#lateral_thinking

  • La #permaculture est elle destinée aux #riches ?

    Continuant la lecture de l’étude évoquée ici : http://seenthis.net/messages/246533

    Si j’ai bien compris la légende du graphique, les pays « pauvres » ne sont le sujet que de 30% des publications (livres, articles, livrets, etc), dont seulement la moitié est écrite par eux-mêmes (l’autre moitié étant des publications écrites dans les pays « riches » et qui parlent de pays « pauvres ».

    L’influence de l’#Australie dont les créateurs de la permaculture sont originaires baisse avec le temps, au profit de l’#Europe et des autres continents. On note une augmentation de la représentation de l’#Afrique comme sujet, mais les Africain⋅e⋅s écrivent peu de publication sur la permaculture. L’#Amérique_du_sud est encore moins bien placée.

    La #carte nous éclaire un peu plus,

    L’Afrique est sûrement sur-représentée dans le graphique précédent à cause de l’Afrique du Sud (qui sera difficilement taxée de pays « pauvre »). On y voit aussi l’écrasante majorité des pays anglophones (USA, Australie, UK, Nouvelle Zélande et Afrique du Sud).

    La permaculture semble belle est bien WEIRD (Western, Educated, from Industrialized, Rich, and Democratic countries).

    Lien vers l’article : http://madeinearth.files.wordpress.com/2014/04/ferguson-2013-permaculture_preprint.pdf

    #critique_permaculture

    • En relation, une partie tirée de « Sustainable Revolution : Permaculture in Ecovillages, Urban Farms, and Communities Worldwide » sur la permaculture vue comme un cheval de Troie d’un nouveau colonialisme.

      À notre échelle, il y a eu pas mal de remous en France à cause de profs australiens qui venaient donner des cours hors de prix (> 1000€) dans des stages surchargés (+60 personnes) sans trop se renseigner sur les profs du coin où ils enseignaient (même si je suis pas trop pour l’approche chasse gardée). Et certain⋅e⋅s appellent à développer une « permaculture à la française » qui se baserait aussi sur les systèmes développés en France ou en Europe.

      Beyond Perma-Colonialism

      Indigenous Permaculture offers its trainings on a pay-what-you-can basis, open to anyone willing to take the information back home and put it to use. Through networking with a variety of native communities worldwide, the aim is to train a cadre of local permaculturists who can share skills with their neighbors.
      “If you bring people from the outside the community, they may not accept a ‘permaculture teacher.’ People may come and take plants, intellectual property, and they never give back,” Vasquez says. “This has gone on for too many years. Indigenous people need to decide their own destiny.” Permaculture teacher Robyn Francis agrees, having trained thousands of students from different parts of the world (see for a profile of the neighborhood she designed). She discusses teaching with an awareness of histories of imperialism and traditional knowledge appropriation. When she taught a permaculture course in Indonesia in 1999, there was concern among participants about whether “it was just another kind of colonialism—an Australian concept taught by an Australian teacher.”
      “The risk is greatest when the teacher sees permaculture as a kind of formula.… When this happens then—yes—it’s a new perma-colonialism,” Francis admits. “What I see as being the most valuable thing about permaculture, and the greatest challenge for a permaculture teacher to teach, is the process of lateral thinking and questioning, of developing the art of analytical observation.”12
      Histories of imposed assimilation into industrial economies have alienated native people from their traditional cultures across the globe, creating poverty and environmental destruction. The irony of “teaching” permaculture to people who traditionally lived its principles is not lost on Vasquez, who points out that when he teaches, he doesn’t always use the term. “We don’t talk about it as permaculture in the indigenous community because we are talking about a way of life.… They practice it, and it works, that’s it.”
      I had the opportunity to witness for myself this harmonious integration of principles and culture when I volunteered at a village school in Nepal in 1999. The experience led me to question mainstream notions of progress and development (for more on this theme, see the profile on Ladakh). I decided to study cultural anthropology at a radical graduate school in San Francisco that focused on decolonizing it.* This approach recognizes the imperialist perspective that spawned anthropology and questions the hierarchy that gives value to rational, scientific knowledge over indigenous and intuitive knowledge. The focus is on recognizing the continuing effects of colonialism and shifting the discipline toward cross-cultural advocacy for indigenous social and environmental justice.
      “Postcolonial” anthropology introduced me to the concept of cultural hegemony: the domination of the global imagination by an ideology that describes the social, political, and economic status quo as inevitable and beneficial for everyone (rather than chiefly for those whom the Occupy movement dubbed “the 1 percent”).
      Mollison calls permaculture a positivist philosophy, one that focuses on what we want and can do, rather than what we want others to change. Permaculture is revolutionary in that it gives people concrete tools to take power back, to become more reliant on local community resources, and to heal relationships. It is based on the assumption that the dominant global system is not inevitable, doesn’t benefit the majority of people, and is, in fact, leading us to the brink of environmental collapse. I came to believe that this design approach can be a catalyst for resistance and transformation within communities seeking alternatives to the globalized economy. The word permaculture usually brings up images of rural life, but it can equally be applied by individuals and groups at the center of the industrialized world, shifting the system from within the heart of the inner city (see Los Angeles Eco-Village).

    • Hum j’aime pas trop goinfres/pillés, et « tropicaux » est trop restrictif. J’aime bien #WEIRD mais c’est pas trop compréhensif. Y a aussi occidentaux mais c’est pas très cohérent par rapport au Japon même si tout le monde comprend. Peut être exploiteur/exploité ? J’aime pas pauvre car il se place implicitement sur le terrain éco, et certains pays sont riches sur certains points même si tout tend à se dégrader.

    • Oui je pense qu’un gros verrou à faire sauter c’est la science réductionniste, qui réduit tellement le monde qu’elle n’est pas de grand intérêt pour étudier les systèmes vivants interconnectés. Je cherche énormément dans les revues scientifiques des articles sur les sujets qui m’intéressent (fourrage pour animaux, qualités nutritionnelle, etc) et j’ai constaté que :
      – les buts des études sont souvent pour des gros projets ou des grosses boites, très industriels
      – la granularité est trop fine pour être appropriée par le commun des mortel (style extraction de la substance X par procédé Y)
      – c’est très réductionniste, par exemple sur une plante pas connu, tous les articles portent sur une substance de la plante

      Le type d’article typique c’est comment extraire la substance X de la plante Y par un procédé Z et quel pourcentage P ont peut mettre dans les granulés des poules pour quelles pondent autant.

      Alors qu’on peut facilement monter des expériences pas aussi carrées mais qui au moins serviraient le plus grand nombre, par exemple : http://seenthis.net/messages/228590

      Mais ce qui est bien avec la permaculture c’est que les concepteurs se sont beaucoup tournés vers les cultures traditionnelles et tribale, sans jugement (sauf positif sur leurs capacités à cultivar durablement les paysages), mais aussi ont gardé un esprit critique pour ne pas virer dans le new-age. Mais maintenant je suis un peu dans l’entre-deux, ni woowoo ni science pure, mais plutôt mythes culturels : http://seenthis.net/messages/247665#message247714
      Un de mes objectifs c’est de transmettre quelques polycultures pertinentes pour nos conditions climatiques, que les gens utiliseraient pendant des générations parce que ça marche, et que ça sera une composante d’une gestion soutenable de l’alimentation. Bien sûr il y a un risque de faire juste pareil que les ancêtres sans chercher à innover, mais c’est une autre composante de l’éducation (curiosité, confiance, soutien, #lateral_thinking, etc)

      Pour la critique sur la permaculture de riches, je l’ai mis en partie parce que j’aime bien remettre en question même ce qui m’intéresse le plus, mais il peut y avoir plusieurs explications, une des plus importantes peut être est que l’écrit est bien plus présent en occident, et que les cultures traditionnelles fonctionnent plus que la transmission orale. J’espère que la permaculture se transmet bien dans les pays non-occidentaux.

      #science_permaculture

    • Oui je pense qu’un gros verrou à faire sauter c’est la science réductionniste, qui réduit tellement le monde qu’elle n’est pas de grand intérêt pour étudier les systèmes vivants interconnectés.

      +1000

      Et celà pour bcp d’autres choses. Les approches « intégratives » ou « systémiques » progressent en sciences, mais la mythologie du réductionnisme a encore la dominance. Vivement qu’on arrive à intégrer « rationnellement » (pas de new-age, de dauphins volants, etc. svp :-) ) les apports des pensées orientales (Inde / Chine).
      C’est un boulot que Varela avait commencé dans les neurosciences / sciences cognitives (surtout les apports de (Nāgārjuna)), et c’était passionnant.

    • Oui ça semble bouger de ce côté là, avec des recherches scientifiques pour appuyer le savoir traditionnel. Je l’ai vu dans les recherches sur la plante Schisandra sinensis qui a été utilisée par des peuples tribaux de Sibérie et en médecine traditionnelle orientale.

      Mais il faut aussi de la science intégrative, sur les bénéfices ou pas de certaines connexions entre éléments.

    • De mon point de vue la permaculture est plus à lier à la #logique_du_don (Marcel Mauss) http://seenthis.net/messages/190256 qu’aux stratégies d’investissement à but lucratif. Les explications données dans cet article de permaculture.co.uk me paraissent par ailleurs un peu capillotractées. Et un peu représentatives aussi de la faible politisation de la permaculture (en tant qu’outil potentiel de construction de communautés humaines résilientes). Dans le cas de la finance il me semblerait plus simple et direct de parler de finance éthique, sans chercher un rapprochement aux forceps avec la permaculture.

      @nicolasm du bullshit, avec une bonne litière pour équilibrer le rapport C/N, ça peut faire un bon amendement pour la zone 1.

    • Faudra que je relise tout le fil de messages.

      J’espère qu’il y a un espace pour la permaculture entre le don et l’investissement financier.

      Des fois j’ai du mal à comprendre les personnes qui pensent que puisque c’est « permaculture » ça doit forcément être gratuit. Dans certaines situations les personnes qui peuvent se permettre de faire des choses gratuitement ont à côté un travail qui paie bien. Ça me semble un bon objectif de gagner l’argent nécessaire en faisant des activités à fort pouvoir de régénération pour les sols, le climat ou le tissu social. Bien sûr la permaculture a une vocation au gratuit sur la base de l’abondance des végétaux (une plante produit des centaines ou des milliers de graines, des dizaines de boutures ou des dizaines ou centaines de greffons), mais ça ne peut pas être généralisé pour autant.

      Mais à côté j’enrage de voir le milieu de la permaculture si prompte à utiliser des modèles commerciaux du siècle dernier, alors qu’il y a sûrement des formes très judicieuses à penser, où on peut mettre de la connaissance ou de la diversité génétique à disposition, tout en bénéficiant de cette mise en commun. Un peu comme les entreprises dans le libre qui donne l’accès au logiciel et fait payer l’expertise. Ou de tourner une vidéo d’un stage de permaculture et de la mettre gratuitement en ligne, et qui remplirait les stages à venir grâce à la « publicité » générée ou pour bénéficier de l’enseignement de qualité vu sur la vidéo et de manière plus personnalisée. Ou mettre le stage gratuitement en ligne mais faire payer la certification correspondante après étude du projet soumis (comme le propose une structure US qui est soupçonnée d’arnaque sur plusieurs points).

      Faudrait un peu plus de #lateral_thinking sur ces questions ...

    • L’approche que je mentionnais pour ma part se pose surtout dans le cadre de relations d’égal à égal dans des réseaux fonctionnant par don (ce que serait le auzolana ou un SEL informel sans comptabilité), ces réseaux étant d’après moi la meilleure façon de répondre au principe que la permaculture énonce concernant les surplus. Comme des communautés paysannes en fait, où la « gratuité » est mutualisée. Et éviterait les biais narcissiques et de désengagement facile (comme celui que tu cites ici de profiter sans contrepartie de la gratuité générée par autrui) qu’analyse finement @aude_v.

    • Effectivement c’est à un autre niveau que mes maniganceries. Je suis plus sur comment faire un peu d’argent avec la permaculture sans tomber dans les schémas classiques d’appropriation, et toi sur la signification profonde de la troisième éthique.

      J’ai l’impression que ça se rejoint un peu dans mes réflexions pour savoir comment diffuser toutes les raretés végétales que j’ai sur le terrain. Je pensais bien sûr à des dons ou échanges dans les réseaux permaculture, amicaux et locaux. Mais aussi par une vente sur internet pour augmenter la pénétration de toute cette diversité génétique dans d’autres cercles (même si rien ne dit que la personne ne va pas juste garder ce qu’elle achète dans son jardin). Même si cet accès est conditionné au « pouvoir d’achat » comme c’est si souvent le cas, au moins c’est toujours un angle d’accès supplémentaire à celui des cercles et réseaux qui peuvent être aussi très excluant. Ça ajoute un peu d’aléatoire. (Et puis ça rembourse toutes ces dépenses).

      bon ça reste encore du « bas niveau ».

    • Ça ressemble bien à un truc de @koldobika ça ;)

      En tout cas parmi les milieux permaculture / jardiniers, il y a vraiment du « lien » (même via internet). je contacte souvent les gens directement pour demander des graines/greffons/boutures, et propose de payer car je n’ai pas assez de stock pour échanger. Et ça me pose problème car depuis un an j’accumule beaucoup de trésors « génétiques » mais il me faudra quelques années pour pouvoir donner à mon tour. Du coup j’ai l’impression de profiter sans redistribuer, même si je sais que ça viendra. Souvent les jardiniers me répondent qu’il n’y a pas de souci, et qu’eux aussi sont passés par là. C’est plutôt cool.

      D’ailleurs ton commentaire me refait penser à pourquoi je n’aime vraiment pas tout un courant récent sur le fait de donner sans voir la personne : sachets de graines déposés dans des bibliothèques, légumes en libre service dans la rue avec les incroyables comestibles ... A croire qu’il y a une vertu supplémentaire à ne pas tisser des liens. Peut être parce que les gens trouvent ça encore plus « désintéressés ». Jusqu’à enlever l’intérêt principal de la chose, car ce ne sont pas trois légumes dans un bac à fleurs qui comptent le plus.

      Bon je dis ça mais pour l’instant je suis en mode ours qui amasse des trucs super chouettes pour son jardin.