets de blog".

      Ultime coup de théâtre : le 26 décembre, le billet est remis en ligne. Dans les commentaires de la mise au point de Swank, Edwy Plenel, président du site, explique : "Nous avons republié votre « lettre énervée d’un abonné dégouté ». Elle avait été dépubliée par l’équipe restreinte chargée de la permanence du week-end qui a parfois bien le droit d’être à son tour « énervée et dégoutée »". Pour le fondateur de Mediapart, ce billet est un "pur délire", "sans aucune source, ni preuve". "Diaboliser ainsi ceux avec qui on est en désaccord, ce n’est pas débattre ni argumenter (…) C’est surtout verser dans une vision complotiste du monde, propre aux idéologies les plus régressives et les plus obscures", ajoute le journaliste.

      Pourquoi, dès lors, l’avoir republié ? Plenel s’appuie sur la déclaration des droits de l’homme, dans laquelle il est question de la liberté comme "pouvoir qui appartient à l’homme de faire tout ce qui ne nuit pas aux droits d’autrui". "Cette dépublication éphémère de votre billet est un rappel à ce principe de base d’une discussion argumentée et raisonnée, dans le respect de toutes celles et de tous ceux qui en sont témoins", estime-t-il.

    • "Lettre à un faux-frère"
      http://www.levilainpetitcanard.be/articles/blog/lettre-a-un-faux-frere_230825153
      En réponse à la lettre de Julien Salingue à un « camarade » qui s’obstine à justifier l’injustifiable.

      Cher Julien,
      Tu ne me connais pas, et moi, avant d’avoir lu ta missive, je ne savais pas grand-chose à ton sujet, sinon que tu étais membre d’Acrimed, qui est un organisme d’utilité publique que je respecte beaucoup.
      Si je prends la liberté de te répondre directement, c’est tout d’abord parce que selon tes propres termes, tu as choisi de t’adresser à un camarade imaginaire, un archétype. Et que je m’y reconnais quelque part, sinon sur les idées parfois tordues que tu lui prêtes, au moins sur un certain nombre de ses opinions politiques.
      C’est aussi parce que la lettre, le ton et le fond m’ont mis dans une rage noire, et qu’il m’a fallu plusieurs jours pour en trouver la cause exacte, en l’analysant à froid.
      Et c’est donc froidement, mais sur le même ton familier que je te répondrai publiquement.
      La cible : contrairement à ce que ton intitulé laisse penser, ton texte est une attaque sournoise et politique contre un candidat à l’élection présidentielle, Jean-Luc Mélenchon...
      Les sources : et puisque tu offres le bâton, allons-y gaiement. Quelles sont les sources de tes affirmations péremptoires quand elles ne sont pas notoirement fantaisistes ? La presse, ou plus exactement, la presse dominante, aussi appelée presse mainstream. Cette presse dont la quasi-totalité se trouve aux mains de quelques milliardaires et capitaines d’industrie totalement acquis à la cause atlantiste, quand leurs intérêts se confondent.
      Cette presse dont tu t’es fait profession de la décortiquer, et de la critiquer vertement à longueur de pages dans les colonnes d’Acrimed.
      Mais d’où viendrait, Cher Julien, que la presse serait presque invariablement critiquable s’agissant de certains sujets économiques, d’actualité sociale ou de politique intérieure ; et qu’elle deviendrait subitement irréprochable s’agissant du traitement de la crise en Syrie ? ...

      https://seenthis.net/messages/555960

  • Des soldats français en Syrie sans concertation avec son gouvernement souverain ? Ce serait un acte de guerre en regard du droit international ! 18 Novembre 2016 - RipouxBlique des CumulardsVentrusGrosQ
    http://slisel.over-blog.com/2016/11/des-soldats-francais-en-syrie-sans-concertation-avec-son-gouvernem

    Assemblée Nationale

    Question N° : 97353

    De M. Pierre Morange ( Les Républicains - Yvelines ) Question écrite

    Ministère interrogé > Défense Ministère attributaire > Défense

    Rubrique >politique extérieure Tête d’analyse >Syrie Analyse > attitude de la France.

    Question publiée au JO le : 05/07/2016

    Réponse publiée au JO le : 01/11/2016 page : 9118

    Texte de la question

    M. Pierre Morange souhaite attirer l’attention de M. le ministre de la défense sur l’inquiétude des citoyens relative à l’engagement des forces françaises en Syrie. Une source kurde a récemment confié à l’agence de presse russe Sputnik que des soldats français déployés dans le nord de la Syrie auraient commencé à construire une base militaire sur la colline de Mashta Nour surplombant la ville de Kobané dans la province d’Alep.

    Ils souhaitent savoir si cet acte est avéré et, dans l’affirmative, s’il a été commis en concertation avec le gouvernement démocratiquement constitué de Syrie. Il le prie de bien vouloir répondre à leurs interrogations.

    Texte de la réponse

    Conformément aux dispositions de l’article L. 413-9 du code pénal, les informations sollicitées par l’honorable parlementaire relatives à un éventuel engagement des forces armées françaises sur le territoire syrien sont couvertes par le secret de la défense nationale. Les précisions demandées ne peuvent donc être rendues publiques par le ministère de la défense.

     

    La question de Monsieur Pierre Morange, député, était claire : Le gouvernement francais envoie-t-il des troupes, sans déclaration de guerre, sans accord ni information du parlement francais, dans un pays souverain pour appuyer des milices terroristes contre un gouvernement élu et reconnu a l’ONU ?

    Le refus de répondre en invoquant un secret défense autorise à penser que tel est bien le cas.

    Or de telles actions peuvent constituer divers crimes de forfaiture, d’abus de pouvoir, car la constitution impose au gouvernement de consulter le parlement en cas de déclaration de guerre, ainsi qu’après 4 mois pour l’envoi de troupes sur un territoire étranger. De plus le droit international impose que les actions guerrières doivent être précédées de déclaration de guerre ou de mandat de l’ONU.

    Il y a donc alors crime de guerre, violation de la constitution, soutien au terrorisme. Le précédent ministre des affaires étrangères déclarait d’ailleurs que Al Nosra “faisait du bon boulot”. Le candidat préféré de l’”établissement français” a initié, en tant que ministre des affaires étrangères de Sarkozy, la violation du principe de la reconnaissance des états en fermant notre ambassade de Syrie et reconnaissant comme gouvernement des “rebelles” dont les exploits terroristes ne sont plus à démontrer. Il a aussi mis en oeuvre avec le gouvernement et le président de l’époque la guerre contre la Libye et l’assassinat de son président, crimes de guerres évidents. Cette guerre a d’ailleurs, avec celle de Syrie, provoqué toute cette déstabilisation de l’Afrique et du moyen Orient, entraînant notamment cette terrible “crise des migrants”

    Lorsque l’on voit notre président et le gouvernement demander la suppression du droit de veto à l’ONU, et par conséquent celui de la France, ainsi que la poursuite de chefs d’Etat (en visant Poutine et Assad, bien sur), devant les tribunaux internationaux, il devrait bien réflèchir à qui pourrait à la fin s’y retrouver. Mais le pire est que sa demande risque d’amener l’intervention de l’OTAN ou d’autres forces étrangères sur notre sol, au prétexte de “défendre des droits de l’homme”, si les troubles s’aggravaient sur notre territoire, et que nos derniers outils de souveraineté aient été détruits ou livrés à nos ennemis (appellés aujourd’hui alliés par nos dirigeants)

    JMaillard

     
    http://canempechepasnicolas.over-blog.com

  • Sahel : une enquête fait parler les armes - Libération
    http://www.liberation.fr/planete/2016/11/16/sahel-une-enquete-fait-parler-les-armes_1528830

    Une enquête minutieuse du Conflict Armement Research apporte un nouvel éclairage sur les conflits en cours en Afrique du Nord et de l’Ouest : le stock libyen « descend » moins vers le sud, les arsenaux nationaux du Mali sont largement pillés, et les armes du jihad peuvent circuler de Kobané à Ouagadougou.

  • Erdogan accuse Washington d’armer les Kurdes syriens - 7SUR7.be
    http://www.7sur7.be/7s7/fr/16921/Syrie/article/detail/2884388/2016/09/23/Erdogan-accuse-Washington-d-armer-les-Kurdes-syriens.dhtml

    « Il y a encore trois jours, deux avions remplis d’armes ont été envoyés à Kobané (en Syrie) au PYD et au YPG », a déclaré le président turc jeudi soir au cours d’un dîner de gala organisé à New York, dans des propos rapportés par l’agence progouvernementale Anadolu. Le dirigeant turc a déclaré s’être entretenu de cette question avec le vice-président américain Joe Biden sans « réussir à (lui) faire entendre raison ».

    #Turquie

  • La #Syrie ouverte à tous les vents

    Il fut un temps où la Syrie jouait un rôle régional important. Elle était un partenaire politique avec lequel il fallait compter dans le triangle saoudien-égyptien-syrien, voire même, dans certains cas, un décideur. Il est était impensable de faire quoi que ce soit au Moyen-Orient sans solliciter la Syrie. Même au moment de l’intervention américaine en Irak à laquelle elle s’était opposée, les canaux de dialogue n’ont jamais été rompus entre Washington et Damas.

    Aujourd’hui, une toute autre équation s’est mise en place. Tout se passe comme si n’importe qui pouvait venir en Syrie et s’y installer. Ouverte à tous les vents, elle est plongée dans une situation qu’il devient de plus en plus difficile à réparer et qui l’oriente vers des divisions irréversibles. Une situation, à dire vrai, que personne ne peut prétendre contrôler, et Bachar al-Assad moins qu’aucun autre : cela fait longtemps que les troupes terrestres de l’armée loyale sont sous la supervision des Iraniens et que l’armée de l’air est sous le contrôle des Russes.

    Il suffit de dresser la liste des intérêts qui s’entremêlent dorénavant sur le terrain pour comprendre qu’il est devenu presque impossible d’envisager une solution.

    – On dit que les Britanniques sont prêt de Al-Tanef, un point de frontière avec l’Irak, pour y entraîner des hommes de l’armée libre

    – Au nord-est de la Syrie, dans les zones sous contrôle kurde, les Américains comptent trois bases.

    – Les Français sont présents à Kobané.

    – La présence militaire iranienne est officielle en Syrie. En plus les millitants du Hezbollah, on sait que des Pakistanais, des Afghans et des Irakiens chiites se battent au côté du régime.

    – Les Russes comptent quatre bases en Syrie : Tartous, Lattaquié, Hmemeim et Palmyre. Et ils n’interviennent plus seulement depuis les airs. A Alep, ils ont désormais des hommes sur le terrain, d’ailleurs tous les arrangements, qui se font en Syrie, sont menés par des généraux russes, c’est un champ d’expérimentation.

    – On parle maintenant, que même les Chinois ont envoyé des soldats en Syrie, qui aident les russes dans leur tâche, bien entendu pour avoir leur place au tour de la table de négociation.

    – Et évidemment, il y a toute la partie qui reste sous le contrôle de Deich.

    – Il ne manquait plus que les Turcs, qui ont à leur tour fait leur entrée en Syrie, à Jarablus, à même pas 50 km de Kobané. Ce qui est sûr, c’est qu’ils ne sont pas entrés sans l’accord des Russes – et donc sans que le régime soit au courant. Cette entente est une nouveauté. Depuis le début du conflit, Turcs et Russes s’étaient farouchement opposés sur la question syrienne. L’objectif des Turcs est très clair : il s’agit d’empêcher les kurdes d’installer un Kurdistan qui s’étendrait sans discontinuer de l’est à l’ouest de la Syrie. Nous parlons des mêmes Kurdes que ceux sur lesquels la coalition occidentale s’est appuyée pour chasser Deich. C’est révoltant de les avoir laissé croire à la possibilité de grand territoire kurde sur tout le nord de la Syrie et à l’west de l’Euphrate.

    – Même la coalition nationale syrienne, l’opposition au régime basée en Turquie, parle ces jours d’installer un gouvernement de transition dans les zones libérées, dans la province d’Idlib. Elle doit se dire que si elle n’entre pas maintenant, elle n’aura pas sa place à la table des discussions, alors que tous le monde y a mis les pieds pour être sûr de pouvoir s’y assoir.

    Pendant ce temps, le nettoyage ethnique continue de progresser. La semaine dernière, un accord a été conclu entre l’armée loyale et les rebelles de #Daraya. La ville est rendue à l’armée sous condition de faire sortir les rebelles et leur famille. Quand on sait que Daraya a été la première ville à se soulever en 2011… On voit bien comment s’opère le changement démographique qui dessine peu à peu une Syrie « utile » (pour le régime), une partie de la Syrie (# 30%) qui engloberait Damas, Homs, Hama, Tartous et Lattaquié.

    Le premier accord de ce type concernait Homs en 2014. Les rebelles ont quitté la ville pour se réfugier dans la province d’Idlib. Il y a eu des accords similaires à Madaya, Zabadani, et on est En train de préparer celui de Mouadamya, autant de villes, toutes sunnites et opposées au régime, qui ont été assiégées par l’armée mettre la habitants sous pression et les forcer en fin à fuir. Ce n’est pas tout : le régime et les Russes s’acharnent à bombarder la région d’Idlib pour que tous ces malheureux évacués ne finissent par y trouver que des ruines à l’arrivée. (ci-dessous, la photo d’une nuit rouge il y a deux jours à Idlib, proie des bombes du régime et de l’aviation russe).


    http://lerefugiesyrien.blogactiv.eu/2016/08/31/la-syrie-ouverte-a-tous-les-vents
    #guerre #conflit #internationalisation #ingérence_étrangère

  • القوات الكردية هل ستكون “حصان طروادة” الامريكي لاستعادة مدينتي الرقة والموصل.. وما هو المقابل الذي ستحصل عليه؟ وهل اقتربت نهاية “الدولة الاسلامية” فعلا؟ وكيف يتسلل اكبر جنرال امريكي الى سورية ويوزع ادوار الهجوم على قواته وحلفائه دون ان يعترض احد؟ | رأي اليوم
    http://www.raialyoum.com/?p=444667

    Commentant la visite du général Vogel, responsable des forces US au Moyen-Orient à Kobané/Aïn al-Arab, ABA pose ces trois questions que je traduis :

    الاول : كيف يصل جنرال امريكي، ويحمل هذه الرتبة العالية (الجنرال فوتيل) الى الاراضي السورية، ويجتمع مع قواته الخاصة، واخرى عربية وكردية، دون ان يأخذ اذنا من احد، فهل اصبحت سوريا ارضا مشاعا مفتوحة للجميع، لكي يعدون طبخاتهم حول حاضرها مستقبلها؟ وكيف يقبل الجنرالات الروس بذلك، ولماذا لم يصدر عنهم اي احتجاج، والشيء نفسه يقال ايضا عن حلفائهم السوريين والايرانيين، فهل هم جميعا متواطئون في هذه الطبخة؟ ام انهم آخر من يعلم؟
    1) Comment un général US, avec un grade aussi élevé, peut-il arriver sur le territoire syrien, se réunir avec ses troupes [250 membres des forces spéciales] et d’autres arabes [celles d’un groupe de l’opposition soutenu par les USA] et kurdes [du PYD], sans demander l’autorisation de personne ? La Syrie est-elle devenue un territoire ouvert à tous pour que chacun vienne y faire sa etite cuisine sur la situation actuelle et l’avenir de ce pays ? Comment les généraux russes ont-ils pu accepter cela ? Pourquoi n’ont-ils élevé aucune protestation ? La question vaut aussi pour leurs alliés syriens et iraniens : tout le monde participe-t-il à cette petite cuisine ? Ou bien ont-ils été les derniers à en être informés ?
    ثانيا : ما هو الثمن الذي سيحصل عليه الاكراد، سواء السوريين منهم او العراقيين، مقابل الدخول في هذه الحرب المحورية ضد “الدولة الاسلامية”؟ وهل ستأتي الدولة الكردية الموعودة على انقاض “الدولة الاسلامية”، كليا او جزئيا؟
    2) Comment les Kurdes, de Syrie ou d’Irak, seront-ils payés pour cela [l’éventuelle reprise de Rakka et de Moussoul] ? Un Etat établi sur les ruines de l’"Etat islamique", partiellement ou en totalité ?
    ثالثا : اين العرب، وحلفاء امريكا خصوصا، مثل قطر والسعودية؟ واين الاتراك؟ وهل هم على علم بهذه السيناريوهات ويشكلون طرفا فيها؟ ام انهم مهمشون كليا مثل “الجيش الحر” و”المعارضة المعتدلة”، على سبيل المثال؟
    3) Où sont les Arabes, les alliés des USA en particulier, les Saoudiens ou les Qataris ? Où sont les Turcs ? Sont-ils au courant de ces accords [la possibilité d’une utilisation des Kurdes par les USA] ? Sont-ils totalement marginalisés, à l’image de l’"Armée syrienne libre" ou de "l’opposition modérée" par exemple ?

    #syrie

  • Syrie : « Pourquoi les Américains n’ont-ils rien fait ? »

    http://www.lemonde.fr/international/article/2016/03/15/syrie-pourquoi-les-americains-n-ont-ils-rien-fait_4882787_3210.html

    C’est l’histoire d’un hold-up tragique, aux répercussions mondiales, et de quelques hommes de bonne volonté qui ont tenté de l’empêcher. Cinq ans après le premier défilé anti-Assad, dans les souks de Damas, le 15 mars 2011, la révolution syrienne est prise en tenailles par les forces prorégime, d’une part, et les djihadistes du Front Al-Nosra et de l’organisation Etat islamique (EI), de l’autre.

    Ces deux formations issues d’Al-Qaida, initialement absentes de la révolution, ont réussi une percée foudroyante, au détriment des combattants de l’Armée syrienne libre (ASL), les pionniers de l’insurrection. La bannière noire des djihadistes flotte désormais sur la plus grande partie du nord du pays, une région libérée à l’hiver 2012-2013, et dont les opposants rêvaient de faire le laboratoire d’une nouvelle Syrie.

    Les principales causes de ce détournement, qui a ébranlé tout le monde arabe et dont l’onde de choc est ressentie jusque dans les capitales européennes, sont bien connues : la brutalité sans limite du régime syrien, qui a semé le chaos propice à l’implantation des extrémistes ; le jeu trouble des bailleurs de fonds du Golfe, qui ont contribué à la confessionalisation du soulèvement ; et le morcellement de l’opposition, qui a multiplié les erreurs.

    A ces trois facteurs, il faut en rajouter un quatrième : le dédain des Etats-Unis pour les opposants syriens, dont les signaux d’alerte ont été régulièrement ignorés. Le Monde a mené l’enquête, recueillant la confession exclusive d’un homme, le maître-espion de l’Armée syrienne libre (ASL), « M. » rencontré à trois reprises.

    Pendant près de deux ans, il a transmis à la CIA des
    rapports très fouillés, nourris par son réseau d’informateurs. Une mine de données, truffées de cartes, de photographies, de coordonnées GPS et de numéros de téléphone.

    « Du moment où Daech [l’acronyme arabe de l’EI] comptait 20 membres à celui où il en a compté 20 000, nous avons tout montré aux Américains, explique cette source. Quand on leur demandait ce qu’ils faisaient de ces informations, ils répondaient de façon évasive, en disant ce que c’était entre les mains des décideurs. »

    Le Monde a pu prendre connaissance de plusieurs de ces pièces et en récupérer quelques-unes, notamment la localisation des bureaux et des check points des djihadistes à Rakka, leur quartier général en Syrie. Par la même filière, Le Monde a eu accès à un plan secret, élaboré à l’été 2014, en concertation avec Washington, qui devait permettre d’expulser l’EI de la province d’Alep. Repoussée à plusieurs reprises par les Américains, l’attaque a finalement été torpillée fin 2014, par un assaut surprise du front Al-Nosra, sur la brigade de l’ASL qui devait la mener.

    Des entretiens avec deux autres hommes de l’ombre ont permis d’authentifier ces documents, ainsi que de recouper et d’enrichir le récit initial. Mis bout à bout, ces éléments dessinent les contours d’une formidable occasion manquée. Si elle avait été saisie, il est probable que la communauté internationale se serait retrouvée dans une situation beaucoup plus confortable qu’elle ne l’est, aujourd’hui, face à l’EI.

    « Nous sous-estimons la richesse que les Syriens peuvent apporter en termes de renseignements sur l’EI », affirme Charles Lister, un spécialiste des mouvements djihadistes syriens, qui a été confronté à de multiples reprises aux récriminations d’opposants, dont les informations avaient été ignorées par les Etats-Unis.

    « A la fin de l’année 2013, nous avons raté deux coches, renchérit un diplomate occidental. Le premier, c’est l’attaque chimique contre la banlieue de Damas [le 21 août 2013], qui est restée sans réponse, ce qui a remis en selle le régime. Le second, c’est le renforcement de l’acteur qui aurait lutté contre Daech, et l’ASL était la mieux placée pour assumer ce rôle. »

    Appelons notre source « M. ». Pour des raisons de sécurité, son identité ne peut être révélée, de même que celle de tous les autres Syriens cités dans cet article. Dans la Syrie d’aujourd’hui, il ne fait pas bon espionner l’EI. Ces derniers mois, plusieurs militants révolutionnaires exilés en Turquie ont payé de leur vie leur engagement antidjihadiste.
    La carrière de « M. » dans le renseignement débute en avril 2013, lorsqu’il intègre le Conseil militaire suprême (SMC). Formé quatre mois plus tôt, cet organe ambitionne de coordonner les opérations des brigades labellisées ASL, et de centraliser l’aide financière qui afflue alors dans le plus grand désordre.

    « M. » contribue d’abord à la mission d’enquête des Nations unies sur
    l’usage d’armes chimiques en Syrie. Puis, il participe à des médiations destinées à obtenir la libération d’étrangers, capturés par des groupes djihadistes. Mais très vite son attention se porte sur l’EI, qu’il a observé à Saraqeb, une ville de la province d’idliv.

    « Son responsable sur place s’appelait Abou Baraa Al-Jazairi, c’était un Belgo-Algérien, raconte M. Il jouait à l’idiot, il fumait du haschisch en permanence. Il parlait de créer un califat, qui s’étendrait comme un cancer, et tout le monde pensait qu’il rigolait. Mais son parcours m’intriguait. Il avait combattu en Irak et en Afghanistan, il parlait le russe, le français et l’anglais, avec un background d’ingénieur. Tout sauf un amateur. Quand ses hommes ont ouvert un tribunal et ont commencé à y juger des gens, on a réalisé que les bêtises d’Abou Baraa étaient sérieuses. »

    En accord avec ses chefs, « M. » décide de monter des dossiers sur ces intrus. L’EI s’appelle alors l’Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL). Ses combattants, non Syriens en majorité, se distinguent par leur empressement à imposer leur loi sur le territoire où ils se déploient, contrairement à leurs rivaux d’Al-Nosra, mieux intégrés à l’insurrection, qui se concentrent sur le renversement du régime. Ils arrivent par centaines chaque mois à la frontière syro-turque, dont la traversée est alors un enfantillage.

    « Ces étrangers venaient voler notre pays, nos droits et notre terre », s’indigne « M. » qui les identifie comme un danger mortel pour la révolution. « Si vous n’arrêtez pas ce flot de terroristes, dans trois mois, même les Syriennes porteront la barbe », s’alarme son chef, à peine ironique, lors d’une rencontre en Turquie avec Robert Ford, l’ambassadeur américain auprès de l’opposition syrienne.

    Infiltré au sein de l’EI

    « M. » est envoyé se former à l’étranger. A son retour, il recrute une trentaine d’hommes de confiance, disséminés dans les villes qui sont en train de tomber sous la coupe de l’EIIL. Jarablus, Al-Bab, Tell Abyad, Manbij, Rakka. Pour financer son réseau, l’espion en chef demande
    30 000 dollars (27 000 euros) par mois aux Etats-Unis. Il en reçoit 10 000. Les rencontres avec ses officiers traitants se tiennent dans les palaces de la Turquie centrale, à Adana, Gaziantep, Ankara.

    L’un des agents les plus précieux du SMC est une taupe infiltrée dans le bureau des affaires financières de l’EIIL, situé à Manbij, non loin de la frontière turque. Un rapport rédigé sur la base de ses « infos », que Le Monde s’est procuré, fait état de transfert d’argent de Radwan Habib, un parlementaire syrien, membre du Ba’as, le parti au pouvoir, vers son frère Ali, émir de l’EI à Maskaneh, une petite ville sur l’Euphrate. Dix versements sont recensés entre novembre 2013 et avril 2014, dont l’un d’une valeur de 14 millions de livres syriennes (environ 67 000 euros).
    « Initialement, il s’agissait pour Radwan Habib de soutenir son frère, un simple chef rebelle, face à une tribu rivale, détaille « M ». Mais quand Ali est passé chez Daech, l’argent a continué à affluer. »

    Les mouchards de l’ASL ne font pas qu’écouter aux portes. Ils font aussi de la reconnaissance de terrain, parfois très risquée. Au Monde, « M. » a montré la photographie, prise au téléobjectif, d’un camp d’entraînement, dans le nord de la province de Lattaquié, fréquenté par des djihadistes étrangers. « Je l’ai évidemment transmise à mes contacts occidentaux, avec les coordonnées GPS, mais je n’ai eu aucun retour, maugrée « M. ». Des agents à moi ont aussi réussi à se procurer des numéros de téléphone de responsables de Daech, des numéros de série d’appareils satellites et même des adresses IP. Mais là encore, zéro retour. »

    A l’époque, au tournant de l’année 2013-2014, les Etats-Unis sont encore loin d’être entrés en guerre contre l’EI. Ils observent en retrait les groupes armés qui poussent alors comme des champignons, tentant de déceler ceux qui menacent leurs intérêts et ceux avec lesquels ils pourraient travailler.
    « Obama et son équipe ont toujours été très réticents à utiliser la force militaire en Syrie et à équiper les rebelles, rappelle Robert Ford, qui a pris sa retraite de diplomate en février 2014, et officie aujourd’hui comme chercheur au Middle East Institute. Leur inquiétude était double : d’une part que les armes fournies soient utilisées contre le régime Assad, ce qui aurait été une grave violation du droit international [les Etats-Unis considérant toujours que, même si leur ambassade à Damas a fermé, le régime Assad

    reste dépositaire de la légalité syrienne]. D’autre part, que ces armes puissent atterrir dans les mains de groupes comme Nosra. »
    A cet égard, la capture des bureaux et des entrepôts de l’ASL, en décembre 2013, dans le village d’Atmeh, sur la frontière turque, marque un tournant. En quelques heures, des groupes islamistes armés s’emparent des lieux et de l’arsenal qui s’y trouve. C’est le coup de grâce pour le SMC, déjà court-circuité par de nombreux bailleurs de la rébellion. Le Qatar et la Turquie par exemple disposent de leur propre filière et de leurs propres clients, hors ASL. Des armes arrivent même de Libye par bateaux, affrétés par un imam de Stockholm, Haytham Rahmé, membre des Frères musulmans.

    Halte à la foire, disent les Etats-Unis. Désormais tout devra passer par le « MOM » [un acronyme du turc qui signifie centre d’opérations militaires], une structure de coordination, hébergée dans les bases militaires du sud de la Turquie, où siègent les principaux parrains des rebelles (Arabie saoudite, Qatar, Turquie, France et Royaume-Uni), sous la baguette de la CIA. Pour faire avaler la pilule aux rebelles, les Etats-Unis leur promettent des armes antichars : les missiles TOW. Ils seront fournis par l’Arabie saoudite et la formation des artilleurs sera faite au Qatar, par des experts américains. Un coup à trois bandes.
    La première brigade de l’ASL à recevoir ces engins, au mois de mars 2014, s’appelle Harakat Hazm. Elle a été fondée au début de l’année par des anciens du bataillon Farouk, les défenseurs de la vieille ville de Homs. Avec les TOW – dont les premières vidéos font sensation sur Internet –, 4 000 hommes répartis entre les provinces d’Idlib, d’Alep et de Hama et un budget mensuel de quelques centaines de milliers de dollars, réglé par l’Oncle Sam, Hazm voit loin : elle aspire à devenir le principal pôle rebelle du nord.

    « Ce n’était pas la priorité de Washington »

    C’est là que se recycle « M. » après le fiasco du SMC. Pendant tout l’été 2014, alors que les hordes de l’Etat islamique proclamé par Abou Bakr Al-Baghdadi déferlent sur Mossoul, en Irak, il travaille à un plan secret, susceptible de bouleverser l’équilibre des forces dans le nord de la Syrie. Il s’agit d’attaquer les positions de l’EIIL du nord au sud de l’axe Azaz-Alep, ce qui compléterait l’offensive du mois de janvier 2014, qui avait déjà permis d’expulser les djihadistes d’Alep. Le Monde a vu les documents soumis aux Américains en préparation de cette offensive, à laquelle d’autres brigades de l’ASL devaient se joindre, comme Jaysh Al-Moudjahidin, basée à Alep.

    Tout était prévu, heure par heure, rue par rue : de l’itinéraire suivi par les assaillants, aux filières de ravitaillement en armes et en essence. Un travail de fourmi nourri par l’armée d’indics de « M ».
    « Dans chacun des villages tenus par Daech, on connaissait le nombre d’hommes armés, l’emplacement de leurs bureaux et de leur planque, on avait localisé les snipers et les mines, on savait où dormait l’émir local, la couleur de sa voiture, et même sa marque. D’un point de vue tactique comme stratégique, on était prêts. »

    Les Américains hésitent, demandent des précisions. Mais le temps presse. Dans la région d’Idlib, le Front Al-Nosra se fait menaçant. Au mois d’août, il s’empare de Harem, dans la région d’Idlib, en y délogeant les hommes du Front des révolutionnaires syriens (FRS), un groupe estampillé ASL et armé par le MOM, commandé par Jamal Maarouf, un ancien ouvrier du bâtiment reconverti en seigneur et profiteur de guerre.

    L’offensive d’Al-Nosra pose un dilemme à Hazm qui connaît la popularité du groupe sur le terrain, non seulement parmi les civils mais aussi dans les rangs des rebelles modérés. « Nous avons sondé nos contacts au Conseil de sécurité national, à Washington, se remémore un consultant syrien, embauché par Hazm. Nous leur avons parlé de combattre le Front Al-Nosra, avant qu’il ne devienne trop fort. Ils ont refusé, en expliquant que ce n’était pas leur priorité. »

    L’urgence, pour la Maison Blanche, est à Kobané. A la mi-septembre 2014, l’EI rentre dans cette bourgade kurde, adossée à la frontière turque. L’aviation américaine, déjà à l’œuvre en Irak, bombarde aussitôt ses colonnes de pick-up. Pendant tout l’automne, l’US Air Force offre aux combattants du YPG, le bras armé du mouvement autonomiste kurde, un soutien aérien massif, qui débouchera sur le retrait des djihadistes, fin janvier 2015. Les membres d’Hazm, qui comme la plupart des révolutionnaires syriens se méfient du YPG, coupables à leurs yeux de collusion avec le régime syrien, observent la bataille avec des sentiments mêlés.

    Car parallèlement, la planification de leur propre offensive contre l’EI s’est enlisée. Beaucoup de réunions dans les palaces turcs et toujours pas de feu vert. « Les Américains rechignaient à nous fournir des images satellites, déplore « M ». Ils disaient aussi que leurs avions ne pourraient pas nous aider une fois les combats avec l’EI commencés. Tout ce qu’ils nous proposaient, c’était de nous débarrasser d’un ou deux obstacles, avant le début de l’offensive. »

    Le Front Al-Nosra ne leur en donnera pas l’occasion. En novembre, il s’empare des QG du FRS et de Hazm dans la province d’Idlib. En quelques semaines, ses combattants balaient leurs rivaux, en qui ils voient une copie conforme des « Sahwa », ces milices sunnites que Washington avait mobilisées en Irak, de 2007 à 2010, pour défaire Al-Qaida. En réaction, Washington suspend son aide militaire et financière aux deux groupes rebelles syriens. Une réunion des chefs de l’ASL est organisée en urgence à Reyhanli, du côté turc de la frontière.
    Dans une atmosphère électrique et enfumée, le chef de Hazm, Hamza Al-Shamali, plaide pour une riposte musclée à Nosra et surtout un engagement à s’entraider, en cas de nouvelle attaque. « Tous les chefs de l’ASL ont dit d’accord en bombant le torse, se rappelle un conseiller de l’opposition syrienne, présent ce jour-là. Mais au bout de quelques minutes, j’en ai vu qui se mettaient déjà à douter. Quand, au mois de janvier, Nosra a attaqué le dernier QG de Hazm à l’ouest d’Alep, personne n’a bougé. La vérité, c’est que Nosra faisait peur à tout le monde. Et que les Américains n’ont pas encouragé leurs autres clients à réagir. »

    Lâchage ? Manipulation ? L’ex-ambassadeur américain Robert Ford, qui n’était plus alors en poste, répond sur un ton clinique. « Les membres de Nosra qui ont défait Hazm ne préparaient pas d’attaque contre des cibles américaines. Ils n’étaient pas une priorité. Et par ailleurs, les Etats-Unis ont toujours été nerveux sur la fiabilité des groupes armés du nord de la Syrie », dit-il en visant implicitement la formation de Jamal Maarouf, accusé de multiples exactions.

    Le fiasco du programme « Train and Equip »

    En Turquie, « M. » fulmine. A la suite d’une ultime rencontre, il coupe les ponts avec ses officiers traitants. « Si nous avions pu aller au bout de notre plan, nous serions considérés aujourd’hui comme les partenaires obligés dans la lutte contre le terrorisme, dit-il. Mais visiblement, quelqu’un ne voulait pas que nous accédions à cette position. »

    « Je ne crois pas aux théories du complot, corrige le consultant d’Hazm, associé de près à la filière CIA. Obama n’est pas interventionniste, c’est comme ça. Il estime que c’est aux Etats du Moyen- Orient de gérer leur chaos. Son seul souci, c’est de parler avec tout le monde. Quant à l’opposition, elle ne peut pas se plaindre. Elle a reçu plein d’armes. Mais elle a fait trop d’erreurs. »

    Sur le terrain, l’épisode de l’automne 2014 a des conséquences dramatiques. De peur de subir le même sort que Hazm et le FRS, les autres leaders de l’ASL se placent plus ou moins sous la tutelle du Front Al-Nosra. Plus possible pour les modérés de prendre des initiatives sans son aval. « Nosra s’est mis à prélever une partie de l’aide humanitaire et militaire qui arrive à l’ASL, accuse Jamal Maarouf, rencontré dans une banlieue du sud de la Turquie, où il vit aux crochets du gouvernement Erdogan. Mais il leur laisse les missiles TOW dont il a besoin pour détruire les tanks du régime. Il sait que s’il s’en empare, les Américains cesseront de les livrer. »

    A l’été 2015, le fiasco du programme « Train and Equip » (« Entraînement et équipement ») qui devait permettre de former des rebelles anti-EI, pousse les conséquences des errements américains dans ce conflit à leur paroxysme. A peine entrés en Syrie, les quelques dizaines d’hommes armés sélectionnés à la va-vite par le Pentagone, sont dépouillés de leurs armes par les combattants du Front Al-Nosra. Parce qu’il interdisait à ses recrues de combattre le régime, le Pentagone n’avait pas jugé bon d’offrir à ses « protégés » une couverture aérienne.

    Depuis la Turquie, « M. » ressasse son amertume. Il voit les Kurdes du YPG, avec lesquels les Etats-Unis collaborent de plus en plus, s’arroger le rôle dont il rêvait. Son ultime travail pour les Américains a consisté à monter un gros rapport sur Rakka, le sanctuaire de l’EI en Syrie. Un document qui comporte l’organigramme local de l’organisation djihadiste, de l’émir jusqu’aux responsables des check points, ainsi que des pages entières de coordonnées GPS. « C’était il y a un an et demi et Rakka est toujours la capitale de Daech », vitupère « M. ».

    Palmyre abandonnée

    Un autre Syrien partage sa colère. Un ancien officier des services de renseignements du régime Assad en rupture de ban, reconverti dans le business au Royaume-Uni, qui sert d’intermédiaire discret à l’ASL. Le Monde l’a rencontré en novembre, dans un hôtel de Gaziantep, pour parler à sa demande de Palmyre. Quelques mois plus tôt, en juin 2015, la célèbre cité antique avait été saisie par les troupes de l’EI, en un raid éclair qui avait stupéfait le monde entier. Une attaque dont les Américains avaient pourtant été prévenus, affirme-t-il.

    « J’étais à Iskanderun [un port turc, non loin de la Syrie]. Des gars à moi à Soukhné [une ville à une centaine de kilomètres à l’est de Palmyre] m’ont appelé pour me dire que des jeeps de l’EI fonçaient vers Palmyre. J’ai alerté la CIA et le Pentagone. La seule réponse que j’ai eue, c’est qu’ils avaient vu eux aussi le départ des convois, mais que leur pilote avait repéré des enfants dans une camionnette. Et les autres véhicules alors ? »

    Cette source n’a pas produit de documents étayant ses propos. Mais ils sonnent juste. « Dans l’opposition, tout le monde savait au moins dix jours à l’avance, que l’EI allait attaquer Palmyre, assure l’ex-consultant d’Hazm. C’est du terrain, plat, désertique, facile à bombarder. Pourquoi les Américains n’ont-ils rien fait ? Cela reste un mystère ». L’analyste Charles Lister n’a pas de réponse non plus. « L’opposition doute depuis longtemps des objectifs des Etats-Unis en Syrie, dit-il. Et il semble que la méfiance existe de l’autre côté aussi. Pourtant l’EI ne pourra jamais être vaincu sans l’aide des Syriens du terrain, autrement dit, l’opposition, majoritairement sunnite et arabe. »

    Dimanche 13 mars, une autre brigade de l’ASL, la Division 13, a été défaite par le Front Al-Nosra dans la ville de Maarat Al-Numan et les villages environnants. Après le FRS et Hazm, c’est un nouveau groupe modéré qui s’incline face aux djihadistes. La série noire continue. Il est minuit moins le quart en Syrie.

  • Erdogan n’a pas aimé la visite de Brett Mc Gurk à Kobané. Ni non plus la jolie photo souvenir qui a émergé sur twitter : http://seenthis.net/messages/456795#message456837
    Certes Brett avait fait des efforts pour ne pas mentionner sur les réseaux sociaux le nom ni un insigne du YPG, lorsqu’il a évoqué son voyage à Kobané à la veille des pourparlers de Genève dont le YPG était exclu. Seulement une rencontre avec les SDF, ce qui est très différent comme chacun sait : http://seenthis.net/messages/456490
    Erdogan calls on US to choose between Turkey or Syrian Kurds
    http://news.yahoo.com/erdogan-calls-us-choose-between-turkey-syrian-kurds-145705967.html?soc_s

    Istanbul (AFP) - Turkish President Recep Tayyip Erdogan expressed anger over a US official’s visit to a Kurdish militia group controlling the Syrian town of Kobane, urging Washington to choose between Turkey and the “terrorists” there.
    A delegation including senior US diplomat Brett McGurk, special envoy to an international coalition fighting IS in Syria and Iraq, last week met members of the Kurdish People’s Protection Units (YPG), a powerful militia that is in control of Kobane.
    The meetings come after the YPG’s political wing, the Democratic Union Party (PYD), was excluded from new peace talks in Geneva being organised by the UN. Ankara had threatened to boycott the talks if PYD was invited.
    “He visits Kobane at the time of the Geneva talks and is awarded a plaque by a so-called YPG general?” Erdogan told reporters on his plane returning from a trip to Latin America and to Senegal.

    #YPG #SDF #Erdogan

  • Saudi Arabia offers to send ground troops to Syria to fight Isis | World news | The Guardian

    http://www.theguardian.com/world/2016/feb/04/saudi-arabia-ground-troops-syria-fight-isis

    Saudi sources told the Guardian that thousands of special forces could be deployed, probably in coordination with Turkey

    Syrian government troops fire at Isis group positions near Mahin, Syria. Photograph: AP

    Ian Black Middle East editor
    @ian_black

    Thursday 4 February 2016 20.06 GMT
    Last modified on Thursday 4 February 2016 20.07 GMT

    Saudi Arabia has offered for the first time to send ground troops to Syria to fight Islamic State, its defence ministry said on Thursday.

    “The kingdom is ready to participate in any ground operations that the coalition (against Isis) may agree to carry out in Syria,” said military spokesman Brigadier General Ahmed al-Asiri during an interview with al-Arabiya TV news.

    #arabie_saoudite #syrie #ei #is #isis

    • Très sceptique sur les capacités militaires des forces, même spéciales, des Saoudiens. J’imagine que l’apport serait surtout financier et en termes de couverture politique.
      Reste que cela relance l’idée qu’il y a dans les cartons d’Erdogan un plan d’invasion du nord de la Syrie.
      Sur le site de l’influent think tank WINEP on trouvait déjà évoqué, il y a peu, un plan américano-turc pour contenir le PYD en prenant du territoire à Da’ich :
      http://seenthis.net/messages/450143
      Patrick Cockburn, il y a quelques jours, se demandait dans The Independent si Erdogan, étant ce qu’il est, ne serait pas tenté par un tel coup de force - avec ou sans l’aval de Washington -, malgré son caractère désormais extrêmement risqué, voire apocalyptique :
      http://www.independent.co.uk/news/world/middle-east/syrian-civil-war-could-turkey-be-gambling-on-an-invasion-a6844171.htm

      Il se pourrait bien que ce soit ce genre d’espérances, parmi d’autres et fondées ou pas, qui a fait que l’opposition de Ryadh s’est fait un devoir de multiplier les conditions à Genève, malgré la dynamique négative sur le terrain militaire pour eux. Question posée ici par : @nidal : http://seenthis.net/messages/455545#message455976

    • Et le point de vue de Pepe Escobar sur la question :
      http://seenthis.net/messages/457872

      Comme si les choses n’étaient pas assez confuses, tous ces think tanks formant le royaume du baratin aux USA nous rabâchent maintenant qu’il y a une entente entre Washington et Ankara pour ce qui sera, à toutes fins utiles, une invasion turque au nord de la Syrie, sous le prétexte d’écraser Daesh au nord d’Alep.
      C’est de la foutaise. Le jeu d’Ankara comprend trois volets : soutenir ses mandataires turkmènes lourdement meurtris ; assurer le maintien des activités dans le corridor menant à Alep (où passe la cruciale autoroute djihadiste liant la Turquie à la Syrie) ; et surtout empêcher par tous les moyens les Kurdes des Unités de protection du peuple (YPG) de relier Afrin à Kobané et d’unir ainsi les trois cantons des Kurdes syriens à proximité de la frontière turque.
      Tout cela n’a rien à voir avec la lutte contre Daesh. Le plus dingue, c’est que Washington aide actuellement les Kurdes syriens en leur fournissant un appui aérien. Le Pentagone doit ou bien soutenir les Kurdes syriens, ou bien soutenir Erdogan dans son invasion du nord de la Syrie. La schizophrénie n’a pas sa place ici.
      Un Erdogan au désespoir pourrait être assez cinglé pour affronter l’Armée de l’air russe pendant sa supposée invasion. Poutine a dit officiellement que la réponse à toute provocation sera immédiate et fatale. Pour couronner le tout, les Russes et les Américains coordonnent maintenant leurs sorties aériennes au nord de la Syrie.

    •  :)

      Balanche, lui, semble se faire l’avocat d’un envoi de troupes occidentales au sol, pour éviter une escalade turco-russe :
      http://www.washingtoninstitute.org/policy-analysis/view/the-struggle-for-azaz-corridor-could-spur-a-turkish-interventio

      TURKISH INTERVENTION?

      The Azaz corridor holds major strategic importance for Turkey, but will that be enough to spur direct intervention? If the corridor falls and Ankara fails to respond, rebel groups would interpret it as a sign of weakness, while the international community would view it as capitulation to Russia. With the Azaz border link closed, Russia could then help the Syrian army and its Shiite allies lock other Turkish crossing points between Bab al-Hawa and Jisr al-Shughour, effectively putting the entire province of Idlib in a net. This would mean a near total defeat for Ankara’s Syria policy. And if the corridor’s fall were accompanied by ethnic cleansing of the area’s large Turkmen population (who are ethnic kinsmen of the Turks) or IS violence against civilians, Turkish public opinion would be further riled up.

      Does Putin underestimate Turkey’s offensive capacity? Thus far, the Turkish army has refused to send ground troops into Syria; the National Intelligence Organization (MIT) is the agency in charge of Turkish operations there. Russia’s presence will remain the main deterrent to large-scale Turkish intervention, though Ankara would likely escalate indirectly to prevent the corridor’s fall. Then again, Putin may well want Turkey to intervene directly against the PYD, since that could force the Kurdish group to join the Russian alliance and deprive the West of its only efficient actor on the ground against IS. To avoid this disaster, Western countries should send ground troops to occupy strategic locations such as Azaz and fight IS directly.
      The Azaz corridor may or may not fall, but the bigger U.S.-Turkish goal remains securing the Marea-Jarabulus corridor from IS, and any future Azaz-Jarabulus corridor if Azaz falls to the group. In other words, if the corridor is overrun, broader US-Turkish policy in this area (backed by allies from Incirlik) would essentially become two steps forward, one step back.

    • @gonzo : ça renvoie à ta remarque sur le nouveau « statut » des chercheurs devenus militants/lobbyistes, qui se mettent à dire où et quand, à leur avis, il serait bon que nous bombardions. Si ces « experts » se mettaient à expliquer qui et quoi bombarder en Israël, où quelle partie de la Galilée il faudrait occuper stratégiquement, je ne doute pas qu’on se hâterait de les rappeler à un peu plus de sérieux dans leur travail académique.

      Mais p’têt que c’est ce qui est demandé quand on rejoint le WINEP (des conseils de trucs à occuper dans le monde arabe).

    • J’espère ne pas couper cette discussion qui s’amorce - ou plutôt reprend -, et m’intéresse, sur la question du statut des chercheurs.
      En incise donc, les déclarations officielles russes sur les suspicions de préparatifs d’invasion, les dénégations turques, et les Américains qui bottent en touche :
      http://edition.cnn.com/2016/02/04/middleeast/turkey-russia-syria-invasion-denial

      Turkish forces aren’t preparing to invade northern Syria — and Russia’s allegation that they are is an attempt to hide Moscow’s crimes in the war-ravaged nation, a source within the Turkish Prime Minister’s office told CNN on Thursday.
      “Simply they are diverting attention from their attacks on civilians as a country already invading Syria,” the source told CNN. “Turkey has all the rights to take any measures to protect its own security.”
      The comments come after Maj. Gen. Igor Konashenkov was quoted by Russian state news agency Ria Novosti as saying Moscow believes some activity on the Turkish side of the border with Syria indicates preparations for an incursion.
      “The signs of hidden preparation of Turkish armed forces for activities in the territory of Syria we notice more and more,” the general said.
      When asked about the Russian claim at a media briefing, John Kirby, a spokesman for the U.S. State Department, said: “I’m not certainly not going to get up here and speak to what the Turks are doing on that border on any given day.”

    • @Souriyâm @Nidal, c’est vrai qu’on marche encore et toujours sur des oeufs dès qu’il s’agit de Syrie mais l’intensité du barrage médiatique, quoi qu’on pense de ce p. de régime, est tout de même extraordinaire... Cela étant, je me demande vraiment comment les Turcs peuvent envisager d’entrer en Syrie, avec un soutien aussi flanchant que celui des USA et de l’Otan, et avec les Russes qui seraient assez heureux de venger l’affront subi avec leur pilote (et peut-être plus si ce qui se raconte sur l’avion dans le Sinaï est vrai). En même temps, mais je ne suis pas expert militaire, je ne sais pas si leur dispositif est adapté à ce type d’affrontement. En tout cas, si je ne vais pas pleurer pour les milliers de mercenaires, je voudrais bien espérer que le pire ne va pas arriver aux derniers « fidèles de la révolution syrienne » dont les Turcs vont faire tout ce qui est en leur pouvoir pour jouer les dernières cartes qui leur restent, à savoir fermer leur frontière pour justifier une éventuelle action internationale. Le montage médiatique a déjà commencé, il suffit de lire l’Orient-Le Jour pour le comprendre... Et l’expérience de Kobané, et de toute la guerre, aurait dû montrer aux plus lucides des « purs » qu’il ne fallait pas attendre beaucoup de soutiens désintéressés... Et comme on sait que le régime syrien va se faire un plaisir de donner la plus cruelle leçon possible aux « mutins », dans la bonne tradition familiale, l’avenir s’annonce très rose... Une diplomatie intelligente consisterait à soutenir à fond l’opposition interne, Manaa et Cie, seuls capables de minorer, au moins un tout petit peu, la répression qui s’annonce, ce que les Russes (et peut-être aussi les Iraniens) ne verraient pas forcément d’un mauvais oeil. Mais pour cela, il faudrait être intelligent, et surtout pragmatique. Je ne suis pas certain que Fabius soit l’homme de ce défi-là sur la Syrie en tout cas.

    • @gonzo : Pas grand chose à redire à ça, y compris sur le "p. de régime". Grosso modo sur la même ligne. Quelques remarques complémentaires comme hypothèses de prospective.

      Pour les Turcs et les Saoudiens il y a deux problèmes :
      1° - la tentative du régime et de ses alliés de fermer entièrement la frontière turco-syrienne au nord-ouest. Maintenant que la poche d’Azaz, avec son poste de Bab al-Salam, est isolée du reste des provinces d’Alep et de la province d’Idlib, il ne reste plus que le poste-frontière de Bab al-Hawa. Il existe certainement d’autres lieux de passage mais de moins grande ampleur et beaucoup plus incommode. Si cette tentative venait à réussir, non seulement Alep-est est menacée d‘encerclement mais aussi tous les gains obtenus en 2015 (Idlib, Jisr al-Shoughour, ...) par la coalition Jaysh al-Fatah qu’ils ont montée avec le Qatar. La conséquence serait une disparition complète de ces deux pays de l’équation syrienne.

      2° - La question de ce que deviendra le territoire syrien tenu par Da’ich à l’est. Sans que personne ne le remarque formellement, tout le monde parle et agit en ce moment comme s’ils considéraient qu’à terme il est destiné à disparaître de la région, au moins comme proto-Etat. On sait que les Turcs ne veulent pas voir le YPG kurde et leurs alliés au sein des SDF prendre la bande au nord que Da’ich tient et relier l’ensemble de leurs zones de contrôle. L’autre peur est qu’une fois la frontière nord-ouest sécurisée, l’effort du régime et de ses alliés ne se porte beaucoup plus massivement sur Da’ich en choisissant de laisser subsister des poches « rebelles » au nord-ouest - des chaudrons comme on dit à l’est de l’Ukraine - que l’armée syrienne réduirait au fil du temps, par exemple Idlib voire l’est d’Alep (Jisr al-Shoughour me paraissant, par sa position, plus stratégique qu’Idlib). Impossible alors de s’opposer à ces combats et à terme à la victoire complète du régime.
      Comment justifierait-on devant les opinions publiques occidentales les condamnations du régime et des opérations russes contre Da’ich au profit de « rebelles » qui ne le combattent pas, pour éviter cette victoire totale ? Comment éviter que le YPG ne passe entièrement dans l’orbite russe et ne devienne clairement l’allié du régime (Saleh Muslim avait déjà fait une proposition en ce sens évoquée ici) ? Comment à ce moment là la Turquie pourrait-elle envisager de s’ingérer directement pour écarter les options arrangées entre le régime et le YPG, qu’elles refusent à sa frontière, à part en se remettant directement à soutenir à Da’ich, alors que le contexte international s’y prête de moins en moins ?

      Conclusion :
      A - soit la Turquie tente un coup militaire insensé maintenant au nord-ouest - soit dans la poche d’Azaz, soit côté province d’Idlib - pour écarter le risque immédiat n°1 en profitant et organisant la mise en scène médiatique des souffrances des civils pour prétendre y créer une zone refuge (vieille idée du safe haven façon Benghazi). Il n’est pas sûr que les USA suivent et les machins militaires russes Sukhoï 35, S-400, … ont l’air d’être assez dissuasifs pour qui que ce soit de sensé…
      Un coup moins risqué serait peut-être l’envoi de missiles anti-aériens portatifs (façon afghane avec les Stinger) dans le cadre d’une nouvelle intensification de l’aide à Jaysh al-Fatah avec les Saoudiens.
      B – soit la Turquie abandonne l’idée de s’opposer autrement que par la parole au risque n°1 et s’organise avec les Saoudiens et leur « coalition islamique », en essayant d’y entraîner les USA, pour mettre des « boots on the ground » au nord-est, chez Da’ich, afin de rester dans l’équation syrienne et écarter au moins le risque n°2. C’est aussi très risqué mais les Russes auront plus de mal à s’y opposer.
      C - Soit ils reconnaissent leur défaite et soutiennent un vrai processus de négociations. Mais je n’y crois pas trop.

  • Syrie : les Kurdes, incontournables sur le terrain, écartés des négociations
    http://www.france24.com/fr/20160201-syrie-kurdes-opposition-syrienne-arabie-saoudite-daech-etat-islam

    De fait, ils sont incontournables, contrôlant environ 15 % du territoire syrien, soit une population de quelque 2 millions de personnes. Les Kurdes du PYD sont surtout en pointe sur le terrain contre l’EI. La coalition menée par les États-Unis, et dont la France fait partie, en a d’ailleurs fait son allié dans la lutte contre les terroristes. En septembre 2014, la bataille de Kobané, ville à majorité kurde du nord de la Syrie, et les efforts de la communauté internationale pour aider les Kurdes à repousser l’EI, en sont l’exemple.

    Malgré tout cela, l’ONU a finalement renoncé à les inviter. « Les Saoudiens et les Turcs n’en voulaient pas », explique Fabrice Balanche. Les Turcs en raison de leurs liens avec le PKK, et les Saoudiens « parce qu’ils refusent qu’un autre type d’opposition soit représenté ».

    « Aujourd’hui, les Kurdes sont furieux », poursuit-il. « Ils ont le sentiment qu’ils se battent contre Daech [autre appellation de l’EI], qu’ils montrent une volonté de discuter, et qu’on ne les inclut pas dans un processus de paix ». Pour tenter d’apaiser la colère du PYD, une délégation de responsables américains, français et britanniques a rapidement pris le chemin de Kobané.

  • Tandis que le YPG / PYD a été banni des pourparlers de Genève sous la pression de la Turquie (membre de l’Otan) : http://seenthis.net/messages/456128
    Brett Mc Gurk, envoyé spécial du président Obama auprès de la coalition « internationale » contre Da’ich, passe, lui, deux jours en compagnie des mêmes dans le nord de la Syrie (notamment à Kobané) pour discuter des « futures étapes dans la campagne en Syrie » :
    https://twitter.com/brett_mcgurk/status/694188776768167936
    https://twitter.com/brett_mcgurk/status/694191294764068865

    PS : tour de force notable, en 6 tweets avec photo évoquant ces rencontres, pas une seule fois ne sont mentionnés le YPG ni le PYD, et pas non plus une seule image de drapeau de ces organisations ou de celui du Kurdistan... Ne seront évoquées que les fameuses « Syrian Democratic Forces ».

  • Manifestation de solidarité avec les migrants ! Bravons l’état d’urgence !
    https://paris-luttes.info/manifestation-de-solidarite-avec-4183

    malgré l’interdiction de la manifestation, celle-ci est maintenue et plus de 46 organisations appellent à rejoindre les migrants sur le pavé parisien ce dimanche.

    #migrants #etat_durgence #attentats #VosGuerresNosMorts #Paris #securitaire

    • certaines organisations appellent à maintenir la manifestation, d’autres, sans appeler, assureront une présence place la Bastille, certaines enfin n’appellent plus à manifester et n’y seront pas présentes.

      la liste initiale des signataires

      ATMF, Attac, BAAM (Bureau d’accueil et d’accompagnement des migrants), CGA, CGT Educ’action 93, CISPM, CNDF, CSP 75, Collectif Avenir Educs, Collectif Austerlitz, Collectif 3 C, Collectif Sans-Voix Paris 18, Collectif 20 e solidaire avec les migrants, Collectif de solidarité aux réfugiés de Gennevilliers, DAL, Droits devant !!, Écologie sociale, EÉLV Paris, Ensemble !, EuroPalestine, Fasti, Fédération anarchiste, Femmes migrantes debout, Femmes égalité, Gisti, IJAN, LDH, 8 Mars Pour TouTEs, Mouvement Utopia, MRAP (fédération de Paris), NPA, PCF, PCOF, PG, RESF, SNPES-PJJ-FSU IDF, STRASS, SUD éducation, UD CGT Paris, UJFP, Union des syndicats CNT de la région parisienne, Union syndicale Solidaires...

    • [mel reçu] Comme vous le savez, il y a plusieurs semaines un collectif d’organisations qui avait déjà appelé à manifester en faveur des migrantEs le 4 octobre a décidé d’organiser une nouvelle manifestation le dimanche 22 novembre. Demain donc.

      Suite aux attentats, le gouvernement a décidé d’interdire les manifs en Ile de France jusqu’au 30 novembre.
      Malgré cela certaines organisations ont décidé de maintenir l’appel.

      Elles ont reçu un certain nombre de soutiens.

      Vous trouverez ci-dessous des textes encourageant à se rassembler à Bastille à 15h demain :

      – Le communiqué unitaire des organisateurs
      – un texte de Denis Godard
      – une Déclaration de Noël Mamère et de Sergio Coronado sur l’interdiction de la manifestation de solidarité avec les migrants le 22 novembre 2015
      – un texte de soutien de Pouria Amirshahi, député PS - destiné à être lu demain
      Bonne lecture

      Le communiqué unitaire

      L’ensemble des organisations signataires de l’appel à manifester, le 22 novembre, en solidarité avec les migrants condamne l’interdiction qui frappe cette manifestation.
      Après les terribles attentats qui ont endeuillé Paris, cette manifestation serait l’occasion de réaffirmer notre solidarité avec l’ensemble des victimes et participerait de la réponse aux attentats qui ont ensanglanté Paris..
      Qu’ils/elles soient nomméEs réfugiéEs, migrantEs ou sans-papiers ils/elles sont aussi des victimes des guerres, des violences et de la misère qui les ont contraintEs à quitter leurs pays.
      Parmi les organisations certaines appellent à maintenir la manifestation, d’autres, sans appeler, seront présentes place la Bastille, certaines enfin n’appellent plus à manifester.
      Toutes se retrouveront dans les plus brefs délais pour envisager les suites à donner à nos mobilisations en solidarité avec l’ensemble des migrantEs.

      Un texte de Denis Godard, membre de la Liste des Sans Voix

      Ils ne nous empêcherons pas de manifester !

      Il faut que nous soyons nombreux et nombreuses à manifester ce dimanche.

      Parce nous pleurons nos mortEs victimes de Daesh et que nous pleurons les victimes de la politique des frontières, les victimes des violences policières dans nos quartiers, les victimes des bombes françaises.

      Parce que plus de solidarité est la réponse. Parce que le pouvoir veut l’interdire.

      Parce que 10 mois après les tueries de janvier dernier, les réponses données alors par le pouvoir (accentuation des interventions militaires, renforcement de la police, lois sécuritaires) n’ont - au mieux - pas empêché les tueries de novembre.
      Parce que les mêmes logiques sont à l’oeuvre. En pire.

      Parce que l’hystérie sécuritaire et nationaliste de toutes les forces dominant ce pays ne fera qu’enfanter de nouveaux monstres et préparer les drames à venir. Parce que nous ne voulons pas pleurer de nouveaux morts.

      Parce que nous avons croisé dans les luttes de ces derniers mois aux côtés des migrantEs beaucoup plus d’hospitalité, de générosité, de détermination et de courage que chez les va-t-en-guerre qui dirigent ce pays. Parce que nous vomissons les fascistes et les racistes qui s’attaquent aux migrantEs et aux musulmanEs.

      Parce que s’il existait des frontières pour ces valeurs d’hospitalité, de générosité, de justice sociale et d’égalité il est évident qu’elles ne seraient ni géographiques ni religieuses.

      Parce que, dans une dizaine de jours, ceux qui appellent à la guerre se réuniront pour - soit-disant - traiter de l’avenir de la planète. En nous interdisant la rue.

      Parce que si nous ne résistons pas aujourd’hui, il sera plus difficile encore de résister demain.

      Parce que tous les arguments qui justifient de ne pas bouger aujourd’hui seront encore plus convaincants demain.

      Parce que les collectifs de sans-papiers et des migrants croisés sur les campements nous appellent à nous joindre à eux et elles ce dimanche.

      Parce que LA France n’existe pas. C’est une fiction que veulent construire à la fois Daesh et le gouvernement français, la droite et les fascistes. Parce qu’au nom de cette fiction des tueurs peuvent s’attaquer à n’importe qui EN France et qu’au nom de cette fiction le gouvernement s’attaque tous les jours à la majorité d’entre nous EN France et ailleurs.

      Parce que mettre la sécurité au dessus de la liberté serait le signe d’un peuple esclave, d’un peuple déjà mort.

      Parce que notre pays n’a pas de frontières. Il est syrien contre Bachar et Daesh. Il est palestinien contre l’Etat d’Israel. Il est kurde à Kobané en résistance, égyptien sur la place Tahrir en révolution, sénégalais et malien dans un foyer expulsé, soudanais et afghan sur un campement à Paris. Il est anglais à Calais. Il a des parents algériens, marocains, tunisiens quand il se fait harceler par la police. Il est syndicaliste à Air France et sans-abri pour imposer la réquisition des logements vides.

      Parce que notre pays s’appelle lutte pour la justice et l’égalité.

      Parce que ce pays est la seule alternative à ce monde qui sombre dans la folie guerrière et meurtrière.

      Il faut que nous soyons nombreux et nombreuses ce dimanche 22 novembre à 15H00 place de la Bastille.

      Parce que nous sommes debout. Ensemble. Parce que nous sommes vivantEs.

      Déclaration de Noël Mamère et de Sergio Coronado sur l’interdiction de la manifestation de solidarité avec les migrants le 22 novembre 2015

      L’Etat d’urgence pour qui ?

      La préfecture a décidé d’interdire la manifestation appelée en solidarité avec les réfugiés et les migrants le 22 novembre 2015. Elle autorise par contre l’ouverture des Centres commerciaux ce même dimanche. Quelle est la raison de ces décisions ? Comment supposer qu’une manifestation pacifique de solidarité est plus menacée par l’action des terroristes qu’un centre commercial ou un marché de Noël aux Champs Elysées.

      Nous dénonçons cette interdiction contre une manifestation de soutien à des êtres humains qui ont fui la violence et la guerre et qui ont connu parfois à une tout autre échelle vécu ce que nous avons subi le 13 novembre à Paris.

      Certaines organisations ont décidé de maintenir cet appel à manifester. La responsabilité des pouvoirs publics, et en particulier celles de la préfecture et du Ministère de l’Intérieur, se trouverait directement en cause en cas de troubles à l’ordre public. La limitation de la liberté d’expression fait le jeu des ennemis de la démocratie et de la liberté.

      Texte de soutien de Pouria Amirshahi, député PS, destiné à être lu demain lors du rassemblement.

      Mesdames, messieurs,

      Le monde est plein de promesses. Les sciences, les technologies, les médecines les connaissances donnent espoir. Mais le monde est traversé aussi de convulsions terribles, qui voient les désordres et les inégalités, les injustices et les guerres surgir. Les migrants, demandeurs d’asile ou pas, sont d’abord les migrants de ces calamités. Leur porter secours, les accueillir et veiller concrètement à tarir les causes de leurs exils forcés est de la responsabilité des démocraties. Nous sommes loin de cet esprit volontariste et généreux. Bien des dirigeants ont peur parce qu’ils ont décrété que les citoyens avaient peur. C’est d’ailleurs partiellement vrai. Mais qui leur fait peur ? Il faut oser dire la vérité : accueillir bien, c’est agir contre le désordre ; agir pour le développement c’est aussi construire un monde plus sûr.

      Pour beaucoup d’entre nous, il y a aussi une empathie devenue viscérale, une solidarité nécessaire à notre conscience. Certains nous le reprochent, croyant nous insulter en disant : « tiens, les droits-de-l’hommistes » ! Nous assumons. Je suis parce que nous sommes. Nous sommes des êtres humains.

      C’est pour ces raisons que nous sommes réunis. Par solidarité, mais pour réfléchir aussi aux désordres du monde, aux responsabilités qui les aggravent, aux solutions qu’ils exigent. Celles et ceux qui fuient ces derniers temps sont, pour beaucoup, issus de Syrie et d’Irak. Ils fuient le malheur, ils fuient aussi des assassins. Ces assassins, dont certains ont sévi sur notre sol en janvier et en novembre, mais aussi en Tunisie, au Liban et ailleurs.

      En réponse, l’état d’urgence a été voté ; il s’applique. Mais en quoi l’interdiction d’une telle manifestation de solidarité constitue-t-elle une menace ou un trouble à l’ordre public ? En rien. Au contraire, dans un moment de sidération, de surenchère sécuritaire, de vocabulaire toujours plus guerrier, nous savons que les citoyens ne peuvent s’en remettre aux seules autorités de l’Etat, surtout quand l’Etat adopte une législation, temporaire espérons-le, d’exception, exorbitante de droit commun. Notre meilleure arme face aux désordres du monde, qui a ses causes, ses responsables et ses conséquences, c’est nous-mêmes, citoyens d’une démocratie. Nous devons nous réunir, nous parler, nous rassembler et manifester nos opinions. Voilà ce que Daesh et d’autres veulent interdire. Voilà ce que nous voulons préserver.

      Le rassemblement d’aujourd’hui constitue aussi une façon de rendre hommage aux morts d’ici et de là-bas...et de soutenir ceux qui fuient les assassins. C’est cela, aussi, la solidarité avec les migrants.

      Pouria Amirshah

    • A Paris, une manifestation pro-migrants se transforme en défilé anti-état d’urgence (pas encore lu, rien que le titre est... expéditif, bien qu’il souligne une dimension réelle)
      http://www.lemonde.fr/attaques-a-paris/article/2015/11/22/a-paris-une-manifestation-pro-migrants-se-transforme-en-defile-anti-etat-d-u

      ils disent :

      ce qui aurait dû être un rassemblement

      Parole de flic.

      La manifestation interdite a donc bien eu lieu, malgré l’opposition de la police !
      Ce qui fut scandé : « état d’urgence, état policier, vous n’en nous priverez pas du #droit_de_manifester », « so so solidarité avec les réfugiés », « so so solidarité avec les #sans-papiers ».
      Les manifestants ont du plusieurs fois forcer les barrages de gardes mobiles, courir pour éviter que la manif soit à nouveau bloquée, subir quelques coups de tonfa et utilisation de gazeuses lacrymos, mais, bien que certaines orgas (et de leurs militants trop disciplinés...) aient choisi de s’en tenir à un rassemblement statique devant l’opéra Bastille, la manif a eu lieu.
      De même, le convoi Notre Dame des Landes Paris a été bloqué aujourd’hui par la police avant de pouvoir avancer vers Paris, liberté de mouvement et d’expression assortie d’un avertissement policier selon lequel cette manifestation ne pourrait accéder à l’Ile de France.

      Caner sur le droit de manifestation ce serait piétiner les ouvriers morts de Fourmies (1891), les manifestants du 17 octobre 1961, de Charonne (1962) et de tant d’autres tués par la police, c’est aussi très précisément renoncer à ce que Daech attaque.

    • #résistance et #bravo merci pour la vidéo excellente, on y voit la preuve que formés à la politique, au militantisme, à la solidarité, la détermination pour rester ensemble, s’organiser et esquiver tout en souplesse les CRS armés sort gagnante du rapport de force inévitable. Pff, chapeau #éducation_politique

    • RT (Ruptly TV) a réalisé un long montage de la journée d’hier ; j’ai sauté rapidement, on entend surtout les slogans, et vers la fin un témoignage d’un sans papier (si j’ai compris).

      https://www.youtube.com/watch?v=rh9zyUEiH5E

      Streamed live on Nov 22, 2015

      A demonstration in support of refugees is set to take place in Paris on Sunday, November 22. The rally will take place at the place de la Bastille square despite the ban on gatherings enforced by French authorities. Participants include the french trade union, movement Utopia, MRAP (federation of Paris), EuroPalestine group and French Anarchists Federation

    • COP21 - Droit de manifester
      Actualités du convoi Notre-Dames-des-Landes - Paris

      > contact presse dédié au convoi : 07 68 17 95 78
      > adresse mail : mslcnddlpress@riseup.net
      > Notre blog : http://marchesurlacop.noblogs.org
      > Notre compte twitter : http://twitter.com/MSLC21
      > CAP sur la COP - The movie, vers la COP21 :
      > https://www.youtube.com/watch?v=OuN5Xa1MBv8


      >
      >
      > Après 2h de blocage de la nationale 23 et du convoi par la police,
      > celui-ci a été libéré. Les participants au convoi avait décidé d’un
      > commun accord de refuser de décliner leur identité et donc se laisser
      > ficher. Alors que les soutiens de la région commençaient à se rendre sur
      > place, le ministère de l’intérieur a finalement accepté de laisser
      > repartir librement le convoi, en se contentant d’une déclaration au
      > mégaphone. Un policier a affirmé dans le micro que le convoi serait
      > interdit d’accès à Saclay, l’étape avant paris et qu’un périmètre de
      > « sécurité » serait déployé autour de la ferme de l’agriculteur qui devait
      > nous accueillir. Il a aussi annoncé que toute tentative de passer à
      > Saclay ou en île de France serait sévèrement réprimé.
      >
      > Cette mesure nous apparaît comme un signe de plus de la volonté de
      > museler toute contestation sociale et environnementale lors de la cop
      > 21.
      >
      > Pourl’heure le convoi continue sa route et sera ce soir à Angers à la
      > salle daviais. Nous invitons les comités qui se sont mobilisé ce matin à
      > nous retrouver sur place et les remercions chaleureusement de leur
      > soutien.

    • Récit d’une manifestation sous état d’urgence

      https://paris-luttes.info/recit-d-une-manifestation-sous-4236?var_mode=calcul

      Depuis plusieurs mois, les migrants se battent au quotidien et manifestent pour leurs droits. Ce dimanche 22 novembre 2015, une nouvelle manifestation de soutien dont l’appel circule depuis plusieurs semaines est prévue de Bastille à République. Depuis la mise en place de l’état d’urgence toutes les manifs sont interdites. Récit à la première personne et photo-reportage d’une manifestation sous état d’urgence.

      @parpaing @colporteur @la_taupe

    • Etat d’urgence : la police dénonce au parquet 58 personnes ayant bravé l’interdiction de manifester
      http://tempsreel.nouvelobs.com/en-direct/a-chaud/12771-attaquesparis-urgence-police-denonce-parquet-personnes.ht

      ...dimanche, plusieurs centaines de personnes se sont rassemblées sur la place de la Bastille et ont défilé jusqu’à la place de la République, mobilisant « un important dispositif de sécurisation » de la part des forces de l’ordre, ce qui les a « détournées de leur mission prioritaire de sécurisation générale », explique la préfecture de police.

      La police a procédé à « 58 #identifications de personnes n’ayant pas respecté l’#interdiction_de_manifester », qui ont été transmises au Procureur de la République de Paris « pour application des suites judiciaires prévues par la loi ». Les contrevenants « s’exposent à une peine pouvant aller jusqu’à six mois d’emprisonnement et à une amende de 7.500 euros », rappelle la #préfecture de police.

    • on espère que nombreux nous serons à répondre à cet appel :

      Dimanche 29 novembre, nous appelons à braver l’état d’urgence et à nous retrouver à 14h sur la place de la République
      http://www.liberation.fr/debats/2015/11/24/bravons-l-etat-d-urgence-manifestons-le-29-novembre_1415769

      sinon la manœuvre consistant à assigner à résidence, traquer, perquisitionner quelques militants pour que nous tous n’osions plus manifester ou très très calmement si ce n’est dans les formes autorisées, controlées, gérées par le gouvernement risque de réussir, au moins pour un temps (j’ai entendu Cazeneuve dire qu’après trois mois, il s’autoriserait peut-être bien à faire perdurer encore l’état d’urgence).

      A la veille de la COP21, perquisitions, assignations à résidence et appels à manifestations
      http://paris-luttes.info/a-la-veille-de-la-cop21-4281

      Et lorsque l’on perd du terrain, on a du mal à le regagner derrière, surtout quand l’état utilise l’outil de l’état d’exception couplé à l’outil antiterroriste...

      J’espère que nombreux nous serons ce dimanche, Place de la République, 14h.

  • Action révolutionnaire anarchiste de Turquie
    « La douleur que vous vivez est notre douleur,
    la rage que vous ressentez est notre rage »

    http://lavoiedujaguar.net/Action-revolutionnaire-anarchiste

    Le 13 novembre, des attaques armées coordonnées par Daech ont tué plus de cent cinquante personnes et en ont blessé des dizaines dans sept quartiers différents de Paris. Daech poursuit ses meurtres en dehors des régions du Moyen-Orient et de l’Anatolie. Le massacre qui a eu lieu à Paris montre clairement que la terreur Daech ne connaît pas de frontière.

    Nous ressentons profondément le massacre de Paris et partageons votre tristesse. Nous avons vécu et vivons encore sous les attaques de Daech soutenues par l’État. De Şengal à Kobané, de Pirsus (Suruç) à Ankara, nous avons perdu beaucoup de camarades et amis. Nous sommes conscients du fait que les massacres visent à créer la peur, la méfiance et la solitude. Notre douleur est grande et augmente chaque jour. Dans ces périodes, nous devons développer la solidarité contre les meurtriers qui veulent nous enterrer sous la peur, la solitude et l’isolement. (...)

    #Paris-Istanbul #solidarité #anarchistes #Turquie

  • Témoignage d’une combattante pro-Kurde au Rojava
    http://www.liberte-expression.fr/les-kurdes-seuls-au-corps-a-corps-contre-daesh

    Nupelda n’a que 28 ans mais compte déjà trois ans de guerre derrière elle. Elle qui est française, de mère marocaine, a fait sien le combat des Kurdes face à la barbarie de l’Organisation de l’Etat islamique. Pierre Barbancey l’a rencontrée au Rojava (Kurdistan de Syrie), sur la ligne de front à Hassaké, ville reprise aux djihadistes fin juillet, mais toujours menacée. Grand reporter à l’Humanité, Pierre Barbancey a été l’un des seul journaliste à entrer à Kobané alors que la ville, était encore aux mains de Daesh et que les combattant(e)s kurdes tentaient de la libérer maison par maison… Durée : 1h. Source : Aligre (...)

  • Abdullah Kurdi : le long chemin du retour à Kobané | Middle East Eye
    par Yvo Fitzherbert, 14 septembre 2015
    http://www.middleeasteye.net/fr/reportages/abdullah-kurdi-le-long-chemin-du-retour-koban-1453217011

    SURUÇ, Turquie – Le voyage en mer d’Abdullah Kurdi n’était pas censé finir à Kobané, la ville frontière syrienne qu’il avait quittée plusieurs fois au cours des dix dernières années, à la recherche d’un travail et d’une vie stable.

    Aylan Kurdi s’est noyé la semaine dernière alors que sa famille tentait de traverser la Méditerranée pour gagner l’Europe, et la photo de son corps sans vie a conduit un continent entier à s’interroger sur ses politiques vis-à-vis des réfugiés. Son père de 40 ans, qui a survécu au naufrage, se déplaçait depuis des années d’un lieu à l’autre en quête de sécurité pour sa famille, loin de la guerre civile syrienne.

    « J’ai décidé de partir parce que je ne voulais pas que mes enfants endurent ce que j’avais enduré », a déclaré Abdullah Kurdi à MEE à propos de son long voyage.

  • Turquie : Erdogan fait sa sale guerre
    http://cqfd-journal.org/Turquie-Erdogan-fait-sa-sale

    Le 20 juillet, à Suruç, ville turque frontalière de la Syrie, un attentat-suicide cause la mort de 33 jeunes venus en délégation pour participer à la reconstruction de la ville de Kobané dans le Rojava. Prenant prétexte du choc causé par ce massacre, le président turc Erdogan obtient le blanc-seing de l’Otan pour déclarer la guerre au terrorisme et lancer une offensive contre… l’ennemi intérieur kurde. Source : CQFD

  • Turquie : Erdogan fait sa sale guerre
    http://endehors.net/news/turquie-erdogan-fait-sa-sale-guerre

    Lu sur CQFD : "Le 20 juillet, à Suruç, ville turque frontalière de la Syrie, un attentat-suicide cause la mort de 33 jeunes venus en délégation pour participer à la reconstruction de la ville de Kobané dans le Rojava. Prenant prétexte du choc causé par ce massacre, le président turc Erdogan obtient (...) — International

  • #Turquie | Selahattin Demirtas (HDP) : “Six millions d’électeurs nous ont mandatés pour la paix”

    Je relaie ici un texte, présenté comme suit par Zeynep Jouvenaux (@zjouvenaux) sur un autre réseau : Le 28 juillet dernier, Selahattin Demirtaş, le co-président du parti #HDP (parti de gauche visant à rassembler tous les peuples de Turquie, que le gouvernement en place veut faire interdire) a prononcé un discours mémorable lors de la réunion de son groupe parlementaire. En voici le texte intégral en français. Selahattin Demirtas est une chance non seulement pour la Turquie, mais pour toute la région. C’est la première fois qu’un politicien kurde déjoue tous les pièges communautaristes en Turquie, et se pose comme un acteur politique pour l’ensemble du pays. Très vivement recommandé ! (cc : @alaingresh)

    Cher-e-s ami-e-s,

    Durant la période électorale, nous avons tous vu, vécu, débattu ensemble des dangers qui menaçaient la Turquie. Nous avons travaillé, nous n’avons pas ménagé nos efforts pour expliquer aux peuples ce que nous espérions pour la Turquie, ce que ces élections signifiaient. On l’a fait comme on le pouvait, avec nos moyens, avec sincérité. Nous avons dit clairement ce que nous avions comme projet à nos électeurs, à nos frères et sœurs, à nos concitoyens. A l’arrivée, nos concitoyens se sont rendus aux urnes pour exprimer leur volonté, malgré des conditions très hostiles et inégalitaires. Nous avions en face de nous un adversaire qui mobilisait tous les moyens de l’Etat, tous les fonds publics pour faire sa propre campagne. Malgré cela, nous avons obtenu 13 % des voix, six millions d’électeurs ont voté pour nous, nous ont fait l’honneur de mener ici, à l’Assemblée nationale pour défendre la justice, la démocratie, la paix, pour prendre le parti de ceux qui sont opprimés, exploités, des pauvres, des femmes, des jeunes. C’est pour cela que nous avons été mandatés.

    “Respecter la volonté des électeurs”

    Cher-e-s ami-e-s,

    Certaines difficultés que nous avons vécues lors de la période électorale ont été relayées dans les médias. Mais vous, qui travaillez sur le terrain, vous avez expérimenté tout cela de très près. La campagne électorale a été très difficile. Malgré cela, nous avons toujours affirmé que nous nous inclinerions devant les résultats, quels qu’ils soient. Notre parti, le HDP a toujours dit que même s’il restait en deçà du barrage des 10 % [ndt. en Turquie, un parti doit obtenir au moins 10% des votes au niveau national pour pouvoir faire entrer un député au Parlement. En deçà de ces 10 % au niveau national, les votes exprimés pour le parti ne comptent pas], il accepterait son sort. Nous avons dit : même si nous ne pouvons pas entrer à l’Assemblée nationale, nous continuerons de travailler, nous essayerons à nouveau, nous estimerons que c’est de notre faute, que c’est à nous de nous améliorer. En tant que dirigeants du Parti, nous nous sommes même engagés à démissionner en cas d’échec, à céder nos places à d’autres camarades, pour poursuivre le combat démocratique.

    Souvenez-vous, à cette période, le Premier Ministre alors en place [du parti AKP] faisait aussi campagne, et nous lançait des mises en garde en disant : « attention, si vous n’arrivez pas à franchir le barrage des 10 %, il ne faut pas venir pleurer. Engagez-vous dès à présent à respecter la volonté des électeurs. Quel que soit le résultat des urnes, soyez prêts à l’accepter ».

    “Ceci est un Coup d’Etat”

    Pourquoi je rappelle tout ça, cher-e-s ami-e-s ? Ceux qui ont déclaré qu’il ne pouvait y avoir de volonté individuelle au-delà de la volonté de la nation, ceux qui ont dit « nous sommes arrivés au pouvoir grâce à la volonté de la nation, si la nation veut notre départ, nous partirons », ceux qui, depuis treize ans, [ndt. AKP est au pouvoir depuis 13 ans] n’ont cessé de répéter le caractère souverain de la volonté de la nation, du peuple, des urnes dont ils tiraient leur légitimité, ceux-là ont décidé aujourd’hui de contrevenir à la volonté du peuple, de nier les résultats des élections, de faire un Coup d’Etat, de former un gouvernement de junte.

    Notre pays s’en est sorti haut les mains des élections législatives du 7 juin. La société a fait son devoir, nos concitoyens se sont rendus aux urnes. Malgré de nombreuses tentatives de fraude, et d’irrégularités dans des bureaux de vote, nos concitoyens ont voté. Le taux de participation était l’un des plus élevés de toute l’histoire de la République. Ces votes ont donné lieu à un nouveau Parlement. A travers leurs votes, les électeurs de ce pays ont demandé un gouvernement de coalition [ndt. AKP a perdu la majorité absolue aux élections du 7 juin, et n’est pas en mesure de former un gouvernement tout seul]

    Mais, ceux qui, depuis 13 ans, nous rabâchent qu’ils sont arrivés au pouvoir par la volonté nationale, ceux qui disent [ndt. Demirtas se réfère à Recep Tayyip Erdogan] “_j_e ne reconnais aucune tutelle, je ne reconnais aucune tentative de Coup d’Etat, moi j’ai lutté contre les Coups d’Etat, je n’en tolérerai aucune”, ceux-là même renient tous ces principes qu’ils faisaient mine de défendre, devant le succès électoral du HDP. Ils viennent de faire un Coup d’Etat. Après le 7 juin, contre la volonté du peuple, en Turquie, nous avons assisté à un coup d’Etat de Recep Tayyip Erdogan. Actuellement, nous avons une junte civile qui a pris possession des organes exécutifs, allant contre la volonté du peuple.

    Ils n’ont aucune légitimité. Leur pouvoir est illégal. D’où tirent-ils leur pouvoir, leur légitimité ?

    “Le gouvernement en place n’est pas légitime”

    Les décisions qu’ils prennent en ce moment même, comme celles de mener le pays à la guerre, ou de nommer des hauts fonctionnaires d’Etat, ou encore d’engager des dépenses sur des fonds secrets d’Etat... Sur quoi les fondent-ils ces décisions ? Le 7 juin, les électeurs vous ont retiré ce pouvoir. Depuis le 7 juin, vous n’avez pas la majorité pour former un gouvernement à vous seuls. Depuis le 7 juin, vous n’êtes pas autorisés à prendre ce genre de décisions tous seuls. Ceux qui agissent ainsi ont clairement fait un Coup d’Etat qui piétine les résultats des dernières élections du 7 juin. Nous en sommes là.

    Et il y a aussi les suiveurs de ce Coup d’Etat. Ceux qui se disent nationalistes [ndt. Demirtas se réfère ici au parti ultra-nationaliste de droite MHP] applaudissent des deux mains ce Coup d’Etat sans honte, sans vergogne. Souvenez-vous de ce qu’il [le chef du parti MHP] disait avant les élections, il disait « si un membre de notre parti se rend au Palais [du Président Erdogan], il sera radié ». C’était ça leur discours aux nationalistes. Mais hier, au Palais, ils étaient tous en garde-à-vous devant le Président.

    Alors ? Vous disiez que vous alliez demander des comptes à Bilal [le fils du Président Erdogan qui semble compromis dans diverses affaires de corruption], _regardez, vous n’avez pas eu Bilal, mais vous avez fini par donner votre Hilal [ndt. allusion au croissant de lune, symbole du parti ultra-nationaliste HDP, qui se dit « hilal » en turc)_

    “Notre seule faute est d’avoir obtenu 13% des voix”

    Cher-e-s ami-e-s, alors de quoi sommes-nous coupables ? Quelle est notre faute ? C’est d’avoir obtenu 13% des voix aux élections, d’avoir porté la volonté du peuple aux urnes et d’avoir donné lieu à la formation d’un nouveau Parlement. A part cela, on ne peut nous imputer aucun méfait. Nous avons lutté pour la démocratie, la fin des inégalités, pour que l’égalité et la liberté deviennent nos modes de vie pérennes dans ce pays. C’est pour cela, c’est pour la paix que les électeurs ont mandaté nos 80 députés aujourd’hui présents dans l’Assemblée nationale. Et dès le premier soir, dès le 7 juin, nous avons dit que nous étions prêts à servir la paix.

    Mais ceux qui ont clamé depuis des années lutter pour la paix, pour la résolution des conflits, pour la fraternité et l’unité des peuples de ce pays ; ceux qui ont solennellement affirmé qu’ils donneraient leur vie pour la paix, en buvant de la ciguë, en devenant des martyrs, ceux-là même nous ont démontré combien la paix ne signifiait rien pour eux en vérité, une fois qu’ils ont perdu leur majorité absolue après le 7 juin. C’est ça le sens de ce Coup d’Etat.

    L’accord de Dolmabahçe était une chance inédite pour ce pays. Le Président l’a renié”

    Souvenez-vous de l’accord de Dolmabahçe [ndt. en février 2015 un accord avait été trouvé entre les forces kurdes et représentants du gouvernement turc en vue du désarmement et de la paix. En mars 2015, le Président Erdogan a condamné cet accord commun, en reniant notamment une quelconque unité, ou entente entre les parties]

    Des délégations formées de nos députés, des représentants d’Imrali [ndt.référence à Abdullah Ocalan, le leader du PKK], des représentants du gouvernement et des députés d’AKP ont fait une déclaration commune. Cette déclaration de Dolmabahçe avait été un tournant crucial pour l’histoire politique turque. Cet accord, ce texte, ne sont pas à prendre à la légère. C’est quelque chose de très sacrée, très morale, très respectable. Je remercie encore une fois tous ceux qui y ont contribué. Chaque partie, que ce soit nos députés, les députés du AKP, les représentants du gouvernement et surtout Monsieur Öcalan qui a rendu possible cette annonce à travers sa ligne politique ferme, chacun d’entre eux mérite nos remerciements. Car, à travers cette déclaration, ils ont remis les clés de la paix aux peuples de Turquie. Ils ont libéré la paix prise en otage par toutes ces puissances qu’on qualifie tantôt d’étrangères, d’obscures, de secrètes, d’agents provocateurs nationaux ou internationaux. Bref ils ont écarté tous ceux qui ont été désignés comme les ennemis de la paix à un moment donné, et ils nous ont confiés cette paix à nous, aux peuples de Turquie. Voilà le sens de l’accord de Dolmabahçe. Cet accord n’était pas une trahison, ni une division du pays. C’était un manifeste, une feuille de route pour la fraternité, la libération de tous, la démocratie et le désarmement. Et nous, forts du mandat que le peuple nous a accordé après les élections du 7 juin, nous avons voulu immédiatement mettre tout cela en œuvre. Nous avons dit que nous respecterions ces principes quels que soient les partis qui allaient former le gouvernement. Nous avons apporté notre soutien à la paix et avons dit qu’on était prêt à collaborer avec tous les partis dans ce sens.

    Le Président de ce pays ne désire pas la paix

    Cher-e-s ami-e-s,

    Nous avons tous suivi avec attention comment ils se sont désolidarisés de l’accord de Dolmabahçe au bout d’une semaine, comment ils l’ont renié. Monsieur le Président a immédiatement réprouvé, contesté cet accord, en allant même critiquer jusqu’à la photo où toutes les parties posaient ensemble. Il a même nié l’existence des pourparlers pour la paix, en déclarant que, de toute façon il n‘y avait même pas de problème kurde dans ce pays. Je le comprends ceci dit. Il s’est fait construire un somptueux palais. Il l’a richement décoré. Il vient de s’y installer à peine. Il a des envies, des ambitions, il aime les titres, la gloire, le pouvoir, l’argent. Or la paix, la résolution des conflits internes, la démocratie, tout cela signifierait pour lui de perdre tout ça. Donc, lui, je le comprends.

    Mais j’ai beaucoup de mal à comprendre tous ceux qui avaient apposé leur signature à cet accord. Tous ces responsables d’Etat qui ont participé aux pourparlers, puis ont fait cette déclaration. Ils ont travaillé jour et nuit pour arriver à cet accord. Alors pourquoi l’ont-ils laissé tomber ? Comme nous, vous y avez passé du temps, donné votre énergie. Nous n’avons rien fait d’illégal, ni d’immoral. Nous avons fait ensemble et publiquement la promesse de la paix aux peuples de Turquie. Et nous n’étions qu’à un pas de la réalisation de cette promesse. Il ne restait plus qu’une semaine pour que tout aboutisse. Aux membres de l’AKP, au Premier Ministre à Monsieur le Président qui nous somment de faire des déclarations pour prouver encore et encore que nous sommes pour la paix. A ceux qui nous reprochent de nous nourrir de terrorisme, de sang, de conflits, je voudrais rappeler cet accord de Dolmabahçe.

    Il ne nous restait plus qu’une semaine, dix jours, pour résoudre de manière stable et pérenne le plus gros problème de la Turquie, pour arrêter le sang qui coule depuis 40 années. Nous avons travaillé, mené ces pourparlers pendant deux ans et demi. Il nous restait 10 jours pour aboutir. Pourquoi y avez-vous renoncé ? Pourquoi vous n’annoncez pas publiquement les raisons de votre désengagement de cet accord ? Pourquoi, pourquoi y avez-vous renoncé ? Imaginez-vous. Il y une organisation armée, le leader de cette organisation [référence à PKK et à Abdullah Öcalan] annonce qu’il va faire un appel à tous ses guérillas, les rassembler dans la semaine qui suit dans un congrès exceptionnel pour leur dire de déposer les armes définitivement. Nous, nous nous sommes réjouis de cette nouvelle. Pourquoi, vous, vous avez paniqué à cette nouvelle ? Monsieur le Président, pourquoi avez-vous paniqué devant la perspective que le PKK dépose les armes ? C’est vous qui avez empêché de déposer les armes ! On a l’impression que si aujourd’hui les membres du PKK quittaient leurs montagnes pour déposer leurs armes, le Président Erdogan leur bloquerait le passage, en leur disant « mais je vous en prie, regagnez la montagne, poursuivez la lutte armée ». Car il n’a pas l’intention d’aboutir à la paix. Je le dis très clairement, il faut que ceci soit très bien compris par tous nos frères et sœurs, par nos concitoyens, par tous ceux qui vivent en Turquie : le Président de ce pays a stoppé le désarmement du PKK, a tout fait pour l’en empêcher.

    Alors que nous étions parvenus à un point déterminant avec l’accord de Dolmabahçe, il a tout balayé d’un revers de la main, en anéantissant tous les fruits des pourparlers. Il a mis fin au processus de paix. Car, tous les sondages d’opinion lui ont démontré que si la paix se réalisait, cela serait contraire à ses intérêts, que la paix serait un obstacle pour lui, l’empêcherait d’obtenir le changement de la Constitution au profit d’un régime présidentiel, comme il le souhaite. Alors il s’est dit : « à quoi bon ces négociations, ce processus pour la paix si cela m’empêche d’instituer le régime présidentiel ? »

    Ceux-là même qui nous qualifient de traîtres à la patrie, de séparatistes, de terroristes, ont livré ce pays dans les flammes de leurs propres mains.

    ~Regardez, je l’exprime en jurant sur tout ce en quoi je crois, toutes mes valeurs sacrées. La situation est aussi claire que cela. Toute la population devrait agir en sachant cette vérité simple.

    “Il n’y a aucune menace séparatiste”

    Il n’y avait pas de menace de séparation, ni de guerre, cette menace n’existe toujours pas. L’organisation appelée PKK a abandonné la stratégie de séparation il y a 20 ans de cela. Il n’existe pas de menace ni la peur de séparation dans le pays. Elle a annoncé qu’elle allait faire un congrès pour le désarmement. De quelle menace parle-t-on ? Il n’y avait donc pas de menace, la seule chose que vous deviez faire, la plus importante et honorable, c’était de maintenir les négociations pour arriver à un résultat final en une semaine ou 10 jours. Maintenant, si on avait fait la paix avec le PKK, si, de facto, la force du PKK n’était plus une menace pour la Turquie, et c’était possible... Ça aurait pu arriver en février. On aurait pu mettre ça en œuvre de facto en mars. Qu’est-ce qui se serait passé dans ce cas, cher-e-s frères et sœurs ? Une Turquie qui aurait fait la paix avec le PKK, une Turquie qui serait sortie de la menace armée du PKK, elle aurait pu se mettre à respirer à l’intérieur comme à l’extérieur, réfléchissez-y. Ainsi, elle aurait pu devenir un acteur de la paix pour tout le Moyen Orient. A ce moment-là, fallait-il se battre contre l’EI ? Cette Turquie qui aurait fait la paix avec le PKK, aurait pu se battre, avec le PKK, contre l’EI.

    Cela est politiquement possible, est éthiquement juste et légitime aux yeux de la population, on aurait pu donc le faire. Mais ils n’ont pas préféré ceci. Car Erdogan a bien dit qu’ils avaient besoin de 400 députés, donnez-nous 400 députés et vivez sereinement, tout se passera bien, sans embrouilles, c’est ce qu’il a dit. Si vous ne les donnez pas, il n’y aura pas de paix pour vous dans ce pays. Regardez, cher-e-s ami-e-s, nous avions prévu les délires qui nous attendaient quand nous nous étions fixés le but de franchir le barrage des 10 %. Et nous avons essayé de vous expliquer lors de nos réunions, dans nos appels à notre peuple, comment, dans cette folie, ils allaient nous conduire vers le feu.

    Ağrı Diyadin, les provocations pendant la période des élections, l’attentat lors du rassemblement, pour la campagne électorale à Diyarbakir, les attaques fascistes à Erzurum, les attentats à Adana, Mersin, les attaques contre les 176 permanences de notre parti. Tout cela était les signes de cette folie.

    “Toutes les victimes sont nos frères et soeurs, nos enfants”

    Maintenant, je suis sûr que les peuples de Turquie voient mieux dans quelle situation ces gens sont capables de nous plonger. Cher-e-s frères et sœurs, nos mères qui ont envoyé leurs enfants faire leur service militaire, nos mères dont les enfants sont des policiers, leurs pères... Ce sont nos enfants, nos frères et sœurs. Les enfants des personnes avec qui nous devons vivre en fraternité sur ces terres, nos frères. La mort d’un seul parmi eux ne pourrait nous faire sentir que de la douleur, que de l’amertume...

    “Ces jeunes ne meurent pas pour défendre la patrie, ils sont sacirifés pour les intérêts du Palais présidentiel”

    Mais ces mères et pères devront savoir : ils n’envoient pas ces enfants à la mort pour la patrie, c’est pour défendre le Palais que les cadavres de ces enfants arrivent entourés de drapeaux turcs. Pour le Palais, pas pour la patrie. Cette patrie appartient à nous tous. Si elle est menacée défendons-la ensemble, main dans la main. Si notre patrie est attaquée par l’ennemi, luttons ensemble, nous l’avons déjà fait plusieurs fois dans le passé. Nous l’avons fait en 1071, dans les années 1920. Faisons-le ensemble encore une fois aujourd’hui, défendons la patrie ensemble mais que personne ne nous demande de sacrifier nos enfants pour les profits d’un parti, encore moins pour le règne et la puissance d’une seule personne. Vous devrez aussi hausser votre voix.

    Des enfants, ça ne s’élève pas facilement. Nous sommes, la plupart, des parents. Nous voyons dans quelles difficultés grandissent nos enfants.

    Ne les sacrifions pas pour les bénéfices d’un palais, ni pour ses ambitions ni pour son pouvoir. Il ne s’agit aucunement de la défense de la patrie. Il n’existe pas de menace. Ce sont des tromperies. Alors que nous étions à un seul pas de la paix, au lieu de franchir ce pas et d’attraper la paix, ils ont préféré cette méthode. En ce moment, cher-e-s ami-e-s, malheureusement les corps des défunts arrivent de tout part. Ils arrivent des montagnes, des vallées, des villes, des villages, des places publiques. Ils arrivent dans les mosquées, dans les Cemevi, [lieu du culte des alévi]. Mais ce sont, tous, les enfants de ce peuple. Et ce complot, cette sale combine est calculée de telle manière que le sang coulera.

    “Les sales combines du pouvoir”

    Les Kurdes mourront, les Turcs mourront, les membres du PKK mourront, les soldats mourront, la police mourra. Les civils mourront. Et c’est le HDP qui sera tenu pour responsable pour tout ce sang versé, à travers des opérations de manipulation psychologique que l’AKP déploie comme des armes de guerre. C’est ça le calcul, la sale combine. En ce moment, avec GLADIO, l’organisation qu’ils ont créée, liée au palais, ils mettent en place une sale guerre. Cher-e-s ami-e-s, l’Etat a une méthode, une stratégie, les Etats font aussi des opérations secrètes. Tous les Etats le font, il n’existe point d’Etat propre. Ils le font. Ils le font faire aux services secrets de renseignement, ils font des réunions secrètes, mais Erdogan, il n’utilise même plus que l’Etat. Il a sa propre organisation, son propre budget, son propre argent. Il a ses fonds secrets et même en dehors de ça, il a son propre argent. Les renseignements arrivent directement à lui. Pas aux registres officiels du MIT (Service Secret de Renseignement National), c’est lui qui reçoit toutes les informations secrètes. Il décide de tout avec son équipe, son cercle restreint. Ils mettent en place des forces de contre-insurrection. Il a sa propre force de police, sa propre justice, ses propres médias. Il a ses propres "trolls" de guerre sale, des réseaux sociaux, et ils sont salariés. Et il a tous mis en activité. Opérations contre les syndicats, à EĞİTİM-SEN ( le syndicat de l’éducation), opérations contre la jeunesse, guerre psychologique contre le HDP. Ordre au procureur général de la Cour Suprême de la République pour ouvrir une procédure de fermeture de notre parti. Préparations dans plusieurs domaines d’un complot avec des raisons quelconques. Tentatives de criminalisation du HDP en créant des preuves de pacotille pour préparer un complot, comme celui concocté contre notre cher député Faysal SARIYILDIZ. Tout ceci est mis en place par l’organisation GLADIO. Cher-e-s ami-e-s, savez-vous quand est-ce que le feu vert a été donné pour tout ceci, après les élections ? Au massacre de Suruç. Celui qui a fait le massacre de Suruç est aussi GLADIO, cette organisation privée. Je vais m’exprimer cher-e-s ami-e-s.

    Les messages du massacre de Suruç

    Que s’est-il passé là-bas ? Des jeunes révolutionnaires brillants ont été massacrés par le biais d’un pauvre diable qui avait rejoint les rangs d’EI mais qui répondait directement à GLADIO, qui était à son service. 32 précieux enfants de ce pays ont été massacrés, mis en morceaux. Premier résultat qu’ils souhaitaient obtenir, c’est de donner le message suivant aux révolutionnaires de ce pays : Si vous maintenez votre solidarité avec Kobane et Rojava, on vous réduira en morceaux. Le second était adressé aux peuples de Turquie s’étant réunis autour du HDP : Si vous continuez à vous assembler autour du HDP, on vous réduira en morceaux. Le 3ème message était au HDP, si vous insistez sur votre politique, on mettra vos jeunes en morceaux. Le 4ème résultat : ils se sont posés comme les victimes de l’EI. Un gouvernement, dont le soutien à l’EI est connu du monde entier, s’est montré comme victime de l’EI grâce à cette sale combine, ce sale massacre.

    Les leaders du monde entier appellent Monsieur le Président pour lui exprimer leurs condoléances mais lui, vu qu’il est victime de l’EI, il n’appelle aucune famille pour exprimer ses condoléances. Regardez-moi cette victime de l’EI. Regardez cette sale combine. Tout de suite après, cher-e-s ami-e-s, deux agents de police dans ont été exécutés dans leur sommeil. C’est une affaire crapuleuse, quoi qu’on en dise.

    “Un piège pour tous les peuples de Turquie”

    Ça fait aussi partie de la provocation. Le meurtre du soldat tué à Adıyaman reste aussi une affaire obscure, pas encore élucidée. Regardez, tout ceci arrive dans le même jour ou dans les jours qui se suivent. Et en partant de cela, on appuie sur un bouton pour une opération militaire et politique préparée et organisée bien avant. Ils font quelques sorties contre l’EI juste pour sauver les apparences, afin de se montrer au monde entier comme victime de l’EI et dire qu’ils font la guerre contre l’EI. Mais en vérité, ils utilisent ceci pour cacher leur opération contre le HDP. La vraie grande opération est contre le HDP. Ils bombardent Kandil avec des avions de guerre et attisent le feu en espérant que leurs adversaires vont répondre par des contre-attaques. Et les résultats de tout cela, ils veulent les mettre sur les épaules du HDP. A une potentielle future période d’élections, ils diront ceci aux peuples de Turquie : Voilà, vous avez voté pour ces terroristes, pour ceux qui ont massacré nos soldats et nos agents de police. Regardez, c’est eux qui ont mis le pays en guerre. Le complot est aussi clair que ça. Si les peuples de Turquie ne prennent pas position face à ce calcul si clair, s’ils n’y arrivent pas, si nous n’avons pas le courage d’élever la voix en unison pour la paix, cette sale combine continuera. Mais si tous ensemble, nous disons que que nous ne voulons pas de guerre, que nous ne les laisserons pas faire la guerre, les deux adversaires devront immédiatement sortir de leurs positions de conflit. Si nous leurs disons : nous n’avons pas trouvé nos enfants dans la rue.

    “On peut lutter tous ensemble, tous unis”

    Nous ne les avons pas élevés pour qu’ils soient victimes de votre règne au palais, cela s’arrêtera. Ils abandonneront s’ils voient qu’ils perdent des votes. Les votes, ce sont les votes qui nourrissent leurs veines. Comme si ces votes leur étaient donnés par perfusion. Au moment où vous la retirez, le danger s’arrête. Que les peuples de Turquie n’aient pas peur ! Le HDP est une grande chance pour ce pays, cher-e-s ami-e-s. Une grande chance pour l’unité et la fraternité dans ce pays. Une grande chance pour la paix au Moyen-Orient. Regardez ceux qui nous attaquent. Regardez leur manière de faire. Regardez les arguments qu’ils utilisent. Vous verrez mieux toutes ces vérités si claires.

    Regardez un peu le comportement de ceux qui parlent d’une Démocratie Avancée, ceux qui disent que dans la nouvelle Turquie, tout est désormais magnifique... Pendant trois jours, le cercueil d’une jeune femme alévie n’a pas pu quitter le Cemevi du quartier de Gazi encerclé par les forces de l’ordre. Cette jeune femme n’a pas pu avoir de funérailles durant trois jours. Pendant trois jours, ils ont attaqué les croyances sacrées des gens, leur foi, avec des gaz lacrymogènes, des balles en caoutchouc, en souillant leur lieu de culte.

    Treize cadavres ! Les cadavres de treize jeunes, ayant perdu la vie à Kobané, attendent depuis 4 jours au poste-frontière de Habur sous 45-50 degrés... Ils ne les acceptent pas en Turquie. Ce sont des citoyens de la République de Turquie. Ce sont les cadavres de héros ayant combattu avec honneur à Kobané. Les cadavres de ces héros qui ont résisté contre votre armée de violeurs, sont bloqués depuis 4 jours là-bas sur ordre du Premier ministre.

    Soixante jeunes sont placés en garde à vue à Urfa. Trois d’entre eux, cher-e-s ami-e-s, furent torturés de manière atroce. Dès le début de leur garde à vue. Ecoutez attentivement. Les membres d’une unité spéciale de la Préfecture de police d’Urfa ont emmené l’un d’entre eux dans un terrain vague, lui ont mis un sac en tissu sur la tête en l’étouffant. Ils l’ont déshabillé entièrement, ils lui ont mis un couteau sous la gorge. Ils lui ont dit : « nous sommes le DAECH, c’est nous le DAECH. » Tout ça figure dans la déposition de ce jeune homme torturé.

    Ils lui ont fait creuser une tombe. Je ne vous parle pas des années 1990, je vous parle de la semaine dernière. Ils l’ont torturé, lui ont infligé des traitements totalement contraires à la dignité humaine que je ne peux pas vous décrire ici, un traitement si inhumain que la victime ne veut pas que le récit des sévices qu’elle a subis soit fait ici. La semaine dernière, en Turquie. Sous le gouvernement AKP. Sous cette mascarade qu’ils appellent la Démocratie Avancée. Si nous n’unissons pas nos efforts cher-e-s ami-e-s, ils vont généraliser ceci à l’ensemble du pays. Nous allons avoir des funérailles chaque jour, un jour un membre du PKK, un autre jour un soldat, le lendemain un policier, le surlendemain un jeune, un autre jour une femme... Ils vont nous laisser porter le poids des cercueils sur nos épaules, nous monter les uns contre les autres pendant qu’eux continuent à savourer leur règne tyrannique, en profitant de l’argent qu’ils ont volé en dépouillant ce pays.

    Pourquoi veulent-ils faire interdire notre Parti ?

    C’est précisément pour cette raison qu’ils veulent faire interdire notre parti, le HDP.~ C’est la raison pour laquelle le HDP représente une menace pour eux. Vous voulez la paix ? C’est l’affaire d’une seule journée. M. Öcalan, que vous détenez en isolement, allait lancer son appel, si vous aviez respecté l’accord de Dolmabahçe. Vous voulez la paix ? Alors pourquoi vous faites des raids avec 40-50 avions de guerre ? Avec une seule de vos directives, vous arrivez à faire décoller cinquante F16 tous les jours. Alors pourquoi aucun bateau ne part pour l’île-prison d’Imrali ? Les avions de guerre ne sont jamais en panne mais le bateau d’Imrali est en panne depuis des années. La paix se trouve sur la trajectoire de ce bateau. C’est une question de bon sens. Si nous avons promis la paix à notre peuple, nous allons respecter notre parole cher-e-s frères et sœurs.

    ~Nous avons eu 13,1 % de voix de paix des peuples de Turquie. Nous avons eux des voix pour la tranquillité. Nous allons évidemment faire le nécessaire, nous allons prendre nos responsabilités. Nos consciences nous l’ordonnent. Le peuple nous l’ordonne. Notre éthique politique nous l’ordonne. Nous n’allons pas tomber dans ce piège, nous n’allons pas céder face à leurs bassesses. Quoi qu’il arrive cher-e-s ami-e-s. Cher-e-s camarades député-e-s, tou-te-s nos ami-e-s du parti. Nous n’allons pas faire de concession sur notre discours de paix. Ils vont nous provoquer, nous attaquer. Leur but est d’éloigner le HDP de sa ligne actuelle fondée sur ses principes. Attention ! C’est le plus grand piège. Evitons-le.

    Leur seul moyen pour revenir à un gouvernement de parti unique est de dissoudre le HDP. Les partis sont créés et dissous par le peuple. Ceux qui nous ont donnés 13% des voix aujourd’hui, pourraient demain nous en donner que 1%. Nous respecterons ceci. Nous considérerons notre parti comme dissout. Mais nulle part dans le monde, aucune décision de justice n’a pu dissoudre réellement un parti. A vous de voir.

    “Levons toutes les immunités parlementaires”

    Vous parlez d’immunité ? Demain, avec 80 collègues député-e-s, nous déposerons nos demandes au parlement pour la levée de nos propres immunités parlementaires. En êtes-vous capables, à votre tour ? Allons-y. Si vous n’avez pas peur, levons tous ensemble nos immunités parlementaires. Nous n’avons rien à nous reprocher, nous n’avons pas peur. Nous n’avons rien volé, nous n’avons rien pillé, nous n’avons pas tué. Nous ne cachons rien à personne. Bien que la justice soit à votre solde, allons-y ! Levons tous ensemble l’immunité parlementaire des 550 députés. Nous allons dire oui. Nous allons dire oui à la levée de nos propres immunités parlementaires. Nous n’avons pas peur de vous. Nous ne nous attendons pas à ce qu’Azraël nous rende la vie...

    Nous faisons confiance à notre peuple. Nous avons toujours dit, nous avons notre Dieu et nous avons notre peuple. Nous avons lutté en y puisant notre force, c’est grâce à cela que nous en sommes là aujourd’hui. Nous allons enrayer cette guerre en résistant ainsi. Nous n’allons pas te laisser faire la guerre dans ce pays.

    Cher-e-s ami-e-s, des moments difficiles nous attendent dans les prochains jours. Nous avons une mission, nous sommes des serviteurs de notre cause. Si nous réussissons à serrer les coudes, à agir ensemble dans la rue, dans les quartiers, dans les usines, jusqu’à dans l’assemblée, dans le respect de nos principes et de nos valeurs, si nous menons une résistance pour la paix, nous allons réussir à arrêter toutes ces sales politiques. Soyez-en sûrs. Nous n’allons jamais céder. Ils ne verront dans nos yeux ni la peur, ni la panique, ni la crainte. Ils en rêveront, mais leur rêve ne se réalisera jamais. Nous ne nous agenouillerons jamais devant eux, nous ne clignerons pas d’un œil. Nous serons aussi déterminés. Nous nous devons d’être clairs en cette période.

    “HDP est le parti des kurdes, des turcs, des turkmènes, des azéris, des assyriens, des yézidis, des sunnites, des alévis, des chrétiens, des arméniens, des femmes, des jeunes, des ouvriers, des agriculteurs, des académiciens.”

    Ce groupe parlementaire représente toutes les personnes qui ont une conscience dans les quatre coins du pays. Nous avons parmi nous des kurdes, des turcs, des turkmènes, des azéris, des assyriens, des yézidis, des sunnites, des alévis, des chrétiens, des arméniens, des femmes, des jeunes, des ouvriers, des agriculteurs, des académiciens. En somme, nous sommes le prototype des peuples de Turquie. C’est ça la Turquie. Et ce groupe parlementaire représente la conscience de la Turquie. Nous ne les laisserons pas piétiner cette conscience. Nous allons en payer le prix quel qu’il soit. Notre peuple, nos frères et sœurs ne porteront plus ce fardeau. Nous ne laisserons pas la guérilla se faire tuer, nous ne laisserons pas le soldat ou le policier se faire tuer. Aucun de ces meurtres n’est et ne sera acceptable à nos yeux. Que ceux-là ne fassent pas les frais, qu’ils n’aient pas à payer, ni de leur vie, ni de rien. Nous sommes là pour ça. Nous avons le mandat du peuple pour payer le prix fort ; c’est la raison pour laquelle ils ont voté pour nous. Nous sommes prêts à payer le prix qu’il faut. Mais ceux qui luttent contre nous, ceux qui nous considèrent comme des ennemis, devront être aussi courageux que nous. Sinon ils perdront et vous verrez bien qu’ils perdront.

    Nous allons le voir tous ensemble. Ils vont perdre face à cette résistance. La volonté pacifique de la Turquie triomphera.~ L’avenir libre de la Turquie vaincra. Pour ce faire, il nous suffit de ne jamais oublier autour de quel principe fondateur du HDP nous sommes réunis. Ils essayeront de nous démoraliser, nous allons rester droits. Ils essayeront de nous faire oublier nos peines, ils se moqueront de nos morts, nous resterons droits. Ils nous feront sentir la discrimination, nous resterons droits. Ils essayeront de nous marginaliser, nous resterons droits. Ils se fracasseront contre notre intégrité. Vous allez voir, ils perdront. Nous allons débarrasser la Turquie de la junte de l’AKP. Nous allons nettoyer la Turquie de cette mentalité de coup d’Etat. Si nous sommes tous d’accord, si nous répondons présents à la Nouvelle Vie, alors bon vent à nous tous. Je vous remercie beaucoup et nous souhaite beaucoup de réussite sur le chemin que nous empruntons.

    • Il est à présent menacé de 24 ans de prison par la justice turque, ainsi que la co-présidente du HDP, Figen Yüksekdağ.
      Selon Henri J. Barkey, directeur des études sur le Proche-Orient de l’institut américain Wilson Center interviewé par l’hebdomadaire allemand Die Zeit, "le combat contre le PKK n’est qu’une diversion, la cible du gouvernement Erdogan est le HDP".

      Le HDP est le premier parti réclamant plus de droits pour la communauté kurde qui est arrivé à entrer au parlement début juin. Il était arrivé à remporter des voix de nombreux électeurs non-kurdes, fatigués de l’éternelle exclusion et de la polarisation entre Turcs et Kurdes. Les 13% du HDP ont coûté au AKP, le parti de M.Erdogan, sa majorité gouvernementale et à Erdogan lui-même une grande partie de son pouvoir. Un nouveau gouvernement n’est toujours pas formé en Turquie.

      « le combat contre le PKK n’est qu’une diversion, la cible du gouvernement Erdogan est le HDP », dit Henri J. Barkey, directeur des études sur le Proche-Orient de l’institut américain Wilson Center . Pour Barkey, l’offensive militaire actuelle poursuit avant tout des buts de politique intérieure. "Erdogan joue un jeu très cynique. Depuis les élections, il est prêt à tout pour aider l’aKP à regagner son pouvoir".

      Avec de nouvelles élections qui seraient nécessaires si fin août il n’y avait toujours pas de coalition, le HDP pourrait, selon le plan Erdogan, retomber sous la barre des 10%, et ainsi être éliminé du parlement. Il suffirait de quelques points, d’une petite part d’électeurs qui se laisseraient attraper à nouveau par la rhétorique habituelle, mais déclamée à présent avec une rage renouvelée d’Erdogan : il faut que nous nous serrions les coudes contre les terroristes kurdes. C’est pourquoi Erdogan et son entourage essaient à chaque occasion d’effacer les frontières entre le HDP et le PKK."

      (extrait de l’article, trad.-minute I.B.)
      http://www.zeit.de/politik/ausland/2015-07/tuerkei-erdogan-friedensprozess-kurden-hdp

    • Vrai ou faux : La Turquie se sert-elle de l’#EI comme prétexte pour combattre les Kurdes ?

      ISTANBUL, 14 août 2015 (IRIN) - À la fin du mois de juillet, la Turquie a lancé des frappes aériennes contre l’autoproclamé État islamique (EI). Les États-Unis ont salué cette initiative, la considérant comme un tournant dans la mise au point d’une stratégie conjointe pour lutter contre le groupe islamiste.

      http://www.irinnews.org/fr/reportfrench.aspx?ReportID=101865

  • La Turquie joue son propre jeu dans la coalition contre l’Etat islamique
    http://lemonde.fr/proche-orient/article/2015/07/25/la-turquie-joue-son-propre-jeu-dans-la-coalition-contre-l-etat-islamique_469

    Après une première série de raids aériens contre des positions de l’organisation de l’Etat islamique (EI) dans le nord de la Syrie, la Turquie a mené de nouvelles frappes, dans la nuit de vendredi 24 à samedi 25 juillet. « L’opération menée contre l’EI a rempli son objectif et ne s’arrêtera pas », a confirmé le premier ministre, Ahmet Davutoglu. Mais cette fois-ci, Ankara a élargi ses cibles aux camps des rebelles kurdes du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK, interdit en Turquie) installés dans le nord de l’Irak.

    Lire Allan Kaval, « Les Kurdes, combien de divisions ? » (novembre 2014)
    http://www.monde-diplomatique.fr/2014/11/KAVAL/50968

    En Syrie, trois zones de peuplement kurde jouxtent la frontière avec la Turquie. Autonomes de facto depuis juillet 2012 et le retrait du régime de Damas du nord du pays, ces enclaves sont à leur tour sorties de l’ombre avec l’offensive menée à la mi-septembre par l’OEI sur la plus réduite et isolée d’entre elles, autour de la ville de Kobané. Comme les régions d’Afrin, dans le nord-ouest du territoire syrien, et de la Djézireh, dans le nord-est, Kobané est dominée depuis plus de deux ans par le Parti de l’union démocratique (PYD) (voir la carte « Théâtre des affrontements entre djihadistes et combattants kurdes »).


    http://www.monde-diplomatique.fr/cartes/kurdistan-OEI

    Grâce à un pacte de non-agression avec le régime de M. Bachar Al-Assad, cette formation politique, appuyée par les combattantes et les combattants des Unités de protection du peuple (YPG), a pu s’imposer dans les régions de peuplement kurde de Syrie. Or le PYD et l’YPG sont des émanations locales du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), en conflit avec l’Etat turc depuis 1984 malgré le cessez-le-feu de 2013, plus que jamais remis en cause. [#st]

    http://zinc.mondediplo.net/messages/5189 via Le Monde diplomatique