• Une #université a tué une #librairie

    Une université vient de tuer une librairie. Le #libéralisme a fourni l’arme. Les codes des marchés ont fourni la balle. Et l’université, après avoir baissé les yeux, a appuyé sur la détente.

    Cette université c’est “mon” université, Nantes Université. Cette librairie c’est la librairie Vent d’Ouest, une librairie “historique”, présente dans le centre de Nantes depuis près de 47 années et travaillant avec l’université depuis presqu’autant de temps.

    Une université vient de tuer une librairie. Nantes Université travaillait, pour ses #commandes d’ouvrages (et une université en commande beaucoup …) avec principalement deux #librairies nantaises, Durance et Vent d’Ouest. Pour Vent d’Ouest, cela représentait une trésorerie d’environ 300 000 euros par an, 15% de son chiffre d’affaire. Une ligne de vie pour les 7 salariés de la libraire. Et puis Vent d’Ouest perd ce marché. Du jour au lendemain. Sans même un appel, une alerte ou une explication en amont de la décision de la part de Nantes Université.

    À qui est allé ce marché ? Au groupe #Nosoli, basé à Lyon, qui s’auto-présente comme le “premier libraire français indépendant multi-enseignes” (sic) et qui donc concrètement a racheté les marques et magasins #Decitre et #Furet_du_Nord (et récemment Chapitre.com) et dont le coeur de métier est bien davantage celui de la #logistique (#supply_chain) que celui de la librairie.

    Pourquoi Nosoli a-t-il remporté ce #marché ? Et pourquoi Nantes Université va devoir commander à des librairies Lyonnaises des ouvrages pour … Nantes ? Parce que le code des #marchés_publics. Parce que l’obligation de passer par des #appels_d’offre. Parce le code des marchés publics et des appels d’offre est ainsi fait que désormais (et depuis quelques temps déjà) seuls les plus gros sont en capacité d’entrer dans les critères définis. Parce que les critères définis (par #Nantes_Université notamment) visent bien sûr à faire des #économies_d’échelle. À payer toujours moins. Parce que bien sûr, sur ce poste de dépenses budgétaires comme sur d’autres il faut sans cesse économiser, rogner, négocier, batailler, parce que les universités sont exangues de l’argent que l’état ne leur donne plus et qu’il a converti en médaille en chocolat de “l’autonomie”. Parce qu’à ce jeu les plus gros gagnent toujours les appels d’offre et les marchés publics. C’est même pour cela qu’ils sont gros. Et qu’ils enflent encore. [mise à jour] Mais ici pour ce marché concernant des #livres, ce n’est pas le critère du #prix qui a joué (merci Jack Lang et la prix unique) mais pour être parfaitement précis, c’est le critère du #stock qui, en l’espèce et malgré le recours en justice de la librairie Vent d’Ouest, et bien qu’il soit reconnu comme discriminatoire par le ministère de la culture (en page 62 du Vade Mecum édité par le ministère sur le sujet de l’achat de livres en commande publique), a été décisif pour permettre à Nosoli de remporter le marché. [/mise à jour]

    Alors Nosoli le groupe lyonnais a gagné le marché de Nantes Université. Et les librairies nantaises Durance et Vent d’Ouest ont perdu. Et quelques mois après la perte de ce marché, la librairie Vent d’Ouest va fermer.

    On pourrait s’en réjouir finalement, ou même s’en foutre totalement. Après tout, Nantes Université va faire des #économies. Après tout une librairie qui ferme à Nantes et 7 salariés qui se trouvent sur le carreau c’est (peut-être) 7 personnes du service logistique du groupe Nosoli qui gardent leur emploi. Et puis quoi, une librairie qui ferme à Nantes mais il y en a 6 qui ont ouvert sur les deux dernières années à Nantes. Alors quoi ?

    Alors une université vient de tuer une librairie. Et quand on discute avec les gens qui, à Nantes Université, connaissent autrement que comptablement la réalité de ce qu’était le #marché_public passé avec Durance et Vent d’Ouest, et quand on échange avec celles et ceux qui ont l’habitude, à l’université ou ailleurs, de travailler avec le groupe Nosoli, on entend toujours la même chose : rien jamais ne remplacera la #proximité. Parce qu’avec Durance et Vent d’Ouest les échanges étaient souples, réactifs, pas (trop) systématiquement réglementaires, parce que les gens qui dans les bibliothèques de l’université commandaient les ouvrages connaissaient les gens qui dans les librairies les leur fournissaient, et qu’en cas de souci ils pouvaient même s’y rendre et les croiser, ces gens. Et on entend, en plus de l’aberration écologique, logistique, et sociétale, que les commandes avec le groupe Nosoli sont usuellement et comme avec tout grand groupe logistique … complexes, lentes, difficilement négociables et rattrapables, sans aucune souplesse, sans aucune écoute ou connaissance des besoins fins de l’université “cliente”. Voilà ce que l’on entend, entre autres choses plus âpres et plus en colère.

    Une université vient de tuer une librairie. Et ça fait tellement chier. C’est tellement anormal. Tellement schizophrène. Le même jour que celui où j’ai appris l’annonce de la fermeture définitive de la libraire Vent d’Ouest, j’ai aussi reçu un message de Nantes Université m’informant que, champagne, l’université venait – comme 14 autres universités – de remporter un appel à projet de plus de 23 millions d’euros. La cagnotte lancée par la libraire Vent d’Ouest après la perte du marché de Nantes Université lui avait rapporté quelques milliers d’euros qui lui avaient permis de retarder sa fermeture de cinq mois.

    Vivre à l’université, travailler à Nantes Université, c’est être tous les jours, à chaque instant et sur chaque sujet, confronté au même type de #schizophrénie. D’un côté on collecte des dizaines de millions d’euros dans de toujours plus nébuleux appels à projets, et de l’autre on gère la misère et la détresse. Et on ferme sa gueule. Parce que ne pas se réjouir de l’obtention de ces 23 millions d’euros c’est être un pisse-froid et c’est aussi mépriser le travail (et l’épuisement) des équipes qui pilotent (et parfois remportent) ces appels à projets. Oui mais voilà. À Nantes Université on organise des grandes fêtes de rentrée et on donnez rendez-vous à la prochaine #distribution_alimentaire, la #fête mais la #précarité. Et l’on fait ça tous les jours. Toutes les universités françaises organisent ou ont organisé des #distributions_alimentaires, et toutes les universités françaises remportent ou ont remporté des appels à projet de dizaines de millions d’euros. Mais les financements qui permettraient de recruter des collègues enseignants chercheurs ou des personnels techniques et administratifs en nombre suffisant, et de les recruter comme titulaires, pour garantir un fonctionnement minimal normal, ces financements on ne les trouve jamais. Mais les financements qui permettraient d’éviter de fermer une librairie avec qui l’université travaille depuis des dizaines d’années et d’éviter de mettre 7 personnes au chômage, on ne les trouve jamais. Mais les financements qui permettraient à tous les étudiant.e.s de manger tous les jours à leur faim, on ne les trouve jamais. Mais les financements qui permettraient à l’UFR Staps de Nantes Université de faire sa rentrée on ne les trouve jamais. Mais les financements qui permettraient aux collègues de la fac de droit de Nantes Université de ne pas sombrer dans l’#épuisement_au_prix et au risque de choix mortifières pour eux comme pour les étudiant.e.s on ne les trouve jamais. Mais les financements qui permettraient aux collègues de l’IAE de Nantes Université de ne pas s’enfoncer dans le #burn-out, ces financements on ne les trouve jamais. Il n’y a pas d’appel à projet à la solidarité partenariale. Il n’y a pas d’appel à projet à la lutte contre la #misère_étudiante. Il n’y a pas d’appel à projet pour permettre à des milliers de post-doctorants d’espérer un jour pouvoir venir enseigner et faire de la recherche à l’université. Il n’y pas d’appel à projet pour sauver l’université publique. Il n’y en a pas.

    Il n’y a pas d’appel à projet pour la normalité des choses. Alors Nantes Université, comme tant d’autres, est uniquement traversée par des #régimes_d’exceptionnalité. #Exceptionnalité des financements obtenus dans quelques appels à projets qui font oublier tous les autres appels à projet où l’université se fait retoquer. Exceptionnalité des #crises que traversent les étudiant.e.s, les formations et les #personnels de l’université. Exceptionnalité des mesures parfois prises pour tenter d’en limiter les effets. Dans nos quotidiens à l’université, tout est inscrit dans ces #logiques_d’exceptionnalité, tout n’est lisible qu’au travers de ces #matrices_d’exceptionnalité. Exceptionnalité des financements. Exceptionnalité des crises. Exceptionnalité des remédiations.

    Une université vient de tuer une librairie. Cela n’est pas exceptionnel. C’est devenu banal. Voilà l’autre danger de ces régimes d’exceptionnalité permanents : ils inversent nos #représentations_morales. Ce qui devrait être exceptionnel devient #banal. Et ce qui devrait être banal (par exemple qu’une université publique reçoive des dotations suffisantes de l’état pour lui permettre d’exercer sa mission d’enseignement et de recherche), est devenu exceptionnel.

    Une université vient de tuer une librairie. Dans le monde qui est le nôtre et celui que nous laissons, il n’est que des #dérèglements. Et si celui du climat dicte déjà tous les autres #effondrements à venir, nous semblons incapables de penser nos relations et nos institutions comme autant d’écosystèmes dans lesquels chaque biotope est essentiel aux autres. Nantes Université a tué la libraire Vent d’Ouest. Le mobile ? L’habitude. L’habitude de ne pas mener les combats avant que les drames ne se produisent. L’habitude de se résigner à appliquer des règles que tout le monde sait pourtant ineptes. L’habitude du renoncement à l’attention à l’autre, au plus proche, au plus fragile, dès lors que l’on peut se réjouir de l’attention que nous portent tant d’autres. L’#habitude d’aller chercher si loin ce que l’on a pourtant si près.

    Une université vient de tuer une librairie. Le libéralisme a fourni l’arme. Les codes des marchés ont fourni la balle. L’habitude a fourni le mobile. Et l’université, après avoir baissé les yeux, a froidement appuyé sur la détente.

    https://affordance.framasoft.org/2023/09/une-universite-a-tue-une-librairie

    #ESR #enseignement_supérieur

  • #Le_Corbusier fut-il fasciste ou démiurge ?

    Le cinquantième anniversaire de la mort de l’architecte Le Corbusier (1887-1965), auquel le Centre Pompidou consacre une rétrospective qui ouvre ses portes le 29 avril, provoque un regain de publications, d’expositions et de colloques qui célèbrent ou vont célébrer la mémoire du grand homme.

    http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/04/29/le-corbusier-fut-il-fasciste-ou-demiurge_4625047_3232.html
    #fascisme #architecture #urbanisme

    • Le Corbusier, fasciste ou séducteur ?http://www.lemonde.fr/idees/article/2015/06/03/le-corbusier-fasciste-ou-seducteur_4646539_3232.html

      Selon Jean-Louis Cohen, professeur d’histoire de l’architecture, les méandres politiques du Corbusier s’expliquent par une nécessité séductrice plutôt que par de véritables convictions (...)

      Ses méandres politiques révèlent sa vision #élitiste de la politique. Il partage celle-ci avec beaucoup de #réformateurs leurrés un temps par la rhétorique révolutionnaire de Vichy, ou tentant de jouer à l’intérieur du système, et dont certains entreront dans la Résistance. Cette posture ne trahit pas un simple #opportunisme, trait caractéristique d’un métier qui ne s’accomplit qu’avec des moyens matériels supposant de fortes décisions publiques. Elle relève de la séduction, car c’est bien là le registre dans lequel opère Le Corbusier. Face aux dirigeants auxquels il entend arracher des #commandes, il en intériorise le discours, qu’il reprend à son compte en tentant de les convaincre. Il reprocha ainsi à Staline de ne pas être assez révolutionnaire et donna à Bata des leçons sur la vente des souliers. En dépit des son amitiés pour des idéologues réellement engagés dans les politiques pétainistes, c’est dans l’ordre de la séduction qu’il restera à Vichy, sans passage à l’acte politique.

  • Laravel Envoy : Exécutez des #commandes #SSH en #PHP - La Ferme du web
    http://www.lafermeduweb.net/billet/laravel-envoy-executez-des-commandes-ssh-en-php-1707.html

    Lorsque vous créez des applications PHP complexes nécessitant de manipuler le filesystem de votre serveur ou encore supprimer des fichiers de cache, il peut être intéressant de pouvoir exécuter des commandes console en PHP.

    Laravel Envoy est une bibliothèque indépendante (pas besoin d’utiliser Laravel) permettant d’exécuter facilement des tâches, à la fois sur un serveur en local ou sur un serveur distant.

  • Les commandes de deux navires Mistral pour la Russie ne sont pas remises en cause - Construction navale (civile ou militaire)
    http://www.usinenouvelle.com/article/les-commandes-de-deux-navires-mistral-pour-la-russie-ne-sont-pas-remi

    Malgré les tensions en cours en Ukraine, la France devrait livrer comme prévu les deux bâtiments à la Russie, le Vladivostok et le Sébastopol. Le contrat pour la commande des deux navires signé en 2011 avec DCNS, est estimé à plus d’1 milliard de dollars.

    En pleine crise russo-ukrainienne, la France ne compte pas tirer un trait ou geler les commandes de deux navires militaires de type Mistral pour la marine russe. Le message est venu du plus haut sommet de l’Etat : « Nous respecterons les contrats qui ont été signés, nous ne sommes pas à ce stade là et nous voulons éviter d’en arriver là », a déclaré jeudi 6 mars le président François Hollande lors d’une conférence de presse à l’issue du sommet européen sur l’Ukraine.

    Pour l’instant la campagne d’essais des navires vient même de franchir un nouveau cap. Le premier des deux navires commandés, le Vladivostok, a pris la mer mercredi dernier pour faire ses premiers essais. La livraison est programmée pour la fin de l’année, celle du second bâtiment en 2016.

    UN contrat de un milliard d’euros

    Les enjeux sont significatifs pour les industriels français. Le contrat pour la commande des deux navires signé en 2011 avec DCNS, est estimé à plus d’1 milliard de dollars. STX France, agissant en tant que sous-traitant de DCNS réalise la moitié avant du navire, tandis que la moitié complémentaire est à la charge des chantiers russes OSK de Saint Petersbourg. Une option pour deux autres navires qui devraient être construits en Russie, n’a pas encore été levée par la marine russe. Le contrat prévoit également des transferts de technologies et la formation des équipages russes à Saint-Nazaire.

    La France dispose déjà de trois navires de ce type, le Mistral, le Tonnerre et le Dixmude. Ces bâtiments long de 200 mètres environ et qui disposent d’un équipage réduit de 170 marins, croisent à 18 nœuds soit 33 km/h. Ils combinent les fonctions de porte-hélicoptères, d’hôpital, de transport de troupes, et de mise en œuvre de moyens d’assaut amphibie.

    #Construction-navale ( militaire)
    #commandes
    #navires
    #Mistral
    #France
    #Russie