• Chasse aux #arrêts_de_travail : des médecins dénoncent « une campagne d’#intimidation générale »

    L’#Assurance_maladie contrôle des centaines de #médecins_généralistes qui prescriraient, selon elle, trop d’arrêts de travail, et leur impose des #quotas au mépris de la situation des patients. Des médecins, « écœurés », contestent la démarche.

    « Ça m’a fait perdre confiance en ma pratique. Je me suis dit : où est le problème, qu’est-ce que je ne fais pas bien ? » Comme d’autres confrères et consœurs, Valérie* [1] fait partie des 1000 médecins généralistes ciblés par l’Assurance maladie, parmi 6000 préalablement identifiés. En cause : leur trop grande prescription d’arrêts de travail. En juin 2023, le ministre de l’Économie, #Bruno_Le_Maire, dénonçait l’« explosion » des arrêts de travail et disait vouloir lutter contre les « #dérives » et « #abus ».

    Selon le gouvernement, les arrêts maladie auraient augmenté de 7,9 % en un an, et de 30 % entre 2012 et 2022, passant de 6,4 millions arrêts prescrits en 2012 à 8,8 millions désormais. Les #indemnités_journalières, versées par l’Assurance maladie pour compenser le salaire lors d’un arrête maladie, coûteraient 16 milliards d’euros par an.

    D’où la #chasse_aux_arrêts_de_travail, initiée par le gouvernement, qui se poursuit avec le projet de loi de financement de la #Sécurité_sociale pour 2024, adopté le 4 décembre dernier. Parmi les mesures que la #loi prévoit : la limitation à trois jours des arrêts de travail prescrits lors d’une téléconsultation, sauf prescription par le médecin traitant ou incapacité de se rendre chez le médecin. « Il y a véritablement eu un changement de politique en 2023 », constate Théo Combes, vice-président du syndicat des médecins généralistes MG France. L’homme voit dans cette offensive « une campagne d’intimidation générale contre la profession ».

    La particularité des patients oubliée

    « Qu’on discute de nos pratiques oui, mais on est dans le #soin, pas dans l’abus », réagit Valérie. Installée en Vendée, elle a eu la surprise de recevoir en juin dernier un courrier recommandé de l’Assurance maladie l’informant de sa trop grande prescription d’indemnités journalières. « En six ans, il y a une personne de 36 ans qui m’a demandé de lui faire un arrêt pour un rhume, que j’ai refusé. Là je suis d’accord qu’il ne faut pas abuser, mais ça m’est arrivé une fois ! » met-elle en avant. Surtout, les critères de contrôles ne tiennent selon elle pas du tout compte des particularités des patientèles.

    Partagée entre son cabinet en libéral et l’hôpital, Valérie est spécialisée en addictologie. « Pour les patients avec des problématiques d’addiction, on sait que les arrêts de travail, pour virus ou autre, sont source de rechute. Donc après, la pente est plus longue à remonter, et les arrêts aussi par conséquent. Pareil pour des patients qui ont des troubles psychiatriques, pour qui c’est vraiment source de décompensation », explique-t-elle. La professionnelle de santé a en effet constaté que ses prescriptions d’indemnités journalières ne font qu’augmenter : « Mais parce que ma patientèle ciblée augmente », précise-t-elle.

    Médecin depuis 30 ans dans le troisième arrondissement de Lyon et membre du Syndicat des médecins libéraux (SML), Laurent Negrello fait le même constat : « Je suis dans un quartier un peu défavorisé, avec 50 % de logements sociaux et plus de difficultés, ce qui impacte probablement mes quotas d’arrêts de travail », appuie-t-il. Contrôlé pour la deuxième fois en cinq ans, il insiste aussi sur le contexte sanitaire global, qu’il a vu nettement évoluer ces dernières années. « L’inflation des arrêts est à mon avis aussi due à des #conditions_de_travail qui sont devenues très difficiles. Les gens sont en #burn-out, ont des #accidents, une pression de rentabilité… ». Les conditions de travail (contraintes posturales, exposition à des produits toxiques, risque d’accidents, etc.) ne se sont globalement pas améliorées depuis 30 ans selon le ministère du Travail.

    Crainte de dépasser le quota

    Et il devient de plus en plus compliqué d’obtenir un rendez-vous chez un spécialiste. « À Lyon, il faut trois mois pour voir un orthopédiste ou un rhumatologue, et je ne parle même pas des psys, avec qui c’est impossible… », explique le généraliste. Plus les délais de prise en charge s’allongent, plus l’état d’un patient peut se dégrader et nécessiter un arrêt de travail. La #Caisse_nationale_d’Assurance_maladie (#Cnam) assure de son côté à Basta ! que ses données sont « standardisées » : « On essaie d’avoir des patientèles comparables. » La limite d’arrêts à ne pas dépasser, c’est plus de deux fois la moyenne du département. « Une approche purement statistique », déplore Théo Combes de MG France, qui pointe une « méthodologie contestable à plusieurs niveaux ».

    Alors que Michel Chevalier, médecin depuis 36 ans à Ousse, près de Pau, se remémore d’anciens contrôles par « entretiens confraternels », il déplore aujourd’hui « une absence de dialogue ». Après la réception d’un courrier recommandé en juin, il a été convoqué avec deux jeunes consœurs : « L’une exerce dans un quartier très pauvre de Pau et une autre dans un désert médical. Elle a 34 ans et n’en dort plus depuis le mois de juin », rapporte ce membre du Syndicat de la médecine générale (SMG). Valérie confie elle aussi s’être sentie « stressée d’être pointée du doigt » à la réception de ce courrier : « Je trouve la procédure violente en elle-même. Sachant qu’on a des délégués médicaux qui viennent régulièrement nous voir, avec qui ça se passe très bien. Je pense que ça aurait pu être fait autrement », met-elle en avant.

    À la réception du courrier, chaque médecin dispose d’un mois pour répondre et faire ses observations à l’Assurance maladie, qui décidera si les éléments apportés sont « suffisamment probants », nous détaille le service communication de la Cnam. Si ce n’est pas le cas, la procédure prévoit qu’il soit proposé au médecin ciblé une #mise_sous_objectif (#MSO) : pendant six mois, ce dernier doit réduire ses prescriptions d’arrêts de travail de 15 à 20 %. Ce que Valérie a refusé, comme de nombreux autres : « Heureusement, car au sein du cabinet médical où j’exerce, plus personne ne prend de nouveaux patients sauf moi quand ça touche des problématiques d’addiction. »

    Déjà contrôlé il y a cinq alors, Laurent Negrello avait alors accepté « la mise sous objectif » : « Pendant six mois, j’ai réduit mon temps de travail, donc les patients allaient voir ailleurs et j’ai atteint mes objectifs », relate-t-il avec ironie. Cette année, il a refusé ce procédé qu’il juge « très pesant et stressant » : « On travaille toujours dans la #crainte de dépasser le quota qui nous est imparti. Mais on est un peu dans le #flou parce qu’on ne sait pas vraiment quels sont les quotas exacts. On nous dit qu’il faut baisser de 20 %, mais c’est une zone grise, on ne sait pas comment baisser nos arrêts. Quels sont les critères ? On a face à nous des situations concrètes, donc baisser de 20 % c’est absurde », critique-t-il.

    En cas de refus de mise sous objectif, les médecins peuvent être « mis sous accord préalable », procédure pendant laquelle un médecin conseil de l’Assurance maladie doit valider tous les arrêts de travail prescrits par le médecin sous 48 heures. Valérie raconte avoir été convoquée à une commission ayant pour but de statuer sur sa soumission à ce dispositif en novembre.

    Convoqués à des « #commissions_des_pénalités »

    « Ça m’a occasionné beaucoup de stress et pris beaucoup de temps. J’ai préparé un argumentaire, fait des recherches. Sans compter les deux heures de route pour 30 minutes d’entretien prises sur ma journée de repos », relate-t-elle. La commission a voté à l’unanimité le refus de sa « #mise_sous_accord_préalable ». Mais la professionnelle de santé a dû attendre la réception d’un courrier de la CPAM, mi-décembre, pour avoir la confirmation de « l’abandon de la procédure ».

    Le 7 novembre dernier, Théo Combes a participé à l’une de ces « commissions des pénalités », notamment composées de représentants syndicaux et médecins d’un côté, et de représentants des employeurs et salariés de l’autre. « Des médecins sont venus s’expliquer. Ils étaient proches de la rupture d’un point de vue moral et psychologique, avec des risques suicidaires qui transparaissaient. J’aurais pensé que leurs récits auraient ému un mort, même si c’est peut-être un peu fort. Mais après quatre heures d’audition on s’est dit que c’était vraiment une #mascarade. C’est un système pour broyer les gens, les humilier », décrit le vice-président de MG France, écœuré.

    À l’issue des contrôles, des #pénalités_financières de plusieurs milliers d’euros peuvent s’appliquer s’il n’y a pas d’évolution du nombre de prescriptions d’arrêts de travail. « C’est très, très infantilisant. On a l’impression d’être dans la #punition plutôt que dans le dialogue, et de faire ça intelligemment », déplore Valérie, qui craint pour ses patients tout autant que pour sa profession. « On peut très bien imaginer maintenant que les médecins vont sélectionner les patients et ne plus s’occuper de ceux qui leur font faire trop d’arrêts », ajoute Michel Chevalier.

    L’Assurance maladie espère de son côté avoir un bilan chiffré de ces mesures « autour du deuxième trimestre 2024 ». Michel Chevalier, lui, ne sera plus là : « Le côté dramatique, c’est que j’ai décidé de prendre ma retraite à la suite de ces contrôles, ça a été la goutte d’eau. » Comme il n’a pas trouvé de successeur, ses patients n’ont plus de médecin depuis le 1er janvier.

    https://basta.media/chasse-aux-arrets-de-travail-medecins-denoncent-campagne-intimidation

    voir aussi :
    https://seenthis.net/messages/1041346
    #santé #France #humiliation #infantilisation #macronisme

    • Pourquoi ce médecin prescrit trois fois plus d’arrêts de travail que la moyenne à #Dieppe

      Le docteur Tribillac exerce au #Val-Druel, à Dieppe. Sanctionné pour avoir délivré trop d’arrêts de travail, il tente en vain d’expliquer la situation à l’Assurance maladie.

      « Je suis un lanceur d’alerte ! », commence #Dominique_Tribillac. Depuis 35 ans, ce médecin de famille exerce dans le quartier du Val-Druel, à Dieppe (Seine-Maritime). Âgé de 70 ans, il est ce que l’on appelle « un retraité actif ».

      Il devrait prendre bientôt sa retraite, avant l’été, mais un problème administratif l’occupe fortement depuis plusieurs mois : l’Assurance maladie l’a sanctionné car il donne trop d’arrêts de travail.

      La Sécurité sociale a fait les calculs, entre le 1er septembre 2022 et le 28 février 2023 : 4 911 journées indemnisées ont été prescrites.
      Trois fois plus d’arrêts de travail

      « Le nombre d’indemnités journalières versées, rapporté au nombre de patients a été de 16,7 », indique l’Assurance maladie. « En Normandie et au sein du groupe de communes semblables au sens de l’indice de défavorisation de l’Insee, l’institut national de la statistique et des études économiques, pour les praticiens exerçant une activité comparable, le nombre d’indemnités journalières versées par nombre de patients est de 5,90. »

      Le médecin du Val-Druel prescrit donc trois fois plus d’arrêts de travail.

      Une lettre aux médecins de France

      Mais le docteur Tribillac ne se laisse pas faire. Il conteste notamment l’indice de défavorisation mis en place par la Sécurité sociale. Selon lui, il ne reflète pas la réalité. « Il est très mal conçu, souligne-t-il. Il fait le contraire de ce qu’il est censé faire ». C’est-à-dire protéger et prendre en compte les populations les plus fragiles.

      « J’ai débusqué une véritable saloperie, ajoute Dominique Tribillac qui a le sentiment qu’on l’empêche d’aller au bout de sa démarche : « L’Assurance maladie essaie d’étouffer l’affaire. »

      Il va même envoyer une lettre ouverte à tous les médecins de France pour raconter son histoire et sa trouvaille concernant le référentiel sécu.
      Une population défavorisée

      Ce docteur, très apprécié de ses patients, ne cesse d’invoquer l’usure de ces derniers, dans un quartier prioritaire de la cité dieppoise. « Un quartier fermé avec une patientèle qui ne bouge pas, précise le professionnel. En tant que médecin de famille, j’ai vu les grands-parents, les parents, les enfants… Les gens qui vivent là y restent. »

      Au Val-Druel, « plus de la moitié de la population vit sous le seuil de pauvreté, indique-t-il. Les #polypathologies sont donc plus fréquentes, en moyenne deux fois plus élevées ». Le secteur dans lequel le médecin évolue est principalement touché par des problématiques psychologiques, de l’obésité, de chômage, de tabac, de cancers…

      Manque de spécialistes

      Selon lui, la moitié des habitants de ce quartier populaire arrive à la retraite invalide. « Ce sont des travailleurs qui ont des conditions de travail difficiles, explique Dominique Tribillac. Jusqu’à 45 ans, ils n’ont pas d’arrêt, et après ça commence.

      L’usure se déclare à cause de mouvements répétitifs qui sollicitent les mêmes membres ou muscles. « On arrive donc à une situation bancale en fin de carrière. Le patient peut-il encore travailler ou non, faire le même job… »

      Le médecin pointe aussi le manque de spécialistes dont les délais d’attente pour un rendez-vous sont de plus en plus élevés : « Les gens ne peuvent donc pas reprendre leur travail sans les avoir vus. »

      Un médecin dans l’#illégalité

      Mais tous ces arguments n’ont pas convaincu l’Assurance maladie. Ainsi, le docteur Tribillac a été sanctionné malgré un avis favorable d’une commission consultative pour le laisser exercer sereinement. C’était sans compter sur la direction de la CPAM de Seine-Maritime qui en a décidé autrement. Cette dernière n’a d’ailleurs pas souhaité répondre à nos questions au sujet du médecin du Val-Druel.

      Il exerce donc sa fonction dans l’illégalité depuis le 1er février 2024, refusant de remplir des papiers supplémentaires permettant à un médecin-conseil de vérifier les prescriptions d’arrêts maladie du docteur Tribillac. On appelle cette procédure une MSAP, une mise sur accord préalable.

      « Pas coupable »

      « Je ne suis pas coupable ! », argue-t-il. « Je ne remplirai pas ces dossiers. Ce médecin-conseil devrait plutôt voir ou appeler lui-même mes patients. »

      Conséquence pour ces derniers : ils ne peuvent plus toucher leurs indemnités journalières versées par la Sécu.

      https://actu.fr/normandie/dieppe_76217/pourquoi-ce-medecin-prescrit-trois-fois-plus-darrets-de-travail-que-la-moyenne-

  • Royaume-Uni : six migrants découverts à l’arrière d’un camion transportés à l’hôpital - InfoMigrants
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    Royaume-Uni : six migrants découverts à l’arrière d’un camion transportés à l’hôpital
    Par La rédaction Publié le : 16/02/2024
    Six exilés ont été transportés vendredi en urgence à l’hôpital après avoir été découverts à l’arrière d’un camion dans le port de Newhaven, au sud de l’Angleterre. Le véhicule avait embarqué dans un ferry depuis le port français de Dieppe. Pour l’heure, deux hommes ont été arrêtés par la police locale de Sussex dans cette affaire.C’est une nouvelle découverte tragique au Royaume-Uni. Six exilés ont été transportés d’urgence à l’hôpital après avoir été trouvés à l’arrière d’un camion dans le port de Newhaven, dans le sud de l’Angleterre, ce vendredi 16 février.
    La découverte a suscité un important déploiement des services de secours et des forces de l’ordre, rapporte l’AFP. Ils étaient plusieurs migrants - leur nombre n’a pas encore été confirmé - à se trouver à l’arrière de ce camion, repérés alors que le véhicule traversait la Manche à bord du ferry Seven Sisters, entre Dieppe et Newhaven. On ne connaît pas non plus, pour l’heure, leur nationalité.
    Le journal local Paris Normandie évoque au moins sept migrants, qui se trouvaient derrière une paroi leur permettant de se dissimuler, dans un camion de type frigorifique. Deux hommes ont été arrêtés dans cette affaire, a déclaré la police britannique de Sussex. L’un pour « entrée illégale » au Royaume-Uni, l’autre pour avoir « facilité l’entrée illégale » de ce petit groupe de migrants sur le territoire.
    L’embarquement s’est fait dans le port normand de Dieppe, pourtant ultra-surveillé. Au fil des années, la pose de caméras de sécurité ou encore de barbelés s’y est multiplié. Les Britanniques y ont même financé, en 2019, un grand hangar dédié à l’inspection minutieuse des camions, d’une surface de 300 m², qui a coûté 680 000 euros, rappelle Paris Normandie.

    #Covid-19#migrant#migration#france#royaumeuni#migrationirreguliere#routemigratoire#frontiere#mortalite#sante#ferry#traversee

  • « Si Cuba peut nous aider, ce sera très bien ». À Guingamp, des médecins cubains pour sauver l’hôpital public ?
    https://france3-regions.francetvinfo.fr/bretagne/cotes-d-armor/guingamp/si-cuba-peut-nous-aider-ce-sera-tres-bien-a-guingamp-de
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    « Si Cuba peut nous aider, ce sera très bien ». À Guingamp, des médecins cubains pour sauver l’hôpital public ?
    Écrit par Camille Bluteau
    Des médecins cubains pourraient-ils sauver l’hôpital public de Guingamp ? Vendredi 16 janvier, les défenseurs de l’hôpital de Guingamp (Côtes-d’Armor) ont rencontré Otto Vaillant, l’ambassadeur de Cuba. Chaque année, des dizaines de milliers de médecins cubains sont formés pour venir exercer à l’étranger et ils sont prêts à venir en France. Faire venir des médecins cubains pour sauver une maternité ? C’est le pari lancé par des défenseurs de l’hôpital de Guingamp (Côtes-d’Armor) qui ont rencontré vendredi 16 février 2024 l’ambassadeur de Cuba, Otto Vaillant, dans un territoire marqué par des difficultés d’accès aux soins. Chaque année, des dizaines de milliers de médecins cubains sont formés pour venir exercer à l’étranger et sont prêts à venir en France. L’agglomération de Guingamp-Paimpol avait invité le diplomate car elle a eu connaissance de « la possibilité d’envoi de médecins cubains dans le monde pour aider tant dans l’urgence que dans le temps », a expliqué son président Vincent Le Meaux, évoquant « un besoin en santé sur nos territoires ». « Si Cuba peut nous aider, ce sera très bien », a-t-il poursuivi. La maternité de Guingamp, menacée de fermeture depuis des années, a obtenu un sursis en 2018 à la demande d’Emmanuel Macron, après une forte mobilisation de la population. Mais depuis avril 2023, les accouchements y sont suspendus, faute d’un nombre de soignants suffisants.
    D’autres hôpitaux de la région souffrent d’un manque de personnel soignant. À Lannion et à Carhaix, l’accès aux urgences est régulé la nuit, faute de médecins urgentistes. Les Côtes-d’Armor sont le département le moins bien loti de la région en termes de densité de médecins. Depuis avril 2023, les accouchements à l’hôpital de Guingamp sont suspendus. Des médecins cubains pourraient venir en renfort.Depuis avril 2023, les accouchements à l’hôpital de Guingamp sont suspendus. Des médecins cubains pourraient venir en renfort.
    D’autres élus, en Bretagne et ailleurs en France, ont aussi sollicité Otto Vaillant, assure le diplomate sans préciser lesquels. Bien sûr, il faudra un décret du gouvernement et l’accord des autorités de santé. Pour les élus locaux, comme pour le syndicat CGT, cette initiative a valeur de test. « Je pense que l’Agence régionale de santé est à l’écoute de toute solution qui viendrait du territoire. Elle a également intérêt à écouter ce qui est proposé par les élus locaux. Nous allons nous employer à écrire très rapidement au président de la République » afin d’"obtenir cet accord par décret", a assuré Vincent Le Meaux. En France, des médecins cubains sont déjà intervenus en Martinique ou en Guyane en pleine crise du Covid-19, d’autres en Italie et en Andorre. Une région italienne, la Calabre, a signé un accord en 2022 pour un déploiement plus important de 500 Cubains. « C’est une solution rapide. Ils ont montré leur efficacité pour se déployer rapidement en cas de sinistre important. On n’est pas dans un sinistre aigu mais on en arrive à une population délaissée depuis 15 ans. Un tiers de nos patients sont sans médecin généraliste dans la région », déclare Christian Brice, médecin urgentiste à l’hôpital de Guingamp.
    Pour celui qui est à l’origine de cette idée, ce renfort cubain ne serait que transitoire, pour éviter les fermetures de service. « Si on laisse fermer ces services d’urgences, si on ne prend pas des mesures qui seraient intermédiaires pour les maintenir ouverts le temps qu’on forme du personnel pour répondre aux demandes légitimes, on ne les rouvrira pas », regrette Gaël Roblin, conseiller municipal de Guingamp. L’hôpital de Guingamp manque notamment d’urgentistes, d’obstétriciens, de sages-femmes. Les besoins précis n’ont pas été évoqués lors des échanges avec l’ambassadeur cubain. Cette rencontre aura permis de mettre « l’État français face à ses contradictions : nous faisons partie des cinq premières puissances mondiales, il y a encore une vingtaine d’années, nous avions le meilleur système de santé au monde et nous nous retrouvons à faire appel à des médecins cubains », estimait Fabrice Dehove, du syndicat SUD, avant les échanges.
    La venue de médecins cubains soulève des questions, comme l’obstacle de la langue et le coût, alors qu’une grande partie du salaire versé par le pays hôte est prélevée par les autorités cubaines. Les médecins cubains pourront apprendre le français, a assuré l’ambassadeur. La question des salaires que toucheraient ces médecins n’a pas été abordée, mais « à compétence égale, il doit y avoir le même salaire », a fait valoir Vincent Le Meaux. Certaines ONG dénoncent les conditions dans lesquelles sont envoyés les médecins cubains à l’étranger. En 2023, selon les autorités cubaines, 22.632 professionnels de santé étaient répartis dans 57 pays. Cette coopération médicale a rapporté 6,3 milliards de dollars en 2018 et 3,9 milliards en 2020, selon des chiffres officiels. Que cette initiative se concrétise ou non, elle aura au moins le mérite d’attirer l’attention sur la situation de l’hôpital public sur ce territoire.

    #Covid-19#migrant#migration#france#cuba#bretagne#personnelmedical#sante#systemesante#

  • Un immigré nommé Missak Manouchian

    Communiqué du RAAR

    Le 21 février prochain, Missak et Mélinée Manouchian entreront au Panthéon. Nous nous félicitons de cette reconnaissance, mais force est de constater qu’« en même temps » la loi Darmanin contre les migrant·es est votée avec le soutien du Rassemblement national, héritier des fascistes du XXème siècle qui envoyèrent à la mort Manouchian et ses camarades. Pour nous, c’est l’occasion de rappeler ce que furent les combats de ces immigré·es et de dire leur actualité, alors que les périls d’hier se profilent à nouveau. De parler, non seulement de Manouchian, mais aussi de ses camarades, qu’il aurait été bon d’associer dans la célébration, comme ils et elle le furent dans la mort (une pétition le réclamait d’ailleurs).

    https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/02/18/un-immigre-nomme-missak-manouchian

    #france #histoire #migration #racisme

  • #CommemorAction 2024 : on n’oublie pas, on ne pardonne pas !

    Le #6_février, c’était la journée mondiale de lutte contre le régime de mort aux frontières et pour exiger la vérité, la justice et la réparation pour les victimes de la migration et leurs familles. Pour la troisième année consécutive, #Douarnenez a répondu à l’appel qui été suivi par 55 villes (dont sept en #Bretagne) de 17 pays d’Afrique, d’Asie et d’Europe.

    https://blogs.mediapart.fr/938539/blog/130224/commemoraction-2024-noublie-pas-ne-pardonne-pas
    #commémor'action #commémoration #mourir_aux_frontières #morts_aux_frontières #migrations #réfugiés #mémoire #oubli #pardon #6_février_2024 #France #portfolio #photographies

    • « Parce que Oublier c’est Tuer une Deuxième Fois »

      « Parce qu’on ne veut pas s’habituer »

      « Parce qu’on savait »

  • Libertés universitaires en danger. Une conférence sur le droit international en #Palestine interdite par l’Université Lyon 2
    https://academia.hypotheses.org/54900

    Le syndicat Solidaires étudiant-es Lyon a fait parvenir à la rédaction d’Académia l’article ci-dessous, suite à la double interdiction – l’une décidée par la présidente de l’université Lyon 2, l’autre par la préfète du Rhône – de la conférence que … Continuer la lecture →

    #Libertés_académiques_:_pour_une_université_émancipatrice #Opinions,_motions,_propositions,_expression_syndicale #liberté_d'expression #liberté_de_réunion #libertés_académiques #Solidaires_étudiant·e·s #Université_Lyon-2

  • La voix des autres

    Rim, tunisienne, travaille en France en tant qu’interprète dans le cadre des procédures de demande d’asile. Chaque jour, elle traduit les récits d’hommes et de femmes exilés dont les voix interrogent sa propre histoire.

    https://www.arte.tv/fr/videos/117669-000-A/la-voix-des-autres
    #interprètes #traduction #asile #migrations #réfugiés #France #accompagnement_juridique #procédure_d'asile

    ping @karine4

  • Le Sénat rejette l’instauration d’un congé menstruel
    https://www.mediapart.fr/journal/france/150224/le-senat-rejette-l-instauration-d-un-conge-menstruel

    Jeudi, en séance publique, la proposition de loi socialiste a été rejetée par 213 voix contre et 115 pour.

    publicsenat

    Le Sénat reste une assemblée très majoritairement masculine, avec 230 hommes (66 %) contre 118 femmes (34 %) à l’issue du dernier renouvellement.

    Je souhaite à tous les sénateurs une prostate qui se durcit douloureusement tout les mois, jusqu’à se tordre par terre, de 13 ans à 90.

  • Monsieur le ministre du Logement, refusez toute mesure qui signerait la suppression de la loi SRU

    Dans une lettre au ministre délégué au Logement, Guillaume Kasbarian, un collectif d’associations, de syndicats et d’élus sonne l’alerte : poursuivre avec les choix actuels du gouvernement en matière de logement social équivaut à une non-assistance à personnes en danger.

    L’heure est grave ! Avec 330 000 personnes à la rue dont 3 000 enfants, plus de 8 000 de nos concitoyen·ne·s dont l’appel au secours n’est pas pourvu par le 115, ne rien faire ou poursuivre avec les choix actuels équivaut à une non-assistance à personnes en danger. L’urgence n’est pas de détricoter la solidarité sociale mais au contraire de la renforcer !

    En annonçant, le 30 janvier dernier, la volonté du gouvernement d’intégrer dans les décomptes de la loi Solidarité et renouvellement urbain (SRU), le logement intermédiaire ainsi que de donner aux maires le pouvoir de décider des premières attributions, le Premier ministre Gabriel Attal s’est engagé dans une voie qui porte atteinte aux fondations du logement social en France.

    https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/02/15/monsieur-le-ministre-du-logement-refusez-toute

    #france #logement

  • badinter était pour la peine de mort des Palestiniens Abdalouahad Bouchal -

    Quatre jours après sa disparition et les louanges médiatiques qui l’ont accompagnée, il est utile de rappeler que robert badinter ne fût pas « que » l’infatigable abolitionniste de la peine de mort. Comme le décline l’analyste Abdalouahad Bouchal qui - à rebours des médias français - n’a pas la mémoire courte... en plein génocide perpétré contre les Palestiniens par l’État colonial d’israël, co-financé par la France et les États-Unis (I’A).


    
On peut s’être battu pour l’abolition de la peine de mort, en France, et être favorable à la mise à mort de tout un peuple, en Palestine. C’est ce que n’a cessé de nous démontrer robert #badinter en venant, sans discontinuer, au secours d’israël.

    Un soutien à un régime d’apartheid au demeurant moins étonnant que les arguments de cet éminent avocat s’articulant en faveur de Tel-Aviv, de façon aussi odieuse que stupide.

    Tout d’abord, fin décembre 2019, devant la Cour Pénale Internationale (CPI), badinter s’est évertué à défendre l’État d’israël pointé par une « enquête sur les éventuels crimes de guerre commis depuis juin 2014 en israël-Palestine ».

    A l’époque, selon badinter, israël et ses dirigeants ne pouvaient être traduits devant la CPI au prétexte que la partie requérante ne serait pas… un pays. A savoir, la Palestine. Or, bien que l’État de Palestine ne dispose que d’un statut d’observateur à l’assemblée des Nations-Unies, l’État palestinien est reconnu comme un État à part entière par les autres États signataires du statut de Rome et membres de la CPI.

    En effet, de 1988 à 2015, la Palestine a été reconnue par 138 États dont deux membres permanents du Conseil de sécurité (Russie et Chine). On pouvait donc, en 2019, être pour le moins perplexe à l’écoute des « arguments » de l’ancien garde des sceaux.

    Quels étaient les arguments de ce technicien du droit sur la recevabilité de la requête déposée jadis par l’Autorité palestinienne de Ramallah ? En voici le résumé, in extenso, dans un billet du chirurgien français Christophe Oberlin ( https://blogs.mediapart.fr/christophe-oberlin/blog/200220/cour-penale-internationale-face-aux-palestiniens-badinter-defend-net ) :

    « La Cour Pénale Internationale n’a pas juridiction sur les crimes prétendus avoir été commis en Cisjordanie, incluant Jérusalem Est et la bande de Gaza. Le terme « État » selon l’article 12(2) (a) du Statut de la Cour signifie que l’État est souverain, or la Palestine ne l’est pas. La Palestine n’est pas un « État » au regard de l’article 12 (2) (a) du Statut par sa simple adhésion au Statut de Rome. Ce n’est pas à la CPI de déterminer si la Palestine est un État souverain selon le droit international, ou si l’enquête en question s’applique « sur le territoire de » la Palestine alors que les parties sont engagées à trouver une solution négociée sur le statut d’état et les frontières. La Palestine ne remplit pas les critères d’un État selon le droit international. Et la seule façon d’enquêter sur des crimes commis dans ce cadre est constituée par la saisine de la CPI par le Conseil de sécurité. Les accords d’Oslo s’imposent à la juridiction de la Cour. » 

    Pour les sceptiques, Oberlin enfonce le clou : « Le résumé de l’argumentaire de robert badinter, présenté en tête de son texte, est identique mot pour mot aux déclarations récentes du Premier ministre israélien #benjamin_netanyahou. Et la suite du document ne fait qu’insister à la fois sur l’illégalité des plaintes palestiniennes, et de la Cour Pénale Internationale à les prendre en compte. Le professeur badinter commet ainsi de remarquables erreurs de droit et d’éthique. »

    Bref, en 2020, robert badinter conduisait une armée de tabellions rémunérés par le gouvernement de l’époque de #benjamin_netanyahu, futur génocidaire en 2023-2024. Il y a 4 ans, israël a finalement été débouté par la présidente ougandaise de la CPI et l’affaire a fait « pschiiiiit ! »

    La France, patrie des lumières blafardes et des droits de l’homme blanc, brille quelques fois d’un bien mauvais éclat. Qu’à cela ne tienne, les lumières, même les plus amoindries, attireront toujours les insectes…

    Protéger certains collabos français 
Plus loin dans le temps, on peut aussi rappeler qu’en 1975, robert badinter s’était violemment opposé à la fameuse Résolution 242 des Nations-Unies https://www.europarl.europa.eu/meetdocs/2004_2009/documents/fd/unresolutions_/unresolutions_fr.pdf . Celle-ci ordonnait, en son article premier :
    1) le « Retrait des forces armées israéliennes des territoires occupés » ;
    2) la « Cessation de toutes assertions de belligérance ou de tous états de belligérance et respect et reconnaissance de la souveraineté, de l’intégrité territoriale et de l’indépendance politique de chaque État de la région et leur droit de vivre en paix à l’intérieur de frontières sûres et reconnues ».

    Aux plus distraits, cette opposition résolue de badinter indique que ce n’est pas d’hier que « Bob » s’est positionné en ennemi de la cause palestinienne.

    Ensuite, pour les cacahuètes du pousse-café, on rajoutera que l’avocat et ex-ministre de la Justice avait vertement engueulé les français juifs venus huer le président François mitterrand lors d’une cérémonie de commémoration du Vélodrome d’Hiver https://www.youtube.com/watch?v=AkebDVjaPjk&t=5s&ab_channel=C%C3%A0vous

    (1992). La cause de cette hostilité citoyenne ? Le refus persistant du monarque mitterrand à reconnaître la responsabilité de la France dans la période de Vichy (1940-1944).

    Voilà donc un bien curieux personnage que ce badinter. S’il s’est incontestablement investi dans l’abolition de la peine de mort, en France et à travers le monde, il a aussi, par fidélité (ou intérêt ?), su se mettre en colère pour protéger « le père François » ; collaborateur du régime de Vichy dans la France occupée de la Seconde Guerre mondiale.

    Par ailleurs, le premier des abolitionnistes français protégera encore#rené bousquet https://fresques.ina.fr/mitterrand/fiche-media/Mitter00296/les-relations-de-francois-mitterrand-et-rene-bousquet.html, antisémite et collabo de l’occupant nazi et… « ami » proche de mitterrand. Cela, jusqu’à ce que – le 8 Juin 1993 – un illuminé vienne tirer 5 balles dans le buffet de l’ex-directeur général de la police de Vichy ET superviseur de « la rafle du Vel d’Hiv’ » [Vélodrome d’Hiver]. Le bilan du haut fonctionnaire bousquet d’avril 1942 à décembre 1943 ? Plus de 60.000 juifs arrêtés par ou avec le concours de la police française pour être déportés vers le camp d’extermination d’Auschwitz…

    L’assassinat de bousquet évitera à mitterrand et son clan « socialiste », la tenue d’un Procès bousquet qui aurait été – comme chacun le sait – très encombrant.

    Enfin, dans la famille badinter, on n’est pas à une contradiction près.

    La veuve de Robert, par exemple, qui, en bonne FÉMINISTE, porte toujours le patronyme de feu son époux, élisabeth_badinter, a été et demeure une pasionaria du féminisme islamophobe. Sans que cela interroge ou énerve quiconque durant sa carrière de présidente au sein du groupe Publicis, dont l’un des très gros clients n’était autre que l’Arabie Saoudite ; pays longtemps soutien inconditionnel de l’État d’israël.



    Abdalaouhad Bouchal

    Source : https://investigaction.net/badinter-etait-pour-la-peine-de-mort-des-palestiniens

    #Palestine #vichy #israël #collaboration #france #elisabeth_badinter #laïcité #islamophobie #badinter #politique #justice #Auschwitz #robert_badinter

    • Des rappels qu’il semble effectivement important de rappeler, sans minimiser le rôle de la personne qui a incarné (en France, donc) l’abolition de la peine de mort, un sujet qui reste malheureusement toujours autant d’actualité. Notamment, en Israël.

      Juste une remarque quelque peu décentrée par rapport au contenu essentiel de ce texte : à propos d’Élisabeth Badinter (on pourra s’étonner que certains patronymes soient privés de majuscules), une féministe,certes, old school , à qui l’on reproche d’avoir conservé le nom de son époux.

      Pour les femmes de cette génération, de toute façon, elles n’avaient pas le choix : c’était soit le nom du mari, soit le nom du père. Pour certaines femmes, choisir le nom du père était une manière de s’affranchir de l’emprise du mari. Et inversement. Dans tous les cas, tant qu’il n’a pas été possible de choisir le nom de la mère ou d’inventer ex nihilo son propre patronyme, il s’agit d’un non-choix, puisque cette expression de la filiation reste la marque symbolique forte du patriarcat.

    • @biggrizzly Alors, s’il n’est pas nécessaire de discuter la question biaisée de la filiation patronymique, on se demande bien ce que vient faire l’évocation de cette personne dans un texte qui concerne son époux, si ce n’est de rattacher, dans leurs identités respectives, l’une à l’autre, respectant ainsi le schéma patriarcal. Le caractère islamophobe et réactionnaire des positionnements politiques d’Élisabeth Badinter ne justifie pas ce type de raccourcis et d’amalgame.

      @mfmb tout à fait d’accord, c’est la raison pour laquelle il me semble que la seule façon de sortir vraiment du truc est la création d’un patronyme.

    • Probablement d’accord, mais alors si l’on critique les positions politiques d’Élisabeth Badinter on le traite dans un sujet qui concerne la personne elle-même ; pas en tant que pièce rapportée d’un texte qui concerne son mari.

  • Quels actes forts la France va-t-elle poser pour imposer la paix à Gaza ? #QAG 14/02/2024 - YouTube
    https://www.youtube.com/watch?v=sCHTpR2Jf1E


    Après un hommage à Missak et Méliné Manouchian, question du député Dharréville et réponse de Mme Chrysoula Zacharopoulou
    Secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, chargée du Développement et des Partenariats internationaux, à la place de Stéphane Séjourné, empêché.
    #gaza #complicité #France #génocide #inaction

  • Israël/Territoires palestiniens - La France adopte des sanctions à l’encontre de colons israéliens violents (13.02.24) - Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères
    https://www.diplomatie.gouv.fr/fr/dossiers-pays/israel-territoires-palestiniens/actualites-et-evenements/2024/article/israel-territoires-palestiniens-la-france-adopte-des-sanctions-a-l-e

    La France adopte des sanctions à l’encontre de colons israéliens extrémistes qui se sont rendus coupables de violences contre des civils palestiniens en Cisjordanie. À ce titre, 28 individus sont visés par une interdiction administrative du territoire français.

    Ces mesures interviennent alors que se sont multipliées, ces derniers mois, des violences perpétrées par des colons à l’encontre de la population palestinienne. La France réaffirme sa condamnation ferme de ces violences inadmissibles. Comme nous l’avons affirmé à de nombreuses reprises, il est de la responsabilité des autorités israéliennes d’y mettre fin et de poursuivre leurs auteurs.

    La France est également favorable à l’adoption de sanctions au niveau européen à l’encontre de ces colons violents. Nous travaillons à cet égard avec nos partenaires européens.

    La colonisation est illégale en droit international et doit cesser. Sa poursuite est incompatible avec la création d’un État palestinien viable, qui est la seule solution pour qu’Israéliens et Palestiniens puissent vivre, côte à côte, en paix et en sécurité.

    #FranceDiplo

  • François Héran, sociologue : « A Mayotte, de quel droit du sol parle-t-on ? »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/02/13/francois-heran-sociologue-a-mayotte-de-quel-droit-du-sol-parle-t-on_6216345_

    François Héran, sociologue : « A Mayotte, de quel droit du sol parle-t-on ? »
    Tribune François Héran
    Professeur au Collège de France
    Lors d’un voyage à Mayotte, en août 2022, Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur et des outre-mer, avait annoncé la couleur : pour réduire l’immigration des Comoriens, il fallait « lutter contre l’attractivité sociale et administrative » de Mayotte. La volonté récente d’abolir le droit du sol dans l’île en modifiant la Constitution s’inscrit dans cette ligne. Elle figurait déjà dans le programme du Rassemblement national (RN). Elle part d’un postulat : si l’immigration est si forte à Mayotte, au point que la moitié des habitants de l’île sont désormais, selon l’Insee, de nationalité étrangère, la faute en reviendrait essentiellement au droit du sol.
    C’est oublier que l’attractivité de Mayotte est d’abord géographique et économique. La politique d’influence menée par la France dans l’océan Indien dans les années 1970 a détaché les Mahorais des Comores en leur faisant miroiter une prospérité inespérée. Dans un rapport d’information, en octobre 2021, le Sénat a bien décrit la situation : les migrations entre les Comores et Mayotte sont typiques de la mobilité humaine des archipels. Elles s’expliquent par la faiblesse des distances, la communauté de langue et de culture, les liens familiaux, les écarts de salaire.
    En montant en épingle les rivalités historiques entre Mamoudzou et Anjouan, des familles de notables civils et religieux ont réussi à mobiliser la population de Mayotte en faveur du ralliement à la France lors du référendum de 1976, processus couronné par l’approbation massive de la départementalisation en 2009. Les Mahorais ont sincèrement cru que le référendum serait l’instrument magique permettant de grimper à bord du paquebot France et de larguer les amarres en abandonnant les Comores à leur sort.
    On s’est imaginé qu’il suffisait de requalifier les migrations internes de l’archipel en migrations « étrangères » pour s’en débarrasser. Ce n’était pas seulement nier les réalités géographiques, économiques et culturelles, c’était surestimer les capacités de la France à garantir, au sein de l’océan Indien, le développement d’un îlot de prospérité.
    Frontière redoutable
    Certes, nul ne peut nier les réformes majeures qui ont rapproché Mayotte de la métropole : instauration d’un état civil à la française, fin de la polygamie, suppression de la justice des cadis, mise en place de droits sociaux. Mais la distance reste considérable. Si l’on retient pour critère le PIB par habitant, l’île est désormais six fois plus riche que les Comores, tout en demeurant le plus pauvre des départements français.
    Entre Mayotte et l’île d’Anjouan, située seulement à 70 kilomètres, la France a creusé l’écart en installant une frontière redoutable : celle qui sépare les pays du Nord des pays du Sud. Comme l’a rappelé le géographe Stéphane Rosière, la nouvelle frontière entre Mayotte et les Comores a créé l’un des écarts de développement entre pays limitrophes les plus marqués au monde, derrière ceux qui séparent Israël de l’Egypte (16 contre 1), l’Iran de l’Afghanistan (10) ou les Etats-Unis du Mexique (7). Comment s’étonner que Mayotte continue d’attirer les populations voisines ? Comment ne pas mesurer le caractère tragique d’une mobilité de cousinage traitée dorénavant comme une invasion ennemie ?
    Dans l’essai Immigration : le grand déni (Seuil, 2023), je doutais qu’on puisse perpétuer « le paradoxe consistant à placer Mayotte en dehors de la légalité républicaine pour mieux affirmer son appartenance à la République ». La liste est longue des exceptions censées « adapter » le droit aux particularités des territoires d’outre-mer, en vertu de l’article 73 de la Constitution : pas de commission du titre de séjour, pas de recours face à l’OQTF (obligation de quitter le territoire français), pas d’allocation pour les demandeurs d’asile, pas d’accueil des enfants mineurs par l’aide sociale, pas d’accès au RSA avant un délai de 15 ans. Et, déjà, un droit du sol limité.
    Mais de quel droit du sol parle-t-on ? C’est par un abus de langage que l’on identifie le droit du sol simple à une acquisition « automatique » de la nationalité française. Il faut en réalité remplir trois conditions : être né en France, y avoir vécu pendant au moins cinq ans et toujours y résider à sa majorité. A Mayotte, une quatrième condition s’y ajoute depuis 2018 : être né sur place de parents qui étaient en situation régulière depuis trois mois. Comment justifier qu’on réduise ainsi le droit des enfants au nom d’une « faute » ancienne des parents ?
    La loi de 1889, qui a créé le droit du sol simple, fait partie des législations qui ont fait la République. Comme l’ont montré Patrick Weil et Rogers Brubaker, il ne s’agissait pas d’opposer un droit du sol « universaliste » à un droit du sang à base « ethnique ». On l’oublie souvent, le droit du sang fait partie intégrante du droit français de la nationalité : est française toute personne née d’un parent français. Le droit du sol ne s’oppose pas au droit du sang, il le complète. Dans les pays d’immigration (Amérique du Nord et Amérique latine, à quelques exceptions près), le droit du sang va de pair avec le droit du sol immédiat. Dans les pays d’immigration plus récente (l’essentiel de l’Europe, dont la France), il est complété par un droit du sol différé : toute personne née en France de parents nés à l’étranger devient française à sa majorité (dès 13 ans sur demande des parents, à 18 ans sinon). Les pays du Sahel et du Moyen-Orient privilégient un droit du sang patrilinéaire, tandis qu’en Russie et dans la plupart des pays asiatiques, le droit du sang exclut tout droit du sol, une façon de ne pas perdre ses émigrés.
    Notre droit de la nationalité est donc le fruit d’une longue histoire et d’un savant équilibre. Le RN prétend extrapoler la situation de Mayotte à l’ensemble de la métropole, comme si un milieu insulaire coupé de son archipel pouvait en quoi que ce soit préfigurer le reste du pays. Mais que ne ferait-on pas pour rallier l’opinion en liant les thèmes de l’immigration, de l’insécurité et du « grand remplacement » ? Si le parti Les Républicains et d’autres acteurs de notre vie politique lui emboîtaient le pas par simple calcul électoral, la République serait clairement en danger.

    #Covid-19#migrant#migration#france#mayotte#droitdusol#naturalisation#insularite#archipel#constitution#sante

  • A Mayotte, Gérald Darmanin annonce la suppression du droit du sol dans l’archipel pour faire taire la colère de la population
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/02/12/a-mayotte-gerald-darmanin-annonce-la-suppression-du-droit-du-sol-dans-l-arch

    A Mayotte, Gérald Darmanin annonce la suppression du droit du sol dans l’archipel pour faire taire la colère de la population
    Par Jérôme Talpin (Mamoudzou, envoyé spécial)
    Cette fois, pas de traditionnels colliers de fleurs pour l’accueil. Pas de shengué, ce chant de bienvenue. Et pas d’enivrant bain de foule ponctué de messages louangeurs, comme ce fut le cas à Mamoudzou, le 25 juin 2023. Après le lancement de l’opération « Wuambushu » de lutte contre la délinquance, l’immigration clandestine et l’habitat insalubre, Gérald Darmanin avait été qualifié à l’époque par la foule d’« homme de la situation ».
    Venu dimanche 11 février à Mayotte, paralysée depuis trois semaines par les multiples barrages des collectifs de citoyens pour protester contre l’insécurité et le poids de l’immigration irrégulière, le ministre de l’intérieur et des outre-mer a été accueilli par des huées. Elles étaient lancées par un peu plus de 400 manifestants maintenus à distance, dont beaucoup de « mamans » des collectifs, vêtues de leur salouva.Pour dessiner une fin de crise et donner de nouvelles « preuves d’amour aux Mahorais », Gérald Darmanin, accompagné de la nouvelle ministre déléguée aux outre-mer, Marie Guévenoux, a annoncé des « mesures extrêmement fortes ». La veille, avant de prendre l’avion, il avait préparé le terrain dans une vidéo en s’adressant aux Mahorais : « Aidez-moi à rétablir la paix publique, discutons, travaillons ensemble. »
    Très remontés, les différents collectifs regroupés dans le mouvement des Forces vives dénonçaient jusqu’à sa venue un « mépris ». « Le gouvernement ne veut pas entendre les cris des Mahorais », s’insurgeait Saïd Kambi, un des leaders des Forces vives. La lenteur prise pour aboutir à un remaniement n’a cessé d’accentuer cette conviction. Ayant réalisé à Mayotte son plus gros score au premier tour de la présidentielle de 2022 (42,68 % des suffrages), Marine Le Pen s’est engouffrée dans cette brèche en fustigeant, vendredi 9 février, « une population mahoraise totalement abandonnée » face à une « quasi-guerre civile ».
    Pour éteindre cette colère longtemps restée sourde dans une île de 310 000 habitants où, selon l’Insee, près d’un habitant sur deux en 2017 était étranger, Gérald Darmanin a lancé solennellement, dès sa descente d’avion, sa série d’annonces : « Le président de la République m’a chargé de dire aux Mahorais que nous allons prendre une décision radicale qui est l’inscription de la fin du droit du sol à Mayotte dans une révision constitutionnelle. » « Il ne sera plus possible de devenir français si l’on n’est pas soi-même enfant de parent français, précise le ministre. Nous couperons l’attractivité qu’il peut y avoir dans l’archipel. » Une mesure réclamée depuis des années par la majorité des élus et de la population mais « jamais accordée ».
    Sa conséquence est qu’elle va renforcer les spécificités et les exceptions du droit des étrangers sur le sol mahorais. Car à Mayotte, le droit du sol comporte déjà de nombreuses dérogations pour dissuader l’immigration irrégulière. (...) Selon M. Darmanin, cette mesure va diminuer de 80 % le nombre de titres de séjour délivrés à Mayotte en raison de liens familiaux. D’après l’Insee, sur un peu plus de 10 770 naissances en 2022, près de sept nourrissons sur dix ont au moins un parent étranger.
    Gérald Darmanin a, en outre, souligné que la loi relative à l’immigration « a beaucoup durci les conditions de regroupement familial à Mayotte », tout en reprochant à certains parlementaires mahorais de ne pas l’avoir votée. Selon lui, les nouvelles conditions – trois ans de résidence et un titre de séjour d’au moins cinq ans – vont « diviser par cinq le nombre de regroupements familiaux à Mayotte ».
    La troisième mesure annoncée était l’une des principales « conditions » des Forces vives pour négocier : la fin du visa territorialisé. Ces titres de séjour délivrés localement autorisent uniquement une présence sur l’île. Les collectifs réclamaient la suppression de cette autre exception qui, selon eux, fait de l’île une impasse où les étrangers sont maintenus, afin de protéger La Réunion et l’Hexagone. (...)
    La fin du visa territorialisé doit être incluse dans le projet de loi Mayotte promis « avant l’été » par Marie Guévenoux. Le ministre de l’intérieur a toutefois voulu placer l’île devant ses responsabilités en épinglant « la bonne société mahoraise parfois complice » pour faire venir des travailleurs étrangers, ou qui monnaye des certificats de
    Autre sujet qui cristallise les colères à Mayotte : le camp de migrants africains venus de la région des Grands Lacs et de Somalie, qui sont installés autour du stade de Cavani, à Mamoudzou, dans des abris construits avec du bois et des bâches. L’installation régulière de nouveaux migrants est vue comme l’ouverture d’une « seconde route migratoire », après celle venue des Comores. (...)
    Gérald Darmanin promet en réponse « l’évacuation totale du camp ». Selon lui, les réfugiés ayant obtenu l’asile « vont être rapatriés dans l’Hexagone ». Cinquante d’entre eux ont pris l’avion dimanche soir, après quarante premiers départs fin janvier. Des retours volontaires dans les pays d’origine vont être proposés. Une nouveauté à Mayotte. Pour ceux qui ont été déboutés de leur demande, il y aura aussi des « expulsions immédiates », selon Gérald Darmanin.
    L’installation de ce camp d’environ 700 migrants africains a joué un rôle de déclencheur dans cette crise. A Mayotte, leur stigmatisation est prégnante. L’extrême droite s’est emparée du sujet pour en faire un épouvantail sur le thème de la submersion migratoire qu’elle prédit pour la France hexagonale.
    Dans ses interventions sur la chaîne d’info CNews, l’un des fondateurs du média Livre Noir, Erik Tegnér, présent à Mayotte, a associé systématiquement les clandestins aux « pillages des maisons des Mahorais ». Et a prétendu avoir découvert un « nouveau camp » de migrants dans la rue à côté de l’association d’entraide Solidarité Mayotte, alors que leur présence date de mai 2023. Dans une autre vidéo diffusée à l’antenne, le militant d’extrême droite a désigné sans retenue « les Somaliens » comme « encore plus dangereux que les Comoriens ». Pour « empêcher le passage des kwassa-kwassa des filières d’immigration », Gérald Darmanin a promis, en outre, la mise en place d’« un rideau de fer dans l’eau ». Avec le déploiement de bateaux de la marine nationale face aux côtes tanzaniennes, d’où partent ces migrants africains, et de drones marins.
    En prélude à sa visite, Gérald Darmanin avait également annoncé le départ de l’opération « Wuambushu 2 ». Il a salué à l’aéroport les quinze gendarmes du GIGN arrivés en renfort pour aboutir à un plus grand nombre d’interpellations dans les bidonvilles les plus sensibles. (...) De ces annonces, élus et responsables des Forces vives retiennent avant tout la fin du droit du sol à Mayotte et du titre de séjour territorialisé. (...)

    #Covid-19#migration#france#mayotte#droitdusol#visasterritorialise#fluxmigratoire#regroupementfamilial#expulsion#traversee#sante#afrique

  • « Aller chercher les médecins à l’étranger est un manque de respect pour les pays où ils sont formés »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/02/08/aller-chercher-les-medecins-a-l-etranger-est-un-manque-de-respect-pour-les-p

    « Aller chercher les médecins à l’étranger est un manque de respect pour les pays où ils sont formés »
    Jean-Luc Dumas, Directeur général de la Cidmef
    Le recrutement de médecins formés en dehors de l’Union européenne ne saurait compenser le besoin urgent d’augmenter les capacités de formation en France, estime Jean-Luc Dumas, directeur général de la Conférence internationale des doyens et des
facultés de médecine d’expression française, dans une tribune au « Monde ».
    La mesure sidérante d’aller chercher les médecins des pays étrangers a été officialisée. Que le premier ministre français en fasse la déclaration devant le Parlement national est une décision lourde de sens ; que cette volonté soit portée en solution aux insuffisances de notre formation médicale est l’aveu d’un manque de respect pour le développement des systèmes de santé dans l’espace francophone.
    Car il ne faut pas s’y tromper : ce ne sont pas nos confrères formés dans les grandes universités anglophones qui sont attendus, mais bien des futurs médecins de locution française provenant de pays historiquement liés à notre culture médicale. Ces médecins sont formés majoritairement dans des facultés qui, depuis des décennies, font l’effort de se structurer au niveau des standards internationaux, avec le soutien public d’Etats souvent démunis, dans le contexte de besoins en santé immenses des populations de ces territoires. Et ce sont bien ces praticiens venant de pays que l’on nommait autrefois « en voie de développement » que la France semble vouloir mettre à son service.
    Quelle confirmation du renoncement et de la négation des politiques de coopération médicale que notre pays a conduites depuis plus de cinquante ans ; quel affront pour ceux qui les ont déployées et, plus largement, pour nos universités ! Dans le contexte apparent de suspicion, si ce n’est de rejet, vis-à-vis de l’héritage de notre culture dans les pays marqués par la colonisation, cette annonce ne peut que renforcer le sentiment de défiance, y compris à l’échelle politique, tant l’enjeu de la santé est un déterminant sociétal.
    L’année 2024 sera marquée par la tenue en France du sommet de l’Organisation internationale de la francophonie. Plus de quatre-vingts Etats et gouvernements y sont représentés, mais, malgré ce contexte, la préservation des relations indispensables pour ces partenariats n’a visiblement pas incité à retenir la parole officielle et la négation dont elle fait preuve à l’encontre des besoins en santé de ces pays. Quelles sont donc les valeurs que la langue française véhicule dans son espace de diffusion ? Solidarité, respect, humanisme ? Aucun argument ne peut tenir face à la gravité de l’image qui est présentée. Certes, beaucoup de ces médecins formés à l’étranger demandent à venir exercer, et même s’installer, en France. Mais la régulation d’un système global de formation et d’échanges doit être la considération supérieure pour préparer l’avenir de tous. Et c’est justement la considération des besoins de nos partenaires qui doit guider les initiatives de cet ordre. La mobilité internationale doit être une source de formation à l’identité professionnelle et non pas l’objet d’une préemption de ressources humaines.
    Certes, nos politiques et nos facultés se sont longtemps contentés de former trop peu de médecins, avec un manque de prévision, mais c’est précisément un effort significatif d’augmentation des capacités de formation et donc de moyens appropriés qui doit être mis en place immédiatement. Certes, les difficultés d’accès aux soins de premier recours en France sont pressantes, mais ce n’est pas en désespérant les étudiants et en culpabilisant les professionnels que les solutions seront créées : l’accès équitable aux études de santé peut être revu, tout comme la reconnaissance de la diversité des nouvelles compétences des professionnels de soins.
    Gageons que le bon sens reviendra au premier plan et que nos administrations de haut rang sauront se mobiliser pour pondérer des annonces détachées d’un contexte de faisabilité. Gageons que ce qui apparaît comme une faute de communication déclenchera une prise de conscience salvatrice et un sursaut constructif.
    Jean-Luc Dumas est directeur général de la Conférence internationale des doyens et des facultés de médecine d’expression française (Cidmef), ancien doyen de la faculté de médecine de Bobigny, université Sorbonne-Paris-Nord.

    #Covid-19#migrant#migration#sante#medecin#francophonie#formation#PADHUE#emigration#systemesante#accessante#politiquemigratoire#france

  • La suppression du droit du sol à Mayotte, une mesure voulue par l’extrême droite aux conséquences incertaines
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/02/12/la-suppression-du-droit-du-sol-a-mayotte-une-mesure-voulue-par-l-extreme-dro

    La suppression du droit du sol à Mayotte, une mesure voulue par l’extrême droite aux conséquences incertaines
    Julia Pascual
    Deux semaines à peine après la promulgation de la loi « immigration », qui avait notamment consacré, avant une censure du Conseil constitutionnel, la remise en cause du droit de la nationalité ou encore la préférence nationale, l’exécutif choisit de relancer le débat autour du droit du sol. A Mayotte, dimanche 11 février, le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, a tout bonnement promis de le supprimer dans ce département de l’océan Indien, par le biais d’une réforme constitutionnelle.
    Début février, le ministre avait déjà dit son souhait de durcir le droit du sol à Mayotte après qu’une disposition de la loi « immigration » sur ce point avait été censurée par le Conseil constitutionnel, le 25 janvier pour des raisons de forme. Ajoutée par la droite sénatoriale, elle prévoyait que, pour devenir français à sa majorité, un enfant né à Mayotte soit tenu de prouver qu’un de ses deux parents se trouvait en situation régulière « plus d’un an avant [sa] naissance ».
    Cette mesure durcissait le régime dérogatoire unique déjà instauré en 2018 par la loi Collomb, la première loi relative à l’immigration sous la présidence d’Emmanuel Macron. Depuis lors, l’enfant né sur l’archipel doit justifier qu’un de ses parents était en situation régulière depuis au moins trois mois avant sa naissance pour espérer devenir français à sa majorité ou par déclaration anticipée à partir de ses 13 ans.
    Sur le reste du territoire français, le principe du droit du sol fait qu’un enfant né en France de parents étrangers devient français de façon automatique à sa majorité, ou par déclaration anticipée s’il a résidé sur le territoire cinq ans depuis l’âge de 11 ans. En 2021, selon l’Insee, quelque 35 000 personnes ont obtenu la nationalité française selon ce droit.Pour M. Darmanin, interviewé sur Mayotte La 1re, la suppression du droit du sol à Mayotte constituerait « une grande résolution [des] problèmes ». Le département le plus pauvre de France est affecté par un phénomène d’insécurité, d’habitat insalubre et de saturation des services publics, notamment de santé et d’éducation. Près de la moitié de la population – estimée à plus de 300 000 habitants – est étrangère, principalement issue des îles comoriennes voisines.
    Le ministère de l’intérieur ambitionne de « diminuer de 90 % le nombre de titres de séjour ». Selon l’hypothèse suivante : si les enfants de parents étrangers ne peuvent plus devenir français, alors leurs parents ne pourront plus obtenir un titre de séjour de parent d’enfant français. Et donc l’intérêt pour eux de migrer à Mayotte sera nul. « Sur 4 000 titres de séjour délivrés chaque année, plus de 3 600 sont délivrés pour motif familial, en particulier en tant que “membres de famille de Français” », assure l’entourage de M. Darmanin.
    Si le calendrier reste à connaître, le principe d’une révision constitutionnelle est posé. « Le besoin de réforme constitutionnelle a été évalué à partir des avis rendus par le Conseil d’Etat à l’occasion de la précédente réforme du droit du sol à Mayotte », argumente la Place Beauvau. Un point qui fait débat.
    Au moment de la loi Collomb, « ni le Conseil d’Etat ni le Conseil constitutionnel n’ont dit qu’il y avait un risque d’inconstitutionnalité si l’on supprimait le droit du sol [à Mayotte] », rappelle Jules Lepoutre, professeur de droit public à l’université Côte d’Azur. Dans une décision de septembre 2018, le Conseil constitutionnel avait jugé que la différence de traitement apportée par la loi Collomb était conforme à la Constitution – et en particulier aux principes d’indivisibilité de la République et d’égalité devant la loi –, compte tenu des caractéristiques particulières de l’archipel, confronté à des flux migratoires importants. Jules Lepoutre pense toutefois qu’une loi ordinaire serait « probablement inconstitutionnelle », car elle pourrait être vue comme une « atteinte disproportionnée à l’indivisibilité de la République et du territoire », ou encore parce que le juge constitutionnel pourrait à l’occasion « reconnaître la valeur constitutionnelle du droit du sol, car il est consubstantiel à notre régime républicain puisqu’il est appliqué sans discontinuité depuis la Révolution ». Saisi sur une suppression de l’automaticité du droit du sol en 1993 à l’occasion de la loi Pasqua-Méhaignerie, Robert Badinter, alors président du Conseil constitutionnel, avait d’ailleurs déclaré lors des délibérations : « Si le législateur avait supprimé le jus soli [droit du sol], la question [de savoir s’il est un principe fondamental reconnu par les lois de la République] se poserait bien. Mais ici, il s’agit simplement d’en adapter certaines modalités. »
    En optant pour une révision constitutionnelle, « le ministre de l’intérieur peut vouloir neutraliser une éventuelle précision de jurisprudence », suppose Mathieu Carpentier, professeur de droit public à l’université Toulouse-Capitole. L’adoption d’un projet de loi constitutionnel n’est cependant pas évidente. Le texte doit être voté en des termes identiques par les deux chambres, après quoi le chef de l’Etat peut le faire adopter par référendum ou par une majorité des trois cinquièmes du Congrès.La loi « immigration » a illustré les difficultés du gouvernement à réunir une majorité parlementaire – il a essuyé une motion de rejet à l’Assemblée nationale et a obtenu un vote au prix de dispositions anticonstitutionnelles et du concours des voix du Rassemblement national (RN). Une réforme constitutionnelle sur l’immigration apparaît à tout le moins compliquée. (...)
    « Le gouvernement annonce quelque chose qui est au programme du RN, qui va lui apporter un répit politique mais qui va enflammer de nouveau le pays sur le sujet de l’immigration et qui ne résout rien sur le terrain », étrille l’historien Patrick Weil. Les conséquences de la réforme sont loin d’être évidentes. « Il reste à prouver que les Comoriens se disent “on va à Mayotte, on fait un enfant, on attend ses 13 ans et à ce moment-là on obtient un titre de séjour en tant que parent d’enfant français” », souligne Jules Lepoutre, tandis qu’il est certain que le PIB par habitant est sept fois plus élevé dans le 101e département français qu’aux Comores. De fait, l’impact de la réforme de 2018 sur les flux irréguliers reste à démontrer. Au ministère de l’intérieur, on assure que la loi Collomb a déjà permis de « diviser par trois le nombre d’obtentions de la nationalité » par déclaration anticipée, passé de 2 800 en 2018 à 799 en 2022. Mais « on ne fait que fabriquer de l’étranger, dénonce l’avocate Marjane Ghaem, qui a officié au barreau de Mayotte entre 2012 et 2020. Cela va précariser des jeunes qui seront privés de l’accès la nationalité. »

    #Covid-19#migrant#migration#france#mayotte#droitdusol#constitution#droit#nationalite#fluxmigratoire#politiquemigratoire#sante

  • Immigration en Europe : la France à la manœuvre pour autoriser la rétention des enfants dès le plus jeune âge
    https://disclose.ngo/fr/article/immigration-en-europe-la-france-a-la-manoeuvre-pour-autoriser-la-retention

    La France a œuvré dans le plus grand secret, pour obtenir l’autorisation d’enfermer des mineurs, sans limite d’âge, dans des centres construits aux frontières de l’Europe. Cette disposition inscrite dans le Pacte sur la migration et l’asile, qui sera voté au printemps par le Parlement européen, pourrait violer la Convention internationale des droits de l’enfant. Lire l’article

  • #François_Piquemal : « la #rénovation_urbaine se fait sans les habitants des #quartiers_populaires »

    Il y a 20 ans naissait l’#Agence_Nationale_pour_la_Rénovation_Urbaine (#ANRU). Créée pour centraliser toutes les procédures de #réhabilitation des quartiers urbains défavorisés, elle promettait de transformer en profondeur la vie des habitants, notamment en rénovant des centaines de milliers de logements. Malgré les milliards d’euros investis, les révoltes urbaines de l’été 2023 ont démontré combien les « #cités » restent frappées par la #précarité, le #chômage, l’#insécurité et le manque de #services_publics. Comment expliquer cet échec ?

    Pour le député insoumis #François_Piquemal, qui a visité une trentaine de quartiers en rénovation dans toute la #France, la #rénovation_urbaine est réalisée sans prendre en compte les demandes des habitants et avec une obsession pour les #démolitions, qui pose de grands problèmes écologiques et ne règle pas les problèmes sous-jacents. Il nous présente les conclusions de son rapport très complet sur la question et nous livre ses préconisations pour une autre politique de rénovation urbaine, autour d’une planification écologique et territoriale beaucoup plus forte. Entretien.

    Le Vent Se Lève – Vous avez sorti l’an dernier un rapport intitulé « Allo ANRU », qui résume un travail de plusieurs mois mené avec vos collègues députés insoumis, basé sur une trentaine de visites de quartiers populaires concernés par la rénovation urbaine dans toute la France. Pourquoi vous être intéressé à ce sujet ?

    François Piquemal – Il y a trois raisons pour moi de m’intéresser à la rénovation urbaine. D’abord, mon parcours politique débute avec un engagement dans l’association « Les Motivés » entre 2005 et 2008 à Toulouse, qui comptait des conseillers municipaux d’opposition (Toulouse est dirigée par la droite depuis 2001, à l’exception d’un mandat dominé par le PS entre 2008 et 2014, ndlr). C’est la période à laquelle l’ANRU est mise en place, suite aux annonces de Jean-Louis Borloo en 2003. Le hasard a fait que j’ai été désigné comme un des militants en charge des questions de logement, donc je me suis plongé dans le sujet.

    Par ailleurs, j’ai une formation d’historien-géographe et j’ai beaucoup étudié la rénovation urbaine lorsque j’ai passé ma licence de géographie. Enfin, j’étais aussi un militant de l’association Droit au Logement (DAL) et nous avions de grandes luttes nationales sur la question de la rénovation urbaine, notamment à Grenoble (quartier de la Villeneuve) et à Poissy (La Coudraie). A Toulouse, la contestation des plans de rénovation urbaine est également arrivée assez vite, dans les quartiers du Mirail et des Izards, et je m’y suis impliqué.

    Lorsque je suis devenu député en 2022, j’ai voulu poursuivre ces combats autour du logement. Et là, j’ai réalisé que l’ANRU allait avoir 20 ans d’existence et qu’il y avait très peu de travaux parlementaires sur le sujet. Bien sûr, il y a des livres, notamment ceux du sociologue Renaud Epstein, mais de manière générale, la rénovation urbaine est assez méconnue, alors même qu’elle est souvent critiquée, tant par des chercheurs que par les habitants des quartiers populaires. Donc j’ai décidé de m’emparer du sujet. J’en ai parlé à mes collègues insoumis et pratiquement tous ont des projets de rénovation urbaine dans leur circonscription. Certains connaissaient bien le sujet, comme Marianne Maximi à Clermont-Ferrand ou David Guiraud à Roubaix, mais la plupart avaient du mal à se positionner parmi les avis contradictoires qu’ils entendaient. Donc nous avons mené ce travail de manière collective.

    LVSL – Ce sujet est très peu abordé dans le débat public, alors même qu’il s’agit du plus grand chantier civil de France. Les chiffres sont impressionnants : sur 20 ans, ce sont 700 quartiers et 5 à 7 millions de personnes, soit un Français sur dix, qui sont concernés. 165.000 logements ont été détruits, 142.000 construits, 410.000 réhabilités et 385.000 « résidentialisés », c’est-à-dire dont l’espace public environnant a été profondément transformé. Pourtant, les révoltes urbaines de l’été dernier nous ont rappelé à quel point les problèmes des quartiers en question n’ont pas été résolus. On entend parfois que le problème vient avant tout d’un manque de financement de la part de l’Etat. Partagez-vous cette analyse ?

    F. P. – D’abord, les chiffres que vous venez de citer sont ceux du premier programme de l’ANRU, désormais terminé. Un second a été lancé depuis 2018, mais pour l’instant on dispose de peu de données sur celui-ci. Effectivement, lors de son lancement par Jean-Louis Borloo, la rénovation urbaine est présentée comme le plus grand chantier civil depuis le tunnel sous la Manche et les objectifs sont immenses : réduire le chômage et la précarité, renforcer l’accès aux services publics et aux commodités de la ville et combattre l’insécurité. On en est encore loin.

    Ensuite, qui finance la rénovation urbaine ? Quand on regarde dans le détail, on se rend compte que l’Etat est peu présent, comme le montre un documentaire de Blast. Ce sont les collectivités locales et les bailleurs sociaux qui investissent, en plus du « 1% patronal » versé par les entreprises. Concernant l’usage de ces moyens, on a des fourchettes de coût pour des démolitions ou des reconstructions, mais là encore les chiffres varient beaucoup.

    LVSL – Vous rappelez que les financements de l’Etat sont très faibles dans la rénovation urbaine. Pourtant, certains responsables politiques, comme Eric Zemmour, Jordan Bardella ou Sabrina Agresti-Roubache, secrétaire d’Etat à la ville de Macron, estiment que trop d’argent a été investi dans ces quartiers…

    F. P. – C’est un discours que l’on entend souvent. Mais on ne met pas plus d’argent dans les quartiers populaires que dans d’autres types de territoires. Par exemple, on mentionne souvent le chiffre de 90 à 100 milliards d’euros en 40 ans, avec les douze plans banlieue qui se sont succédé depuis 1977. Dit comme ça, ça semble énorme. Mais en réalité, cela représente en moyenne 110€ par habitant et par an dans les quartiers de la politique de la ville (QPV), un chiffre inférieur aux montants dépensés pour les Français n’habitant pas en QPV. Néanmoins, nous manquons encore d’informations précises et j’ai posé une question au gouvernement pour avoir des chiffres plus détaillés.

    LVSL – Parmi les objectifs mis en avant par l’ANRU dans les opérations qu’elle conduit, on retrouve tout le temps le terme de « mixité sociale ». Il est vrai que ces quartiers se sont souvent ghettoïsés et accueillent des populations très touchées par la pauvreté, le chômage et l’insécurité. Pour parvenir à cette fameuse mixité, il semble que l’ANRU cherche à gentrifier ces quartiers en y faisant venir des couches moyennes. Quel regard portez-vous sur cette façon d’assurer la « mixité sociale » ?

    F. P. – D’abord, il faut questionner la notion même de mixité sociale. Ce concept, personne ne peut être contre. Mais chacun a une idée différente de comment y parvenir ! Pour la droite, la mixité sociale passe par le fait que les classes moyennes et populaires deviennent des petits propriétaires. Pour la gauche, c’est la loi SRU, c’est-à-dire l’obligation d’avoir 25% de logement public dans chaque commune, afin d’équilibrer la répartition sur le territoire national.

    Peu à peu, la gauche et la droite traditionnelles ont convergé, c’est ce que le philosophe italien Antonio Gramsci appelle le « transformisme ». En réalité, c’est surtout l’imaginaire de la droite s’est imposé : aujourd’hui, vivre en logement public n’est pas perçu comme souhaitable, à tort ou à raison. Ceux qui y vivent ou attendent un logement public ne voient cela que comme une étape dans leur parcours résidentiel, avant de devenir enfin petit propriétaire. Dès lors, habiter en logement public devient un stigmate de positionnement social et les quartiers où ce type de logement domine sont de moins en moins bien perçus.

    Concrètement, ça veut dire que dans un quartier avec 50 ou 60% de logement public, la politique mise en œuvre pour parvenir à la mixité sociale est de faire de l’accession à la propriété, pour faire venir d’autres populations. Ca part d’un présupposé empreint de mépris de classe : améliorer la vie des personnes appartenant aux classes populaires passerait par le fait qu’elles aient des voisins plus riches. Comme si cela allait forcément leur amener plus de services publics ou de revenus sur leur compte en banque.

    Quels résultats a cette politique sur le terrain ? Il a deux cas de figure. Soit, les acquéreurs sont soit des multi-propriétaires qui investissent et qui vont louer les appartements en question aux personnes qui étaient déjà là. C’est notamment ce que j’ai observé avec Clémence Guetté à Choisy-le-Roi. Soit, les nouveaux propriétaires sont d’anciens locataires du quartier, mais qui sont trop pauvres pour assumer les charges de copropriété et les immeubles se dégradent très vite. C’est un phénomène qu’on voit beaucoup à Montpellier par exemple. Dans les deux cas, c’est un échec car on reproduit les situations de précarité dans le quartier.

    Ensuite, il faut convaincre les personnes qui veulent devenir petits propriétaires de s’installer dans ces quartiers, qui font l’objet de beaucoup de clichés. Allez dire à un Parisien de la classe moyenne d’aller habiter à la Goutte d’Or (quartier populaire à l’est de Montmartre, ndlr), il ne va pas y aller ! C’est une impasse. Rendre le quartier attractif pour les couches moyennes demande un immense travail de transformation urbanistique et symbolique. Très souvent, la rénovation urbaine conduit à faire partir la moitié des habitants d’origine. Certes, sur le papier, on peut trouver 50% de gens qui veulent partir, mais encore faut-il qu’ils désirent aller ailleurs ! Or, on a souvent des attaches dans un quartier et les logements proposés ailleurs ne correspondent pas toujours aux besoins.

    Donc pour les faire quitter le quartier, la « solution » est en général de laisser celui-ci se dégrader jusqu’à ce que la vie des habitants soit suffisamment invivable pour qu’ils partent. Par exemple, vous réduisez le ramassage des déchets ou vous laissez les dealers prendre le contrôle des cages d’escaliers.

    LVSL – Mais cet abandon, c’est une politique délibérée des pouvoirs publics, qu’il s’agisse de l’ANRU ou de certaines mairies ? Ou c’est lié au fait que la commune n’a plus les moyens d’assurer tous les services ?

    F. P. – Dans certains quartiers de Toulouse, que je connais bien, je pense que cet abandon est un choix délibéré de la municipalité et de la métropole. Par exemple, dans le quartier des Izards, il y avait un grand immeuble de logement public, certes vieillissant, mais qui pouvait être rénové. Il a été décidé de le raser. Or, beaucoup d’habitants ne voulaient pas partir, notamment les personnes âgées. Dans le même temps, d’autres appartements étaient vides. Certains ont été squattés par des réfugiés syriens, avant que le bailleur ne décide de payer des agents de sécurité pour les expulser. Par contre, ces agents laissaient sciemment les dealers faire leur business dans le quartier !

    Dans d’autres cas, le bailleur décide tout simplement d’abandonner peu à peu un immeuble voué à la démolition. Donc ils vont supprimer un concierge, ne pas faire les rénovations courantes etc. Et on touche là à un grand paradoxe de la rénovation urbaine : en délaissant certains immeubles, on dégrade aussi l’image du quartier dans lequel on souhaite faire venir des personnes plus aisées.

    LVSL – Il semble aussi que la « mixité sociale » soit toujours entendue dans le même sens : on essaie de faire venir ces ménages plus aisés dans les quartiers défavorisés, mais les ghettos de riches ne semblent pas poser problème aux pouvoirs publics…

    F. P. – En effet, il y a une grande hypocrisie. Faire venir des habitants plus riches dans un quartier prioritaire, pourquoi pas ? Mais où vont aller ceux qui partent ? Idéalement, ils visent un quartier plus agréable, qui a une meilleure réputation. Sauf que beaucoup de maires choisissent de ne pas respecter la loi SRU et de maintenir une ségrégation sociale. Résultat : les bailleurs sociaux ne peuvent souvent proposer aux personnes à reloger que des appartements trop chers ou inadaptés à leurs besoins.

    Donc on les déplace dans d’autres endroits, qui deviennent de futurs QPV. A Toulouse par exemple, beaucoup des personnes délogées par les programmes de rénovation urbaine sont envoyées au quartier Borderouge, un nouveau quartier avec des loyers abordables. Sauf que les difficultés sociales de ces personnes n’ont pas été résolues. Donc cela revient juste à déplacer le problème.

    LVSL – Ces déplacements de population sont liés au fait que les programmes de rénovation urbaine ont un fort ratio de démolitions. Bien sûr, il y a des logements insalubres trop compliqués à rénover qu’il vaut mieux détruire, mais beaucoup de démolitions ne semblent pas nécessaires. Pensez-vous que l’ANRU a une obsession pour les démolitions ?

    F. P. – Oui. C’est très bien montré dans le film Bâtiment 5 de Ladj Ly, dont la première scène est une démolition d’immeubles devant les édiles de la ville et les habitants du quartier. Je pense que l’ANRU cherchait à l’origine un effet spectaculaire : en dynamitant un immeuble, on montre de manière forte que le quartier va changer. C’est un acte qui permet d’affirmer une volonté politique d’aller jusqu’au bout, de vraiment faire changer le quartier en reconstruisant tout.

    Mais deux choses ont été occultées par cet engouement autour des démolitions. D’abord, l’attachement des gens à leur lieu de vie. C’est quelque chose qu’on retrouve beaucoup dans le rap, par exemple chez PNL ou Koba LaD, dont le « bâtiment 7 » est devenu très célèbre. Ce lien affectif et humain à son habitat est souvent passé sous silence.

    L’autre aspect qui a été oublié, sans doute parce qu’on était en 2003 lorsque l’ANRU a été lancée, c’est le coût écologique de ces démolitions. Aujourd’hui, si un ministre annonçait autant de démolitions et de reconstructions, cela soulèverait beaucoup de débats. A Toulouse, le commissaire enquêteur a montré dans son rapport sur le Mirail à quel point démolir des immeubles fonctionnels, bien que nécessitant des rénovations, est une hérésie écologique. A Clermont-Ferrand, ma collègue Marianne Maximi nous a expliqué qu’une part des déchets issus des démolitions s’est retrouvée sur le plateau de Gergovie, où sont conduites des fouilles archéologiques.

    LVSL – Maintenant que les impacts de ces démolitions, tant pour les habitants que pour l’environnement, sont mieux connus, l’ANRU a-t-elle changé de doctrine ?

    F. P. – C’est son discours officiel, mais pour l’instant ça ne se vérifie pas toujours dans les actes. J’attends que les démolitions soient annulées pour certains dossiers emblématiques pour y croire. Le quartier de l’Alma à Roubaix est un très bon exemple : les bâtiments en brique sont fonctionnels et superbes d’un point de vue architectural. Certains ont même été refaits à neuf durant la dernière décennie, pourquoi les détruire ?

    Maintenir ces démolitions est d’autant plus absurde que ces quartiers sont plein de savoir-faire, notamment car beaucoup d’habitants bossent dans le secteur du BTP. Je le vois très bien au Mirail à Toulouse : dans le même périmètre, il y a l’école d’architecture, la fac de sciences sociales, plein d’employés du BTP, une école d’assistants sociaux et un gros vivier associatif. Pourquoi ne pas les réunir pour imaginer le futur du quartier ? La rénovation urbaine doit se faire avec les habitants, pas sans eux.

    LVSL – Vous consacrez justement une partie entière du rapport aux perceptions de la rénovation urbaine par les habitants et les associations locales, que vous avez rencontré. Sauf exception, ils ne se sentent pas du tout écoutés par les pouvoirs publics et l’ANRU. L’agence dit pourtant chercher à prendre en compte leurs avis…

    F. P. – Il y a eu plein de dispositifs, le dernier en date étant les conseils citoyens. Mais ils ne réunissent qu’une part infime de la population des quartiers. Parfois les membres sont tirés au sort, mais on ne sait pas comment. En fait le problème, c’est que l’ANRU est un peu l’Union européenne de l’urbanisme. Tout décideur politique peut dire « c’est pas moi, c’est l’ANRU ». Or, les gens ne connaissent pas l’agence, son fonctionnement etc. Plusieurs entités se renvoient la balle, tout est abstrait, et on ne sait plus vers qui se tourner. Cela crée une vraie déconnexion entre les habitants et les décisions prises pour leur quartier. La rénovation se fait sans les habitants et se fait de manière descendante. Même Jean-Louis Borloo qui en est à l’origine en est aujourd’hui assez critique.

    A l’origine, les habitants ne sont pas opposés à la rénovation de leur quartier. Mais quand on leur dit que la moitié vont devoir partir et qu’ils voient les conditions de relogement, c’est déjà moins sympa. Pour ceux qui restent, l’habitat change, mais les services publics sont toujours exsangues, la précarité et l’insécurité sont toujours là etc. Dans les rares cas où la rénovation se passe bien et le quartier s’améliore, elle peut même pousser les habitants historiques à partir car les loyers augmentent. Mais ça reste rare : la rénovation urbaine aboutit bien plus souvent à la stagnation qu’à la progression.

    LVSL – L’histoire de la rénovation urbaine est aussi celle des luttes locales contre les démolitions et pour des meilleures conditions de relogement. Cela a parfois pu aboutir à des référendums locaux, soutenus ou non par la mairie. Quel bilan tirez-vous de ces luttes ?

    F. P. – D’abord ce sont des luttes très difficiles. Il faut un niveau d’information très important et se battre contre plusieurs collectivités plus l’ANRU, qui vont tous se renvoyer la balle. Le premier réflexe des habitants, c’est la résignation. Ils se disent « à quoi bon ? » et ne savent pas par quel bout prendre le problème. En plus, ces luttes débutent souvent lorsqu’on arrive à une situation critique et que beaucoup d’habitants sont déjà partis, ce qui est un peu tard.

    Il y a tout de même des exemples de luttes victorieuses comme la Coudraie à Poissy ou, en partie, la Villeneuve à Grenoble. Même pour l’Alma de Roubaix ou le Mirail de Toulouse, il reste de l’espoir. Surtout, ces luttes ont montré les impasses et les absurdités de la rénovation urbaine. La bataille idéologique autour de l’ANRU a été gagnée : aujourd’hui, personne ne peut dire que cette façon de faire a fonctionné et que les problèmes de ces quartiers ont été résolus. Certains en tirent comme conclusion qu’il faut tout arrêter, d’autres qu’il faut réformer l’ANRU.

    LVSL – Comment l’agence a-t-elle reçu votre rapport ?

    F. P. – Pas très bien. Ils étaient notamment en désaccord avec certains chiffres que nous citons, mais on a justement besoin de meilleures informations. Au-delà de cette querelle, je sais qu’il y a des personnes bien intentionnées à l’ANRU et que certains se disent que l’existence de cette agence est déjà mieux que rien. Certes, mais il faut faire le bilan économique, écologique et humain de ces 20 ans et réformer l’agence.

    Jean-Louis Borloo est d’accord avec moi, il voit que la rénovation urbaine seule ne peut pas résoudre les problèmes de ces quartiers. Il l’avait notamment dit lors de l’appel de Grigny (ville la plus pauvre de France, ndlr) avec des maires de tous les horizons politiques. Je ne partage pas toutes les suggestions de Borloo, mais au moins la démarche est bonne. Mais ses propositions ont été enterrées par Macron dès 2018…

    LVSL – Justement, quelles répercussions votre rapport a-t-il eu dans le monde politique ? On en a très peu entendu parler, malgré les révoltes urbaines de l’été dernier…

    F. P. – Oui, le rapport Allo ANRU est sorti en avril 2023 et l’intérêt médiatique, qui reste limité, n’est arrivé qu’avec la mort de Nahel. Cela montre à quel point ce sujet est délaissé. Sur le plan politique, je souhaite mener une mission d’information pour boucler ce bilan de l’ANRU et pouvoir interroger d’autres personnes que nous n’avons pas pu rencontrer dans le cadre de ce rapport. Je pense à des associations, des collectifs d’habitants, des chercheurs, des élus locaux, Jean-Louis Borloo…

    Tous ces regards sont complémentaires. Par exemple, l’avis d’Eric Piolle, le maire de Grenoble, était intéressant car il exprimait la position délicate d’une municipalité prise entre le marteau et l’enclume (les habitants de la Villeneuve s’opposent aux démolitions, tandis que l’ANRU veut les poursuivre, ndlr). Une fois le constat terminé, il faudra définir une nouvelle politique de rénovation urbaine pour les deux prochaines décennies.

    LVSL – Concrètement, quelles politiques faudrait-il mettre en place ?

    F. P. – Des mesures isolées, comme l’encadrement à la baisse des loyers (réclamé par la France Insoumise, ndlr), peuvent être positives, mais ne suffiront pas. A minima, il faut être intraitable sur l’application de la loi SRU, pour faire respecter partout le seuil de 25% de logement public. On pourrait aussi réfléchir à imposer ce seuil par quartier, pour éviter que ces logements soient tous concentrés dans un ou deux quartiers d’une même ville.

    Ensuite, il faut changer la perception du logement public, c’est d’ailleurs pour cela que je préfère ce terme à celui de « logement social ». 80% des Français y sont éligibles, pourquoi seuls les plus pauvres devraient-ils y loger ? Je comprends bien sûr le souhait d’être petit propriétaire, mais il faut que le logement public soit tout aussi désirable. C’est un choix politique : le logement public peut être en pointe, notamment sur la transition écologique. Je prends souvent l’exemple de Vienne, en Autriche, où il y a 60% de logement public et qui est reconnue comme une ville où il fait bon vivre.

    Pour y parvenir, il faudra construire plus de #logements_publics, mais avec une #planification à grande échelle, comme l’avait fait le général de Gaulle en créant la DATAR en 1963. Mais cette fois-ci, cette planification doit être centrée sur des objectifs écologiques, ce qui implique notamment d’organiser la #démétropolisation. Il faut déconcentrer la population, les emplois et les services des grands centres urbains, qui sont saturés et vulnérables au changement climatique. Il s’agit de redévelopper des villes comme Albi, Lodève, Maubeuge… en leur donnant des fonctions industrielles ou économiques, pour rééquilibrer le territoire. C’est ambitieux, quasi-soviétique diront certains, mais nous sommes parvenus à le faire dans le passé.

    https://lvsl.fr/francois-piquemal-la-renovation-urbaine-se-fait-sans-les-habitants-des-quartier

    #quartiers_populaires #urbanisme #TRUST #Master_TRUST #logement #aménagement_territorial #écologie

  • Dématérialisation et pratiques abusives dans les CAF : lettre ouverte inter-associative à Gabriel Attal

    Nous sommes une trentaine d’associations actrices de la solidarité et du travail social, de défense des droits sociaux, de promotion des libertés fondamentales et des droits humains dans l’environnement numérique, unies pour interpeller le Premier ministre sur les conséquences pour les allocataires les plus fragiles de certaines pratiques mises en place dans le réseau des CAF.
    Dans une lettre ouverte, nous pointons notamment du doigt le caractère discriminatoire de l’algorithme de notation et de profilage des allocataires, qui engendre des surcontrôles pouvant aboutir à des suspensions totales de droits pendant des mois.

    https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/02/12/dematerialisation-et-pratiques-abusives-dans-l

    #france

  • Israël / Territoires palestiniens - Frappes israéliennes à Rafah (11.02.24) - Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères
    https://www.diplomatie.gouv.fr/fr/dossiers-pays/israel-territoires-palestiniens/actualites-et-evenements/2024/article/israel-territoires-palestiniens-frappes-israeliennes-a-rafah-11-02-2

    La France exprime sa plus vive préoccupation après les frappes israéliennes intervenues à Rafah.

    Rafah est aujourd’hui un lieu où plus de 1,3 million de personnes se réfugient. C’est aussi un point de passage vital pour acheminer l’aide humanitaire pour la population de Gaza. Une offensive israélienne à grande échelle à Rafah créerait une situation humanitaire catastrophique d’une nouvelle dimension et injustifiable. Afin d’éviter un désastre, nous réitérons notre appel à un arrêt des combats.

    Israël doit prendre des mesures concrètes pour protéger la vie des populations civiles à Gaza.

    À Gaza comme partout ailleurs, la France s’oppose à tout déplacement forcé de populations, proscrit par le droit international humanitaire.

    L’avenir de la bande de Gaza et de ses habitants ne pourra s’inscrire que dans un État palestinien vivant en paix et en sécurité aux côtés d’Israël.

    #FranceDiplo

  • Ensemble, désmicardisons-nous !

    Des dividendes qui explosent (près de 100 milliards d’euros versés par les entreprises du CAC 40 en 2023), une inflation importante et persistante (encore +5% en 2023, soit +11% en deux ans), une hausse des tarifs du gaz et de l’énergie qui continue, et des salaires qui stagnent il y a urgence à augmenter les salaires et à permettre à toutes et tous de vivre dignement de son travail.

    https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2024/02/11/ensemble-desmicardisons-nous

    #france #luttes