• #Jean_Grave #machinisme #industrialisme #consumérisme #capitalisme #anarchisme #anticapitalisme

    ★ Jean Grave : Le Machinisme (1898) - Socialisme libertaire

    La révolution est fatale, avons-nous dit, et, pour celui qui étudie les phénomènes sociaux, ce n’est pas une affirmation en l’air, ce n’est que la constatation d’une vérité qui nous crèverait les yeux, si la complexité de ces mêmes phénomènes ne nous en cachait la marche réelle, en enchevêtrant leurs effets de telle sorte que, bien souvent, nous prenons les effets pour des causes, et les causes pour des effets.
    C’est ainsi que beaucoup de travailleurs, frappés de ce fait brutal : leur remplacement par le machinisme, ont pris celui-ci en haine, en sont arrivés à en désirer la suppression, ne s’apercevant pas qu’ils n’en restaient pas moins, eux, à l’état de machines à produire ; que la suppression des machines ne leur apportait qu’une amélioration relative et toute momentanée, qui ne tarderait pas à disparaître par la rapacité des exploiteurs.
    Dans la société actuelle, cela est de toute évidence, la machine porte un grand préjudice aux travailleurs, quoi qu’en disent les économistes qui font ressortir que l’outillage mécanique économise les forces de l’ouvrier, qu’en réduisant les frais de production elles amènent le bon marché des produits dont profitent les travailleurs en tant que consommateurs. Cela n’est que le beau côté de la chose, qui serait vrai entièrement si la société était mieux organisée ; mais, actuellement, de par l’exploitation du capital, cela est loin d’être exact (...)

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  • #luddisme #industrialisme #machinisme #capitalisme #productivisme... #anticapitalisme

    🛑 Faut-il casser les machines ? Quand la révolte luddite nous inspire - Frustration Magazine

    La révolte luddite (1811-1813, environ) prend place dans le contexte de « la révolution industrielle » britannique, qui fut bien plus qu’une transformation des techniques, mais bien « un changement idéologique et culturel radical ». En effet, au-delà de l’apparition des technologies à proprement parler, elle s’est traduite par la baisse du nombre de paysans, par l’urbanisation, le « démantèlement des communautés autonomes », l’aggravation des inégalités, par la « prédominance des valeurs de profit, de croissance, de propriété et de consommation » et l’imposition d’une idéologie positiviste. Le premier mérite de l’ouvrage est de casser l’idée selon laquelle cette révolution se serait déroulée de manière naturelle, poussée par la nécessité du « progrès » alors qu’elle est le fruit de « toute une série de lois, de réformes » et de répressions des résistances. En 1812, casser une machine est tout simplement passible de la peine de mort par pendaison (...)

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  • #luddisme #industrialisme #machinisme #capitalisme #productivisme...
    #anticapitalisme #anarchisme #autogestion

    ★ Des idées et des luttes : La révolte luddite – 🔴 Info Libertaire

    La révolte luddite, voilà un titre bien mystérieux relatif à un mouvement apparu au début du 19ème siècle en Angleterre et bien oublié de nos jours. Pourtant des points convergent avec certaines luttes actuelles et donnent à réfléchir grâce au travail méticuleux de l’auteur, Kirkpatrick Sale, et des éditions L’Echappée.

    Quelle est la cause du luddisme ? Selon l’auteur, l’industrialisme est inséparable de l’accaparement des ressources et de la perte des savoir-faire des professionnels. La révolution industrielle se traduit par une profonde misère et les tondeurs du Yorkshire, les tisserands des métiers à bras engagent une révolte contre les machines mais aussi et surtout contre les conséquences sociales du machinisme. Ils ont souvent été considérés comme des obscurantistes incapables d’apprécier le progrès. En réalité, ils protestaient contre la confiscation de la signification du travail. Cette approche se traduit aujourd’hui dans l’automatisation et le devenir d’un individu rouage de la machine. Chaplin l’a fort bien représenté dans Les temps modernes. Orwell en fera souvent état dans ses textes. « Si les machines industrielles rendent les ouvriers étrangers à la production, c’est parce que les machines de l’usine sont essentiellement conçues pour faire d’eux leur exécutants, privés de pensée et de parole (...) »

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  • Günther Anders, Machines, 1987
    https://sniadecki.wordpress.com/2020/04/08/anders-machines

    Pourquoi sommes-nous en droit d’avancer cette thèse exagérée ?

    Pas simplement parce qu’il y a aujourd’hui tant d’appareils et de machines (politiques, administratifs, commerciaux ou techniques), ou parce qu’ils jouent un rôle tellement puissant dans notre monde. Cela ne justifierait pas cette désignation. Ce qui est décisif, c’est quelque chose de plus fondamental, lié au principe de la machine – et c’est sur ce principe-là qu’il nous faut revenir maintenant. Car il contient déjà les conditions dans lesquelles le monde entier devient machine. Quel est le principe des machines ?
    Performance maximale.

    Et c’est pourquoi nous ne devons pas nous représenter les machines comme des objets insulaires, isolés, par exemple selon le modèle des pierres qui ne sont que là où elles sont et demeurent donc encloses dans leurs limites physiques, chosales. Comme la raison d’être des machines réside dans la performance, et même dans la performance maximale, elles ont besoin, toutes autant qu’elles sont, d’environnements qui garantissent ce maximum. Et ce dont elles ont besoin, elles le conquièrent. Toute machine est expansionniste, pour ne pas dire « impérialiste », chacune se crée son propre empire colonial de services (composé de transporteurs, d’équipes de fonctionnement, de consommateurs, etc.). Et de ces « empires coloniaux » elles exigent qu’ils se transforment à leur image (celle des machines) ; qu’ils « fassent leur jeu » en travaillant avec la même perfection et la même solidité qu’elles ; bref, qu’ils deviennent, bien que localisés à l’extérieur de la « terre maternelle » – notez ce terme, il deviendra pour nous un concept-clé – co-machiniques. La machine originelle s’élargit donc, elle devient « mégamachine » ; et cela non pas seulement par accident ni seulement de temps en temps ; inversement, si elle faiblissait à cet égard, elle cesserait de compter encore au royaume des machines.

    […]

    Et cela : le monde en tant que machine, c’est vraiment l’État technico-totalitaire vers lequel nous nous dirigeons. Remarquons que cela ne date pas d’aujourd’hui ou d’hier, au contraire, cette tendance découlant du principe même de la machine, de sa pulsion d’auto-expansion, elle existe depuis toujours. C’est la raison pour laquelle nous pouvons tranquillement affirmer que le monde en tant que machine, c’est l’empire millénariste vers lequel se sont portés les rêves de toutes les machines, depuis la première ; et il est désormais devant nous réellement, cette évolution étant entrée depuis quelques décennies dans un accelerando de plus en plus forcené.

    Je dis devant nous. En effet, que cet « empire » ait déjà trouvé sa réalisation ultime et intégrale, il ne nous appartient pas de l’affirmer. Cependant, nous consoler avec cette concession, nous n’en avons plus le droit non plus. Car la partie décisive du chemin qui conduit à la « machine mondiale » se trouve déjà derrière nous.

    #Günther_Anders #machinisme #critique_techno #mégamachine #techno-totalitaire

  • Machines arrière ! (des chances et des voies d’un soulèvement vital)
    http://www.piecesetmaindoeuvre.com/spip.php?page=resume&id_article=816

    Une revue universitaire vient de nous poser l’une de ces questions qui remplissent les bibliothèques de livres et les penseurs d’angoisse depuis 1945 : « Quelle forme est-il encore envisageable de donner à la résistance ? Peut-on espérer voir se lever les populations superflues contre le capitalisme technologique et ses soutiens politiques ? » Il faudrait pour répondre à pareilles questions avec une certitude scientifique, maîtriser la théorie du chaos et connaître la situation dans toutes ses conditions initiales et toutes les chaînes de réactions qu’elles peuvent déclencher. Heureusement, ni les big data, ni les logiciels des sociologues et de la Rand Corporation, malgré tous leurs modèles, ne peuvent encore traiter l’avenir comme un mécanisme programmé. Le plus sage serait de dire, oui, on peut (...)

    #Documents
    http://www.piecesetmaindoeuvre.com/IMG/pdf/machines_arrie_re.pdf

    • Les ennemis du Progrès, comme les Indiens, ont le choix entre deux façons de perdre.

      Soit ils considèrent que la fin est dans les moyens, ils refusent - à la manière des Amish - de vivre avec leur temps. Ils se retirent dans des isolats temporels, à la campagne, au sein de micro- sociétés et de micro-réseaux, dans l’espoir, au mieux, que leur exemple soit contagieux, au pis, d’assurer leur salut individuel. S’ils sortent de leur refuge pour attaquer le système, ils sont vaincus, sauf exception ; comme les Indiens, avec leurs arcs et leurs flèches, furent vaincus, sauf exception. On ne peut pas éternellement se gargariser du Larzac et de la Little Big Horn.

      Soit ils considèrent que la fin justifie les moyens et ils retournent contre l’ennemi, les armes de l’ennemi. C’est la position des communistes, de Lénine, de Trotski, 5 des nationalistes des pays colonisés, des islamistes aujourd’hui. C’est possible parce que ces courants croient à la neutralité des moyens scientifiques, technologiques, industriels, militaires, etc. Le Progrès est neutre, les moyens sont neutres, tout dépend de leur usage, de ce qu’on en fait, de leur fin. Ainsi l’arme nucléaire devient-elle morale, dès qu’elle devient rouge, communiste, ou verte, islamique. Les drones auraient toutes les vertus s’ils attaquaient Israël, les Etats-Unis et l’Europe, etc. Cette souplesse morale s’étend d’ailleurs aux moyens politiques et guerriers. La fin justifie la terreur : les massacres de septembre 1792, l’extermination des anarchistes et des populistes par le Guépéou bolchevique, et les moyens théorisés par l’Etat islamique dans La Gestion de la terreur, afin de purifier le monde de ses mécréants. C’est ainsi que la Révolution perfectionne l’Etat hérité de l’autocratie russe ou de l’absolutisme royal et que la technologie, conçue et développée en Occident, transforme le monde, modernise/américanise/occidentalise tous ceux qui prétendent l’employer contre l’Occident. Et en fin de compte, « nous sommes tous américains » - mais comme les Américains eux-mêmes - moyennant quelques gris-gris culturels et identitaires, que l’on soit afro-américain, sino-américain, juif américain, hispano-américain etc., ou gallo-ricain pour les résidents de l’Hexagone.

    • Si les ennemis du Progrès, au nom de l’efficacité et du pragmatisme, utilisent les moyens du Progrès pour combattre le Progrès, il leur faut devenir de meilleurs progressistes que les progressistes. Il leur faut, pour vaincre les progressistes sur leur terrain, devenir de meilleurs ingénieurs et techniciens, utiliser mieux de meilleures machines, de meilleurs systèmes et réseaux. Les spécialistes et les experts instaurent aussitôt leur domination et prennent le pouvoir chez les ennemis du Progrès comme ils l’ont pris chez les progressistes. Technocratie contre technocratie, l’identité profonde entre les deux adversaires l’emporte sur l’opposition de surface, et le combat cesse faute de combattants.

    • La technologie, comme tous les moyens, n’est pas neutre (Ne-uter : ni l’un, ni l’autre) ; elle est ambivalente (ambi : ceci & cela), voire polyvalente. Elle n’interprète pas le monde comme la philosophie spéculative, elle le transforme ainsi que ceux qui l’utilisent. De moyen en vue d’une fin, elle devient sa propre fin et celle de ses utilisateurs.

    • L’exemple canonique étant la production des « puces » électroniques, ce composant de base, matériel (hardware), emblématique de la société technologique et de l’économie de la connaissance. Or le coût unitaire et le prix de vente des puces ne cesse de s’effondrer, en même temps que diminue leur taille et qu’augmente leur vitesse de calcul - mais - l’investissement dans une fonderie, une fab, est devenu si vertigineux que des entreprises concurrentes doivent s’associer lorsqu’elles se risquent à en construire une. Ainsi l’Alliance qui regroupe Motorola, TSMC et STMicroelectronics, en 2002, à Crolles, près de Grenoble, pour construire une fab à 3 milliards d’euros (dont 543 millions de subventions publiques) : le plus gros investissement industriel en France, depuis dix ans. Malgré les multiples soutiens de la puissance publique à tous les échelons, du municipal à l’européen, l’Alliance, qui pille les eaux des massifs voisins et bouleverse par sa seule présence le paysage et le marché de l’immobilier, ne cesse de changer de partenaires et de licencier des centaines de salariés, au gré des cycles du marché des semi- conducteurs, en voie de concentration, et des luttes à mort entre constructeurs. La superfluité - la prolétarisation - frappe même les ingénieurs et les techniciens. La part des salariés dans les coûts de production devient toujours plus marginale. Les ouvriers – les « opérateurs » des salles blanches - se réduisant depuis longtemps à une minorité quantitative et qualitative, par rapport aux machines et aux strates supérieures de personnel. Une classe ouvrière réduite à des éléments épars, submergée de robots et de bataillons d’ingénieurs, a perdu toute chance d’être le sujet de l’ultime révolution.

    • Les superflus sont aujourd’hui vraiment superflus. Inutiles comme producteurs concurrencés par l’informatique et l’automation. Insolvables comme consommateurs au point d’en être à quémander une allocation d’existence universelle. Ils n’atteignent même pas à la dignité des prolétaires au sens originel, ceux qui n’ont que leurs enfants à offrir à la cité. Les multiples techniques de reproduction artificielle déjà au point et sans cesse améliorées suffisent bientôt aux besoins en ressources humaines des entreprises et des collectivités, ainsi qu’aux projets parentaux des technarques et de la technocratie : les 1 % mentionnés plus haut.

      Cependant les superflus mangent, boivent, respirent, s’habillent, se logent, circulent, consomment. Dans un monde de raréfaction des ressources en eau, en nourriture, en espace, en énergie et minéraux, ils ne sont pas seulement superflus, mais nuisibles. La technocratie n’a que faire d’opprimer les superflus. Elle se soucie comme d’une guigne de leur assurer les conditions d’existence qui leur permettent au moins de vivre dans la servitude. Elle se moque de leur assurer une existence d’esclaves parce que leur existence d’esclave est pur gaspillage.

    • D’où pourraient renaître les hommes et la conscience humaine, capables de penser la déshumanisation du monde et de s’y opposer ? Et surtout de s’y opposer avec la moindre chance de succès, alors que tant de générations et de héros, autrement résolus et armés, intellectuellement et militairement, et qui combattaient dans un rapport de forces moins défavorable, furent écrasés. C’est de leurs défaites, aussi, que nous restons anéantis. Pour mémoire, la dernière insurrection victorieuse en France remonte à février 1848.

    • Certes, cette image du passé est forcément mythifiée, du moins en partie, et nous sommes loin d’en regretter tous les us et coutumes, mais elle est émouvante , ce qui vaut mieux que d’être mobilisatrice.

      C’est ce mirage, ce passé, qui, depuis un demi-siècle, dans les « sociétés avancées », ramènent des hommes à la campagne, en groupes ou en solitaires. Ceux-là sortent de la superfluité. Ils témoignent pour les autres que c’est possible, éveillant du coup la vision d’une sortie en masse. Ils portent en actes la critique du Progrès, née avec le Progrès lui-même, il y a deux siècles. Précisons pour les malentendants : le progrès technoscientifique contre le progrès social et humain.

    • Ainsi le milieu anti-industriel avait remis en circulation, voici des années, l’idée de « Réappropriation des savoirs-faire », déjà présente dans les communautés post-soixante- huitardes. Heureuse idée, destinée à rendre un peu d’autonomie vis-à-vis de la Mégamachine, à ceux qui la mettraient en pratique ; à conserver des vieilles pratiques ; à renouer avec cette expérience directe, avec cette sensibilité qui façonne les réfractaires à la société industrielle. Nombre de textes, parmi les plus intéressants de l’époque, sont issus de cette mouvance, qu’on peut lire notamment à L’Encyclopédie des Nuisances et dans Notes & Morceaux choisis, le bulletin de Bertrand Louart. Cette idée de « réappropriation des savoirs-faire » circule dans les squats, les communautés, les ZAD, les ateliers et les jardins collectifs et chez bien des gens qui vivent à l’écart, seuls ou en famille. Elle est un point d’ancrage et un point de départ. Elle donne du recul et matière à penser à ceux qui la mettent en pratique, sans prétendre un instant s’être affranchis du système, au sein d’on ne sait quelle Utopie enfin trouvée. Il n’y a pas d’ailleurs, mais des idées nées de la pratique et qui suscitent de nouvelles pratiques, en un perpétuel va-et- vient cumulatif entre l’expérience et la théorie. Une fois passé le seuil du mouvement spontané, de la réaction instinctive née de l’existence même des sujets – et il est aussitôt passé-, ce sont la réflexion et la critique qui commandent la pratique.

      avec du @tranbert dedans

    • Nous qui ne savons ni le grec, ni l’hébreu, et à qui les temps qui s’enténèbrent n’ont permis que de mauvaises études, nous avons proposé la méthode de l’enquête critique afin de produire des idées et des producteurs d’idées. Il y a toutes sortes d’enquêtes. Sans détailler ce qui semble un pléonasme - après tout, une enquête devrait toujours être critique - il s’agissait de pousser tout un chacun à se « réapproprier la pensée », à fabriquer du sens par lui-même, en enquêtant sur le monde à partir de son lieu de vie. Ellul : « Penser global, agir local ». Du concret et du particulier, à l’abstrait et au général. C’est l’exemple que nous avons tâché de développer à partir de la technopole grenobloise qui, de fil en aiguille, s’est transformé en critique du capitalisme mondialisé à l’ère technologique.

    • Chaque époque, en effet, présente un caractère particulier, qui l’unifie et qui l’affecte dans tous ses aspects. Ainsi le caractère technologique du capitalisme contemporain depuis la 2 e Guerre mondiale nous serait tôt ou tard apparu, que nous enquêtions sur l’élevage ovin en Lozère, la porcelaine à Limoges, le foot spectacle à Marseille ou plus directement sur l’aviation, les télécoms ou les nanotechnologies dans la technopole grenobloise, à Rennes ou à Toulouse. Dire que la technologie est le front principal ne signifie pas qu’on réduise toute opposition à sa contestation. Ce serait aussi absurde que de se battre « contre la Somme » ou « contre le Rhin » parce qu’à un moment donné la ligne de la Somme ou celle du Rhin matérialise le front principal entre deux armées. Le front principal n’est que le théâtre majeur de l’action, celui qui commande les fronts dits secondaires et où se décide l’issue du conflit. C’est-à-dire que toute percée ou recul sur ce front se répercute en cascade sur les autres et transforme la situation. À aucun moment, il ne s’agit de hiérarchiser les mérites de différentes causes, ni ceux de leurs défenseurs (cause des femmes, des homos, des animaux, etc.). Il s’agit de comprendre, avec le moins de retard possible sur le fait accompli, comment la technologie transforme le monde, villes et campagnes, les hommes et les femmes, leurs corps, les rapports sociaux, le rapport à soi, les idées, etc. Et enfin les rapports de force entre nécessaires et superflus, à l’avantage des premiers, bien sûr. Maintenant, si vous pouvez nous dire quel autre facteur que les technosciences a davantage changé l’homme et le monde depuis la révolution industrielle (circa 1800), ou la révolution cybernétique (circa 1945), nous serons vraiment intéressés.

    • Huhu, @aude_v je dirais : pas spécialement : je relève les passages qui me semblent intéressants ou significatifs, ou encore « à discuter ». Là mes citations en sont à 1/3 du document, et pas vraiment rencontré de trucs anti-féministes, homophobes ou du genre, donc ça reste plutôt lisible intéressant. Mais cela ne signifie pas qu’il n’y aurait pas des choses à discuter/critiquer quand même hein. :D

      Il y a pas mal de rappels historiques et de choses qui sont intéressantes à rappeler ou avoir en tête.

      Je continuerai ce soir ou demain…

    • « Ce soir ou demain » … 4 ans plus tard

      De même qu’un paléozoologue reconstitue l’anatomie, l’alimentation et le milieu d’un dinosaure à partir d’un os, nous avons pu, à partir de la technopole grenobloise, reconstituer le technocapitalisme mondialisé (le stade Silicon Valley du capitalisme), désigner et décrire au fil d’une quinzaine de livres et de centaines de textes, nombre de concepts et de phénomènes associés : la police totale (gestion et contention), la société de contrainte (implants cérébraux), la technocratie (l’alliage du capital et de l’expertise), la reproduction artificielle de l’humain, etc. Nous avons reçu un accueil mondain, la reconnaissance rechignée d’un étroit milieu d’initiés, et un échec politique ; les enquêteurs, les producteurs d’idées et les idées ne se sont pas multipliés à la vitesse nécessaire. La conscience du désastre traîne loin derrière l’emballement technologique. Nous-mêmes, qui y passons notre temps et nos efforts, nous peinons à saisir « ce qui se passe »,« en temps réel ». Et encore plus à le dire, et à y répondre.
      Certes, nous avons parlé avec beaucoup de gens. Nous avons suscité des écrits et des écriveurs, mais finalement nous n’avons rencontré que ceux qui nous cherchaient.

      […]

      Pardon de notre naïveté, nous avons rencontré tant de diplômés, désireux de « nous aider », de « faire quelque chose », en proie à la panique et à la procrastination dès lors qu’on leur proposait - non pas d’écrire - mais de rédiger sur tel ou tel sujet qui leur tenait à cœur. Ils en étaient simplement incapables ; et aussi humiliés que les illettrés à qui l’on demande soudain de lire ou de remplir un document.

    • La plupart des jeunes radicalistes que nous avons croisés, ne s’intéressaient pas plus au local et aux technologies que les vieux citoyennistes. Ils cherchaient surtout des thèmes d’activisme pour se mettre en valeur, des prétextes à réunions, à hauts cris, conciliabules, opérations d’agit-prop’, voire, dans leur plus cher désir, à une émeute réglementaire, avec cagoules, black bloc et bris de vitrines. Il nous incombait de fournir le discours, les faits, les arguments, les textes, justifiant ces envies d’esclandres. Pour peu qu’on féminise les textes collectifs et qu’on ajoute systématiquement « ...et son monde » après l’objet de notre opposition -Contre Ceci et son monde !... Contre Cela et son monde ! - comme un répons de messe, nous avions l’imprimatur. Peu d’entre eux ont vraiment compris ce qu’étaient les nanotechnologies, les technologies convergentes, ni ce que signifiait l’emballement technologique. Nous étions pour eux, comme pour les gauchistes du NPA, une sorte de commission spécialisée, dans un domaine ésotérique et abscons. On ne s’y investit que lorsqu’on n’a rien de plus urgent ou de plus gratifiant à faire ; et on y fait appel quand on a besoin d’une explication ou d’un intervenant sur le sujet. Gauchistes et post-gauchistes n’ont jamais admis que nous étions des généralistes de la politique et non pas des spécialistes des technologies. Il aurait fallu d’abord comprendre que la technologie était devenue la politique de notre temps – la réelle politique du capital et de la technocratie - et non pas un simple moyen, susceptible de « dérives » et de « dysfonctionnements ».

      Il y a des années de cela, une note étonnante du Centre d’Analyse Stratégique - ou d’une officine similaire - nous était passée sous les yeux. L’auteur y déclarait que les risques de tension majeurs à venir en France, étaient soit les controverses technologiques (nucléaire, OGM, nanos, etc.), soit les controverses identitaires (ethniques, confessionnelles, sexuelles, etc.). En tant qu’humains, à qui rien d’humain n’est étranger, nous nous sommes évertués à faire de la lutte contre l’inhumain (transhumanisme, anomie, fanatisme) le souci premier de nos congénères. Devinez qui a gagné.

    • A-t-on jamais vu, malgré des décennies d’appels et de propagande, laFrance d’en bas défiler en masse contre les nuisances qui frappent davantage les quartiers populaires ? Le bruit, l’air et l’eau empoisonnés, la malbouffe, les pesticides, les engrais qui infectent et abrègent la vie. A-t-on jamais vu la jeunesse des cités ou la vieillesse des cantons se soucier de l’intérêt général et se joindre aux protestations contre le nucléaire, les chimères génétiques et l’artificialisation du territoire ? Pour toutes les critiques qu’on leur adresse, et qu’ils méritent, les petits-bourgeois « écolos » restent les seuls, et les derniers, à ne pas séparer leurs intérêts de l’intérêt commun, à faire preuve d’idéalisme et à se battre pour tous, en même temps que pour eux. Qu’ils gagnent et qu’ils s’y prennent bien pour rallier l’ensemble du peuple à la cause commune est une autre affaire. Mais pour en parler, il faut avoir tenté, une fois, d’éveiller un canton d’éleveurs de porcs ou les banlieusards d’une métropole à la critique radicale.

      Demandez à n’importe quel ancien établi, mao ou marxiste-léniniste. Aux derniers prêtres ouvriers et curés des cités. Cela suppose d’y habiter. De se lier aux habitants. D’enquêter. De ne passuivre les idées et les revendications aliénées, aussi populaires soient-elles. De ne pas émettre un langage et un programme tout faits, aussi justes soient-ils dans l’abstrait, mais étranges et incompréhensibles pour la population. De se plonger dans le milieu sans s’y perdre, mais sans heurter. Cela suppose d’écouter, d’observer, de comprendre – « l’analyse concrète de la situation concrète ». De synthétiser les griefs pour produire des idées radicales (et non pas extrémistes), dont les habitants puissent s’emparer, etc. L’expérience de l’établissement (« aller au peuple ») et de l’enquête de masse, depuis le XIXe siècle, ont accumulé là-dessus de multiples règles et leçons qu’on ne discutera pas ici. Mais si vous connaissez des volontaires, on ne demande qu’à leur en faire part.

    • Il ne suffit pas de protester contre la destruction de l’école, de la langue, de la pensée, de la culture, de la mémoire, ni de se réfugier, chacun pour soi, dans la lecture. Il s’agit de créer un réseau de maisons vouées à la conservation et à la transmission de l’œuvre ancienne de l’humanité. Il faut de la pierre : des bâtiments, des librairies, des salles d’étude. Il faut des programmes, des maîtres, des élèves et de l’argent.
      Il n’a jamais suffit de la réunion mensuelle du « café citoyen » ou du « lieualternatif », avec son film-débat ou son conférencier en tournée.Il faut, partout, des centres de recherches sauvages qui analysent constamment, concrètement, la situation et lâchent des essaims d’enquêteurs dans toutes les situations concrètes.
      Il faut sauver tout ce qui peut l’être. Il faut des jardins, des vergers, des potagers ; des semences paysannes et des arches animales. Il faut des ateliers où réapprendre les techniques vernaculaires et autonomes, par opposition aux systèmes technologiques et autoritaires. Il faut donc tout ce qui se fait déjà, depuis des années, de manière éparse et multiple, et qui nourrit ce fond de conscience humaine et vitale, hostile à la mort machine. Mais il le faut de façon beaucoup mieux pensée, beaucoup plus dense et rayonnante. Beaucoup plus sérieuse.
      Il s’agit en somme d’instituer une véritable éducation populaire, du meilleur niveau et pour le plus grand nombre. D’ouvrir des écoles partout.

      […]

      Ce que les résistants attendent, c’est un tour de magie qui ne leur demande rien de plus que « toutce qu’ils font déjà », un simple vœu ; un acte d’opinion. « ils font partie », « Ils soutiennent »... Beaucoup n’espèrent plus qu’en la Catastrophe pour arrêter la catastrophe, mais avec souvent une sorte de complaisance et d’inconséquence. Ils n’imaginent pas concrètement cette catastrophe ; ou alors sans douleur ; ou du moins, après leur mort. Ils déplorent la catastrophe en cours, mais « jusqu’ici, ça va », et s’ils la nomment « catastrophe », c’est davantage par goût des grands mots et de l’exagération militante que par exactitude. La Catastrophe arrivera « un jour », et ce sera un événement subit, d’une violence planétaire.
      Cependant, cette attente apocalyptique qui se coule dans le moule culturel et religieux de nombreux peuples, façonne une mentalité anxieuse et désespérée. Elle sature l’esprit du temps et tourmente, de façon latente, celui des superflus. Ainsi s’accumule un fond de désespoir et d’abattement, telle une nappe de naphte, prête à nourrir des feux spontanés, lorsqu’elle affleure la surface, ou à s’embraser en incendie gigantesque, suite à un accident de forage. Aussi attendu soit-il, l’événement, sur le vif, surprend et stupéfie. Après coup, assez vite, les commentateurs rappellent qu’on s’y attendait, que « ça ne pouvait pas durer » ; même si, en fait, « ça durait » depuis si longtemps qu’on ne voyait pas pourquoi « ça » ne pourrait pas durer aussi longtemps -et même toujours - quoi qu’on s’interdît de le dire par piété révolutionnaire. Ainsi vont les catastrophes dont la théorie n’est plus à faire. Soit la catastrophe provoque la révolution, soit la révolution prévient la catastrophe.

    • Il faut pour agir un but et des moyens.
      Quant au but, nous reprenons notre bien : l’usage partagé des biens communs (de ce qu’il en reste), qui était l’exigence des vrais socialistes et anarchistes du jeune XIXe siècle.
      L’usage prudent, frugal, des biens communs, qui était celle des vrais « écologistes » du jeune XXe siècle (Ellul, Charbonneau et alii) ; le contrôle des naissances revendiqué par Armand Robin et les anarchistes des années vingt (les « néo-malthusiens ») ; la décroissance qui est, en ce début de XXIe siècle, l’autre nom, le « nom obus », du combat contre la société de consommation engagé par les contestataires des années soixante (situs, beatnicks, hippies, etc.) ; tous ces buts et ces moyens participent de cet épicurisme, de cet art choisi et délicat de la vie sur terre, dont le monde porte depuis longtemps le rêve. N’en déplaise aux pieux natalistes, il ne suffit pas de réduire la consommation ostentatoire de quelques-uns pour préserver notre jardin, il faut aussi réduire le nombre des consommateurs. Aussi viable que serait une fourmilière humaine, elle n’en serait pas pour autant vivable, ni enviable. Nous sommes des animaux politiques et non pas des insectes sociaux.

      #biens_communs #communs

      […]

      Peut-on, au-delà, proposer aux superflus et aux résistants des tactiques de lutte, comme l’ancien mouvement ouvrier en avait inventé durant son histoire ?
      En fait, nous pouvons toutes les transposer - grèves, sabotages, occupations, blocages, boycottages - de l’usine à la vie quotidienne, en sachant qu’aucune ne constitue l’arme absolue (aujourd’hui comme hier), et que toutes peuvent être récupérées et retournées par la technocratie.
      Il est ainsi possible pour les radicaux de se lier aux superflus en faisant une propagande intense et constante aux entrées des grandes surfaces, aux sorties des gares, aux arrêts de bus, etc., partout où ils passent et consomment en masse des produits et des services, afin de les informer concrètement des vices de ces marchandises, les inciter au boycottage, leur proposer des alternatives d’achat, et surtout, des alternatives à la consommation. Ces boycottages peuvent cibler d’abord certains produits particulièrement nocifs, socialement et sanitairement, faciles à éviter, et s’étendre ensuite. Le refus d’achat est beaucoup plus facile que le refus de travail : on ne perd pas d’argent, on en gagne. À moins de restaurer la vente forcée, comme celle du sel sous l’ancien régime (la gabelle), on ne peut obliger les clients à acheter. Les partisans de la décroissance, ennemis de la « consommation patriotique » et saboteurs du « moral des ménages », devraient répandre cette tactique, au lieu de la confiner de manière anecdotique et symbolique à leur seul usage. Mais il faut oser parler et apprendre à parler aux superflus. Leur parler en vrai, de vive voix dans le monde réel, et non pas seulement par le biais d’Internet et de publications internes aux milieux « écolos ». Nous pouvons par ce moyen mettre des entreprises à genoux. Nous pourrions, à titre de mythe radical, lancer l’idée d’une grève générale des achats, réminiscente de la grève générale du travail.

      […]

      C’est une membrane qui sépare les initiatives d’autogestion alternative, de l’exploitation par l’Etat du sentiment de fraternité.
      De même qu’autour de l’usine en grève pouvait se développer une « société autogérée », piquets de grèves, fêtes, approvisionnements, occupation et production « sauvage », préfigurant « le monde à venir », le boycottage peut mener à la grève des achats et celle-ci, à la mise en place d’autres circuits, et de proche en proche à l’instauration d’une économie parallèle gérée par des conseils populaires. Sourdement, c’est à quoi tendent les « amap », les « sel », les « zad » etc., quels que soient leurs défauts par ailleurs.

      […]

      Nous l’avons dit maintes fois, nous n’avons pas de « projet » au sens des programmes et théories des vieilles avant-gardes surplombantes, nous n’avons que des rejets. Nous proposons d’agir par soustraction, d’examiner collectivement, une à une, toutes les activités économiques suivant leur utilité ou leur nocivité, et de décider de leur maintien ou de leur abolition. À titre d’échantillons, nous pourrions examiner le sort de l’industrie publicitaire, de la grande distribution, de l’agrochimie, de l’industrie nucléaire, de la spéculation financière, des médias de masse, etc.. Et ainsi, pièce par pièce, en démanteler des pans entiers. Ce qui resterait de ce passage au crible ne serait nullement la société socialiste ou communiste des traités marxiens, mais un pis-aller. Un capitalisme rabougri, ramené des décennies en arrière, et laissant à la société le loisir de débattre au fond, consciemment, de ses formes d’organisation. Ce serait un peu d’air.

  • George Orwell, Le socialisme et l’industrialisation, 1937
    https://sniadecki.wordpress.com/2015/11/07/orwell-socialisme-industrialisation

    On voit ici où le bât blesse. Ayant décelé la cause économique cachée du fascisme, l’auteur pose comme allant de soi que l’aspect spirituel de la question est dénué d’importance. Le fascisme est dépeint comme une manœuvre de la « classe dirigeante », ce qu’il est effectivement en substance. Mais ceci explique uniquement l’attirance que le fascisme peut exercer sur les capitalistes. Que dire des millions de gens qui ne sont pas des capitalistes, qui, sur le plan matériel, n’ont rien à attendre du fascisme, qui bien souvent s’en rendent parfaitement compte, et qui pourtant sont fascistes ? De toute évidence, leur choix est purement idéologique. S’ils se sont jetés dans les bras du fascisme, c’est uniquement parce que le communisme s’est attaqué, ou a paru s’attaquer, à des valeurs (patriotisme, religion) qui ont des racines plus profondes que la raison économique. Et en ce sens, il est parfaitement exact que le communisme fait le lit du fascisme. Il est navrant que les communistes s’obstinent à sortir des lapins économiques de chapeaux idéologiques. En un sens, cela a bien pour effet de révéler la vérité, mais avec cette conséquence annexe que la propagande communiste manque pour l’essentiel son but. C’est cette réaction de rejet intellectuel à l’égard du socialisme, telle qu’elle se manifeste surtout chez les esprits réceptifs, que je veux étudier dans ce chapitre. Cette analyse sera assez longue dans la mesure où la réaction en question est très largement répandue, très puissante, et presque totalement négligée par les penseurs socialistes.

    #George_Orwell #idéologie #religion #socialisme #marxisme #communisme #fascisme #critique_techno #industrialisation #machinisme, chez @tranbert

    • Prenons une autre invention — l’avion par exemple, qui, à première vue, ne semble pas fait pour rendre la vie plus sûre. Les premiers aviateurs étaient des hommes d’un extraordinaire courage, et il faut aujourd’hui encore une bonne dose de sang-froid pour piloter un plus lourd que l’air. Mais la machine s’est déjà engagée sur sa pente naturelle. Comme aujourd’hui l’automobile, l’avion pourra bientôt être confié au premier venu. Un million d’ingénieurs travaillent, presque à leur insu, pour parvenir à ce but. Et finalement — c’est là le but, même si on ne l’atteint jamais tout à fait — vous obtiendrez un avion qui ne demandera pas à son pilote plus d’adresse ou de courage qu’il n’en faut à un bébé pour se laisser promener dans son landau. Et c’est dans cette direction que s’effectue et doit continuer à s’effectuer tout progrès mécanique. Une machine évolue en s’automatisant, c’est-à-dire en devenant plus facile à utiliser, plus fiable. La finalité ultime du progrès mécanique est donc d’aboutir à un monde entièrement automatisé — c’est-à-dire, peut-être, un monde peuplé d’automates.

      #visionnaire (à son regret, et au mien)

  • http://www.b-a-m.org/2015/10/o-s-linvention-de-la-science

    Émission du 2 octobre 2015, nous recevons #Guillaume_Carnino (Professeur d’histoire des sciences et techniques à l’université de Compiègne) pour son ouvrage : « L’invention de la #science. La nouvelle #religion de l’âge industriel ». Le livre propose une enquête historique et généalogique permettant de comprendre pourquoi et comment, en France, à l’heure de la IIIe République, l’idée selon laquelle la science serait garante du vrai, en est venue à être unanimement partagée. Il dévoile les rouages de la carrière de savants comme #Louis_Pasteur dont les découvertes furent convoitées par les industriels.

  • La Machine est ton seigneur et ton maître - Yang - Jenny Chan - Xu Lizhi
    http://agone.org/centmillesignes/lamachineesttonseigneurettonmaitre

    Comment le système Foxconn – les usines chinoises qui produisent iPhone et PlayStation – expérimente et met en œuvre les pires formes d’exploitation.

    Les machines ressemblent à d’étranges créatures qui aspirent les matières premières, les digèrent et les recrachent sous forme de produit fini. Le processus de production automatisé simplifie les tâches des ouvriers qui n’assurent plus aucune fonction importante dans la production. Ils sont plutôt au service des machines. Nous avons perdu la valeur que nous devrions avoir en tant qu’êtres humains, et nous sommes devenus une prolongation des machines, leur appendice, leur serviteur. J’ai souvent pensé que la machine était mon seigneur et maître et que je devais lui peigner les cheveux, tel un esclave. Il fallait que je passe le peigne ni trop vite ni trop lentement. Je devais peigner soigneusement et méthodiquement, afin de ne casser aucun cheveu, et le peigne ne devait pas tomber. Si je ne faisais pas bien, j’étais élagué.

    Foxconn est le plus grand fabricant du monde dans le domaine de l’électronique. Ses villes-usines, qui font travailler plus d’un million de Chinois, produisent iPhone, Kindle et autres PlayStation pour Apple, Sony, Google, Microsoft, Amazon, etc. En 2010, elles ont été le théâtre d’une série de suicides d’ouvriers qui ont rendu publiques des conditions d’exploitation fondées sur une organisation militarisée de la production, une taylorisation extrême, l’absence totale de protection sociale et une surveillance despotique jusque dans les dortoirs où vivent les ouvriers.

    Ce livre propose quelques éléments d’analyse du système Foxconn à partir du portrait que fait la sociologue Jenny Chan d’une ouvrière qui a survécu à sa tentative de suicide en 2010. Complété par le témoignage de Yang, un étudiant et ouvrier de fabrication à Chongqing, il retrace également le parcours de Xu Lizhi, jeune travailleur migrant chinois à Shenzen, qui s’est suicidé en 2014 après avoir laissé des poèmes sur le travail à la chaîne, dans « L’atelier, là où ma jeunesse est restée en plan ».

    Traduit de l’anglais et préfacé par #Celia_Izoard

    #livre #Foxconn #critique_techno #machinisme #industrie #iPhone #Playstation #Chine #exploitation #usine #capitalisme #automatisation

    • Ce livre est absolument recommandable : les poèmes sont beaux (et glaçants) ; la première partie n’apprendra peut-être rien à celleux qui suivent déjà le sujet, mais donne des références solides ; et la conclusion qui relie les deux mondes (l’abattage à Shenzhen et les délicatesses de la Silicon Valley) est d’autant plus forte qu’elle est écrite sans hyperbole.
      #merci

  • François Jarrige, Le travail discipliné, 2009
    https://sniadecki.wordpress.com/2015/03/08/jarrige-discipline

    Face à l’effritement des anciennes régulations du travail, les économistes et les fabricants du début du XIXe siècle s’efforcent de trouver des moyens pour lutter contre « l’oppression du travail » et discipliner la main-d’œuvre qui inquiète à l’ère des Révolutions. Durant la première moitié du XIXe siècle, en France comme en Grande-Bretagne, le travail et l’invention technique sont au cœur d’un important processus de réévaluation. La mécanisation industrielle apparaît de plus en plus comme le moyen de faire advenir un travail discipliné et moralisé. À travers l’examen de quelques univers productifs britanniques et français de la première industrialisation, et en confrontant les discours et les pratiques des manufacturiers, il s’agit de suivre comment la recherche de la discipline au travail s’affirme progressivement comme un élément majeur de légitimation du changement technique.

    #travail #discipline #machinisme #révolution_industrielle #critique_techno

  • François Jarrige, Se prémunir contre les préjugés ouvriers, 2010, via @tranbert
    http://sniadecki.wordpress.com/2014/12/18/jarrige-prejuges-ouvriers

    Au cours de la première moitié du XIXe siècle, l’économie politique devient la science justificatrice du nouveau monde industriel et de son cortège d’innovations techniques. Face aux oppositions qui s’expriment dans la société, la science économique en voie d’institutionnalisation est chargée de dire les avantages de l’emploi des machines pour la main-d’œuvre comme pour les consommateurs. La volonté de lutter contre « les préjugés ouvriers » à l’égard des machines s’affirme comme un topos du discours économique, il justifie le développement d’une vulgarisation de la science des machines auprès des masses. Si ce mouvement s’amorce précocement en Grande-Bretagne, il est largement international. Des préoccupations similaires se font jour en France, les expériences et les textes circulent entre les deux pays. En France, les phases d’agitations révolutionnaires sont l’occasion d’accélérer les transferts et d’importer les livres et les expériences britanniques.

    #machine #machinisme #économie #acceptabilité (déjà !) #histoire #industrialisation #critique_techno #luddisme#François_Jarrige

  • Passionnante et très détaillée critique de la biologie de synthèse et de sa présentation dans la revue « Pour la science ». Avec un parallèle sur cette conception de la biologie et l’industrialisation des machines. Chez @tranbert.

    François Képès, rationalisateur des machines vivantes | Et vous n’avez encore rien vu...
    https://sniadecki.wordpress.com/2014/10/09/sniadecki-kepes

    Ne rien comprendre, mais asservir

    La modélisation informatique est la seule approche théorique dont veulent aujourd’hui entendre parler les scientifiques, quelque soit leur domaine : celle qui permet de calculer et de prévoir. Elle évite d’avoir à penser son objet dans sa spécificité et par là de comprendre véritablement ce qu’il est et par suite ce que l’on fait de lui.

    Pourtant, nos biotechnologues ne manquent jamais de souligner que l’approche que promeut la biologie de synthèse « aiderait à comprendre le vivant en le fabriquant »
    […]
    Mais comment espérer comprendre quoi que ce soit en niant l’existence, en supprimant, en détruisant ce qu’il s’agit justement de comprendre ? Car réduire le vivant à la machine, c’est en faire quelque chose que nous connaissons : quelque chose qui fonctionne « comme prévu », qui produit l’effet que l’on en attend ; et rien d’autre. Alors que ce qu’il s’agit de comprendre dans le vivant, c’est précisément son caractère dynamique, imprévisible et capricieux ; bref, ce dont ne sera jamais pourvu une machine, à savoir son activité autonome.

    Si les biotechnologues comme François Képès parviennent un jour à fabriquer un « système vivant » selon « les principes fondamentaux de l’ingénierie rationnelle », ce n’est pas à une meilleure connaissance et compréhension du « monde vivant » qu’ils vont parvenir, puisqu’ils font tout pour le simplifier, l’appauvrir et le réduire à la machine, mais seulement à une meilleure manière de l’asservir aux impératifs du rendement industriel et de la rentabilité économique.

    #biologie #biologie_de_synthèse #biotech #machinisme #industrialisation #vivant #François_Képès

    • y’a 2, 3 trucs intéressant, mais je trouve que l’article est extrêmement long pour les débusquer.
      En gros y’a un passage intéressant sur les distinctions de différentes machines (mais je pense qu’on doit le trouver dans le 1er manuel d’ingénierie venue), puis ensuite en gros il y a une critique d’un discours de fantasme de maîtrise du vivant, sans se salir les mains, alors qu’il s’agit surtout d’un tatonnement, ou l’on ne sait pas trop ce que l’on fait.

  • « La pente naturelle de la machine consiste à rendre impossible toute vie humaine authentique » (Orwell) - CQFD, mensuel de critique et d’expérimentation sociales
    http://cqfd-journal.org/La-pente-naturelle-de-la-machine

    Osez critiquer publiquement la technologie et vous vous retrouverez qualifié d’obscurantiste, de nostalgique de la bougie et de l’âge des cavernes, d’antihumaniste, voire de pétainiste nostalgique du « retour à la terre ». Le philosophe Günter Anders prédisait « une mort intellectuelle, sociale ou médiatique » à ceux qui encourent ce risque. Or force est de constater que la technocratie qui règne sur le monde, dédiée intégralement à l’efficacité, a effectivement à voir avec un processus de domination totalitaire auquel l’homme est sans cesse condamné à s’adapter. Dans un ouvrage synthétique, intitulé Technocritiques, Du refus des machines à la contestation des technosciences (éditions La Découverte, 2014), l’historien François Jarrige retrace le fil politique des oppositions sociales et intellectuelles aux changements techniques.

  • Aujourd’hui, découvrons un monde neuf, des concepts novateurs, avec des innovations nouvelles et jamais vues. Que-du-nou-veau je te dis !

    Par la faute de ma #procrastination maladive, je me suis mis à suivre les liens annexes aux vidéos incluses dans ce seen : http://seenthis.net/messages/183496. Ainsi qu’à faire des recherches sur les intrigantes initiales #RBEHP.

    Je suis d’abord tombé sur cette vidéo présentant un homme qu’il faudrait apparemment connaître : #Peter-Joseph.
    http://www.youtube.com/watch?v=j6zyTOrPNuM

    Il a une page Wikipédia dédié : http://fr.wikipedia.org/wiki/Peter_Joseph.
    Il a travaillé dans la musique et dans la finance. Mais la finance ce n’est pas bien, c’était juste pour ne pas avoir un chef. Donc finalement il devient monteur, et sur son temps libre il fait des documentaires.

    Dès les premières lignes, on nous parle d’un concept économique qui apparemment mérite un lien interne de Wikipédia : "une #économie basée sur les ressources". Les mots sont simples, mais mis ensemble, on se demande alors ce que cela signifie puisqu’il y a un lien qui suggère que c’est un concept particulier. Nous y reviendrons un peu plus loin.

    Peter Joseph a produit une série préfixée par le même terme : la série #Zeitgeist. Et même carrément un mouvement (social ?) basé autour des admirateurs de cette série : le mouvement Zeitgeist.
    http://en.wikipedia.org/wiki/The_Zeitgeist_Movement
    http://fr.wikipedia.org/wiki/Zeitgeist:_The_Movie
    http://fr.wikipedia.org/wiki/Zeitgeist:_Addendum
    http://fr.wikipedia.org/wiki/Zeitgeist:_Moving_Forward
    http://zeitgeistmovie.com

    Le but de ces films est de faire comprendre que le monde ne va pas bien (apparemment beaucoup de théorie du complot au début, quand même), mais pas seulement. Car ensuite il propose une solution pour sauver le monde.

    Dans son ensemble, cette œuvre engagée constitue un modèle de compréhension du paradigme social actuel et explique pourquoi il est impératif d’en sortir. La nouvelle approche sociale radicale, mais néanmoins pratique, qu’elle propose, est fondée sur des connaissances avancées qui permettraient de résoudre les problèmes sociaux auxquels le monde est aujourd’hui confronté.

    Rien que ça !

    Les descriptions des deux derniers pointent de nouveau sur un lien Wikipédia interne parlant de « l’économie basée sur les ressources » : c’est vraiment intrigant.

    En vérité, le lien redirige vers un sous-chapitre d’une autre page :
    http://fr.wikipedia.org/wiki/The_Venus_Project#Une_.C3.A9conomie_bas.C3.A9e_sur_les_ressources

    Cette page parle du projet Vénus (#The-Venus-Project), qui est une organisation. Une organisation ? Non, une entreprise (et une association), fondé par #Jacque-Fresco, un ingénieur qui propose, depuis plus longtemps que Peter Joseph, de sauver le monde en changeant notre système économique :
    http://fr.wikipedia.org/wiki/Jacque_Fresco

    Mais alors c’est quoi le projet Vénus, en quoi ça consiste ? On apprend :

    The Venus Project est présenté par la littérature de Jacque comme l’aboutissement du travail de toute une vie. Il est localisé au centre de la Floride, près de la rive ouest du Lac Okeechobee, à peu près 80 km au nord-est de Fort Myers. Sur sa parcelle de 8,7 ha, il y a 10 structures entièrement imaginées par Fresco. C’est en partie un centre de recherche pour Jacque Fresco et Roxanne Meadows. Ils y produisent des vidéos et de la littérature qui a pour but de présenter leur buts. Selon leurs informations, leur objectif ultime est d’améliorer la société en direction d’un concept social global, durable et technologique qu’ils appellent une « économie basée sur les ressources ».

    Donc le but de toute sa vie, c’est avoir trouvé un lieu qui lui permet d’écrire des textes et de faire des vidéos qui présentent son but dans la vie.

    Mais revenons à notre concept novateur : c’est quoi une économie base sur les ressources ?

    Une économie basée sur les ressources utilise les ressources existantes plutôt que le commerce.

    Il me semble que le commerce, quand bien même il serait à critiquer, ne nous fait pas échanger des ressources inexistantes. Au contraire d’ailleurs, puisqu’on a justement un manque de ressources existantes à cause du commerce qui nous fait en utiliser trop. Du coup, je ne comprends pas la phrase, cela doit vouloir dire autre chose.

    Les richesses de la Terre sont considérées comme le patrimoine commun de tous les peuples et sont de ce fait partagées de manière équitable.

    Ça c’est super gentil, vraiment hein. Mais c’est le but de la plupart des mouvements politiques ou économiques (y compris le libéralisme). Donc ce qui importe, c’est surtout « comment ? »

    une telle économie s’organiserait comme suit :
    1. Répertorier les #ressources planétaires.
    2. Décider ce qu’il est nécessaire de produire, en se fondant sur le strict minimum (comme la nourriture, l’eau, le logement, etc.) en passant par des produits utilitaires (matériaux bruts, machines automatisées, développement technologique, etc.) jusqu’aux produits utilisés à des fins non-utilitaires (divertissements, radios, instruments de musique, etc.).
    3. Optimiser les méthodes de production, maximiser la durée de vie des produits.
    4. Mettre en place des méthodes adaptées de distribution pour accéder aux produits.
    5. Optimiser le recyclage de ces produits qui peuvent devenir obsolètes ou inopérants.

    Voilà. On y est. C’est ça le nouveau #concept totalement innovant et novateur.

    Un #machinisme cybernéticien, mille fois promu par mille techno-utopistes depuis au moins deux siècles déjà. Et pire, uniquement avec des phrases creuses, super génériques, qui me font vaguement penser à un truc sectaire. Rien, mais absolument RIEN de jamais lu autre part dans toutes les pages qui tournent autour de cette mouvance.

    Une société mondiale avec une sorte de gouvernement technocratique planétaire, dirigé par la science et les ingénieurs qui calculent tout ce qu’il faut globalement et localement.

    J’ai perdu tout ce temps, pour ÇA.

    Annexes :

    En cherchant les initiales RBEHP, on trouve aussi « Guillaume, consultant EBR ». (EBR = RBE en français à priori)
    http://questionsebr.wordpress.com/tag/rbehp
    http://www.questions-ebr.com/consultant-economie-basee-sur-ressources

    On tombe aussi sur #The-Transition-Project, un suite de blogs, en plusieurs langues, qui font allusion à l’économie basée sur les ressources. Mais qui diffuse aussi des vidéos K-Pop tout en écrivant que c’est de la publicité pour leur projet. Je ne comprends pas.
    http://www.ttpfrance.org
    http://www.thetransitionproject.org

    Je vous laisse procrastiner plus loin, moi je suis un peu fourbu là.

    #technocratie #cybernétique

  • Le futur, c’était pas mieux avant ?
    http://www.rslnmag.fr/post/2013/07/01/le-futur-cetait-pas-mieux-avant.aspx

    Depuis le début de la révolution numérique, jamais nous n’avions inventé autant d’appareils et de dispositifs techniques pour nous faire gagner du temps. Et pourtant, jamais nous n’avons autant eu l’impression d’en manquer ! Un paradoxe ? Pas tant que ça, il s’agirait plutôt d’un classique des réflexions sur l’impact des technologies sur nos modes de vie. La preuve en images et citations de la première Révolution industrielle… qui n…

    #www.rslnmag.fr

    • La morale de tout ceci ? On pourrait la formuler en rappelant, avec Olivier Postel-Vinay, que « le progrès technique, en lui-même, est neutre. Tout dépend de l’usage qui est fait des nouvelles inventions ». S’il y a un véritable enjeu à rester critique vis-à-vis des nouvelles technologies, la technophobie de principe n’apporte rien, ni plus, ni moins d’ailleurs que le cyber-optimisme béat. Plutôt que de faire l’apologie des technos ou de s’en méfier, il vaut bien mieux se concentrer sur ce qu’on veut faire avec elles. Et imaginer ainsi la société que l’on veut préparer.

      #lol-jaune #neutralité-mon-cul #ambivalence #technologie #machinisme #progrès et surtout #lieu-commun...

      Continuer de balancer des inepties de lieux communs pareils après tant d’études sociologiques/philosophiques/anthropologiques/historiques sur les différentes sortes de techniques « inventées » au cours de l’histoire humaine... C’est juste... déprimant.

    • @rastapopoulos : lieu commun je veux bien, mais ineptie je vois pas pourquoi. J’ai pas lu le reste, mais l’extrait que tu remontes ne me semble pas inepte, juste un enfonçage de portes ouvertes, pourtant nécessaire selon moi.
      ça rejoint le désaccord avec @bp314 ici ou là http://seenthis.net/messages/152787#message152981
      http://seenthis.net/messages/152779#message153012
      et je dois dire que oui, c’est un peu triste, mais le débat semble s’échouer sur une opposition lieu commun / posture radicale qui débouche sur pas grand chose...

    • Enfoncer une porte ouverte signifierait que c’est un fait avéré (et ça l’est pour toi apparemment). Ce que je conteste absolument, ça ne correspond à aucune réalité. Toute technique un tant soit peu complexe induit en elle-même un contexte qui permet son utilisation : un urbanisme particulier, un mode de vie particulier, etc. Qu’on soit gentil ou méchant n’y change rien, il y a certains invariants qui suivront toujours cette technique. Et cela vaut d’autant plus pour les techniques nouvelles, industrielles, qui ne sont jamais issues d’inventions à l’intérieur d’un corps de métier, mais qui sont issues des ingénieurs et des scientifiques.

      (Je rappelle que jusqu’à pas si longtemps, la majorité des innovations étaient inventés par les travailleurs eux-mêmes dans leur corps de métier, souvent en plusieurs endroits du monde à la fois, puis se diffusaient lentement dans la société, tandis que de nos jours à peu près tout est inventé par des ingénieurs et scientifiques dédiés à ça, puis breveté ou pas, puis diffusé massivement sur fort peu de temps, entre autre grâce à la publicité. Ces deux modes d’invention n’ont rien à voir, et ne produisent pas les mêmes améliorations pour les gens.)

      Cette posture inutile du ni-ni, ni blanc ni noir, ni technophobe ni cyber-optimiste, sert juste à se parer d’une fausse objectivité comme tout « bon » élève sortant d’école de journalisme.

      Comme si être « contre la technique » voulait dire quelque chose alors que justement le propos est de dire qu’il y a des échelles incomparables et que donc « la technique », ça ne veut rien dire. À cela Jacques Ellul (entre autre) opposait (entre autre) le concept d’ambivalence, qui ne signifie pas du tout que telle technique précise pourrait être utilisée en bien ou en mal, mais que telle technique, une fois mise en place et démocratisée, induit à la fois des conséquences biens, et des conséquences mauvaises, et qu’il est impossible de les séparer. Ce qui, lorsqu’on en tire l’enseignement, oblige alors à devoir faire la balance, et si une technique apporte plus de problèmes que de solutions, il faut décider de tout arrêter et chercher d’autres chemins. Aucun rapport avec revenir en arrière sur l’ensemble, donc.

      Mais évidemment, dans une société de Progrès où l’on nous a éduqué à penser que l’Histoire est linéaire d’un point A à un point B, le concept de tout arrêter volontairement telle innovation est un peu violent (ça l’est pourtant bien moins que la violence subie par la majorité des gens à cause du nucléaire/de l’urbanisme centré sur la voiture/des OGM/de l’informatisation du monde/des périphériques mobiles/etc).

      Mais c’est toujours plus facile d’écouter les sirènes de la science-fiction (demain on va trouver une solution) ou de l’âge d’or (à telle époque tout allait bien)...

    • Votre échange m’amène à indiquer l’ouvrage de David Edgerton, Quoi de neuf ? Du rôle des techniques dans l’histoire globale dont Pour la Science de juillet 2013 fait la revue dans sa rubrique À lire . J’hésitais à le poster ici…

      Le texte de PLS n’est pas en ligne, en revanche, on peut trouver différentes critiques en ligne.

      Dans Le Monde (mars 2013)
      Un regard décalé sur les technologies
      http://www.lemonde.fr/sciences/article/2013/03/07/un-regard-decale-sur-les-technologies_1844500_1650684.html

      Le propos d’Edgerton est, in fine, politique : il n’y a aucune raison d’accepter sans examen toute innovation, bien au contraire : « Vivre à une époque inventive exige de rejeter la majorité de ce qui est proposé », estime-t-il. Dans un texte publié en 2011 dans la revue Nature, à l’occasion du bicentenaire de l’insurrection luddite contre le machinisme dans les filatures anglaises, il célébrait le rôle éminent des scientifiques dans ce tri nécessaire.

      Ou plus argumenté

      David Edgerton, Quoi de neuf ? Du rôle des techniques dans l’histoire globale
      http://lectures.revues.org/11712

      Reste que la thèse de l’auteur, historien des sciences à Imperial College (Londres), relève d’une évidence trompeuse : il s’agit de composer « l’histoire des techniques en usage », afin de montrer que « notre perception de l’importance d’une technique privilégiait jusqu’ici l’innovation et reposait sur des présentations de la modernité attribuant un rôle central à certaines techniques nouvelles » (p. 18). À l’encontre de cette focalisation sur la nouveauté et le futur, la bonne compréhension de la place des techniques passe par une réévaluation décisive : non seulement « la plupart des inventions ne sont jamais utilisées [et] nombre d’innovations échouent » (p. 22), mais il faut prêter attention aux choix technologiques, le plus souvent réalisés parmi des techniques concurrentes, et à la persistance voire la résistance des techniques « anciennes ». Un seul cas, extrait de l’impressionnante accumulation d’exemples, suggère la portée de ce propos en apparence banal : celui des transports, où les « technologies dérivées, adaptées » (p. 83) sont légion.

    • Merci de ces liens. Le journal La Décroissance dans sa recension terminait par :

      Cette idée aboutit à une conclusion radicale et très forte qui offrira des ressources à ceux qui sont en quête de chemins de traverse et de trajectoires alternatives : "Nous n’aurons plus à nous culpabiliser d’être hostiles à l’innovation ou en retard sur notre époque sous prétexte que nous refusons d’adopter une invention. Nous sommes libres de refuser les techniques que nous n’aimons pas, quand bien même des gourous de la consommation et des gouvernements nous affirment de manière intéressée qu’il est primordial d’accepter, par exemple, les cultures génétiquement modifiées. Il existe d’autres techniques, d’autres voies d’invention. L’histoire de l’invention n’est pas l’histoire d’un futur inéluctable auquel nous devons nous adapter sous peine de disparaître, mais plutôt une histoire de futurs avortés, et de futurs fermentent ancrés dans le passé" (page 276). Il ajoute : "Nous devons nous estimer libres de chercher, développer, innover,même dans des domaines jugés obsolètes par ceux qui s’enferment dans un futurisme dépassé". Ce livre lève un verrou essentiel pour penser ce que serait une politique de décroissance, une politique qui serait en réalité plus réaliste que les appels mystiques et idéologiques à s’en remettre aux inventions du futur pour résoudre les problèmes de l’humanité.

    • @rastapopoulos : bon ben ça m’embrouille, je ne vois plus trop bien sur quoi nous serions en désaccord.
      On est à peu prêt d’accord pour dire qu’être pour ou contre la technique, ça ne veut rien dire.

      Ensuite, ce qui m’importe, personnellement, c’est d’avoir une approche responsable de l’usage de nos outils.
      Je crois qu’on a raté le coche lors de l’invention du « principe de précaution ». On aurait dû plutôt inventer le « principe de responsabilité », qui obligerait toute entité qui veut introduire une invention, un concept ou une technique nouvelle à démontrer non seulement que ce n’est pas nocif pour la santé et l’environnement, mais qu’ensuite les conditions seront réunies pour que cet acteur (ou des institutions consentantes) puissent assumer les conséquences de cette innovation sociétale.
      Sachant que cela irait jusqu’au traitement des déchets ou le provisionnement des catastrophes, on verrait que l’innovation technologique futile attirerait soudainement moins les capitalistes...

  • « Debug your baby » / The Data-Driven Parent - Mya Frazier - The Atlantic
    http://www.theatlantic.com/magazine/archive/2012/05/the-data-driven-parent/308935

    pour tous les parents 2.0 qui ne sauraient pas quoi faire avec leur #bébé 1.0

    THE DAY THEIR SON was born, Monica Rogati and her husband began obsessively plotting his life via thousands of bits of data they punched into the smartphone app Baby Connect. They called the data “baby I/O,” a reference to the computing expression input/output and the kind of “geeky joke,” as Rogati puts it, that you might expect from a pair of professional data crunchers with doctorates from Carnegie Mellon. With the baby’s feedings (input), diapers (output), sleep sessions, and other accomplishments duly registered, he generated 300 data points each month.

    (...)

    Rogati imagines that this crowdsourcing will provide an early-warning system to help parents determine what is and isn’t out of the ordinary: “He’s in the 50th percentile, he is perfectly normal.” Or “This is in the 99.9th percentile. Maybe this is not normal.” It will be a way, she says matter-of-factly, “to debug your baby for problems.”

    #data

    oui je pense à toi @supergeante !

  • L’#automatisation et le self-service : on finit par ne plus parler qu’à des #machines (et j’ajouterais, sur les hotlines, à des humains tenus de se comporter comme des machines). Selon le LA Times, ce mouvement de #déshumanisation s’accélère dans le #commerce.

    Automation accelerates in retail sector : Retail jobs are disappearing as shoppers adjust to self-service – latimes.com « MAHB Sustainability Initiative
    http://mahbsustainability.wordpress.com/2011/03/05/automation-accelerates-in-retail-sector-retail-jobs-ar

    Automation — long a force in agriculture and manufacturing — is accelerating in the retail sector, a trend that could hamper efforts to bring down the nation’s stubbornly high jobless rate.

    In an industry that employs nearly 1 in 10 Americans and has long been a reliable job generator, companies increasingly are looking to peddle more products with fewer employees. Shipping and warehousing workers are being replaced by robots that can process packages more efficiently than humans. Virtual assistants are taking the place of customer service representatives. Kiosks and self-service machines are reducing the need for checkout clerks.

    Implications for sustainability?
    1. few jobs means even greater anger
    2. ability to affect the system even more remote as machines can’t engage.
    These looks expensive.

    My own tendency to use #Amazon for all sorts of things means the brown truck driving more miles to deliver small packages..

    #chômage #cdp

    • Comme là il s’agit de l’activité commerciale, on le voit plus car ce sont les gens avec qui ont a une interaction durant nos moments de vie où on est « consommateur ». Mais ce processus liant #économie, #automatisation, #réification, ce n’est pas nouveau...

      On peut même dire que c’est le propre de l’#économie-de-marché, et plus encore depuis le #machinisme et les automatismes qui en ont découlé.

      En fait, contrairement à ce que disent beaucoup de critiques de la cybernétique, ce qui est dangereux dans ce phénomène ce n’est pas du tout que les machines vont remplacer les humains : mais c’est que l’ « on fait des humains des machines » !