• Vladimir Poutine accorde la nationalité russe au lanceur d’alerte Edward Snowden
    https://www.rts.ch/info/monde/13417099-vladimir-poutine-accorde-la-nationalite-russe-au-lanceur-dalerte-edward

    Le président Vladimir Poutine a accordé la nationalité russe au lanceur d’alerte et ancien employé de la NSA américaine Edward Snowden, réfugié en Russie depuis 2013 après avoir quitté les Etats-Unis, selon un décret publié lundi.

    Edward Snowden, 39 ans, est recherché par les Etats-Unis pour avoir transmis à la presse des dizaines de milliers de documents de l’Agence nationale de sécurité américaine (NSA) prouvant l’ampleur de la surveillance électronique exercée par Washington.

    Ces révélations avaient alors suscité de très fortes tensions entre les Etats-Unis et leurs alliés et la décision des autorités russes de lui accorder un permis de séjour avait provoqué la colère de Washington.

    Pas concerné par la mobilisation
    Le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov a précisé à l’agence Ria Novosti que la nationalité russe avait été accordée à Edward Snowden à sa propre demande.

    L’avocat russe du lanceur d’alerte, Anatoli Koutcherena, a pour sa part précisé qu’Edward Snowden ne serait pas concerné par l’ordre de mobilisation pour l’offensive en Ukraine, décrété par Vladimir Poutine la semaine dernière pour certaines catégories de Russes.

    « Il n’a pas servi dans l’armée russe et par conséquent, selon notre législation actuelle, il n’entre pas dans cette catégorie de citoyens qui sont maintenant appelés », a-t-il déclaré à l’agence Ria Novosti.

    Selon lui, la compagne d’Edward Snowden, Lindsay Mills, a également demandé à recevoir la nationalité russe et leur fille la possède déjà, étant née en Russie.

    En Russie depuis 2013
    Edward Snowden, privé de son passeport américain sur demande de Washington, s’était retrouvé à Moscou en mai 2013 après y être arrivé depuis Hong Kong et dans l’intention de trouver refuge en Amérique latine. Il s’était finalement retrouvé bloqué en Russie, où il a obtenu l’asile.

    Les autorités américaines ont tenté depuis plusieurs années d’obtenir son extradition pour le juger pour espionnage.

    #Russie #snowden #surveillance #nsa #prism #internet #edward_snowden #vie_privée #wikileaks #censure #journalisme #etats-unis #privacy #Vladimir_Poutine #information

  • Bleu, S3ns : pourquoi les offres Cloud de confiance seront certainement soumises au Cloud Act ETX Studio - La Tribune
    https://www.latribune.fr/technos-medias/internet/bleu-s3ns-pourquoi-les-offres-cloud-de-confiance-seront-certainement-soumi

    Une étude commandée à un cabinet d’avocats américain par le ministère de la Justice des Pays-Bas sur le Cloud Act, conclut que les entités européennes peuvent êtres soumises à cette loi extraterritoriale même si leur siège social n’est pas aux Etats-Unis. Elle précise même que le Cloud Act s’applique aussi quand un fournisseur de cloud européen utilise du hardware ou un logiciel américain, ce qui est le principe même des futures offres de « Cloud de confiance » Bleu (les technologies de Microsoft proposées par Orange et Capgemini) et S3ns (celles de Google avec Thales). L’étude, dont les analyses sont validées par plusieurs experts du droit du numérique consultés par La Tribune, contredit donc la communication du gouvernement français ainsi que celles de Bleu et de S3ns. Elle pointe surtout un risque pour les opérateurs d’importance vitale (OIV), les opérateurs de services essentiels (OSE) et les administrations invités à souscrire sans attendre à ces offres.

    Nouvelle claque pour le gouvernement français et sa stratégie très controversée de « Cloud de confiance ». Suffit-il de posséder un siège social en France ou en Europe et de couper tout lien capitalistique avec les Etats-Unis pour être protégé contre le Cloud Act, même en vendant une offre basée sur des technologies américaines ? Non, tranche une étude réalisée par le bureau européen du cabinet d’avocats américain Greenberg Traurig LLP, https://www.ncsc.nl/documenten/publicaties/2022/augustus/16/cloud-act-memo pour le compte du ministère de la Justice et de la Sécurité des Pays-Bas, et rendue publique le 26 juillet dernier.

    Le gouvernement néerlandais souhaitait savoir si le Cloud Act, une législation extra-territoriale adoptée en 2018 pour légaliser la collecte de données à l’étranger au nom de la protection des Etats-Unis, s’appliquait seulement aux entités américaines présentes en Europe, comme on le présente souvent, ou s’il pouvait oui ou non aussi toucher les entreprises 100% européennes, c’est-à-dire dont le siège social est situé dans l’Union européenne.

    Le Cloud Act peut s’appliquer aux entreprises qui vendent des logiciels américains
    La réponse du cabinet américain Greenberg Trauring LTT -qu’on ne peut accuser de servir un agenda pro-européen- est très claire :  « Les entités européennes peuvent être à la portée du Cloud Act, même si [elles] sont situées en dehors les Etats Unis » , tranche le document en première page. https://www.ncsc.nl/documenten/publicaties/2022/augustus/16/cloud-act-memo

    Les avocats précisent toutefois qu’il est possible pour les entreprises européennes de minimiser ce risque en établissant une « muraille de Chine » avec les Etats-Unis, notamment en n’employant aucun Américain ou n’avoir aucun client américain. Ceux-ci peuvent être des chevaux de Troie pouvant justifier une intervention au titre du Cloud Act.

    Mais d’après les auteurs de l’étude, même ce bouclier anti-Cloud Act est insuffisant si l’entité utilise des technologies américaines. « Le Cloud Act peut accéder aux données via des sous-traitants/fournisseurs de matériel et de logiciels, de/vers les fournisseurs de cloud » , affirme le rapport.

    Or, ce sera précisément le mode de fonctionnement de Bleu, coentreprise entre Orange et Capgemini, et de S3ns, détenue par Thales. Bleu commercialisera sous licence les offres cloud logicielles de Microsoft Azure (notamment la suite Office 365), tandis que S3ns proposera celles de Google Cloud. Ces deux offres se présentent comme souveraines : elles affirment qu’elles seront étanches au Cloud Act américain car le service sera hébergé par des datacenters situés en France, et sera commercialisé par une entreprise de droit français, coupé de tout lien capitalistique avec les Etats-Unis.

    Ces précautions, accompagnées d’autres mesures de sécurité, sont effectivement suffisantes pour la plupart des entreprises. Mais probablement pas pour Bleu et S3ns, car Microsoft et Google sont pour elles des fournisseurs de logiciels dont elles commercialisent les services. Contacté par La Tribune, le cabinet Greenberg Trauring LTT confirme également qu’il suffit, d’après lui, de vendre des logiciels américains, même si l’entreprise est française, pour tomber sous le coup du Cloud Act.

    Cette déduction apparaît logique : dans l’économie numérique, l’hébergement des données n’est qu’une commodité. La valeur réside dans l’infrastructure logicielle qui fait tourner les clouds, ainsi que dans les logiciels qui utilisent les données. Pour justifier l’application du Cloud Act à une entité étrangère comme Bleu ou S3ns, les Etats-Unis doivent montrer que celle-ci a « suffisamment de contacts avec les Etats-Unis » , et pour de nombreux experts juridiques, la commercialisation de technologies américaines sous licence leur offre une raison suffisante.

    Une « muraille de Chine » en théorie possible mais extrêmement complexe et coûteuse
    Le gouvernement français n’ayant pas demandé ou rendu publique une étude approfondie sur la portée réelle du Cloud Act sur les futures solutions « Cloud de confiance », les conclusions du rapport de Greenberg Trauring doivent être prises avec des pincettes.

    La Tribune a donc demandé à d’autres avocats experts du droit du numérique, d’analyser la portée du Cloud Act sur les offres Cloud de confiance.  « La seule voie possible pour Bleu et S3ns, c’est de cloisonner l’offre de telle façon à ce qu’il y ait pas d’accès possible à une personne sous juridiction américaine », explique Olivier Iteanu, avocat spécialiste du droit du numérique. « Cela signifie qu’il ne peut pas y avoir de clients américains et surtout, pas un seul employé américain dans la structure, sinon le Cloud Act s’applique », met-il en garde.

    L’avocat rappelle la genèse du Cloud Act, après le scandale Snowden en 2013 qui a révélé au monde l’ampleur de la surveillance de masse opérée par les services de renseignement américains, au nom de leur souveraineté nationale.  « Les Etats-Unis ont besoin de légaliser les pratiques de surveillance de masse, de façon à ne pas soumettre les entreprises et les personnes qui coopèrent avec eux, à des actions judiciaires a posteriori. Ils ont donc prévu un très large éventail d’actions pour le Cloud Act. Il est mensonger de dire qu’il ne s’applique qu’aux entreprises américaines à l’étranger et pas aux entreprises locales ».

    Sonia Cissé, avocate associée en droit des technologies au sein du cabinet Linklaters, affirme « partager l’analyse du cabinet Greenberg Trauring » sur le fait que « les offres Cloud de confiance peuvent être soumises au Cloud Act ». Elle insiste elle-aussi sur la nécessité d’ériger une « muraille de Chine » pour se protéger au maximum des possibles intrusions américaines.

    « En plus d’empêcher tout Américain, y compris pour du support technique ou de la sauvegarde de données, d’accéder à la plateforme, il faudra mettre en place une totale ségrégation des données. Cela nécessite un cumul de mesures très lourdes, complexes et extrêmement coûteuses : c’est une muraille de Chine technique et organisationnelle, impliquant la gouvernance même des structures ainsi que les ressources humaines et la communication entre entités, qu’il faudra mettre en place et surveiller en permanence », décline-t-elle, tout en pointant les « nombreuses zones de flou » qui demeurent encore du côté de l’organisation de Bleu et de S3ns.

    Backdoors et loi FISA, les autres gros risques des offres « Cloud de confiance »
    Si le gouvernement, Bleu et S3ns se sont montrés très légers en affirmant avant même la création des offres Cloud de confiance qu’elles seront labellisées par l’Anssi -ce qui n’est pas garanti- et immunes au Cloud Act en dépit d’une analyse juridique approfondie, que dire des deux autres éléphants dans la pièce eux aussi magistralement ignorés : le risque accru de backdoors -logiciels espions infiltrés dans le code-, et celui d’une autre loi extraterritoriale américaine, FISA.

    Ainsi, FISA -pour Foreign Intelligence Surveillance Act - s’applique uniquement aux citoyens étrangers. Cette loi permet aux agences de renseignement américaines de demander aux fournisseurs de cloud l’installation de dispositifs permanents qui permettent de scanner toutes les données qu’ils gèrent en dehors des Etats-Unis. Cette surveillance peut se faire avec du matériel d’inspection des paquets en profondeur (DPI), ou de manière invisible au niveau de l’infrastructure logicielle du cloud, c’est-à-dire en utilisant les fournisseurs de la technologie. Or, Bleu et S3ns devraient ne pas avoir accès au code source des logiciels de Microsoft et de Google, qui sont leur secret industriel le plus précieux. Et même s’ils y avaient accès, encore faudrait-il qu’ils repèrent la porte dérobée imposée par les services de renseignement.

    Ces portes dérobées, ou backdoors, peuvent aussi être illégales. C’est l’autre gros risque, pour les données des opérateurs d’importance vitale, d’utiliser des services étrangers. Or, les logiciels de Microsoft et de Google sont bien connus des services américains de renseignement, et il est certainement plus facile pour eux d’entrer dans un logiciel américain qu’ils connaissent que dans une autre solution bénéficiant des plus hauts niveaux de sécurité.

    #extraterritorialité #Backdoors #surveillance #vie_privée #donnée_personnelles #nsa #bigdata #FISA #cloud #Bleu #S3ns #Cloud_Act #Logiciels #Microsoft #Orange #Capgemini #OIV #OSE

  • Il s’est battu infatigablement pour la vérité et la liberté de la publier – Désormais, nous devons lutter pour le sauver | Karen Sharpe

    Je parle, naturellement, de Julian Assange, le fondateur et éditeur de WikiLeaks, qui se languit pour l’instant dans une prison de haute sécurité à Londres en attendant une décision qui déterminera s’il va être extradé vers les États-Unis pour finalement passer le reste de ses jours dans une prison de type « supermax » sans plus jamais avoir la possibilité de se faire entendre.

    https://www.investigaction.net/fr/il-sest-battu-infatigablement-pour-la-verite-et-la-liberte-de-la-pub
    #Assange

  • Interdiction de l’accès des femmes aux tavernes au Québec, jusque 1984
    https://fr.wikipedia.org/wiki/Acc%C3%A8s_des_femmes_aux_tavernes_au_Qu%C3%A9bec

    À la fin des années 1960, des mouvements féministes radicaux[1],[2] revendiquent l’égalité pour tous et partout. Des actions d’éclat[3] sont organisées dont l’assaut des tavernes réservées exclusivement aux hommes, depuis une loi de 1937[4]. La résistance antiféministe est cependant très forte [5]et ce n’est qu’en 1986 que toutes les tavernes sont obligées de se conformer à la loi et ouvrir leurs portes aux femmes.

    Contexte historique
    Au début de la colonie, les hôtels et les auberges sont des endroits publics où les femmes et les hommes majeurs peuvent consommer de l’alcool[6]. À l’époque de la prohibition aux États-Unis, qui s’étend au Canada, le Québec vote, en 1921, une loi sur les liqueurs alcooliques[7] et crée le premier organisme de contrôle au Canada : la Commission des liqueurs du Québec[8] (ancêtre de la Société des Alcools du Québec). Cette loi institutionnalise aussi l’existence légale des tavernes[9]. Le permis octroyé stipule que : "Nul autre débit de boisson n’est autorisé à vendre, sur place, de la bière en fût," destinée à une vente rapide[10]. La taverne offre aux classes ouvrières, dans le contexte de l’industrialisation rapide des grandes villes, un lieu de socialisation et un pendant aux clubs privés bourgeois[11]. Les femmes fréquentent aussi les tavernes à cette époque. Toutefois, la moralité publique décrie de plus en plus les lieux comme une menaces aux bonnes mœurs [12] et à l’ordre social. En 1937, cédant aux pression des organisations sociales et religieuses, pour la tempérance [13] et la protection des mœurs, le gouvernement de Maurice Duplessis vote une loi qui en interdit l’accès aux femmes[14]. On les accuse même d’être la cause du désordre[15], fréquent dans ces établissements. Les femmes, sauf celle du tavernier, se voient aussi refuser le droit d’y travailler [16] . Les tavernes sont donc devenues un espace homosocial populaire, culturel et "un lieu de résistance" pour les ouvriers [17] .

    L’égalité pour tous et partout
    Depuis la fin du XIXe siècle les femmes revendiquent leurs droits à l’égalité dans tous les domaines et dans tous les lieux publics. Dans les années 1960, les mobilisations féminines s’accentuent. De nombreuses lois à caractère sexiste, ou limitant l’action des femmes, sont ciblées. Les mouvements féministes se radicalisent et deviennent un outil de prise de conscience féministe [18] . De grands rassemblements et des actions chocs ont lieu pour contester l’attitude des politiciens, des syndicats et de la société en général afin d’ accélérer la libération et l’égalité des femmes.

    À l’assaut des tavernes
    Une opération féministe, « drink-in », est donc mise en place, par des étudiantes de l’Université de Montréal et vise l’occupation d’une taverne sur la rue St-Laurent à Montréal. Elles justifient la contestation en ces termes : « Nous, des femmes québécoises, nous allons à la taverne manifester notre colère. Nous sommes “tannées” d’un petit salaire accompagné d’un gros prix pour un repas ou une bière. Ou encore d’être obligées de rester “au foyer” neuf fois sur dix. Nous nous élevons contre ces sanctuaires de la domination masculine, desquels les chiens, les enfants et les femmes sont exclus »[19]. C’est le 23 janvier 1969 que des femmes envahissent la Taverne Le Gobelet[20], pour s’opposer à la loi sexiste interdisant aux femmes d’y entrer et d’y consommer de la bière en fût. Elles sont semoncées et expulsées par la police. Cette manifestation a permis de porter une attention médiatique [21], sur un problème flagrant d’inégalité envers les femmes, dont les politiciens ont pris acte.

    Afin d’éliminer un des éléments discriminatoires, décrié par les féministes, le projet de loi 44 crée les brasseries, qui sont ouvertes à tous, et modifie en conséquence la Loi de la régie des alcools (1971). Un nouveau type de permis permet aux brasseries de servir de la bière en fût "mais sans que soit supprimé l’exclusivité masculine dans les tavernes"[22]. Ainsi, plutôt que d’éliminer le sexisme dans les tavernes, les législateurs choisissent de donner du temps à la tradition et de favoriser une lente transition « pour ne pas créer de bouleversement non seulement dans les traditions établies, mais également dans les investissements de ceux qui sont propriétaires de tavernes »[23].

    La fin de la discrimination dans les tavernes
    Les tavernes ont maintenant le choix ou non de se transformer en brasserie[24]. À Montréal, Le Gobelet est une des premières taverne à se convertir en brasserie, en décembre 1971[25]. Cependant la confusion règne entre les types de permis et les femmes continuent à se faire expulser des tavernes ou des brasseries ayant un permis de taverne[26]. En 1975, l’Assemblée Nationale vote à l’unanimité la Charte québécoise des droits et libertés de la personne. Les législateurs doivent réviser toutes les lois sexistes et agir pour se mettre en conformité avec la Charte. C’est donc dans cet état d’esprit, qu’en 1979, le gouvernement présente le projet de loi 55 modifiant les permis des tavernes pour éliminer définitivement tout interdit basé sur le sexe[27]. Les nouvelles tavernes doivent donc se conformer à la loi et accueillir les femmes. Toutefois la loi , par une clause d’antériorité, permet aux tavernes existantes, avant 1979, de se soumettre ou non aux exigences en matière de sexisme [27]. Certaines tavernes modifient leurs permis, mais plusieurs irréductibles contestent la loi. La discrimination continue pendant plusieurs années et le problème devient épineux, notamment en 1981, lors de débats électoraux qui ont lieu dans des tavernes. Comme les femmes candidates, ne peuvent entrer dans les tavernes, elles sont privées ainsi de l’accès à une partie de l’électorat masculin[28]. En 1986, la discrimination sur le sexe est définitivement abolie dans tous les lieux publics, incluant les tavernes[29]. Malgré cela plusieurs établissements ne se conforment toujours pas à la loi [30] et demeurent des « piliers de tavernes ». Cela prendra jusqu’à trois ans pour tourner définitivement la page sur cette discrimination que les femmes ont subie pendant un demi siècle[31].
    . . . . . .
    #Femmes #prohibition #sexisme #interdiction #Canada #Quebec #Brasseries #discrimination #mentalité #bourgeoisie #religion #catholicisme

  • Les États-Unis mettent hors service une société israélienne de logiciels d’espionnage Moon of Alabama
    https://www.moonofalabama.org/2021/07/us-takes-down-israeli-spy-software-company.html#more
    https://lesakerfrancophone.fr/les-etats-unis-mettent-hors-service-une-societe-israelienne-de-lo

    Un certain nombre de journaux, dans le monde entier, parlent aujourd’hui https://www.theguardian.com/world/2021/jul/18/revealed-leak-uncovers-global-abuse-of-cyber-surveillance-weapon-nso-gr de la société de piratage israélienne NSO qui vend des logiciels d’espionnage [nommés Pegasus, NdT] à divers régimes. Ce logiciel est ensuite utilisé pour espionner les téléphones des ennemis du régime, des adversaires politiques ou des journalistes qui déplaisent. Tout cela était déjà bien connu, mais l’histoire a pris un nouvel essor puisque plusieurs centaines de personnes qui sont espionnées peuvent maintenant être nommées.

    La façon dont cela s’est produit est intéressante https://www.washingtonpost.com/gdpr-consent/?next_url=https%3a%2f%2fwww.washingtonpost.com%2finvestigations%2fin :

    Les téléphones sont apparus sur une liste de plus de 50 000 numéros concentrés dans des pays connus pour surveiller leurs citoyens et également connus pour avoir été clients de la société israélienne NSO Group, un leader mondial dans le secteur, en pleine expansion et largement non réglementé, des logiciels d’espionnage privés, selon l’enquête.

    La liste ne permet pas de savoir qui y a inscrit les numéros, ni pourquoi, et on ignore combien de téléphones ont été ciblés ou surveillés. Mais l’analyse technique de 37 smartphones montre que beaucoup d’entre eux présentent une corrélation étroite entre les horodatages associés à un numéro de la liste et le déclenchement de la surveillance, dans certains cas aussi brève que quelques secondes.

    Forbidden Stories, une organisation de journalisme à but non lucratif basée à Paris, et Amnesty International, une organisation de défense des droits de l’homme, ont eu accès à cette liste et l’ont partagée avec certains journaux, qui ont effectué des recherches et des analyses supplémentaires. Le Security Lab d’Amnesty International a effectué les analyses techniques des smartphones.

    Les chiffres figurant sur la liste ne sont pas attribués, mais les journalistes ont pu identifier plus de 1 000 personnes dans plus de 50 pays grâce à des recherches et des entretiens sur quatre continents.

    Qui aurait pu dresser une telle liste pour la donner à Amnesty et à Forbidden Stories ?

    NSO est l’une des sociétés israéliennes utilisées pour mettre sur le marché le travail de l’unité de renseignement militaire israélienne, 8200. Les « anciens » membres de 8200 sont employés par NSO pour produire des outils d’espionnage qui sont ensuite vendus à des gouvernements étrangers. Le prix de la licence est de 7 à 8 millions de dollars pour 50 téléphones à espionner. C’est une affaire louche mais lucrative pour cette société et pour l’État d’Israël.

    NSO nie les allégations selon lesquelles son logiciel est utilisé pour des objectifs malsains en racontant beaucoup de conneries https://www.nsogroup.com/Newses/following-the-publication-of-the-recent-article-by-forbidden-stories-we-wa :

    Le rapport de Forbidden Stories est rempli d’hypothèses erronées et de théories non corroborées qui soulèvent de sérieux doutes sur la fiabilité et les intérêts de leurs sources. Il semble que ces "sources non identifiées" aient fourni des informations qui n’ont aucune base factuelle et sont loin de la réalité.

    Après avoir vérifié leurs affirmations, nous démentons fermement les fausses allégations faites dans leur rapport. Leurs sources leur ont fourni des informations qui n’ont aucune base factuelle, comme le montre l’absence de documentation à l’appui de nombre de leurs affirmations. En fait, ces allégations sont tellement scandaleuses et éloignées de la réalité que NSO envisage de porter plainte pour diffamation.

    Les rapports affirment, par exemple, que le gouvernement indien du Premier ministre Narendra Modi a utilisé le logiciel de NSO pour espionner https://thewire.in/government/rahul-gandhi-pegasus-spyware-target-2019-polls le chef du parti d’opposition, Rahul Gandhi.

    Comment NSO pourrait-elle nier cette allégation ? Elle ne le peut pas.

    Plus loin dans la déclaration de NSO, la société se contredit https://www.nsogroup.com/Newses/following-the-publication-of-the-recent-article-by-forbidden-stories-we-wa sur ces questions :

    Comme NSO l’a déclaré précédemment, notre technologie n’a été associée en aucune façon au meurtre odieux de Jamal Khashoggi. Nous pouvons confirmer que notre technologie n’a pas été utilisée pour écouter, surveiller, suivre ou collecter des informations le concernant ou concernant les membres de sa famille mentionnés dans l’enquête. Nous avons déjà enquêté sur cette allégation, qui, une fois encore, est faite sans validation.

    Nous tenons à souligner que NSO vend ses technologies uniquement aux services de police et aux agences de renseignement de gouvernements contrôlés dans le seul but de sauver des vies en prévenant la criminalité et les actes terroristes. NSO n’exploite pas le système et n’a aucune visibilité sur les données.

    Comment NSO peut-elle nier que le gouvernement saoudien, l’un de ses clients reconnus, a utilisé son logiciel pour espionner Jamal Khashoggi, puis l’assassiner, en disant qu’il « n’exploite pas le système » et « n’a aucune visibilité sur les données » ?

    Vous ne pouvez pas prétendre à la fois a. recueillir des informations et b. n’avoir aucun moyen de les recueillir.

    Mais revenons à la vraie question :
    • Qui a la capacité de dresser une liste de 50 000 numéros de téléphone dont au moins 1 000 ont été espionnés avec le logiciel de NSO ?
    • Qui peut faire « fuiter » une telle liste à ONG et s’assurer que de nombreux médias « occidentaux » s’en emparent ?
    • Qui a intérêt à faire fermer NSO ou du moins à rendre ses activités plus difficiles ?

    La concurrence, je dirais. Et le seul véritable concurrent dans ce domaine est l’Agence nationale de sécurité [la NSA, NdT] étatsunienne.

    Les États-Unis utilisent souvent le « renseignement » comme une sorte de monnaie diplomatique pour maintenir les autres pays dans une situation de dépendance. Si les Saoudiens sont obligés de demander aux États-Unis d’espionner quelqu’un, il est beaucoup plus facile d’avoir de l’influence sur eux. Le NSO gêne cette activité. Il y a aussi le problème que ce logiciel d’espionnage de première classe que NSO vend à des clients un peu louches pourrait bien tomber entre les mains d’un adversaire des États-Unis.

    La « fuite » à Amnesty et Forbidden Stories est donc un moyen de conserver un certain contrôle monopolistique sur les régimes clients et sur les technologies d’espionnage. (Les Panama Papers étaient un type similaire de « fuite » parrainée par les États-Unis, mais dans le domaine financier).

    Edward Snowden, qui était autrefois un partisan convaincu de la NSA mais qui en a divulgué des documents parce qu’il voulait qu’elle respecte la loi, soutient cette campagne :

    Edward Snowden @Snowden - 16:28 UTC - 18 juil. 2021 https://twitter.com/Snowden/status/1416797153524174854

    Arrêtez ce que vous êtes en train de faire et lisez ceci. Cette fuite va être l’histoire de l’année : https://www.theguardian.com/world/2021/jul/18/revealed-leak-uncovers-global-abuse-of-cyber-surveillance-weapon-nso-gr

    Edward Snowden @Snowden - 15:23 UTC - 19 juil. 2021 https://twitter.com/Snowden/status/1417143168752095239

    Il y a certaines industries, certains secteurs, contre lesquels il n’y a aucune protection. Nous n’autorisons pas un marché commercial pour les armes nucléaires. Si vous voulez vous protéger, vous devez changer la donne, et la façon dont nous le faisons est de mettre fin à ce commerce.
    Guardian : Edward Snowden demande l’interdiction du commerce de logiciels espions dans le cadre des révélations sur Pegasus https://www.theguardian.com/news/2021/jul/19/edward-snowden-calls-spyware-trade-ban-pegasus-revelations

    Edward Snowden semble vouloir dire https://www.theguardian.com/news/2021/jul/19/edward-snowden-calls-spyware-trade-ban-pegasus-revelations que NSO, qui ne vend ses logiciels qu’aux gouvernements, devrait cesser de le faire mais que la NSA devrait continuer à utiliser cet instrument d’espionnage :

    Dans une interview accordée au Guardian, M. Snowden a déclaré que les conclusions du consortium illustraient la manière dont les logiciels malveillants commerciaux avaient permis aux régimes répressifs de placer beaucoup plus de personnes sous une surveillance invasive.

    L’opinion de Snowden à ce sujet est plutôt étrange :
    chinahand @chinahand - 17:28 UTC - 19 juil. 2021 https://twitter.com/chinahand/status/1417174487678656527

    Fascinant de voir comment M."La surveillance étatique américaine est la plus grande menace pour l’humanité" s’énerve sur le fait qu’un peu de surveillance étatique est apparemment externalisée à un entrepreneur privé par des acteurs étatiques de niveau moyen et bas.

    Edward Snowden @Snowden - 17:06 UTC - 19 juil. 2021 https://twitter.com/Snowden/status/1417168921472405504

    Lisez les articles sur les fonctionnaires de Biden, Trump et Obama qui ont accepté de l’argent du groupe NSO pour enterrer toute responsabilité, même après leur implication dans la mort et la détention de journalistes et de défenseurs des droits dans le monde entier !
    WaPo : Comment les assoiffés de pouvoir de Washington ont profité des ambitions de NSO en matière d’espionnage https://www.washingtonpost.com/gdpr-consent/?next_url=https%3a%2f%2fwww.washingtonpost.com%2ftechnology%2f2021%2

    Le tumulte créé dans les médias par les révélations concernant NSO a déjà eu l’effet escompté https://www.vice.com/en/article/xgx5bw/amazon-aws-shuts-down-nso-group-infrastructure :

    Amazon Web Services (AWS) a fermé l’infrastructure et les comptes liés au fournisseur israélien de logiciels de surveillance NSO Group, a déclaré Amazon dans un communiqué.

    Cette mesure intervient alors que des médias et des organisations militantes ont publié de nouvelles recherches sur les logiciels malveillants de NSO et les numéros de téléphone potentiellement sélectionnés pour être ciblés par les gouvernements clients de NSO.

    "Lorsque nous avons appris cette activité, nous avons agi rapidement pour fermer l’infrastructure et les comptes concernés", a déclaré, dans un courriel, un porte-parole d’AWS à Motherboard.
    Cela fait des années qu’AWS est au courant des activités de NSO. NSO a utilisé CloudFront, un réseau de diffusion de contenu appartenant à Amazon :

    L’infrastructure de CloudFront a été utilisée pour déployer les logiciels malveillants de NSO contre des cibles, notamment sur le téléphone d’un avocat français spécialisé dans les droits de l’homme, selon le rapport d’Amnesty. Le passage à CloudFront protège aussi quelque peu NSO contre des enquêteurs ou d’autres tiers qui tenteraient de découvrir l’infrastructure de l’entreprise.

    "L’utilisation de services en nuage protège NSO Group de certaines techniques de balayage d’Internet", ajoute le rapport d’Amnesty.

    Cette protection n’est plus valable. NSO aura bien du mal à remplacer un service aussi pratique.

    Israël s’en plaindra, mais il me semble que les États-Unis ont décidé de faire fermer NSO.

    Pour vous et moi, cela ne réduira que marginalement le risque d’être espionné.
    Moon of Alabama
    Traduit par Wayan, relu par Hervé, pour le Saker Francophone

    #nso #NSA #israel #Amnesty #police #agences_de_renseignement #Edward_Snowden #CloudFront #surveillance #pegasus #spyware #écoutes #smartphone #journalisme #hacking #sécuritaire #espionnage #géolocalisation #jamal_khashoggi #Forbidden_Stories #Amazon #Amazon_Web_Services #AWS
    #USA #CloudFront

    • La firme derrière Pegasus est liée au Luxembourg
      http://www.lessentiel.lu/fr/luxembourg/story/la-firme-derriere-pegasus-est-liee-au-luxembourg-15258218

      Jean Asselborn, ministre des Affaires étrangères, a confirmé l’existence au Luxembourg de deux bureaux de la firme israélienne NSO Group, qui a conçu le logiciel Pegasus, accusé d’avoir été utilisé par plusieurs États pour espionner les téléphones de journalistes et de dissidents.

      Selon le ministre, les bureaux luxembourgeois servent au back office, c’est-à-dire au contrôle des opérations financières de l’entreprise. Un communiqué de l’entreprise datant de 2019 précise que le siège social se trouve au Luxembourg. « NSO développe des technologies qui aident les services de renseignements et les agences étatiques à prévenir et enquêter sur le terrorisme et le crime », indique l’entreprise, dans sa présentation. Il serait même « un leader mondial » en la matière, générant « 250 millions de dollars de revenus en 2018 ». NSO affirme aussi s’être passé de clients à cause d’un non-respect des droits de l’homme.

      Un tour politique
      Mais la nature des activités au Grand-Duché reste floue. D’après Amnesty International, le logiciel Pegasus n’a pas été conçu au Grand-Duché. Aucune demande d’exportation de produit n’a d’ailleurs été formulée. « Je ne peux dire qu’une chose. S’il s’avère que le groupe NSO au Luxembourg a commis des violations des droits de l’homme, alors le Luxembourg doit réagir et réagira », a déclaré Asselborn. Ce dernier a envoyé une lettre aux dirigeants concernés pour rappeler les obligations en matière de droits de l’homme.

      Le sujet n’a pas encore été évoqué en commission des Affaires étrangères à la Chambre, expliquent des députés concernés. L’affaire a cependant vite pris un tour politique, avec d’abord une question parlementaire urgente du parti Pirates, sommant le gouvernement d’indiquer si des journalistes, politiciens ou militants au Luxembourg sont concernés par le scandale d’espionnage et quels sont les liens entre NSO et le Grand-Duché. Le parti déi Lénk demande aux autorités de réagir, bien au-delà du « Pacte national entreprises et droits de l’homme », avec une « loi opposable et munie des moyens financiers et personnels permettant d’intervenir pour mettre fin au mépris envers les droits humains ».

    • Hilarants ces politiques et ces journalistes choqués par leur surveillance !

      On n’a pas arrêté, ces dernières années, d’étendre toujours plus la surveillance du citoyen, depuis l’extension des caméras de surveillance partout sur le territoire jusqu’à la reconnaissance faciale qui ne cesse de progresser, y compris en France, jamais en retard d’une idée pour nous pister, nous surveiller, nous fliquer.

      Une surveillance active, intrusive, poussée, de plus en plus vicelarde, de certaines cibles aisément identifiées par ceux qui sont pouvoir, pour le profit personnel des politiciens et de leurs amis.

      Pour elles et eux, les drones qui seront sans nul doute utilisés pour mieux canaliser les mouvements de foule, les manifestations, pas de problème.
      Pour elles et eux, la loi européenne « ePrivacy » qui instaure de manière dérogatoire une surveillance automatisée de masse des échanges numériques sur internet en Europe, pas de problème.
      Le smartphone obligatoire, pas de problème.

      Ne parlons pas des données sur nos enfants, envoyées directement chez microsoft, education nationale, santé . . .
      Ne parlons pas non plus de toutes les informations possibles et imaginables que les gafam nous volent, de façon de plus en plus vicieuse.

      Pegasus, ePrivacy, pass sanitaire, la société qui se dessine ces dernières semaines devient véritablement cauchemardesque.
      Bon, d’après Edward Snowden la NSA n’aimait pas la concurrence pour ce qui est de nous espionner, et Julian Assange est toujours en prison, en Angleterre, sans aucun motif.

      Pour le reste, l’essentiel, c’est de monter à dessein les habitants de ce pays les uns contre les autres, et c’est une réussite.

  • Julian Assange et l’effondrement de l’État de droit Chris Hedges

    Chris Hedges a prononcé cette allocution lors d’un rassemblement jeudi 10 juin au soir à New York en soutien à Julian Assange. John et Gabriel Shipton, le père et le frère de Julian, ont également pris la parole lors de l’événement, qui s’est tenu au People’s Forum.

    Une société qui interdit la capacité de dire la vérité éteint la capacité de vivre dans la justice.
    C’est pourquoi nous sommes ici ce soir. Oui, nous tous qui connaissons et admirons Julian décrions ses souffrances prolongées et les souffrances de sa famille. Oui, nous exigeons que les nombreux torts et injustices qui lui ont été infligés prennent fin. Oui, nous l’honorons pour son courage et son intégrité. Mais la bataille pour la liberté de Julian a toujours été bien plus que la persécution d’un éditeur. C’est la bataille la plus importante de notre époque pour la liberté de la presse. Et si nous perdons cette bataille, ce sera dévastateur, non seulement pour Julian et sa famille, mais pour nous tous.

    Les tyrannies renversent l’état de droit. Elles font de la loi un instrument d’injustice. Elles dissimulent leurs crimes derrière une fausse légalité. Elles utilisent le décorum des tribunaux et des procès, pour masquer leur criminalité. Ceux, comme Julian, qui exposent cette criminalité au public sont dangereux, car sans prétexte de légitimité, la tyrannie perd de sa crédibilité et n’a plus dans son arsenal que la peur, la coercition et la violence.

    La longue campagne contre Julian et WikiLeaks est une fenêtre sur l’effondrement de l’État de droit, la montée de ce que le philosophe politique Sheldon Wolin appelle notre système de totalitarisme inversé, une forme de totalitarisme qui entretient les fictions de l’ancienne démocratie capitaliste, y compris ses institutions, son iconographie, ses symboles patriotiques et sa rhétorique, mais a cédé en interne le contrôle total aux diktats des entreprises mondiales.

    J’étais dans la salle d’audience de Londres lorsque Julian était jugé par la juge Vanessa Baraitser, une version mise à jour de la reine de cœur d’ Alice au pays des merveilles exigeant la peine avant de prononcer le verdict. C’était une farce judiciaire. Il n’y avait aucune base légale pour détenir Julian en prison. Il n’y avait aucune base légale pour le juger, un citoyen australien, en vertu de la loi américaine sur l’espionnage. La CIA a espionné Julian à l’ambassade par l’intermédiaire d’une société espagnole, UC Global, chargée d’assurer la sécurité de l’ambassade. Cet espionnage comprenait l’enregistrement des conversations privilégiées entre Julian et ses avocats alors qu’ils discutaient de sa défense. Ce seul fait invalidait le procès. Julian est détenu dans une prison de haute sécurité afin que l’État puisse, comme l’a témoigné Nils Melzer, le rapporteur spécial des Nations Unies sur la torture, continuer les abus dégradants et la torture qui, espère-t-il, mèneront à sa désintégration psychologique, voire physique.

    Le gouvernement américain a dirigé, comme Craig Murray l’a si éloquemment documenté, le procureur de Londres James Lewis. Lewis a présenté ces directives à Baraitser. Baraitser les a adoptés comme sa décision légale. C’était de la pantomime judiciaire. Lewis et le juge ont insisté sur le fait qu’ils n’essayaient pas de criminaliser les journalistes et de museler la presse alors qu’ils s’affairent à mettre en place le cadre juridique pour criminaliser les journalistes et museler la presse. Et c’est pourquoi le tribunal a travaillé si dur pour masquer la procédure au public, limitant l’accès à la salle d’audience à une poignée d’observateurs et rendant difficile et parfois impossible l’accès au procès en ligne. C’était un procès-spectacle vulgaire, pas un exemple du meilleur de la jurisprudence anglaise mais de la Loubianka.

    Maintenant, je sais que beaucoup d’entre nous ici ce soir aimeraient se considérer comme des radicaux, peut-être même des révolutionnaires. Mais ce que nous exigeons de l’échiquier politique est en fait conservateur : c’est le rétablissement de l’État de droit. C’est simple et basique. Ça ne devrait pas, dans une démocratie qui fonctionne, être incendiaire. Mais vivre pour la vérité dans un système despotique est l’acte suprême de défi. Cette vérité terrifie ceux qui sont au pouvoir.

    Les architectes de l’impérialisme, les maîtres de la guerre, les pouvoirs législatif, judiciaire et exécutif contrôlés par les entreprises et leurs courtisans obséquieux dans les médias, sont illégitimes. Dites cette simple vérité et vous êtes banni, comme beaucoup d’entre nous l’ont été, et jeté en marge du paysage médiatique. Prouvez cette vérité, comme Julian, Chelsea Manning, Jeremy Hammond et Edward Snowden l’ont fait en nous permettant de scruter le fonctionnement interne du pouvoir, et vous êtes pourchassé et persécuté.

    Peu de temps après que WikiLeaks a publié les journaux de guerre d’Irak en octobre 2010, qui ont documenté de nombreux crimes de guerre américains —y compris des images vidéo du meurtre de deux journalistes de Reuters et de 10 autres civils non armés dans la vidéo Collateral Murder, la torture de routine des prisonniers irakiens, la couverture des milliers de morts parmi les civils et le meurtre de près de 700 civils qui s’étaient approchés de trop près des points de contrôle américains—, les imposants avocats des droits civiques Len Weinglass et mon bon ami Michael Ratner, que j’accompagnerais plus tard pour rencontrer Julian à l’ambassade équatorienne, ont rencontré Julian dans un studio au centre de Londres. Les cartes bancaires personnelles de Julian avaient été bloquées. Trois ordinateurs portables cryptés contenant des documents détaillant les crimes de guerre américains avaient disparu de ses bagages en route vers Londres. La police suédoise fabriquait un dossier contre lui dans le cadre d’un mouvement, a averti Ratner, qui visait à faire extrader Julian vers les États-Unis.

    « WikiLeaks et vous personnellement êtes confrontés à une bataille à la fois juridique et politique », a déclaré Weinglass à Assange. « Comme nous l’avons appris dans l’affaire Pentagon Papers, le gouvernement américain n’aime pas que la vérité éclate. Et il n’aime pas être humilié. Peu importe si c’est Nixon ou Bush ou Obama, si c’est un Républicain ou un Démocrate à la Maison Blanche. Le gouvernement américain essaiera de vous empêcher de publier ses vilains secrets. Et s’ils doivent vous détruire ainsi que le Premier Amendement et les droits des éditeurs avec vous, ils sont prêts à le faire. Nous pensons qu’ils en ont après WikiLeaks et vous, Julian, en tant qu’éditeur. »

    « Ils vont s’en prendre à moi à quel titre ? » demanda Julian.

    « Espionnage », a poursuivi Weinglass. « Ils vont accuser Bradley Manning de trahison en vertu de la loi sur l’espionnage de 1917. Nous ne pensons pas que cela s’applique à lui parce qu’il est un lanceur d’alerte, pas un espion. Et nous ne pensons pas que cela s’applique à vous non plus parce que vous êtes un éditeur. Mais ils vont essayer de forcer Manning à vous impliquer comme son collaborateur. »

    « Ils vont s’en prendre à moi à quel titre ? »

    Telle est la question.

    Ils s’en sont pris à Julien non pour ses vices, mais pour ses vertus.

    Ils sont venus après Julian parce qu’il a exposé les plus de 15 000 morts non signalées de civils irakiens ; parce qu’il a dénoncé la torture et les mauvais traitements infligés à quelque 800 hommes et garçons, âgés de 14 à 89 ans, à Guantanamo ; parce qu’il a révélé qu’Hillary Clinton en 2009 a ordonné aux diplomates américains d’espionner le Secrétaire Général de l’ONU Ban Ki Moon et d’autres représentants de l’ONU de Chine, de France, de Russie et du Royaume-Uni, espionnage qui comprenait l’obtention d’ADN, d’analyses d’iris, d’empreintes digitales et de mots de passe personnels, une partie du long schéma de surveillance illégale qui comprenait l’écoute clandestine du Secrétaire général de l’ONU Kofi Annan dans les semaines précédant l’invasion de l’Irak par les États-Unis en 2003 ; parce qu’il a révélé que Barack Obama, Hillary Clinton et la CIA ont orchestré le coup d’État militaire de juin 2009 au Honduras qui a renversé le Président démocratiquement élu Manuel Zelaya, le remplaçant par un régime militaire meurtrier et corrompu ; parce qu’il a exposé que George W. Bush, Barack Obama et le général David Petraeus ont poursuivi une guerre en Irak qui, en vertu des lois post-Nuremberg, est définie comme une guerre criminelle d’agression, un crime de guerre, qu’ils ont autorisé des centaines d’assassinats ciblés, y compris ceux de citoyens américains au Yémen, et qu’ils ont secrètement lancé des attaques de missiles, de bombes et de drones sur le Yémen, tuant des dizaines de civils ; parce qu’il a révélé que Goldman Sachs a payé 657 000 dollars à Hillary Clinton pour donner des conférences, une somme si importante qu’elle ne peut être considérée que comme un pot-de-vin, et qu’elle a assuré en privé aux chefs d’entreprise qu’elle ferait ce qu’ils voulaient tout en promettant la réglementation et la réforme des finances publiques ; parce qu’il a exposé la campagne interne visant à discréditer et à détruire le chef du parti travailliste britannique Jeremy Corbyn par des membres de son propre parti ; parce qu’il a exposé comment les outils de piratage utilisés par la CIA et la National Security Agency permettent la surveillance gouvernementale en gros de nos téléviseurs, ordinateurs, smartphones et logiciels antivirus, permettant au gouvernement d’enregistrer et de stocker nos conversations, images et messages texte privés, même à partir d’applications cryptées.
    . . . . . . . .

    La suite : https://lecridespeuples.fr/2021/06/19/julian-assange-et-leffondrement-de-letat-de-droit

    #wikileaks #assange #julian_assange #surveillance #snowden #en_vedette #actualités_internationales #internet #nsa #usa #etats-unis #censure #journalisme #cablegate #activisme #google #julianassange #liberté #facebook

  • Genève se mobilise pour réclamer la libération de Julian Assange Chams Iaz

    « Il a perdu sa liberté pour protéger la nôtre ». Plusieurs personnalités genevoises emmenées par la compagne du lanceur d’alerte déclenchent ce vendredi un « Appel de Genève » pour que Londres le libère et pour qu’il puisse être accueilli, en Suisse ou ailleurs


    De gauche à droite : le conseiller aux Etats Carlo Sommaruga, le rapporteur spécial des Nations unies sur la torture Nils Melzer, l’avocat de Julian Assange Antoine Vey et la fiancée du lanceur d’alerte, Stella Morris — © KEYSTONE/Magali Girardin

    « Son seul crime est d’avoir dit la vérité », martèlent tour à tour les signataires de l’Appel de Genève. Cette pétition https://www.change.org/p/la-justice-du-royaume-uni-gen%C3%A8ve-lance-un-appel-pour-lib%C3%A9rer-assan , lancée ce vendredi 4 juin, demande « la libération immédiate » de Julian Assange, le lanceur d’alerte et fondateur de Wikileaks retenu dans la prison de haute sécurité de Belmarsh, à Londres, depuis le 11 avril 2019 – jour de son arrestation à l’ambassade d’Équateur. Julian Assange venait déjà de vivre sept années enfermé dans cette ambassade, où il s’était réfugié pour éviter l’extradition vers la Suède, qui le réclamait pour viol, un dossier depuis classé.

    Le fondateur de WikiLeaks est aujourd’hui menacé d’extradition vers les Etats-Unis. Là-bas, il risque une peine de prison de 175 ans. En cause, son ONG fondée en 2006, Wikileaks, cette plateforme internet développée par l’Australien pour permettre à tout citoyen de publier anonymement des documents compromettants sur une société, une organisation ou un gouvernement. C’est grâce à celle-ci que des centaines de milliers de câbles diplomatiques ont pu être publiés dès 2010 en partenariat avec des médias internationaux dont  The New York Times, The Guardian, Der Spiegel, Le Monde et El País.

    Et parmi ceux-ci : des milliers de documents confidentiels du Département d’Etat américain et du Pentagone. Julian Assange a notamment révélé les bavures commises par l’armée américaine en Irak ou en Afghanistan, ou encore les mauvaises conditions de détention à Guantanamo. Pour les Etats-Unis, il a surtout mis en péril la vie d’individus ayant fourni des informations à l’armée ou à la diplomatie américaine.

    C’est pourquoi le Ministère américain de la justice réclame son extradition auprès du gouvernement britannique. La juge en charge de ce dossier a déjà opposé un premier refus, le 6 janvier 2021, invoquant le risque de son suicide, et a décidé de le maintenir en détention sur son territoire en attendant l’examen de l’appel demandé par les Etats-Unis. La date exacte de cette procédure est toujours inconnue.

    Six demandes
    Dans l’attente, plusieurs institutions et personnalités genevoises ont donc décidé de s’unir ce vendredi 4 juin, aux Bains des Pâquis, pour soutenir Julian Assange et rappeler ses mauvaises conditions de détention. Parmi les figures mobilisées figurent la compagne du lanceur d’alerte l’avocate britannique Stella Morris, le rapporteur spécial des Nations unies sur la torture Nils Melzer, la maire de Genève Frédérique Perler, l’ancien directeur du CICR Yves Daccord, le conseiller aux Etats Carlo Sommaruga, le secrétaire général de l’ONG Reporters Sans Frontières Christophe Deloire, l’ex-député Jean Rossiaud et le directeur exécutif du Club suisse de la presse Pierre Ruetschi.

    Ce dernier estime que « cet Appel de Genève est avant tout un appel citoyen » et que le lieu de cette conférence de presse est particulièrement symbolique. « Genève, ville où siège le Conseil des droits de l’homme, ville humanitaire, ville de paix et de négociation, ville qui accueillera le 16 juin les présidents Joe Biden et Vladimir Poutine : c’est ici que les choses se décident, c’est ici que nous exigeons la libération de Julian Assange. »

    Dans leur pétition, les signataires s’adressent à plusieurs interlocuteurs « au nom des valeurs promues par les organisations de défense des droits humains basées à Genève ». Ils demandent ainsi aux autorités britanniques de refuser l’extradition de Julian Assange et de lui rendre sa liberté, au gouvernement américain de renoncer aux poursuites engagées contre lui, aux organisations internationales et aux ONG d’user de leurs compétences et autorités pour contribuer à le faire libérer, aux médias de continuer à informer sur sa situation, aux peuples de le soutenir, enfin à tous les Etats démocratiques de lui assurer un refuge.

    Un visa humanitaire
    Frédérique Perler, maire de Genève, s’associe « pleinement » à cet appel, souligne-t-elle. « Julian Assange est le symbole de la persécution politique et judiciaire insensée dont les lanceurs d’alerte peuvent être victimes. Il a dû fuir, s’exiler et vivre caché pour nous avoir informés. Il a perdu sa liberté pour protéger la nôtre. » Le conseilleur aux Etats Carlo Sommaruga déclare son indignation face « aux crimes commis prétendument pour le maintien de la démocratie » et « aux turpitudes commises à l’insu des citoyens. » Pour le socialiste, il est du devoir de la Suisse de « protéger les nouveaux dissidents qui agissent désormais dans le monde virtuel. »

    Sur ce sujet, l’ancien député du grand conseil genevois Jean Rossiaud réitère son idée d’accorder à l’Australien un visa humanitaire. « Les députés ont déjà voté cette résolution, donc Genève est prête à l’accueillir, dit-il. Sauvons-le de la torture, amenons-le dans un hôpital pour le soigner, et ensuite, grâce à ce visa il pourra choisir ce qu’il veut faire et où aller. Le plus important est qu’il soit libre et qu’il puisse recouvrer sa santé et son état mental. »

    Confiné, puis incarcéré depuis plus de dix ans, Julian Assange a vu son état de santé physique et mental se dégrader, rapportent régulièrement des observateurs ou proches. Sa compagne Stella Morris confie craindre pour sa survie. Pour elle, son mari et père de ses deux enfants sortira de prison soit en homme libre, soit mort. « Julian n’est pas simplement un nom ou un symbole ; c’est un homme, un être humain et il souffre. On le cache, on tente de le faire taire, mais il se bat », insiste-t-elle.

    Bouleversée par la statue de son compagnon réalisée par le sculpteur Davide Dormino érigée aux Bains des Pâquis, au côté de celle d’Edward Snowden et de Chelsea Manning, elle poursuit : « Il est en cellule pour avoir divulgué des preuves concrètes sur des crimes commis par le même pays qui tente aujourd’hui de l’extrader. Joe Biden, qui sera bientôt ici, doit cesser cette folie ».

    Source : https://www.letemps.ch/suisse/geneve-se-mobilise-reclamer-liberation-julian-assange

    #wikileaks #assange #julian_assange #surveillance #snowden #actualités_internationales #nsa #internet #etats-unis #censure #usa #cablegate #journalisme #activisme #julianassange #liberté

  • Géopolitique de la surveillance numérique - Ép. 2/4 - À l’ère de la surveillance numérique
    https://www.franceculture.fr/emissions/lsd-la-serie-documentaire/a-lere-de-la-surveillance-numerique-24-geopolitique-de-la-surveillance

    Depuis quelques temps, je regarde mon portable Huawei d’un œil soucieux. Et si les services secrets chinois s’en servaient pour m’espionner ? Ou bien les Américains ? Ou les services français ? Et d’ailleurs comment font-ils tous ces États pour surveiller internet ? Depuis l’affaire Snowden, il est devenu clair que les services de renseignement surveillent les infrastructures numériques. Les câbles et les data center par lesquels transitent nos données numériques sont devenus des enjeux (...)

    #NSA #spyware #smartphone #surveillance #LaQuadratureduNet

  • Starlink vise la conquête marchande de l’espace
    https://reporterre.net/Starlink-vise-la-conquete-marchande-de-l-espace

    ENQUÊTE 3/3 - Le réseau de satellites Starlink doit rendre l’accès à internet haut-débit possible partout sur la planète. Les militaires et les particuliers isolés — s’ils en ont les moyens — pourraient en bénéficier mais ce ne sera pas le cas d’une grande partie de la population mondiale. Ce déploiement servira en revanche d’appui pour les projets de conquête marchande de l’espace. « Je me sens désormais comme une personne normale, Starlink est ma bouée de sauvetage. » Sur le site de Starlink, les (...)

    #GCHQ #SpaceX #Tesla #USArmy #NSA #Starlink #GPS #écologie #militaire #domination (...)

    ##finance

  • China Hijacked an NSA Hacking Tool in 2014—and Used It for Years
    https://www.wired.com/story/china-nsa-hacking-tool-epme-hijack

    The hackers used the agency’s EpMe exploit to attack Windows devices years before the Shadow Brokers leaked the agency’s zero-day arsenal online. More than four years after a mysterious group of hackers known as the Shadow Brokers began wantonly leaking secret NSA hacking tools onto the internet, the question that debacle raised—whether any intelligence agency can prevent its “zero-day” stockpile from falling into the wrong hands—still haunts the security community. That wound has now been (...)

    #NSA #hacking #surveillance

  • Edward Snowden and Cory Doctorow on Permanent Record
    https://www.youtube.com/watch?v=dipfjn3bir8

    Featured Book : Permanent Record (Young Readers Edition) : How One Man Exposed the Truth about Government Spying and Digital Security BUY NOW : https://www.copperfieldsbooks.com/boo...​ If you were convinced it was the right thing to do, how far would you go to inform your country, your fellow citizens ? Would you follow your conscience ? And what would you be willing to give up ? Join us for the ONLY virtual visit in the US for the new Young Readers Edition of Edward Snowden’s book, (...)

    #NSA #PRISM #surveillance

  • Permanent Record (Young Readers Edition)
    https://us.macmillan.com/books/9781250767912

    A young reader’s adaptation of whistleblower and bestselling author Edward Snowden’s memoir, Permanent Record—featuring a brand-new afterword that includes resources to learn about the basics of digital security. In 2013, Edward Snowden shocked the world when he revealed that the United States government was secretly building a system of mass surveillance with the ability to gaze into the private lives of every person on earth. Phone calls, text messages, emails—nothing was safe from prying (...)

    #NSA #PRISM #surveillance

  • Silicon Valley Takes the Battlespace
    https://prospect.org/power/silicon-valley-takes-battlespace-eric-schmidt-rebellion

    Through an obscure startup named Rebellion Defense, former Google CEO Eric Schmidt attempts to buy his way into the Biden White House. Days after winning the November election, Joe Biden announced the names of those staffing his transition. Big Tech landed prominent spots. Among the hundreds of personnel on the agency review teams serving the president-elect, there was one from Uber, two from Amazon, and one from Google. And then there were two people from Rebellion Defense, a shadowy (...)

    #Alphabet #Google #DoD #NSA #CIA #Amazon #Uber #GAFAM #lobbying #RebellionDefense

  • WhatsApp Doesn’t Read Your Messages, It Doesn’t Need To - Pen Magnet
    https://medium.com/swlh/whatsapp-doesnt-read-your-messages-it-doesn-t-need-to-7ce0ec2846f9

    As of this writing, WhatsApp released a newer version of its privacy policy on Jan 4, 2021. Among other things, it mentions : We are one of the Facebook Companies. You can learn more further below in this Privacy Policy about the ways in which we share information across this family of companies. When I opened WhatsApp yesterday, I was greeted with a prompt to read the fine print. Among other things, it talks highly about “End to end encryption.” WhatsApp even has a ridiculous (...)

    #NSA #CIA #FBI #Facebook #Messenger #Signal #Skype #WhatsApp #Zoom #algorithme #cryptage #Android #payement #WiFi #iOS #données #écoutes (...)

    ##surveillance
    https://miro.medium.com/max/1200/0*l-aSb_r4sZU6Ktk1

  • La fin d’un homme, la fin d’un monde _ Le blog de pierre verhas
    http://uranopole.over-blog.com/2020/12/la-fin-d-un-homme-la-fin-d-un-monde.html

    La fin d’un homme
    Depuis plusieurs mois, nous évoquons l’évolution de la situation de l’informaticien et journaliste australien Julian Assange, persécuté pour avoir publié les câbles diplomatiques secrets de Washington qui révélaient les crimes de guerre des Etatsuniens et de leurs alliés en Afghanistan et en Irak, accusé par la Suède d’un prétendu viol.
     
    « Vous vous souvenez du meurtre de sang froid de civils irakiens dans Collateral Murder ? Vous vous souvenez de la torture à Guantanamo Bay ? Vous vous souvenez de la corruption politique révélée par les câbles diplomatiques ? Ce sont quelques-unes des histoires qui ont fait la une en 2010, lorsque les principaux journaux internationaux, du New York Times au Guardian en passant par Der Spiegel, se sont associés à WikiLeaks pour exposer les crimes de guerre américains et une longue liste de vérités honteuses que nos gouvernements avaient gardées secrètes. » (Ex Berliner – EXB – journal berlinois en langue anglaise, 8 septembre 2020)
     
    Assange se trouvait à Londres lorsque la Justice suédoise demanda son extradition pour une accusation de viol. Sentant le piège et craignant d’être ensuite extradé de Suède vers les Etats-Unis, Assange s’est d’abord réfugié durant sept années à l’ambassade d’Equateur à Londres d’où il ne pouvait sortir et où, à son insu, ses moindres faits, gestes et paroles étaient notés par la CIA par l’intermédiaire d’une société de surveillance espagnole qui a clandestinement installé des dispositifs d’espionnage Quelques semaines après le renversement du président progressiste Rafaele Correa qui lui avait accordé l’asile et la nationalité équatorienne, exclu du pouvoir suite à des élections contestables, le nouveau président, Lénine (!) Moreno, sous la pression du gouvernement étatsunien, retire à Assange sa nouvelle nationalité et le fait expulser de sa « résidence » équatorienne. La police londonienne l’a transféré manu militari à la prison de haute sécurité de Belmarsch, où il côtoie des terroristes et de dangereux criminels. Il a d’abord été condamné par un tribunal londonien à 52 semaines de détention pour avoir échappé à la Justice anglaise en se réfugiant à l’ambassade d’Equateur. Cette période de détention a permis aux juges britanniques de préparer le procès de l’extradition d’Assange pour répondre à la demande de la puissance étatsunienne.
     
     

    L’expulsion manu militari de Julian Assange par la police londonienne révèle son traitement futur !
     
    Entre temps, la Justice suédoise a abandonné les poursuites contre le fondateur de Wikileaks, faute de preuves. À y réfléchir, cette affaire de viol avait un double objectif : discréditer Assange auprès de l’opinion publique et le livrer indirectement aux Etats-Unis. Tout cela pour ce qui est en définitive une banale relation sexuelle consentie non protégée !
     
    C’est d’ailleurs ce que dit Nils Melzer, rapporteur spécial des Nations Unies sur la torture :
     
    « Je ne sais pas si Julian Assange a commis une agression sexuelle ou non, mais ce que je sais, c’est que la Suède ne s’est jamais souciée de le savoir. Ils voulaient utiliser ces allégations pour le discréditer. Et une fois qu’ils ont activement diffusé ces allégations aux quatre coins du monde, ils se sont ensuite assurés qu’il n’y aurait jamais de procès en bonne et due forme car, comme le procureur l’a finalement admis en novembre 2019, ils n’ont jamais eu suffisamment de preuves pour même porter plainte contre Julian Assange. »

    Nils Melzer est un éminent juriste suisse, professeur à Genève et aussi dans plusieurs pays étrangers, rapporteur spécial des Nations Unies sur la torture et les traitements inhumains, a pris fait et cause pour Julian Assange.
     
    Un palais de justice qui fait partie d’un système carcéral.
     
    Une première série d’audiences du procès d’extradition britannique eut lieu fin février, début mars 2020. Elles se déroulèrent à Woolwich Court attenant à la prison de Belmarsch. Craig Murray a rédigé et publié le compte-rendu de ces audiences. Il commente :
    « Woolwich Crown Court est conçu pour imposer le pouvoir de l’État. Les tribunaux normaux de ce pays sont des bâtiments publics, délibérément placés par nos ancêtres en plein centre-ville, presque toujours à proximité d’une rue principale. Le but principal de leur positionnement et de leur architecture était de faciliter l’accès au public, avec la conviction qu’il est vital que la justice soit visible par le public.
     
    Woolwich Crown Court, qui accueille le Belmarsh Magistrates Court, est construit sur un principe totalement opposé. Il n’a pas d’autre but que d’exclure le public. Rattaché à une prison située dans un marais balayé par les vents, loin de tout centre social normal, une île accessible uniquement en naviguant dans un labyrinthe de routes à double voie, tout l’emplacement et l’architecture du bâtiment sont pensés pour décourager l’accès au public. Il est entouré par la même barrière de palissage en acier extrêmement résistant qui ceinture la prison. C’est une chose extraordinaire, un palais de justice qui fait partie du système carcéral lui-même, un lieu où l’on est déjà considéré comme coupable et incarcéré dès son arrivée. Le Woolwich Crown Court n’est rien d’autre que la négation physique de la présomption d’innocence, l’incarnation même de l’injustice coulée dans du béton, de l’acier, et des vitres blindées. Il a précisément la même relation à la justice que Guantanamo Bay ou la Lubyanka. Il n’est en réalité que l’aile de condamnations de la prison de Belmarsh. »

     
    Le tribunal est présidé par la magistrate Vanessa Baraitser qui se montre particulièrement hostile à l’égard de l’accusé et de sa défense.
     
    « … dans la salle d’audience elle-même, Julian Assange est confiné au fond du tribunal derrière un écran de verre pare-balles. Il a fait remarquer à plusieurs reprises au cours de la procédure qu’il lui était ainsi très difficile de voir et d’entendre les débats. La magistrate, Vanessa Baraitser, a choisi d’interpréter cela, avec une malhonnêteté étudiée, comme un problème dû au très faible bruit des manifestants à l’extérieur, par opposition à un problème causé par le fait qu’Assange est enfermé à l’écart dans une énorme boîte de verre pare-balles.
     
    Or, il n’y a aucune raison pour qu’Assange se trouve dans cette boîte, conçue pour contenir des terroristes extrêmement violents physiquement. Il pourrait siéger, comme le ferait normalement un accusé à une audience, au sein du tribunal à côté de ses avocats. Mais la lâche et vicieuse Baraitser a refusé les demandes répétées et persistantes de la défense pour qu’Assange soit autorisé à s’asseoir avec ses avocats. »

     
    Voilà donc comment la Justice britannique traite Julian Assange ! Public limité au strict minimum, enfermement de Julian Assange dans une cage de verre pour entraver les contacts avec ses avocats, attitude hostile de la présidente du tribunal. Le procès s’annonce très mal ! Un incident révélateur : à la seconde audience, un des avocats d’Assange, Baltasar Garzon, l’ancien juge espagnol qui a fait poursuivre le dictateur Pinochet et qui souhaitait poursuivre les crimes du franquisme, devait rejoindre Madrid. Il se leva et alla vers la cage de verre pour saluer et serrer la main d’Assange. Les gardiens assis à ses côtés l’en empêchèrent !
     
     

    Baltasar Garzon, évincé de son mandat de juge d’instruction, pour sa tentative d’exhumation du passé franquiste de l’Espagne est un des avocats de Julian Assange.
     
    Des décisions pré-écrites  
    La première série d’audiences s’acheva le 8 avril 2020 pour reprendre le 7 septembre, à Westminster cette fois. Craig Murray dans son compte-rendu de la dernière audience du 30 septembre écrit :
     
    « Baraitser a de nouveau suivi son cheminement habituel qui consiste à refuser chaque requête de la défense, à la suite de décisions pré-rédigées (je ne sais pas si elles sont écrites par elle ou si elle les a copiées), même lorsque l’accusation ne s’y oppose pas. Vous vous rappelez qu’au cours de la première semaine de l’audience d’extradition proprement dite, elle a insisté pour que Julian soit maintenu dans une cage de verre, bien que l’avocat du gouvernement américain n’ait émis aucune objection à ce qu’il siège dans le tribunal, et qu’elle ait refusé d’intervenir pour faire cesser ses fouilles à nu, ses menottes et la confiscation de ses documents, même si le gouvernement américain s’est joint à la défense pour contester sa déclaration selon laquelle elle n’avait pas le pouvoir de le faire (pour laquelle elle a ensuite été vivement réprimandée par l’Association internationale du barreau).
     
    Hier, le gouvernement américain ne s’est pas opposé à une motion de la défense visant à reporter la reprise de l’audience d’extradition. La défense a invoqué quatre motifs :
     
    1) Julian est actuellement trop malade pour préparer sa défense
2) En raison du confinement, l’accès à ses avocats est pratiquement impossible
3) Les témoins vitaux de la défense, y compris de l’étranger, ne pourraient pas être présents pour témoigner
4) Le traitement des problèmes de santé mentale de Julian a été interrompu en raison de la situation de Covid-19.
     
    Baraitser a rejeté catégoriquement tous ces motifs - bien que James Lewis ait déclaré que l’accusation était neutre sur la question - et a insisté pour que la date du 18 mai soit maintenue. Elle a déclaré que Julian pouvait être amené dans les cellules du tribunal de Westminster pour des consultations avec ses avocats. (Premièrement, en pratique, ce n’est pas le cas, et deuxièmement, ces cellules ont un passage constant de prisonniers, ce qui est très manifestement indésirable avec Covid19). »

     

    L’ancien diplomate Craig Murray a fait état de toutes audiences du procès Assange.
     
    Il y a deux constats : à chaque fois, la juge Baraitser présente des décisions écrites avant l’audience – est-ce de sa propre initiative ou lui ont-elles été dictées ? – et rejette systématiquement toute requête de la défense, même si l’accusation ne s’y oppose pas ! Se conformerait-elle à des instructions préalables, on peut raisonnablement se poser la question.
     
    Enfin, nulle mesure de protection d’Assange contre le Covid 19 n’a été prise aussi bien à la salle d’audience qu’à la prison de Belmarsch. Sans doute, son éventuelle contamination aurait arrangé pas mal de monde !
     
    _ Trois pas sur deux !
     
    Voici ce que conclut Craig Murray de ces trois semaines d’audience :
     
    « … dans cette salle d’audience, vous étiez en présence du mal. Avec un placage civilisé, un semblant de procès, et même des démonstrations de bonhomie, la destruction totale d’un être humain était en cours. Julian était détruit en tant que personne sous mes yeux. Pour le crime d’avoir publié la vérité. Il a dû rester assis là à écouter des jours entiers de discussions posées sur l’incroyable torture qui l’attendait dans une prison américaine de grande sécurité, privé de tout contact humain significatif pendant des années, à l’isolement dans une cellule de seulement 4,5 mètres carrés.
     
    4,5 mètres carrés. Retenez bien cela. Trois pas sur deux. De toutes les terribles choses que j’ai entendues, la plus effrayante était peut-être ce qu’a dit le directeur Baird en expliquant que la seule heure par jour autorisée pour sortir de la cellule est passée seul dans une autre cellule absolument identique, appelée "cellule de loisirs". Cela et l’infâme "expert" du gouvernement, le Dr Blackwood, décrivant comment Julian pourrait être suffisamment drogué et physiquement privé des moyens de se suicider pour le maintenir en vie pendant des années. »

     
    Le jugement sur l’extradition est annoncé pour le 4 janvier 2021.
     
    Nils Melzer estime : « Quelle que soit la décision, je pense qu’un appel sera interjeté auprès de la Haute Cour. Probablement par Julian Assange, car je ne m’attends pas à ce que la première instance refuse l’extradition. Mais même si un miracle se produit et que le juge refuse de l’extrader, les États-Unis feront certainement appel de cette décision. »
     
    Laissons la conclusion à Nils Melzer :
     
    « Nous parlons des droits de l’homme et non des droits des héros ou des anges. Assange est une personne, et il a le droit de se défendre et d’être traité avec humanité. Peu importe de quoi il est accusé, Assange a droit à un procès équitable. Mais ce droit lui a été délibérément refusé - en Suède, aux États-Unis, en Grande-Bretagne et en Équateur. Au lieu de cela, il a été laissé à pourrir pendant près de sept ans dans les limbes d’une pièce. Puis, il a été soudainement été traîné dehors et condamné en quelques heures et sans aucune préparation pour une violation de la liberté sous caution qui consistait à lui avoir accordé l’asile diplomatique d’un autre État membre des Nations unies sur la base de persécutions politiques, comme le veut le droit international et comme l’ont fait d’innombrables dissidents chinois, russes et autres dans les ambassades occidentales. Il est évident que ce à quoi nous avons affaire ici, c’est la persécution politique. En Grande-Bretagne, les violations de la liberté sous caution entraînent rarement des peines de prison - elles ne sont généralement passibles que d’amendes. En revanche, Assange a été condamné dans le cadre d’une procédure sommaire à 50 semaines dans une prison de haute sécurité - une peine clairement disproportionnée qui n’avait qu’un seul but : détenir Assange suffisamment longtemps pour que les États-Unis puissent préparer leur dossier d’espionnage contre lui.
     
    Que signifie le refus des États membres de l’ONU de fournir des informations à leur propre rapporteur spécial sur la torture ?  
    Qu’il s’agit d’une affaire arrangée d’avance. Un simulacre de procès doit être utilisé pour faire un exemple de Julian Assange. Le but est d’intimider d’autres journalistes. L’intimidation, d’ailleurs, est l’un des principaux objectifs de l’utilisation de la torture dans le monde. Le message que nous devons tous recevoir est le suivant : Voici ce qui vous arrivera si vous imitez le modèle de Wikileaks. »
     
    Une affaire arrangée d’avance ? Nils Melzer en est bien conscient et ne se fait guère d’illusions sur son propre sort :
     
    « En tout cas, je ne me fais pas d’illusions sur le fait que ma carrière aux Nations unies est probablement terminée. Ayant ouvertement affronté deux États P5 (membres du Conseil de sécurité des Nations unies) comme je l’ai fait, il est très peu probable qu’ils m’acceptent à un autre poste de haut niveau. On m’a dit que mon engagement sans compromis dans cette affaire avait un prix politique. Mais le silence a aussi un prix. Et j’ai décidé que je préfère payer le prix pour m’exprimer que le prix pour rester silencieux. »
     
    L’affaire Assange n’a jamais porté sur Julian Assange.
    Mais pour lui, le plus important est :
    « Mais l’affaire Assange n’a jamais porté sur Julian Assange. Il s’agit de l’éléphant dans la pièce que tout le monde semble ignorer : la mauvaise conduite officielle des états qu’Assange a exposé. En 2010, au moment des révélations, tout le monde était choqué par les crimes de guerre, la torture, la corruption, et le public du monde entier a commencé à en parler. Cela a rendu les États concernés très nerveux. Ce n’est donc pas un hasard si, quelques semaines plus tard, les autorités suédoises ont délibérément publié un gros titre dans la presse à sensation : Julian Assange est soupçonné de double viol. Immédiatement, le public du monde entier s’est désintéressé de la discussion des crimes des puissants, a changé d’orientation et a commencé à débattre du caractère et de la personnalité de Julian Assange : est-il un violeur, un narcissique, un hacker, un espion ? »  
     
    Ainsi, la fin d’un homme est programmée par l’Etat profond étatsunien avec comme supplétifs la Justice britannique et la Justice équatorienne.
     
    La fin d’un homme, la fin d’un monde.

    Pierre Verhas

  • Exploitation des données, manipulation de l’opinion, culte du secret… La trahison des GAFA
    https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2020/12/18/exploitation-des-donnees-manipulation-de-l-opinion-culte-du-secret-la-trahis

    Il y a encore quelques années, Mark Zuckerberg était considéré comme un génie, Google comme l’une des entreprises les plus cool au monde… et puis la confiance s’est perdue. L’avidité des géants de la tech semble avoir eu raison des valeurs des pionniers du numérique : liberté, innovation et progrès.

    Deux jours d’audience de presque cinq heures chacune, pas loin de six cents questions, une centaine de membres du Congrès. Et face à eux : Mark Zuckerberg, le puissant PDG de Facebook, costume et cravate bleus, visage gris. Nous sommes le 10 avril 2018 et le prodige des nouvelles technologies, 33 ans, troisième fortune mondiale, témoigne pour la ­première fois devant les élus américains. Ce ne sera pas la dernière.

    « Mon équipe reviendra vers vous pour des détails supplémentaires », martèle-t-il à seize reprises en guise de réponse aux interrogations minutées des démocrates et des républicains. Elles sont pourtant simples : les données personnelles récoltées par Facebook ont-elles été transmises à des entreprises tierces ? Ces données étaient-elles protégées par les serveurs de l’entreprise ? Ou encore quelle fut la réaction de l’entreprise face aux comptes diffusant des « fake news », notamment sur la vie politique américaine ? Imperturbable, Mark Zuckerberg conserve une voix monotone et une expression neutre. Comme s’il était habitué à être questionné de la sorte.

    A vrai dire, le jeune patron a été formé en urgence par un ancien conseiller spécial du président George W. Bush, sous la pression du scandale Cambridge Analytica. Soit l’utilisation illégale des données personnelles d’environ 87 millions d’utilisateurs de Facebook par cette entreprise britannique financée par le businessman ultraconservateur Robert Mercer, et cofondée par Steve Bannon, ancien stratège du président américain Donald Trump. Tout ça dans le but de favoriser l’élection de ce dernier, en novembre 2016 – une méthode visiblement efficace.

    Au micro, le sénateur du Dakota du Sud John Thune résume l’atmosphère au Capitole : « Dans le passé, beaucoup de mes collègues, des deux côtés de l’allée [majorité et opposition, des deux côtés de l’hémicycle au Sénat], étaient prêts à laisser les entreprises technologiques faire l’effort de s’autoréguler. » Pause. « Cela pourrait changer. » L’image est emblématique : Mark Zuckerberg garde les mains posées sur le large bureau noir, face à des dizaines d’appareils photo, comme s’il craignait d’être englouti par ce haut lieu du pouvoir américain. Il se raccroche aux origines « modestes » de son entreprise, créée dans un « dortoir » de l’université Harvard en 2004, et concède : « Nous avons fait des erreurs et nous essayons d’en tirer des conclusions. » Comme un premier aveu de faiblesse.Retour ligne automatique
    La Silicon Valley tremble

    Il y en aura d’autres. Au-delà du plus célèbre réseau social, scruté de plus en plus intensément aux Etats-Unis comme dans l’Union Européenne, c’est la Silicon Valley tout entière qui tremble. La crise est sans précédent. A tel point que, le 16 décembre 2018, l’influent Financial Times dévoile un « mot de l’année » inédit et directement adressé à l’industrie la plus riche de l’histoire : techlash. Contraction de tech et backlash (« contrecoup », en VF), il désigne l’animosité croissante d’une large part de la population envers les plus grandes entreprises technologiques mondiales et leur pouvoir intimidant.

    « Même la femme au foyer de 50 ans originaire du Minnesota intéresse Cambridge Analytica. Nous sommes tous victimes de la surveillance généralisée. » Christopher Wylie, lanceur d’alerte

    L’année suivante, un sondage du Pew Research Center confirme l’intuition du média financier : la part d’Américains persuadés que la technologie produit un impact positif sur la société est passée à seulement 50 % en 2019, contre 71 % en 2015. « A mesure que les grandes entreprises technologiques se sont hissées au top du capitalisme mondial, les contestations sont apparues », constate Sébastien Broca, sociologue à l’université Paris-VIII.

    Difficile d’en vouloir à l’opinion : en quelques années à peine, ces innovations, vendues comme révolutionnaires et consacrées au bien commun, ont accompagné l’élection de Donald Trump et sa rhétorique raciste et rétrograde ; Google a discrètement cherché à développer un moteur de recherche censuré, le projet « Dragonfly », fait sur mesure pour respecter les exigences du gouvernement chinois ; Amazon a nié toutes les avancées du droit du travail pour maintenir la cadence dans ses immenses entrepôts nécessaires à la vente en ligne.

    Les exemples ne manquent pas. « Le techlash est le résultat prévisible pour une industrie incapable de se gouverner elle-même », conclut le Financial Times. Depuis, les mêmes questions ne cessent de hanter les cercles de pouvoir, les médias et les plates-formes de discussions, tous réseaux sociaux confondus : où est passée l’utopie ? Comment la Silicon Valley a-t-elle pu devenir cette inquiétante machine dont on aurait visiblement perdu le contrôle ? Peut-on encore l’empêcher de menacer nos libertés, nos vies privées, et peut-être même la démocratie ?Retour ligne automatique
    Le coup de grâce Cambridge Analytica

    Sa puissance, visiblement sans limites, est déjà devenue « inquiétante », selon les termes de plusieurs personnes interrogées pour cet article. Pour une industrie de la tech déjà en plein doute existentiel, les révélations sur les pratiques de l’entreprise Cambridge Analytica font office de coup de grâce. En 2018, l’ancien consultant Christopher Wylie, qui a travaillé pour cette entreprise britannique spécialisée dans le conseil en communication et l’analyse de données, transfère des disques durs de documents à plusieurs journalistes du quotidien anglais The Guardian, toutes employées dans la rubrique « Arts et culture ».

    « Il n’y avait pas un seul journaliste tech sur cette histoire, raconte le lanceur d’alerte via Zoom, il fallait des gens, en l’occurrence uniquement des femmes, qui ne faisaient pas partie de ce petit monde masculin pour pointer ses failles. » Elles sont béantes : un outil dédié à la lutte contre la radicalisation aurait été tordu pour devenir un vaste projet de manipulation des données permettant d’influer sur plusieurs élections démocratiques. Cambridge Analytica serait ainsi devenu un outil de « guerre psychologique », pointe Christopher Wylie.

    L’impact médiatique de cette série d’articles est à la hauteur des informations rendues publiques. Le trentenaire, installé à Londres, se lance dans une « tournée d’audiences parlementaires », s’exprime sur tous les plateaux de télévision disponibles, devient le visage – cheveux de couleurs variées, lunettes branchées – de la débâcle de la tech. Il précise : « Pour la première fois, tout le monde a compris qu’il pouvait être une cible, même la femme au foyer de 50 ans originaire du Minnesota intéresse Cambridge Analytica. Nous sommes tous victimes de la surveillance généralisée. » Avec, comme dommage collatéral, les idéaux fondateurs de la Silicon Valley.Retour ligne automatique
    Des nerds devenus les rois du monde

    Cupertino, Californie, 1984. Jean-Louis Gassée est attablé au Good Earth, un café du centre-ville aujourd’hui disparu pour cause de gentrification. C’est l’heure du petit-déjeuner. Le premier d’une nouvelle vie. Le Français de 40 ans vient d’être nommé directeur de la division recherche et développement chez Apple, les cool kids de l’ordinateur personnel – un Macintosh, comme ils ont appelé leur révolution estampillée d’une pomme croquée. Mais, pour l’instant, Jean-Louis Gassée regarde le ciel et laisse son esprit vagabonder dans le big sky country.

    « La tech était sexy, c’était le futur et c’était forcément génial ! Je crois qu’il y a eu un gros manque de responsabilité de la part de ces leaders politiques qui n’ont pas prêté attention aux signes avant-coureurs. » Un ancien grand patron de la tech

    « Je me disais, ça y est, je suis arrivé, rejoue-t-il aujourd’hui par téléphone depuis la Côte ouest, c’est l’endroit où j’avais toujours voulu aller. » Depuis son arrivée chez Hewlett-Packard, et sa branche française, en 1968, le cadre n’a jamais cessé de rêver des Etats-Unis. Là-bas, il entrevoit le « sentiment des possibilités » et une culture de l’entreprenariat plus aboutie qu’à Paris. « Il n’y avait pas que le fric qui comptait ! Je voulais y aller pour faire ce qui n’existait pas avant, pour innover ! », sourit l’ancien businessman, 76 ans aujourd’hui. En l’espace de deux décennies, il a vu se lancer des dizaines de start-up, et certaines sont devenues, depuis, des empires.

    La saga emblématique de cet âge d’or reste peut-être celle de Google, symbole de la méritocratie en vogue au cœur de cette Silicon Valley encore tâtonnante. La preuve : Larry Page et Sergey Brin sont les « deux meilleurs ingénieurs » de l’université Stanford et ils ont une « idée toute simple et très belle », assure l’entrepreneur. Ils souhaitent ranger les pages Internet en les classant selon leur mérite. Jean-Louis Gassée : « Ils ont construit un algorithme, mis sur pied quelques serveurs et c’est devenu ce qu’on sait. »

    Hors de cette bulle de nerds devenus les rois du monde, on loue aussi la vision de cette jeune génération fraîchement débarquée dans les affaires, prête à tout gagner, autant qu’à « contribuer au bien de l’humanité ». Les médias érigent Steve Jobs, et plus tard Mark Zuckerberg ou Jeff Bezos, au rang de nouvelles figures du cool et de la réussite à l’américaine. Le grand public est conquis. Et les décideurs politiques leur ouvrent bientôt grand les portes. Toutes les portes.

    Snowden sonne l’alarme

    Les années Obama sont le théâtre d’une véritable love story entre la tech et la Maison Blanche. A partir de 2008, les pontes de Google ont organisé près d’« un rendez-vous par semaine » avec le président, selon un ancien patron d’une grande entreprise canadienne. A en croire les archives répertoriées pendant les deux mandats de Barack Obama, près de quatre cents de ces rendez-vous ont bien eu lieu dans la plus haute sphère du pouvoir politique.

    Assez pour que de nombreux hauts fonctionnaires poursuivent leur carrière dans les conseils d’administration des mastodontes de la Silicon Valley. Et vice versa. Un feu vert symbolique pour tout un corps de métier. Cet ancien grand nom de l’innovation canadienne confirme : « La tech était sexy, c’était le futur et c’était forcément génial ! Je crois qu’il y a eu un gros manque de responsabilité de la part de ces leaders politiques qui n’ont pas prêté attention aux signes avant-coureurs. Ces signaux étaient pourtant là. »

    Le plus flagrant se manifeste en 2013. C’est un cataclysme. Le jeune informaticien Edward Snowden dévoile un vaste programme de surveillance de masse pilotée par la NSA (National Security Agency). Les services de renseignement ont puisé directement des données sur les plateformes Internet et dans les entreprises de leur propre pays, sans autorisation ni contrôle. Adolescent dans les années 1990, Snowden avait cru aux interventions des pionniers de la tech, détaille-t-il dans son autobiographie. « Il raconte comment, à 14 ans, il pouvait parler à des scientifiques renommés à l’autre bout du monde, explique le sociologue Sébastien Broca. Mais, pour lui, il y a eu trahison de cette utopie initiale. »

    C’est ainsi qu’il justifie son geste radical et pour lequel il sera prêt à vivre en exil au nom de la protection de nos données privées. Dans ce programme, décrit comme « orwellien » par la justice fédérale américaine, les grandes entreprises mises en cause ont souvent été considérées comme victimes plutôt que complices. Malgré leur participation évidente à certaines de ces manœuvres.

    Le péché originel

    A la même époque, le 17 juin 2014, Facebook et la prestigieuse université Cornell publient un article scientifique intitulé « La preuve expérimentale de la contagion émotionnelle à grande échelle à travers les réseaux sociaux », ou comment manipuler les sentiments des utilisateurs des réseaux sociaux grâce à des publicités ciblées. Comme une conclusion logique, l’année suivante, Google abandonne sans bruit son slogan historique, le célèbre « Don’t be evil » (« ne faites pas le mal »).

    Mais pour Tim O’Reilly, pionnier légendaire de la Silicon Valley, le ver était dans le fruit bien avant les révélations de Snowden : « Le 8 février 1996, la section 230 a été adoptée dans la loi américaine, qui permet aux plateformes Internet de ne pas être responsables des publications sur leurs sites, détaille l’entrepreneur, donc on a arrêté de modérer le contenu correctement. »

    En parallèle, un autre verrou saute : la monétisation des données. Oublié l’utopie de start-up tournées vers le bien commun. A l’aube des années 2000, les nouvelles compagnies commencent à songer en termes de rentabilité et Google se met à vendre ses données au plus offrant. La pratique sera bientôt généralisée et des milliards de dollars de profits suivront.

    Et l’on découvre que les GAFA sont des entreprises capitalistes comme les autres, voire pire que les autres. Pour Tim O’Reilly, la tech s’inscrit dans la logique ultralibérale définie par l’économiste Milton Friedman. Dans une tribune publiée dans le New York Times Magazine le 13 septembre 1970, le futur Prix Nobel écrivait : « La responsabilité sociale des entreprises est de générer du profit. » Tim O’Reilly y voit le péché originel, le fruit défendu dans lequel ont croqué les GAFA. Jusqu’à ce que le paradis fantasmé ne devienne un enfer.

    La fronde des employés

    Le 1er novembre 2018, à 11 heures du matin, environ 20 000 employés de Google quittent leur poste de travail, sans un regard pour les open spaces bientôt déserts. Dublin, Chicago, Zurich ou Berlin, presque aucun bureau n’échappe à la « plus grande grève de l’histoire du droit du travail moderne », selon Ben Tarnoff, auteur du livre d’entretiens Voices from the Valley (2020, non traduit), organisée simultanément dans cinquante villes. Les employés modèles protestent contre les parachutes dorés offerts à plusieurs cadres dirigeants accusés de harcèlement sexuel – notamment Andy Rubin, créateur de la technologie Android, parti avec 90 millions de dollars.

    Cette « révolte de la tech » dans le plus grand moteur de recherche du monde avait débuté plus tôt dans l’année, contre le « Projet Maven » – un contrat noué avec le Pentagone pour améliorer le programme de drones américains à l’aide de l’intelligence artificielle. « Ces sujets sont devenus très importants au cours des deux dernières années, raconte Evan Greer, directeur adjoint de Fight for the Future, un organisme à but non lucratif militant pour la défense des droits des usagers du numérique. Et ils interrogent plus largement le but de toute cette technologie. »

    « Beaucoup d’entreprises se sont associées à des boîtes dont le seul but est de briser toute tentative de création de syndicat. » Ben Tarnoff, employé de la Silicon Valley

    Conscients de leur pouvoir immense, les employés de ces entreprises s’associent aux mouvements nationaux et internationaux, de Black Lives Matter aux différents cercles féministes impliqués dans la lutte contre le harcèlement et le viol depuis les révélations de #metoo en 2017. « Toutes ces actions ne viennent pas de nulle part, elles reposent sur une dynamique plus globale dans la société », souligne Evan Greer.

    Résultat, toute la « Vallée » est bientôt rythmée par les levées de boucliers : des employés pressent Microsoft d’abandonner ses liens et son projet à 10 milliards de dollars avec l’armée américaine ; en pleine administration Trump, l’entreprise Salesforce est pointée du doigt pour son partenariat avec les douanes américaines ; Amazon doit, pour la première fois, organiser des négociations avec les employés de ses hangars de tri. Alors, tout est en train de s’arranger ? Pas vraiment.Retour ligne automatique
    Représailles et surveillance

    « On dirait que c’est de nouveau le XIXe siècle », s’amuse Ben Tarnoff, comme pour tenir l’épuisement à distance. Par là, l’employé de la Silicon Valley fait référence aux « représailles agressives » tristement devenues la norme sous le soleil de la Californie. Dans les plus grandes entreprises, plusieurs leaders de ces mouvements spontanés ont été licenciés dans la foulée de leurs prises de parole publiques.

    En novembre 2020, le site d’information américain Motherboard révèle qu’Amazon a signé un généreux contrat avec l’entreprise Pinkerton, leader historique des agences anti-syndicats et spécialisée dans l’espionnage des employés prêts à sortir du rang. « Beaucoup d’entreprises se sont associées à des boîtes dont le seul but est de briser toute tentative de création de syndicat », précise Ben Tarnoff.

    Pour ne prendre aucun risque, les moyens de surveillance développés dans la Silicon Valley sont régulièrement utilisés en interne – même chez Google, l’une des entreprises les plus « libres » : les téléphones professionnels sont mis sur écoute, les serveurs internes prévus pour les échanges entre services sont rendus accessibles au management et des accords de confidentialité impitoyables sont imposés à certains employés. Le pire ? Tout ça fonctionne. Depuis l’année 2018, le nombre de manifestations publiques ou privées a drastiquement diminué. La routine semble avoir repris ses droits. Ben Tarnoff : « Après la frustration et la colère de voir leurs équipes se rebeller, beaucoup de cadres dirigeants ont adopté un discours réactionnaire. »Retour ligne automatique
    Les « réformateurs de la tech »

    D’autres ont pris le chemin inverse, renoncé à leurs salaires à six chiffres, leurs titres ronflants et leurs portefeuilles de stock-options, pour se lancer dans la mêlée. C’est le cas de Jim Balsillie, ancien PDG de l’entreprise RIM et créateur du célèbre BlackBerry, devenu en quelques années une figure centrale d’un jeune mouvement de « réformateurs de la tech ». Soit d’anciens cadres haut placés et chief executive officers (CEO) qui ont vu la bête de l’intérieur, le désastre potentiel et ont décidé de ne pas rester les bras ballants. « Je ne pensais pas que la tech deviendrait si toxique », regrette le multimilliardaire.

    Ses actions contre le projet de « smart city » pilotée par Google à Toronto, la ville où il a fait ses études, aux côtés d’associations locales, ses travaux avec le milliardaire hongrois George Soros pour le Forum économique mondial de Davos ou la création de plusieurs think tanks ont fait de lui un véritable « activiste », comme l’a résumé Shoshana Zuboff, influente autrice de L’Age du capitalisme de surveillance (Zulma, 2020). Aux côtés de puissantes personnalités de la Silicon Valley, comme Roger McNamee, ancien mentor de Mark Zuckerberg et investisseur star de Californie, ou Tristan Harris, ancien cadre de Google, il pointe la cupidité des nouveaux pontes de l’innovation, emportés par leur hubris et leurs rêves de monopole, encouragés par des succès tonitruants ou leurs réactions violentes face à la moindre tentative de contrôle.

    Jim Balsillie rappelle : « Dans l’histoire, le travail des enfants, l’esclavage et les déchets toxiques ont été bannis. Nous avons toujours imposé des règles pour contrôler le capitalisme, afin que le bien-être de la société reste l’objectif final. » L’entrepreneur aimerait bien que cela continue. Fin novembre 2020, 132 patrons, souvent jeunes, de sociétés de nouvelles technologies basées au Canada ont transmis une lettre ouverte au premier ministre Justin Trudeau qui, tel Obama il y a quelques années, semble sous le charme de la tech. Exigeant des garde-fous, ils l’ont invité à se montrer « responsable sur la question des données » pour favoriser la « construction de la nation », surtout dans une période de crise. « Il faut réguler, pointe le créateur du BlackBerry, c’est une question de démocratie. »

    La riposte des Etats

    En 2019, aux Etats-Unis, la Federal Trade Commission (FTC) a infligé une amende record de 5 milliards de dollars – la plus importante de l’histoire du pays – à Facebook, pour non-respect de la vie privée. Dans l’Union européenne, 8,25 milliards d’euros ont été demandés à Google pour abus de position dominante de 2017 à 2019, a tranché la commissaire à la concurrence Margrethe Vestager, qui a aussi permis l’avènement du règlement général sur la protection des données (RGPD), première base juridique solide pour contrer les GAFA.

    « Dans les cercles politiques, tout le monde sait désormais que ces entreprises ne sont pas forcément là pour agir dans l’intérêt de tous », précise Damian Collins, député conservateur au Parlement britannique. Grâce au soutien des idéalistes de la tech, et à son rôle au sein du Real Facebook Oversight Board – un groupe indépendant pour le contrôle des activités du réseau social –, l’homme politique a prévu de passer à la vitesse supérieure : des régulations contraignantes et internationales. « Ces entreprises sont présentes partout et nous sommes limités dans nos décisions nationales, justifie le membre du Parlement, donc nous avons par exemple instauré un grand comité international avec des parlementaires en Europe et dans le monde. »

    L’idée est en cours depuis deux ans déjà, et les premières avancées, des deux côtés de l’Atlantique, commencent à surgir, malgré l’absence presque totale de collaboration des GAFA. Le 9 décembre, la FTC et 48 Etats américains ont accusé Facebook d’avoir bafoué les lois anti-trust en rachetant des concurrents pour s’assurer un contrôle total de plusieurs marchés. Le 19 décembre, c’est Google qui a fait l’objet d’une troisième plainte en deux mois. Une coalition de 38 Etats a lancé des poursuites contre le géant de l’Internet là aussi pour pratiques anticoncurrentielles.

    Quant à l’Union européenne, elle a dévoilé, le 15 décembre, un plan d’attaque en deux volets : un Digital Service Acte (DSA) pour la régulation des contenus, et le Digital Market Act (DMA) afin de préserver la concurrence dans le numérique. Affaire à suivre. Gageons que les protestations – et les pressions – des géants du numérique seront à la hauteur des ambitions des législateurs.

    Habituellement, les premières « questions difficiles » posées, le dialogue se rompt très vite. « J’ai demandé à Facebook, dans un rendez-vous privé, de vérifier combien et quelles publicités avaient été achetées par des comptes russes pendant la campagne pour le Brexit », se souvient Damian Collins, lui-même en faveur du maintien dans l’UE. Les équipes de Zuckerberg proposent alors de vérifier des preuves que le parlementaire apporterait, sans avoir accès aux serveurs de l’entreprise. Difficile de faire plus, assurent-ils. « Puis ils ont ajouté qu’ils ne regarderaient pas et ne me donneraient pas l’information », poursuit le parlementaire britannique.

    Le poids des étudiants

    Pour rester optimiste, le milieu de l’année 2020 a déjà apporté une (petite) victoire. Pendant l’été, la grande entreprise de données Palantir Technologies, cofondée par Peter Thiel, un des seuls soutiens de Donald Trump dans la tech, a dû quitter Palo Alto. Et la Silicon Valley tout entière. Direction Denver, dans le Colorado, où l’entreprise a installé ses nouveaux locaux, prête à continuer à collaborer avec l’Immigration and Customs Enforcement (ICE) pour « optimiser » les renvois de réfugiés illégaux, présents sur le territoire américain, comme ce fut le cas durant toute l’administration Trump.

    Qu’est-ce qui a poussé la grande entreprise loin de la Côte ouest ? « Les étudiants », sourit Ben Tarnoff. Plusieurs milliers de jeunes, organisés dans seize universités différentes, dont Stanford, qui jouxte Palo Alto. Armés de pancartes désignant Palantir comme « social evil », ils ont réussi à faire ployer l’une des entreprises les plus mystérieuses et les plus puissantes du monde moderne. « Ce sont eux qui ont le pouvoir, précise l’auteur de Voices from the Valley. Cette boîte, comme beaucoup d’autres, recrute principalement à Stanford ou au MIT, et d’un coup ils ne pouvaient plus recruter. »

    La première victoire d’une longue série ? Cette stratégie a été appliquée dans d’autres cas, pour chambouler des géants comme Amazon. Sans succès. Ces entreprises et nos vies n’ont pas fini d’être intimement liées. Le sociologue Sébastien Broca raconte : « Dans le New York Times, il y a quelque temps, un consultant en nouvelles technologies a dit quelque chose que je n’arrive pas à oublier. Il expliquait que le nirvana vanté par la Silicon Valley avait du plomb dans l’aile, mais que nous, en tant que consommateurs, nous ne cessions de voter pour ces entreprises. »

    Après l’annonce du départ de Palantir, les étudiants de Stanford ont célébré leur victoire sur Instagram, Facebook ou TikTok. Puis, le soir même, certains ont probablement regardé une série Netflix, commandé un plat sur Uber Eats ou se sont offert un cadeau sur Amazon. Il fallait bien fêter ça.

    #Apple #Google #CambridgeAnalytica/Emerdata #NSA #Amazon #Facebook #GoogleSearch #algorithme #Dragonfly #consommation #manipulation #consentement #domination #BigData #GAFAM #GigEconomy #PRISM #syndicat #travail (...)

    ##CambridgeAnalytica/Emerdata ##FTC

  • Former NSA and CIA director says terrorists love using Gmail
    https://www.washingtonpost.com/news/the-switch/wp/2013/09/15/former-nsa-and-cia-director-says-terrorists-love-using-gmail

    Former NSA and CIA director Michael Hayden stood on the pulpit of a church across from the White House on Sunday and declared Gmail the preferred online service of terrorists. As part of an adult education forum at St. John’s Episcopal Church, Hayden gave a wide ranging speech on “the tension between security and liberty.” Follow the latest on Election 2020 During the speech, he specifically defended Section 702 of the Foreign Surveillance Intelligence Act (FISA), which provides the legal (...)

    #Google #Gmail #anti-terrorisme #FISA #PRISM #NSA #surveillance #CIA

  • Why using Google VPN is a terrible idea
    https://protonvpn.com/blog/google-vpn

    If there has ever been a year that demonstrates how central the internet is to society, it is 2020. We have relied on the internet this year for work, entertainment, and to keep us close to family. But the freedom and privacy of the internet are under attack. We have seen authoritarian governments around the world, including in Hong Kong, Iran, Belarus, and many other places, increasingly clamp down on internet freedoms to maintain power against the will of their citizens. We have also (...)

    #Google #NSA #VPN #anonymat #écoutes #FISA #surveillance

  • Les backdoors de la NSA restent un secret bien gardé
    https://www.01net.com/actualites/les-backdoors-de-la-nsa-restent-un-secret-bien-garde-1998209.html

    Un sénateur américain voulait en savoir plus sur la manière dont l’agence américaine implémentait désormais ses portes dérobées dans les technologies américaines. Sans surprise, il n’a pas eu de réponse. Selon Reuters, la NSA a récemment modifié sa politique liée à l’implémentation de backdoors dans les technologies américaines. Ce changement fait suite à deux événements, les révélations d’Edward Snowden et l’affaire Juniper, qui a intégré une backdoor dans ses produits VPN à la demande de la NSA. (...)

    #Juniper #NSA #algorithme #backdoor #surveillance

  • Spy agency ducks questions about ’back doors’ in tech products
    https://www.reuters.com/article/us-usa-security-congress-insight-idUSKBN27D1CS

    SAN FRANCISCO (Reuters) - The U.S. National Security Agency is rebuffing efforts by a leading Congressional critic to determine whether it is continuing to place so-called back doors into commercial technology products, in a controversial practice that critics say damages both U.S. industry and national security. The NSA has long sought agreements with technology companies under which they would build special access for the spy agency into their products, according to disclosures by former (...)

    #Juniper #algorithme #backdoor #surveillance #NSA #VPN

    https://static.reuters.com/resources/r

  • Comment le capitalisme de surveillance “transforme notre intimité en matière première”
    https://www.telerama.fr/idees/comment-le-capitalisme-de-surveillance-transforme-notre-intimite-en-matiere

    … et pourquoi il faut lutter contre. Dans “L’Âge du capitalisme de surveillance”, enfin traduit, Shoshana Zuboff, professeure émérite à la Harvard Business School, sonne l’alerte contre les géants du numérique qui nous dépossèdent de nos vies pour mieux les soumettre au marché.

    Au temps du tube cathodique, Jacques Ellul, l’un des grands penseurs de l’aliénation contemporaine, se posait déjà la seule question qui vaille vraiment à propos du pouvoir de la technique : « Une des illusions qu’on cherche à développer dans l’homme moderne, c’est de lui faire croire [qu’elle] le rend plus libre. […] Libre de quoi ? » À l’heure des réseaux sociaux et de la toute-puissance technologique, Shoshana Zuboff, professeure émérite à la prestigieuse Harvard Business School, prend le relais. Et sonne l’alerte. Nous sommes dépossédés de nos propres vies dans des proportions « indéchiffrables pour le cerveau humain ». Pire, plus nos spoliateurs en savent sur nous, moins nous en savons sur eux.

    Dans L’Âge du capitalisme de surveillance, un pavé de plus de huit cents pages sorti début 2019 aux États-Unis et enfin traduit en français (aux éditions Zulma), l’universitaire décrit minutieusement une société dystopique – mais bien réelle – dans laquelle les Google, Facebook et consorts capturent sans vergogne notre « surplus comportemental », raffinant le moindre atome de nos intimités numérisées pour leur seul profit. « C’est une double agression, contre notre autonomie et contre la démocratie », s’inquiète-t-elle, en livrant ce qui s’apparente à un opportun manuel de résistance.

    Celui-ci est d’autant plus notable qu’il n’émane pas d’une dangereuse radicale, bien au contraire : à la fin des années 1990, Shoshana Zuboff, prise dans une crise identitaire, a quitté son campus pour partir vivre dans une ferme. À l’époque, persuadée de faire partie du problème plus que de la solution, elle fait face à un choix : « Trouver un nouveau champ de recherche, ou chausser de nouvelles lunettes. » Ainsi a mûri sa charge – à mort – contre les tenants de ce « capitalisme renégat » qui nous traque tous, en permanence. Vous n’avez rien à cacher ? « Alors, vous n’existez pas. »

    Vous avez popularisé le terme « capitalisme de surveillance » depuis quelques années. Comment fonctionne-t-il ?

    L’effrayante spécificité du capitalisme de surveillance, c’est qu’il capture l’expérience personnelle pour la soumettre aux impératifs du marché. On pourrait même parler d’un marché de l’avenir humain. Ce capitalisme dévoyé transforme notre intimité en matière première qui, raffinée sous la forme de données, alimente une chaîne d’approvisionnement complexe. Dans ces usines d’un nouveau genre, on ne fabrique plus des produits mais des prédictions, individuelles et collectives. Ces conjectures, tirées de nos vies, émanent de nous, mais ne nous appartiennent pas. Elles nous concernent, mais ne nous reviennent pas.

    De la même manière que Ford aurait révolutionné le capitalisme en 1913, avec sa chaîne de production, vous posez le postulat que Google a inventé le capitalisme de surveillance au tournant du millénaire. Dans quelles circonstances ?

    Je situe sa naissance dans la Silicon Valley pendant l’éclatement de la bulle Internet, entre 2000 et 2001. À l’époque, de jeunes gens très intelligents dirigent des entreprises prometteuses, à l’intérieur desquelles ils inventent toutes sortes de services en ligne. Problème : ils ne gagnent pas d’argent. Là où le capitalisme industriel a réussi à transformer les ressources naturelles en énergie, les fleurons de cette nouvelle économie se révèlent incapables de répéter l’opération. Par conséquent, les investisseurs se retirent, et ils commencent à faire faillite les uns après les autres. Dans ce tableau, Google est perçu comme une pépite, mais même chez eux, il y a urgence.

    À vous écouter, ils n’étaient pas très doués pour le capitalisme !
    Jusqu’à ce qu’ils n’aient plus le choix, Sergey Brin et Larry Page, les fondateurs de Google, étaient publiquement opposés à la publicité ciblée. Quand ils ont commencé à regarder de plus près les données stockées sur leurs serveurs, des historiques de recherche, des miettes, des restes, ils ont réalisé qu’ils avaient à disposition un gisement gigantesque. C’est à ce moment-là qu’ils ont décidé d’exploiter notre surplus comportemental, que je nomme ainsi car il dépasse largement leurs besoins réels.
    “Au lieu de l’âge de l’information dont nous rêvions, fondé sur le partage de la connaissance permis par Internet, nous sommes renvoyés à un système féodal dans lequel des entreprises gigantesques peuvent influencer et contrôler nos comportements.”

    On touche ici une différence fondamentale. Le capitalisme industriel était une division du travail ; le capitalisme de surveillance, écrivez-vous, est une division de la connaissance. C’est-à-dire ?

    Il nous a fallu des décennies pour mesurer les conséquences du capitalisme industriel, pour déterminer par exemple que la dépendance aux énergies fossiles accélérait le réchauffement climatique. Aujourd’hui, nous sommes capables d’identifier les répercussions négatives du capitalisme de surveillance, à savoir la production secrète, effroyablement asymétrique, de savoir. C’est son effet le plus profond et le plus pernicieux, et il est indissociable d’un événement : le 11 Septembre. Au Capitole, juste avant que les tours jumelles s’effondrent, les parlementaires discutaient des contours d’une législation destinée à protéger la vie privée.

    En l’espace de quelques heures, George W. Bush a déclaré la « guerre contre la terreur », nous sommes entrés dans l’ère de l’information totale et dans une quête de certitudes. « Puisque nous n’avons pas su connecter les points, nous avons besoin de tous les points de tout le monde », ont dit les services de renseignement. Le département de la Défense, la CIA ou la NSA œuvrant sous les auspices de la Constitution américaine et obéissant à l’État de droit, il a fallu trouver une solution. Puisque Google et consorts n’étaient pas soumis aux mêmes contraintes, les autorités ont décidé de les laisser amasser richesse et pouvoir, afin qu’ils se chargent de connecter les points. Ainsi s’est forgée la symbiose entre la sphère publique et la sphère privée, entre la sphère du marché et celle du gouvernement.

    Pendant vingt ans, nous avons ensuite été aveuglés par notre optimisme sur le pouvoir libérateur de la technologie. Au lieu de l’âge de l’information dont nous rêvions, fondé sur le partage de la connaissance permis par Internet, nous sommes renvoyés à un système féodal dans lequel des entreprises gigantesques peuvent influencer et contrôler nos comportements. C’est une double agression, contre notre autonomie et contre la démocratie.

    Le pouvoir que vous décrivez est aussi immense qu’effrayant. Mais est-il vraiment effectif ?
    En 2001, Larry Page, le patron de Google, se référait à la capacité de calcul de ses serveurs en parlant de « [leur] intelligence artificielle ». Aujourd’hui, quand Google utilise cette expression, il s’agit d’un pouvoir sans commune mesure avec ces premières déclarations. Avec le capital qu’elles possèdent, ces entreprises visent le long terme. Pour entraîner son intelligence artificielle, Facebook ingère des trillions (milliards de milliards) de données chaque jour, afin de produire 6 millions de prédictions sur nos comportements par seconde. C’est une échelle inimaginable, indéchiffrable pour le cerveau humain.

    Pendant très longtemps, nous n’avions pas conscience de ce qui se jouait en arrière-plan. Puis le scandale Cambridge Analytica [du nom de cette officine britannique spécialisée dans le conseil politique qui a siphonné 87 millions de comptes Facebook au profit des campagnes du Brexit et de Donald Trump, ndlr] en 2018 a ouvert les yeux de l’opinion publique.
    “En 2016, le camp républicain a eu recours au micro-ciblage psychologique pour manipuler des comportements numériques qui ont des effets dans le monde réel. C’est ça le gagne-pain du capitalisme de surveillance.”

    Un récent rapport des autorités britanniques a tout de même montré que Cambridge Analytica a très largement survendu ses compétences…
    Mais personne ne peut nier que la campagne de Trump en 2016 a utilisé la technologie publicitaire de Facebook plus efficacement que quiconque. Le camp républicain a eu recours au micro-ciblage psychologique pour manipuler des comportements numériques qui ont des effets dans le monde réel. C’est ça le gagne-pain du capitalisme de surveillance.

    Vous estimez que le capitalisme de surveillance est « tyrannique », mais qu’il ne requiert « ni le fouet du despote, ni les camps ou les goulags du totalitarisme ». Avec l’omniprésence de nos smartphones, nos applications intrusives, nos objets connectés qui mouchardent, nous sommes devenus les agents consentants de notre propre enfermement. Plus que la manipulation cognitive, n’est-ce pas la plus grande victoire du phénomène que vous décrivez ?
    Nous nous sommes enchaînés nous-mêmes et c’est une intolérable tragédie. Dans nos sociétés libérales contemporaines, nous ne sommes pas éduqués à nous opposer au progrès technologique. Face à la dictature de l’inévitabilité, nous avons pourtant cruellement besoin d’alternatives et d’apprentissage citoyen. C’est d’autant plus problématique que les réseaux sociaux ont été inventés par des adolescents. Nous savons que ce moment de la vie désigne un soi inachevé.

    On construit sa personnalité et son libre-arbitre en se confrontant à l’altérité, au questionnement, à la dissonance. Or ces plateformes ne renvoient pas à des questionnements intérieurs – « Qui suis-je ? » – mais à des logiques de groupe. Des légions de pré-adolescents et de jeunes adultes sont profondément investis dans une machinerie conçue par d’autres adolescents et sont coincés dans un monde où ils sont constamment jugés par les autres. On parle souvent d’une économie de l’attention [qui consiste, dans la surabondance d’informations, à capter l’attention du public pour la valoriser économiquement, ndlr], mais c’est une confusion trompeuse. L’attention n’est que l’effet d’une cause, et cette cause, c’est un impératif économique qui demande une implication permanente.

    Craignez-vous que la pandémie, pendant laquelle nos vies se déroulent massivement en ligne, n’accélère cette dynamique ?
    À cause du coronavirus, l’Unesco estime que près de 300 millions d’enfants n’ont pas pu aller à l’école. C’est un chiffre sans précédent. Dans le même temps, Classroom, la plateforme d’apprentissage de Google à destination des enseignants, a multiplié par deux le nombre d’utilisateurs. Contrairement à ce que pensent les dirigeants des géants du numérique, cette consolidation n’est pas liée à un soudain afflux d’amour.

    Au contraire, deux enquêtes réalisées cet été montrent un renforcement du techlash (contraction de technology et backlash, ce mot-valise désigne le retour de bâton subi par les oligopoles de la Silicon Valley depuis deux ou trois ans, NDLR). La première dévoile que 75 % des Américains accordent plus d’importance à leurs données personnelles qu’au service offert par les plateformes ; 77 % pensent que ces entreprises ont trop de pouvoir ; 84 % ne leur font pas confiance. Dans la seconde, on apprend que la seule industrie moins populaire que Mark Zuckerberg est celle du tabac. Ces chiffres démontrent une véritable rupture entre le public et les Gafam, Facebook en particulier.

    “Je suis impressionnée par notre capacité collective à nous rassembler malgré l’isolement dans lequel nous sommes maintenus. C’est un premier pas et, désormais, il faut réussir à amener cette énergie dans l’arène politique.”

    Ce qui rend le moment aussi intéressant qu’incertain : sous le règne du capitalisme traditionnel, les classes populaires ont su s’unir pour défendre leurs droits en s’organisant en syndicats, en faisant grève, etc. Et face au capitalisme de surveillance ?
    Jusqu’à présent, nous n’étions que des utilisateurs, le terme dont nous affublent les plateformes. Une terminologie qui annonce notre anonymat interchangeable. En janvier 2019, j’ai quitté mon domicile pour trois semaines de tournée promotionnelle. Au bout du compte, j’ai voyagé pendant quatorze mois. Partout où je suis allée, aux États-Unis et en Europe, j’ai demandé aux gens de résumer en un seul mot pourquoi ils venaient à ma rencontre. En les compilant, j’ai réalisé qu’ils étaient récurrents et formaient un champ lexical parfaitement cohérent : liberté, anxiété, démocratie, manipulation, contrôle, résistance, colère, rébellion, action, invasion, peur, vie privée, vol, droits, autonomie, constitution, pouvoir, justice.

    Je suis impressionnée par notre capacité collective à nous rassembler malgré l’isolement dans lequel nous sommes maintenus. C’est un premier pas et, désormais, il faut réussir à amener cette énergie dans l’arène politique. Nous allons devoir inventer de nouveaux modes d’organisation, qui seront probablement différents des institutions du XXe siècle. Je pense par exemple au Real Facebook Oversight Board, lancé au mois de septembre et dans lequel je siège avec vingt-cinq autres membres de la société civile [ce collectif a été créé afin de surveiller l’Oversight Board officiel, « cour suprême » du réseau social chargée d’arbitrer les différends liés aux contenus, ndlr].

    Des armes anciennes pourraient toutefois être efficaces, comme les lois antitrust. Pensez-vous qu’il faille démanteler Facebook ou Google ?
    Ce n’est qu’une partie de la solution. Ces lois ont été conçues pour répondre à d’autres situations. Une entreprise comme Amazon était une impitoyable capitaliste avant de devenir une impitoyable capitaliste de surveillance. Autour de 2015, son patron, Jeff Bezos, a commencé à prendre conscience des incroyables revenus générés par les dividendes de la surveillance, et il s’est mis à réfléchir à un moyen d’embrasser ce modèle, en plus des pratiques dont il était déjà coutumier, qu’il s’agisse d’exploiter sa main-d’œuvre ou d’éliminer la concurrence.

    On pourrait dire la même chose de Facebook ou de Google. Il est vital que nous mesurions l’ampleur exacte du problème que nous tentons de résoudre. Quand les dirigeants de ces entreprises sont auditionnés au Congrès américain, il est surtout question d’invasion de la vie privée, de géolocalisation clandestine, du risque de désinformation. Ces interrogations montrent bien qu’il ne s’agit pas seulement de démanteler des monopoles. En Europe, le Règlement général sur la protection des données [entré en vigueur en mai 2018, ndlr] montre à la fois la voie et qu’il est bien trop tôt pour sabrer le champagne.

    Vous parlez d’un « capitalisme renégat » comme s’il était accidentel. Cela signifie-t-il qu’il peut être réformé ?
    Le capitalisme possède cette propriété que l’historien Fernand Braudel nommait « la longue durée ». Il faut l’analyser à travers ce prisme, en prenant en compte les spécificités de son époque, en l’occurrence le numérique. Je le nomme renégat car il renie certains aspects du capitalisme de longue durée, indispensables à sa durabilité, particulièrement l’idée d’offre et de demande. Même si Marx ou Schumpeter [le théoricien de la fameuse destruction créatrice, ndlr] ne partagent évidemment pas la même vision sur ses effets, le capitalisme, aussi violent et inégalitaire soit-il, a appris à améliorer les sociétés, en renforçant par exemple les classes moyennes.
    “Le capitalisme de surveillance ne s’intéresse ni à la réciprocité de l’offre et de la demande, ni à la résolution des problèmes que rencontrent les individus. Comme la financiarisation, c’est une forme entièrement parasite, et il n’y a rien à en sauver.”

    Le capitalisme de surveillance s’éloigne de ce modèle en ce sens qu’il détourne la technologie de notre époque à des seules fins d’accumulation. Il ne s’intéresse ni à la réciprocité de l’offre et de la demande, ni à la résolution des problèmes que rencontrent les individus. Comme la financiarisation, c’est une forme entièrement parasite, et il n’y a rien à en sauver. Je ne pense pas qu’on puisse dire la même chose du capitalisme industriel, qui a su en partie épouser les formes d’une société démocratique.

    Pour conclure sur une note plus personnelle et universelle, vous militez pour un droit au sanctuaire. Que répondez-vous à ceux, nombreux, qui prétendent qu’ils n’ont rien à cacher ?

    Si vous n’avez rien à cacher, vous n’existez pas. C’est une intoxication dangereuse. Cela revient à vous laisser détrousser de votre vie privée, à abandonner toute solitude et à ouvrir votre intimité à n’importe laquelle de ces entreprises. Dire que vous n’avez rien à cacher, c’est accepter votre condition d’utilisateur vide, uniquement défini par le rapport qu’il entretient avec les technologies qu’il utilise.

    #Alphabet #Google #DoD #NSA #CIA #algorithme #bénéfices #BigData #surveillance #microtargeting

  • How the U.S. Uses Technology to Mine More Data More Quickly
    https://www.nytimes.com/2013/06/09/us/revelations-give-look-at-spy-agencys-wider-reach.html

    WASHINGTON — When American analysts hunting terrorists sought new ways to comb through the troves of phone records, e-mails and other data piling up as digital communications exploded over the past decade, they turned to Silicon Valley computer experts who had developed complex equations to thwart Russian mobsters intent on credit card fraud. The partnership between the intelligence community and Palantir Technologies, a Palo Alto, Calif., company founded by a group of inventors from (...)

    #NSA #Paypal #BigData #Anduril #Palantir #PRISM #Maven #payement #scraping #câble

  • NSA Spying
    https://www.eff.org/nsa-spying/faq#38

    What is the NSA domestic spying program ? In October 2001, President Bush issued a secret presidential order authorizing the NSA to conduct a range of surveillance activities inside of the United States without statutory authorization or court approval, including electronic surveillance of Americans’ telephone and Internet communications. This program of surveillance continues through today, although the legal justifications have changed over time, and works with the major (...)

    #algorithme #NSA #AT&T #anti-terrorisme #écoutes #FISA #PatriotAct #surveillance #EFF

    ##AT&T

  • 1984, George Orwell
    https://www.franceinter.fr/emissions/affaires-sensibles/affaires-sensibles-02-octobre-2020

    1984, Londres, capitale d’Océania. Les Socialistes ont pris le pouvoir depuis longtemps. Dans son appartement, Winston Smith, fonctionnaire du ministère de la Vérité, écrit son journal profitant d’un angle mort pour fuir la télésurveillance. Pourra-t-il continuer son œuvre ? Pas sûr : « Big Brother is watching you ». 1984 de George Orwell fait partie de ces livres qui sont à la fois des classiques et qui redeviennent parfois d’actualité. La preuve par deux événements : 1/ Le scandale de la NSA (...)

    #NSA #vidéo-surveillance #écoutes #PRISM #surveillance #art