person:alexandre grothendieck

  • Les archives insaisissables d’Alexandre Grothendieck
    https://www.lemonde.fr/sciences/article/2019/05/06/les-archives-insaisissables-d-alexandre-grothendieck_5459049_1650684.html

    Attendez là, si je comprends bien, il faudrait 500 000 € pour que les manuscrits d’Alexandre Grothendieck entrent à la BnF. Mais c’est une somme dérisoire en regard de l’importance de ce personnage, tant pour les mathématiques que pour l’écologie (création du premier groupe écolo dans les années 70 : Survivre et Vivre"). (il me semble que c’est l’équivalent d’un kilomètre d’autoroute !).

    Quelque 70 000 pages d’un géant des mathématiques, mort en 2014, dorment dans une cave, à Paris. Ces manuscrits, rédigés alors qu’il vivait en ermite dans l’Ariège, restent à déchiffrer. Aucune institution ne s’est encore emparée de cet héritage compliqué.

    Que peut-on dire de ses derniers écrits ? Un naufrage de la pensée ? Un affaissement de la raison ? Un engloutissement de l’intelligence ? Tout est vrai, mais il faudrait qualifier cet effondrement de grandiose, quand Alexandre Grothendieck tente d’arracher de l’oubli les 76 000 déportés juifs de France, parmi lesquels se trouvait son père. Il avait eu l’esprit le plus ordonné, le chaos a fini par prendre le dessus. Il a laissé un témoignage, poignant parfois, de cette quête humaine ou de cet égarement, s’en prenant sans cesse au diable qui lui avait retiré le plaisir de chercher.

    Reste évidemment à faire l’essentiel : transformer les « gribouillis » – le mot appartient à Alexandre Grothendieck – en texte lisible. C’est un travail immense qui demandera sûrement l’expertise d’un logiciel capable de lire l’écriture de l’ermite de Lasserre. Après, on saura s’il faut parler d’or ou de plomb. Quand vous posez la question à un mathématicien x, y ou z dans un espace à trois dimensions, la réponse est toujours la même. Il respire profondément, assure qu’il n’y a proba­blement rien à en tirer et ajoute aussitôt : « Mais c’est du Grothendieck, alors il faut regarder. »

    Le coût de l’opération ? Moins de 500 000 euros pour mettre à l’abri une cathédrale mathématique et humaine qui permettra d’observer comment le cerveau, qui créa des outils pour ordonner des espaces qui nous échappent encore, a pu s’enfoncer dans le désordre. On peut aussi dire que ces écrits sont indésirables. Sinon, il faut résoudre l’opération de l’héritage et dire combien cela vaut, entre epsilon et l’infini.

    #Alexandre_Grothendieck #Mathématiques #Archives

  • En mathématiques, les filles restent des inconnues - Libération
    http://www.liberation.fr/debats/2018/06/21/en-mathematiques-les-filles-restent-des-inconnues_1660876

    Article déjà mis en lien ici : https://seenthis.net/messages/703974 mais j’ai fait un copier coller pour les personnes qui ne savent pas désactiver javascript vu le paywall de Liberation à partir d’un certain nombre d’articles lus.

    Normale Sup, Polytechnique… Les grandes écoles scientifiques peinent à faire de la place aux filles. Une discrimination insidieuse que certaines vont jusqu’à intégrer. « Libération » a rencontré de jeunes mathématiciennes qui racontent les stéréotypes auxquels elles font face et leur combat pour s’en affranchir.

    Zéro. Aucune fille n’a intégré le département de mathé­­ma­tiques de l’Ecole normale ­supérieure (ENS) de la rue d’Ulm (Paris) l’an dernier. Voilà, un problème réglé. Après la disparition, en 1985, de l’ENS jeunes filles de Sèvres la prédominance des « mâles » n’a cessé de se confirmer.

    Elles s’appellent Edwige, Lola, ­Sonia, Camille, elles ont réalisé un parcours sans faute, mais pas sans douleurs, pour s’imposer parmi les meilleurs élèves de la filière des mathématiques. Elles ont intégré l’une des ENS ou l’Ecole polytechnique, et racontent les petites vexations et les grands préjugés, les révoltes et les victoires remportées contre le mécanisme qui voudrait qu’elles n’aient rien à faire dans le domaine des mathématiques, qu’elles soient appliquées ou fondamentales.

    Il y a d’abord Camille (2), une trajectoire rectiligne à « Stan », Stanislas un établissement privé situé dans le VIe arrondissement de Paris, du collège à la prépa. Brillante, elle a le choix des meilleurs  : l’ENS et Polytechnique, l’X. Elle choisit la seconde. Neuf filles sur 30 élèves en terminale S, neuf sur 50 en math sup, et quatre sur 42 en math spé, sans que cela suscite d’interrogation  : « Je n’ai jamais senti de différence de traitement entre filles et garçons. »

    Pourtant Edwige, Sonia et Lola ont une autre vision des choses. A des degrés différents, elles racontent une discrimination palpable ou impalpable qui leur donne des envies de combattre pour l’égalité des filles et des garçons en maths.

    Egaux devant Pythagore

    A la veille de l’été 2017, Lola était aussi admise à l’ENS, rue d’Ulm d’où sont sorties toutes les médailles Fields de France à l’exception d’Alexandre Grothendieck. Elle préférera elle aussi le campus de l’X à Palaiseau. Au collège à Vanves, celui que les contourneurs de carte scolaire évitent et où elle a voulu rester, Lola est dans les meilleures élèves. Les 17, succèdent aux 19, sans efforts particuliers. Filles ou garçons, il n’y a pas de différence. Tous égaux devant Pythagore.

    Bonne élève, elle intègre le lycée Louis-le-Grand en seconde. Les notes chutent, mais elle bosse et intègre « la » 1ère S1, et la TS1, « la » terminale S qui donne accès à « la » classe prépa qui permettra d’accéder à l’une des quatre ENS (Ulm, Rennes, Lyon, Paris-Saclay, l’ex-Cachan) ou à l’X. En TS1, la parité est respectée 50 % de filles 50 % de garçons.

    C’est ensuite que tout se complique. Lola se voit reléguée tout au fond la classe  : 35e, 35e, 36e aux trois premiers contrôles. En janvier, elle doit choisir entre faire autre chose ou s’accrocher. A la maison, son père ne cesse de lui répéter que les filles sont meilleures que les garçons. Le stéréotype qui veut que les mathématiques ne sont pas faites pour les filles tourne dans l’autre sens. « J’ai repris les bases, repassé les programmes de 1ère et de TS, quand le professeur était déjà passé au programme de math sup. » C’est à ce moment qu’elle découvre le sexisme très ordinaire qui traîne dans les couloirs d’un grand lycée parisien. « On pardonne très facilement aux garçons de ne faire que des maths. Ils peuvent s’enfermer dans le travail, ne faire que bosser, passer de l’internat aux salles de cours en peignoir, en survêtement ou même en pyjama. C’est presque normal. On dira  : “C’est un bosseur”. Des filles, on attend autre chose. Il faut qu’elles soient sympathiques, qu’elles préparent le buffet pour les fêtes, qu’elles s’investissent dans la vie de la classe. Elles doivent “jouer les princesses” et passer du temps à se préparer. On perd un temps fou, et pendant ce temps, les garçons bossent et passent devant. Moi, je descendais comme j’étais, et tant pis si ça provoquait des remarques », s’agace Lola qui refuse la division surhommes et princesses, nouvelle version du « Sois belle et tais toi  ! ». Elle remonte à la 17e place et intègre finalement « la » bonne prépa.

    « Travailler dur »

    Sonia raconte un parcours similaire. Elle aussi se dit « ni bonne ni mauvaise » élève, quand les garçons souligneraient la puissance de leur machine cérébrale. Elle aussi échappe aux stéréotypes familiaux, avec une mère anglaise féministe virulente, un père mexicain, l’un et l’autre artistes plasticiens. Après la seconde à Louis-le-Grand, elle voit les garçons lui passer devant sans qu’elle comprenne bien pourquoi. Pas de 1ère S1, pas de TS1, pas de prépa « étoilée ». « On proposait à des garçons moins bien notés que moi d’aller dans les bonnes math sup, et je me suis retrouvée en MP5 [la classe préparatoire qui ne prépare pas aux meilleures écoles, ndlr]. Ça m’a révoltée, et, du coup, je me suis mise à travailler dur. » Elle raconte les perles du sexisme ordinaire en classe prépa  : « Pour une matheuse t’es bonne », sous entendu « t’es mignonne  ! ». « Une fille, enfin elle compte pour une demie. »« Un jour, un garçon fait le décompte des filles en prépa et il ajoute  : “Elle, elle compte pour une demie.” Il fallait la disqualifier parce qu’elle ne faisait pas assez ­attention à son look  ! » L’un des meilleurs élèves de la prépa lancera en cours de philo que la place de la femme est à la maison pour s’occuper des enfants. Plus tard, une fois intégrée l’X, Lola entendra dire en stage qu’elle n’allait pas toute sa vie faire des maths, qu’il fallait songer à se marier et à faire des enfants.

    Le syndrome de la vieille fille allume des clignotants dans tous les sens  : « Le garçon est prêt à s’enfermer dans les études, quand la fille n’a pas de temps à perdre pour trouver un mec. » En dépit des obstacles, elle intégrera l’ENS-Lyon où le sexisme s’atténue peut-être parce que les femmes ont disparu, elles sont quatre sur 40 élèves. Pour décrire un monde où les mâles dominants s’agrègent, elle évoque la salle du concours où se retrouvent les postulants à Polytechnique  : « Un océan de mecs. Là, j’ai senti la différence, ça n’était pas la place pour une fille. »

    Conscience collective

    Edwige partage le constat de Lola et Sonia sur la mise à l’écart ­insidieuse des filles, mais elle veut transformer le discours individuel en une arme collective dans un domaine où la solidarité féminine est presque inexistante. « Les filles ne se voient pas comme les victimes d’un système, la solidarité féminine est inexistante. Chacune pense qu’il s’agit d’un problème individuel. A chacune de trouver la solution, il n’y a pas de sororité, vraiment il n’y a aucune solidarité », estime Edwige qui a choisi l’ENS-Lyon.

    Pour susciter une prise de conscience collective, Edwige organise dans le cadre d’Animath (1) des week-ends « Filles et Maths » avec des rencontres avec des mathéma­ticiennes de métier et des ateliers d’algèbres, de géométrie ou d’arithmétique. Faut-il faire des quotas dans les préparations aux grandes écoles pour les filles  ? « Pourquoi pas  ? La loi ORE (3) a fixé des quotas pour les boursiers, pourquoi pas pour les filles  ? »

    L’idée a été évoquée à l’ENS-Lyon tant le désarroi est grand face à la raréfaction des filles dans le département de mathématiques, admet Emmanuelle Picard, sociologue impliquée dans un groupe d’études mis en place par les ENS pour comprendre l’incompréhensible. Pourquoi les filles représentent 20 % des élèves en prépa, 16 % des candidats au concours MP des ENS, celui qui privilégie les maths, 8 % des admissibles et 5 % des intégrées par concours  ? Et question subsidiaire  : comment remédier à cette situation  ? « La pression sociale, les stéréotypes qui classent, rangent les garçons du côté des chiffres et les filles du côté des lettres tout cela est vrai, mais il faut comprendre ces phénomènes pour comprendre à quel moment les filles s’éliminent », explique la sociologue.

    « Avoir une barbe »  ?

    Rozzen Texier-Picard, mathématicienne et vice-présidente chargée des questions liées à la diversité à l’ENS-Rennes, avoue ne pas avoir trouvé la solution à un problème qu’elle examine depuis plusieurs années  : « Nous avons intégré les matières littéraires, le français et les langues dès l’admissibilité pour le concours 2018, et nous allons voir ce que cela donne », dit-elle sans attendre un bond spectaculaire.

    Elyès Jouini, mathématicien, vice-président de l’université Paris-Dauphine et coauteur de plusieurs études, n’a pas beaucoup plus de certitudes pour expliquer la sexuation des maths. « Beaucoup d’efforts ont été réalisés pour réduire l’écart entre le niveau moyen des filles et des garçons. Mais, quand on regarde le haut du panier, les 5 % qui se trouvent tout en haut de la pyramide, les garçons s’imposent à chaque fois qu’il y a une sélection. Là, les archétypes et les stéréotypes fonctionnent, et quand il s’agit de se présenter à un concours réputé difficile, les garçons iront quand ils ont 12 ou 13, les filles attendront d’avoir 15 ou 16. Prenez un pays comme la Norvège qui a sans doute le plus fait pour effacer les écarts entre femmes et hommes, le biais mathématiques demeure. »

    La situation est-elle désespérée  ? Pas tout à fait. Elyès Jouini rappelle qu’au XVIIIe siècle, l’un des cerveaux les plus brillants de l’Europe s’éclairant à la raison, Emmanuel Kant, estimait que les filles n’étaient pas faites pour les lettres classiques  : « Une femme qui sait le grec est si peu une femme qu’elle pourrait aussi bien avoir une barbe. » Faudra-t-il attendre un siècle ou deux pour que les choses s’arrangent  ? « Si nous voulons maintenir le niveau de l’école française de mathématiques, on ne peut pas se passer de la moitié de la population », constate un mathématicien pressé de voir les choses bouger, sans savoir comment faire. Inutile de porter attention aux explications mettant en cause des différences fondamentales entre les deux sexes, sinon en donnant la parole à un enfant de 5 ans rentrant de l’école  : « Le cerveau des filles ne tourne pas dans le même sens que celui des garçons. »

    Une autre scène vaut la peine d’être racontée. Un matin de juin, les enfants de l’école maternelle de la rue Clauzel à Paris sont déguisés pour fêter la fin de l’année. Toutes les filles sont en princesses, sauf une, habillée en catwoman. Les garçons sont tous en super-héros, sauf un pirate. Et un tigre pas du tout méchant.
    (1) Animath est une association qui cherche à promouvoir les mathématiques auprès des jeunes.
    (2) Nous ne parlerons à aucun moment du physique des jeunes femmes que nous avons rencontrées, pour ne pas avoir à aborder cette question qui voudrait qu’une fille qui fait des maths sacrifie sa féminité.
    (3) Loi du 8 mars 2018 relative à l’orientation et à la réussite des étudiants.

    Philippe Douroux , Magalie Danican

    Par contre je ne suis pas d’accord avec l’argument qui cite Kant et les lettres classiques. Tout le monde le sait, le problème ce ne sont pas les maths en eux mêmes mais le fait que c’est la matière qui est considérée comme un marqueur d’excellence et de sélection. Donc si les maths cessent d’être cet outil de sélection, il n’y aura aucun souci et les filles deviendront aussi bonnes en maths que les garçons pendant que la matière qui sera devenue matière marqueur d’excellence, la géographie par exemple, sera squattée par les garçons. Ça ne voudra absolument pas dire que l’éducation mettre filles et garçons sur le même pied d’égalité. C’est ce qui s’est passé avec les humanités qui jouaient ce rôle avant les maths, raison pour laquelle Kant évoque les lettres classiques.

    #mathématiques #sexisme #orientation #éducation #discriminations #école #filles #genre

    • Je sais plus ou j’avaiis lu ca et je vais chercher ou c’étais, mais le pbl des choix d’orientations n’est pas lié au fait que les filles ne vont pas en sciences, maths, mais ce déséquillibre serait lié au fait que les garcons desertent les secteurs féminisés. Les filles font des maths, mais les garçons evitent totalement les branches féminisées pour ne pas passer pour féminins. Il ne manque pas de programmes pour inciter les filles a faire des etudes de math, mais des programmes pour inciter les garçons à choisir les fillières féminisées (qui sont méprisées e dévalorisées parceque féminisées, avec tres faibles salaires et progressions de carrières) c’est ca dont on aurais besoin.

      edit c’est ici : https://seenthis.net/messages/704072

      [Les garçons] se retrouvent de manière très concentrée en S (69 %) alors que les filles se répartissent dans les 3 séries de manière plus équilibrée et choisissent préférentiellement la section S, à l’opposé de ce que l’on pense généralement (…). Contrairement aux injonctions qui leur sont faites, les filles n’ont pas, du moins au niveau de l’enseignement secondaire général, un problème de diversification des choix d’#orientation.

      […] C’est l’observation de la répartition des filles et des garçons, pas seulement la proportion des filles dans les filières, qui révèle le jeu du #genre, c’est-à-dire l’impact du système féminin/masculin sur les orientations des deux sexes. C’est cela qui doit nous poser question et non pas seulement le constat de la moindre orientation des filles vers les sciences et techniques. On devrait effectivement se demander d’une part, pourquoi les filles sont attirées par les secteurs du soin, de l’éducation, du social et, d’autre part, pourquoi l’absence des garçons dans ces filières et métiers ne fait pas problème.

      […] Le survol rapide que l’on vient d’en faire [des politiques de promotion de l’égalité] pour les quarante dernières années révèle qu’il est quasi exclusivement question de l’orientation des filles vers les sciences et techniques. On ne se préoccupe pas réellement du fait que la division sexuée de l’orientation touche aussi les choix des garçons, comme nous l’avons souligné plus haut. L’absence des garçons des filières littéraires et sociales, du soin et de l’éducation, ne fait pas question, elle n’est pas une préoccupation sociale et politique. Par ailleurs, ces politiques concentrent beaucoup d’énergie sur l’information, comme si l’absence des filles dans les filières visées provenait essentiellement de leur manque d’informations objectives sur ces secteurs. Enfin, on semble croire que la diversification des choix d’orientation des filles produira de facto l’égalité des sexes en matière de formation et d’emploi. Il suffirait que les filles soient présentes pour que disparaissent les inégalités entre sexes… L’aveuglement, aux rapports sociaux de sexes qui régissent la société, donc l’école et le travail, laisse perplexe.

      Comme d’habitude on rend les filles et les femmes responsables des discriminations qu’elles subissent et jamais on ne dit ni ne fait rien qui puisse vaguement incommodé le moindre garçon ou homme.

  • Les notes du mathématicien Alexandre Grothendieck arrivent sur le net - Libération
    http://www.liberation.fr/sciences/2017/05/05/les-notes-du-mathematicien-alexandre-grothendieck-arrivent-sur-le-net_156

    Si la question des archives de Montpellier est réglée, il reste maintenant à trouver une solution pour les 65 000 pages de Lasserre. Seront-elles vendues ? Seront-elles accessibles un jour ? Pour l’instant, la Bibliothèque nationale de France (BNF) et l’Institut des hautes études scientifiques (IHES) ne parviennent pas à formuler une offre aux enfants du mathématicien. La question clé étant : ce trésor a-t-il un prix ?

    Ceux qui cliqueront sur les archives Grothendieck doivent être prévenus d’une chose. Il se trouve au pied d’un Himalaya des mathématiques, puisque chaque feuille manuscrite nécessite une dizaine d’heures de travail pour un géomètre algébriste rompu aux « gribouillis » grothendieckien. Les choses misent à plat, le travail commence.

    Pour organiser le décryptage, il faudra sans doute qu’une équipe de mathématiciens s’organise à travers la planète, sur le modèle des Polymaths. Un mathématicien pose une question, et qui détient un bout de la réponse apporte sa contribution. La publication scientifique finale pourrait mentionner une quarantaine de signatures de chercheurs qui ne se seront croisés que numériquement.

    #archives-scientifiques #mathématiques #collaboration

  • La géométrie algébrique, l’étincelant monde de Claire Voisin

    http://www.lemonde.fr/sciences/article/2016/12/12/la-geometrie-algebrique-l-etincelant-monde-de-claire-voisin_5047653_1650684.

    Pour cette chercheuse sans concession, qui reçoit cette année la Médaille d’or du CNRS, rien ne peut égaler la beauté des objets mathématiques.

    Je suis Claire Voisin et je démontre des théorèmes. » Voici, comment, sobrement, se définit la récipiendaire de la dernière Médaille d’or du CNRS, qui lui sera remise le 14 décembre. Cette mathématicienne de 54 ans est aussi, depuis cette année, professeure au Collège de France, auprès de ses collègues Alain Connes, Pierre-Louis Lions et Gérard Berry.

    « J’étais horrifiée au début », avoue-t-elle. Non à l’idée de rejoindre la prestigieuse institution, mais à celle de quitter le CNRS, autre lieu ­d’excellence, uniquement consacré à la recherche. « Une structure protectrice », explique la ­chercheuse, qui livre des ­confessions ­rares sur son travail quotidien. « Souvent, en maths, on ­souffre. Trouver des idées est difficile. On a les problèmes en tête, mais on cherche le fil pour commencer. A cela s’ajoutent les difficultés ­techniques à contourner », décrit Claire Voisin, qui dit même avoir déjà été « aux trois quarts » dans un demi-désespoir. « Mais parfois, on a aussi un sentiment de triomphe ! »

    Le « parfois » est en fait assez fréquent chez elle, comme en témoignent les récompenses reçues : prix de la Société européenne de ­mathématiques en 1992, prix de la fondation Clay en 2008, ainsi qu’une conférence plénière en 2010 au Congrès international quadriennal de mathématiques. Distinctions auxquelles s’ajoutent les Médailles de bronze, puis d’argent du CNRS. « Claire est une étoile internationale en maths », souligne Leila Schneps, amie de trente ans, chercheuse à l’Institut de mathématiques de Jussieu et traductrice en anglais d’un livre référence de sa collègue (Hodge Theory and Complex Algebraic Geometry, 2007).

    « Elle associe une grande créativité, en sortant des sentiers battus, et une grande technique, en n’hésitant pas à mettre les mains dans le cambouis quand il faut », résume Arnaud Beauville, professeur émérite à l’université de Nice et ­directeur de la thèse de cette étudiante brillante, entrée à l’Ecole normale supérieure de Sèvres en 1981. « Elle est généreuse dans ses idées. Elle a une grande culture mathématique et ­connaît beaucoup d’exemples qu’elle partage avec étudiants et collaborateurs », apprécie l’un de ses anciens étudiants en thèse, François Charles, aujourd’hui professeur à l’université Paris-Sud. Il souligne aussi son « exigence », ­envers elle-même et ses étudiants.
    Preuve par l’exemple. Lorsque nous la rencontrons dans son nouveau bureau encore vide du Collège de France, elle vient de corriger la version écrite de sa leçon inaugurale du 2 juin, car il manque «  : » dans une phrase. « Un énoncé mathématique est économique, on ne peut remplacer un mot par un autre », tranche-t-elle. « Comme son livre, Claire est complète, ­efficace et sévère », décrit Leila Schneps. « Ça ne fait pas de prisonniers », complète Arnaud Beauville en reprenant les mots d’un critique anglophone de ce livre, pour souligner l’absence de concessions de l’auteure.

    Claire Voisin excelle dans une branche très abstraite des mathématiques, la géométrie ­algébrique. Comme le nom l’indique, il s’agit d’étudier des formes (la géométrie) décrite par des opérations et des équations (l’algèbre). Ainsi, un cercle peut soit se dessiner, soit se décrire comme le lieu des points tels que x2 + y2 = 1. Selon les problèmes, se placer dans un formalisme ou dans l’autre peut simplifier la tâche. Bien sûr, très vite, cela se complique. Les équations sont des polynômes avec des puissances plus grandes que 2 et avec des coefficients qui peuvent être complexes (un « pays » où un nombre au carré peut être négatif). Les surfaces sont appelées « variétés » et peuvent, elles aussi, s’épanouir dans de plus grandes dimensions que les deux ou trois habituelles. Les structures sont des « motifs », les outils des « cohomologies », les coïncidences des « syzygies »…
    La discipline est marquée par l’un des génies des maths, Alexandre Grothendieck, disparu en 2014, et qui est aussi célèbre pour sa rupture avec sa communauté dans les années 1980. Claire Voisin n’en fait pas son unique maître et le juge d’ailleurs trop « mégalo » et « misogyne ». Elle lui préfère, pour le style, Jean-Pierre Serre, Pierre Deligne ou encore Phillip Griffiths.

    Son résultat favori est « d’avoir détruit l’intuition des gens », sourit la chercheuse. Elle a en ­effet démontré qu’une conjecture était fausse ! Beaucoup pensaient qu’en « déformant » une certaine famille de variétés, très générales, on pouvait toujours se ramener à des variétés algébriques, plus « structurées » et plus connues. Eh bien non, mais cela repose sur des subtilités à la saveur réservée aux initiés.

    Alain Connes préfère, lui, mettre en avant un résultat ayant intéressé les physiciens qui se penchent sur la théorie des cordes, un domaine qui tente de dépasser les théories actuelles de physique des particules. Claire Voisin a contribué à jeter des ponts entre des concepts a priori éloignés. « Avec les physiciens, j’avais un peu l’impression de servir à plâtrer les choses et d’être considérée comme subalterne », témoigne la mathématicienne. « Les physiciens traversent le décor. Ils écrivent vite et passent à autre chose, quand nous, nous creusons. On a du mal à discuter », tranche celle qui n’hésite pas à dire qu’elle était nulle en physique à l’école et que ses erreurs « la faisaient éclater de rire ».

    Des objets lumineux

    C’était différent pour les maths, qui l’amusaient. « On ne s’ennuie jamais quand on fait des maths !, explique la chercheuse qui, adolescente, pouvait passer quinze jours de vacances à bûcher des problèmes d’olympiades. Mais je ne pensais pas en faire mon métier, car cela ne me semblait pas assez intellectuel. » Elle ajoute : « C’est très différent aujourd’hui. »

    Elle a été « happée » par ces objets mathématiques, se jetant intensément dans ce monde des variétés algébriques complexes. « On a une vie tellement riche, en maths, que la vie quotidienne fait pâle figure. Notre vie est étincelante. Les ­objets y sont riches, lumineux, d’une beauté ­incroyable. On n’en finit pas de les admirer ! » Et d’enfoncer le clou : « Un groupe est un objet mathématique plus simple à comprendre qu’un composant électronique. Nous connaissons mieux nos objets que la plupart de ceux, réels, autour de nous. »« Claire Voisin connaît personnellement toutes les variétés algébriques », résume ironiquement Alain Connes, paraphrasant une boutade célèbre chez ses collègues.

    La chercheuse s’épanouit donc dans ces espaces étranges. Elle tourne même autour d’un problème mis à prix à 1 million de dollars par la fondation Clay. Cette conjecture dite « de Hodge » est une proposition dont on ne sait même pas si elle est vraie. Il y est question d’une structure cachée des variétés. « Ce qui compte, c’est la profondeur d’un énoncé, pas qu’il soit vrai ou faux », note la chercheuse, qui a démontré pas mal de conjectures autour de ce haut sommet de sa discipline. « Je n’aime pas trop l’idée de mettre à prix des énoncés. Les lire est déjà intéressant en soi. On sent qu’ils appellent une théorie, qu’ils structurent les maths », indique-t-elle, décrivant là l’un des moteurs de sa discipline.

    Malgré l’intensité dans le travail et la difficulté de la tâche, Claire Voisin n’est pas hors du monde. Elle a élevé cinq enfants avec son mari, Jean-Michel Coron, également mathématicien et qui a rejoint son épouse sur les bancs de l’Académie des sciences en 2014. Elle s’est mise à la musique pour les accompagner et partage avec ses filles ses impressions de lecture.

    Sur sa position de femme, académicienne, professeure ou mathématicienne, elle s’énerve un peu, avec son ton direct caractéristique, comme dans un courrier au Monde en 2014 : « Je souhaite que mon statut de femme, qui me plaît beaucoup, reste du domaine privé. » Elle ­reconnaît tout de même qu’il faudrait agir en amont du laboratoire, dans les formations, pour corriger des déséquilibres.

    Elle s’évade aussi par les conférences, l’édition et la relecture d’articles, l’encadrement de thésards… L’enseignement, en revanche, lui a toujours fait peur ; elle reconnaît même avoir « perdu » les étudiants, sans doute car trop « exigeante ». Mais pour ses cours au Collège de France, elle est moins stressée, car elle a du temps pour expliquer avec rigueur ses idées. Juste un risque à éviter, « le danger de se parer des plumes de paon en entrant dans cette institution. Ma hantise était de tomber dans les mondanités », dit-elle. Sans concession.

  • Les Maths de #Grothendieck - Numéro 467, septembre 2016 - Pour la Science

    http://www.pourlascience.fr/ewb_pages/e/espace-numerique-detail.php?art_id=37381&num=467

    DOSSIER
    Grothendieck : un génie des maths devenu ermite Winfried Scharlau
    Une jeunesse marquée par la guerre, la gloire scientifique, une fin de vie en solitaire et empreinte de mysticisme : tel était le destin fort singulier d’Alexandre Grothendieck, l’un des plus brillants mathématiciens du XXe siècle.

    Grothendieck : un héritage mathématique fertile Jean Malgoire
    Parmi les multiples concepts qu’Alexandre Grothendieck a inventés, le « topos » est sans aucun doute l’un des plus puissants, et celui dont le champ d’applications présentes et à venir est le plus vaste.

    Grothendieck : un écrivain en quête de vérité Leila Schneps
    Alexandre Grothendieck a laissé bien plus qu’une œuvre mathématique monumentale : une façon d’aborder le monde sans fard ni artifices, à commencer par ceux dont on se pare soi-même pour affronter la vie.

    En 3 articles et 20 pages. À ne pas manquer.

    • et aussi ça : https://seenthis.net/messages/513010

      Alexandre Grothendieck est un des plus grands mathématiciens du XXe siècle, dit-on. Moissonneur de nombreux prix académiques – il revendra aux enchères sa médaille Fields (1966) pour soutenir le Vietnam dans sa lutte contre l’impérialisme. Ou encore il refusera le prix Crafoord en 1988 : il soutient qu’accepter ce jeu des prix et des récompenses serait cautionner « un esprit et une évolution, du milieu scientifique, qu’[il] reconnaît comme profondément malsains. » Quand il est invité au Collège de France, Grothendieck y propose un cours intitulé : « Allons-nous continuer la recherche scientifique ? » De 1973 à sa retraite en 1988, il enseigne à l’université de Montpellier, avant de se replier dans les Pyrénées. À Montpellier, il a laissé des cartons de notes, écrites ces vingt dernières années. Vingt mille pages, qui en font saliver plus d’un. Car il y aurait des trésors à déchiffrer dans ces pattes de mouche. Mais Grothendieck, que son exil montagnard n’a pas réconcilié avec le monde de la recherche, ne lâche pas le morceau : il fait paraître en 2010 « une déclaration de non-publication ». Il y interdit tout usage de ses textes sous quelque forme que ce soit. Le responsable du patrimoine de l’université de Montpellier cherche à passer outre. Il veut prouver la valeur scientifique de ces écrits, afin de les classer comme « trésor national », et ainsi s’asseoir sur les intentions de l’auteur. Si aujourd’hui, remettre en cause la recherche scientifique est un blasphème, la critique, lorsqu’elle est émise par un éminent chercheur, ne peut que relever de la folie. Pour bon nombre de scientistes, Grothendieck est atteint d’une « paranoïa autodestructrice ». Faut-il vraiment être parano, aujourd’hui, pour vouloir foutre le feu à un tas de vieux papiers, qui pourraient conduire à de funestes applications scientifiques ? Tant pis pour les puristes, Grothendieck ne vendra pas son âme au diable.

      Momo Brücke https://seenthis.net/messages/102569

  • Survivre (1970 – 1975) | #Science et #Société
    http://science-societe.fr/survivre

    Au sein du courant de critique des sciences du début des années 1970, la #revue Survivre, et le groupe du même nom, occupent une place singulière. Initiatrice de nombreux thèmes de l’#écologie militante en France, source d’inspiration pour des pionniers de l’écologie #politique comme Pierre Fournier (lui-même fondateur de La Gueule Ouverte), et ayant bénéficié d’une diffusion plus large que Labo Contestation ou Impascience, la revue est aussi remarquable par le cheminement qu’elle a suivi entre 1970 et 1975. Après des débuts marqués par une réflexion sur la responsabilité des savants face aux dangers de l’industrialisation et aux menaces militaires, le groupe évolue peu à peu et se radicalise, jusqu’à l’arrêt de la parution de la revue en 1975. Au cours de ces quelques années, Survivre formule une critique externe des sciences, moins tournée vers la vie de laboratoire (contrairement à Labo Contestation et Impascience) et plus attentive aux conséquences sociales de ces pratiques. Mais de toute évidence, Survivre n’a eu de cesse de remettre en question les fondements de la pratique scientifique, et d’essayer d’imaginer des alternatives au développement technoscientifique contemporain.

    #archives

  • Les inestimés « #Grothendieck Papers »
    http://www.liberation.fr/debats/2016/06/08/les-inestimes-grothendieck-papers_1458196

    Que valent les archives d’un génie des mathématiques ? Mort en 2014, le mathématicien Alexandre Grothendieck a laissé quelque 85 000 pages. L’université de Montpellier vient de restituer le « pactole » aux enfants. A eux de décider du sort de documents qui n’ont pas révélé tous leurs secrets.


    Les derniers papiers laissés à Lasserre (Ariège) par Alexandre Grothendieck vers les années 2000. Photo Courtesy famille Grothendieck

  • Guerre de succession pour les notes de Grothendieck
    http://www.liberation.fr/futurs/2016/01/14/des-gribouillis-de-genie-en-heritage_1426478

    Des notes d’Alexandre Grothendieck, le plus grand mathématicien du XXe siècle, décédé en 2014, font l’objet d’une guerre de succession entre ses enfants, la Bibliothèque nationale et l’université de Montpellier. La perspective d’un procès se dessine aujourd’hui.

    #propriété_intellectuelle cc @lewer

  • Très beau texte !
    Non, les migrants ne sont pas un fardeau !

    C’est parce que l’extrême droite a réussi à imposer l’idée que l’immigration était un problème que les migrants sont rejetés par les Européens. Et si l’on changeait d’angle et qu’on y voyait plutôt une force ?

    L’arrivée massive de migrants s’impose comme l’une des questions majeures dans l’Europe des années à venir. Les journaux s’affolent, les compteurs explosent, les bureaux d’études s’inquiètent : cette année, le nombre de migrants traversant la Méditerranée pour rejoindre l’Europe pourrait même atteindre le chiffre de 100 000. Cent mille personnes qui arrivent sur un territoire peuplé de 500 millions d’habitants… Et ce serait un problème que d’accueillir une personne pour 5000 habitants, dans l’Europe d’aujourd’hui ?

    Si nous percevons cette question comme un problème, c’est parce que nous sommes aveuglés par les thèses des partis d’extrême droite. Depuis plusieurs décennies, ils ont réussi à instiller dans tous les esprits - y compris hélas dans ceux des hommes politiques de tous bords aveuglés par l’enjeu de court terme de la prochaine élection - une vision faussée des migrants, nourrie par la #peur.

    Que s’est-il donc passé au cours des trois dernières décennies pour que notre regard change à ce point ? Avons-nous oublié la mobilisation pour les boat people et la démarche conjointe, en juin 1979, des philosophes Sartre et Aron, réconciliés autour de cet enjeu, lorsqu’ils vinrent demander au président Giscard d’Estaing un accueil décent pour les réfugiés du Vietnam ?

    Certes, la situation économique a bien changé depuis les années 70, et la montée du chômage de masse a contribué à alimenter la peur de l’immigration. Pourtant, craindre ainsi l’arrivée des migrants, c’est ignorer que, dans les sociétés modernes, les ressources ne sont pas un gâteau à partager, mais qu’elles sont bien plutôt créées par les hommes, à partir de leurs propres idées, de leurs propres inventions, de leurs propres besoins : les terres d’immigration sont bien souvent des terres d’avenir - que l’on songe à la Californie.

    Non, les migrants ne viennent pas nous envahir, ni manger notre pain, ni prendre notre travail, ni piller nos ressources. Ce sont des êtres humains dignes, extraordinairement courageux, qui ont dû abandonner leur pays d’origine, face à la situation désespérée qui y a été créée par la guerre ; ce sont donc très majoritairement des hommes et des femmes confiants dans nos démocraties, et des adversaires résolus de ces obscurantistes qui, chez eux, alimentent les conflits qui les font fuir. De plus, à l’instar des précédentes générations de migrants qui ont enrichi notre pays au cours des siècles précédents, ils représentent, pour l’Europe de 2050, un immense #potentiel d’idées, de volontés, d’énergies et de ressources. Est-il besoin de rappeler le nom de tous ces immigrés qui ont construit la France d’aujourd’hui et dont la liste prendrait des volumes ? On y trouve des scientifiques comme Marie Curie, Georges Charpak, Alexandre Grothendieck, des écrivains tels que Samuel Beckett ou Milan Kundera, des artistes comme Pablo Picasso ou Marc Chagall, sans parler des chefs d’industrie, des sportifs, des hommes politiques, et tous ceux qui, sans faire la une des journaux, ont su créer leur propre territoire d’insertion.

    Les chercheurs le savent bien : face à une question difficile, c’est bien souvent grâce à une modification radicale de l’angle d’approche que commence à naître une voie vers la solution. Ainsi, modifier le #regard que nous portons sur ces migrants, et considérer qu’ils ne sont pas un fardeau à subir ou à partager, mais bien plutôt une force pour l’Europe, tel me semble être le point de départ indispensable aujourd’hui. Alors, seulement, pourra être initiée la complexe mise en place de structures d’#accueil pour ces hommes et ces femmes, en leur faisant confiance, en les laissant travailler et s’organiser. C’est en éliminant cette vision faussée sur l’immigration - tel un poison qui a pénétré à notre insu au cœur des pays européens - que nous ouvrirons un futur à nos sociétés. Ainsi peut-être parviendrons-nous alors à leur donner à nouveau un sens et redeviendrons-nous également un peu plus humains. Il y a urgence.

    http://www.liberation.fr/societe/2015/07/13/non-les-migrants-ne-sont-pas-un-fardeau_1347380
    #migration #asile #fardeau #réfugiés #force #problème

  • La chasse aux manuscrits de Grothendieck a commencé
    http://www.liberation.fr/societe/2015/07/05/grothendieck-le-genie-des-maths_1343847

    La succession d’Alexandre Grothendieck, comparable à un Einstein ou à un Picasso, se complique alors qu’émergent « notes », courrier ou travaux laissés derrière lui. Qui en est propriétaire  ? Quelle en est la valeur marchande  ? Et qui peut en disposer au-delà des requêtes formulées par celui qui avait décidé de se retirer dans les Pyrénées pour méditer  ?

  • Récoltes et semailles , l’autobiographie mathématique inédite d’Alexandre Grothendieck, lisible en ligne pour les courageux :

    http://lipn.univ-paris13.fr/~duchamp/Books&more/Grothendieck/RS/pdf/RetS.pdf

    C’est un texte énorme (presque mille pages de pdf), mais le peu que j’en ai lu pour l’instant est plutôt passionnant, didactique, et même assez beau ; pas besoin d’être un génie des maths pour s’y aventurer, bien au contraire même, c’est un texte très intuitif où Grothendieck se montre soucieux de faire sentir ce que peut bien être, pour les butés du chiffre, cette nébuleuse a priori inaccessible qu’est la création mathématique.

    "Je viens là d’esquisser à grands traits deux portraits : celui du mathématicien « casanier » qui se contente d’entretenir et d’embellir un héritage, et celui du bâtisseur-pionnier, qui ne peut s’empêcher de franchir sans cesse ces « cercles invisibles et impérieux » qui délimitent un Univers. On peut les appeler aussi, par des noms
    un peu à l’emporte-pièce mais suggestifs, les « conservateurs » et les « novateurs ». L’un et l’autre ont leur raison d’être et leur rôle à jouer, dans une même aventure collective se poursuivant au cours des générations, des siècles et des millénaires. Dans une période d’épanouissement d’une science ou d’un art, il n’y a entre ces
    deux tempéraments opposition ni antagonisme. Ils sont différents et ils se complètent mutuellement, comme se complètent la pâte et le levain.
    Entre ces deux types extrêmes (mais nullement opposés par nature), on trouve bien sûr tout un éventail de tempéraments intermédiaires. Tel « casanier » qui ne songerait à quitter une demeure familière, et encore moins à aller se coltiner le travail d’aller en construire une autre Dieu sait où, n’hésitera pas pourtant, lorsque décidément ça commence à se faire étroit, à mettre la main à la truelle pour aménager une cave ou un grenier,
    surélever un étage, voire même, au besoin, adjoindre aux murs quelque nouvelle dépendance aux modestes proportions. Sans être bâtisseur dans l’âme, souvent pourtant il regarde avec un oeil de sympathie, ou tout au moins sans inquiétude ni réprobation secrètes, tel autre qui avait partagé avec lui le même logis, et que voilà à trimer à rassembler poutres et pierres dans quelque cambrousse impossible, avec les airs d’un qui y verrait
    déjà un palais..."

    #maths #Grothendieck

  • Les « gribouillis » d’Alexandre #Grothendieck enfin sauvegardés
    http://www.liberation.fr/sciences/2015/06/17/les-gribouillis-d-alexandre-grothendieck-enfin-sauvegardes_1331465

    Les archives d’Alexandre Grothendieck, que nous avions laissées il y trois ans dans un cagibi de l’Institut de botanique de Montpellier, ont changé de mains sans bouger d’endroit et vont pouvoir entrer dans le monde numérique. Un accord a été ratifié mercredi entre la région Languedoc-Roussillon et l’université de Montpellier pour que ses 20 000 pages de notes contenues dans cinq cartons soient scannées et conservées selon les règles de l’art.


    Dessins de la main d’Alexandre Grothendieck, contenus dans les archives de Montpellier.
    #math

    • Les gribouillis d’Alexandre Grothendieck malheureusement sauvegardés…

      Enfin je dis ça mais l’information principale de l’article c’est pourtant :

      ses enfants ont donné un avenir aux gribouillis de Montpellier en respectant ses dernières volontés qui étaient de confier ses ultimes écrits à la Bibliothèque nationale

      alors qu’aussi bien il y a 30 ans qu’en 2010 il disait qu’il ne voulait que rien ne soit publié.

      Ou bien rien publié, mais pas détruit non plus, juste stocké à la biblio natinoale ? Ce serait un peu naïf de sa part, comme si, sans le supprimer, le contenu existant allait rester à la biblio sans le rendre accessible à d’autres.

      Ou bien comme il était quand même fier de lui, il ne s’est jamais résolu à demander à détruire ce contenu (dans le but de ne pas le rendre accessible à la communauté scientifique corrompue par le monde industriel, selon ses convictions).

    • Personnellement je me réjouis que cet esprit brillant puisse en inspirer d’autres. Il y a un flou bien sûr, mais il me semble que tu simplifies un peu trop « ses convictions » : à mon sens il ne s’agissait en tout cas pas d’une posture morale ("je punis la communauté scientifique parce qu’elle est corrompue"), mais d’une question politique ("je n’accepte plus de participer à ce système de développement de la #recherche, car il conduit à la destruction de la vie"). Les conséquences ne sont pas les mêmes.

    • Je n’ai jamais dit que c’était une question morale, au contraire… :D

      C’était clairement une demande politique car il ne voulait pas que son travail tombe dans les mains de la Recherche, afin que ça ne puisse pas servir ensuite à l’industrie ou tout autre chose de ce genre qu’il considérait comme nuisible.

      D’après lui le monde de la Recherche était un système, et donc peu importe qu’il y ait telle ou telle exception de chercheur « gentil », il ne voulait plus avoir à faire avec ce système dans son ensemble ni surtout lui servir la soupe.

      S’il voulait inspirer d’autres esprits scientifiques, il semblerait que ce soit en les invitant à déserter la recherche pour se consacrer à d’autres activités. :D

    • Mais s’il avait détruit ses écrits il en aurait privé toute l’humanité, pas seulement les chercheurs… c’est là qu’est la contradiction :)

  • GROTHENDIECK CONFERENCE 2015

    http://www.i3m.univ-montp2.fr/grothendieck-2015

    En voilà qui ont oublié qui était #Alexandre_Grothendieck et les raisons qui l’ont amené à abandonner la #recherche_scientifique et a refuser les prix que l’establishment lui a décerné pour ses travaux #mathématiques.

    Pour se rafraichir la mémoire, rien de tel qu’une belle petite brochure :

    Alexandre Grothendieck, Allons-nous continuer la recherche scientifique ? , 1972

    http://archive.org/details/Allons-nousContinuerLaRechercheScientifique

    Je voudrais préciser la raison pour laquelle au début j’ai interrompu mon activité de recherche : c’était parce que je me rendais compte qu’il y avait des problèmes si urgents à résoudre concernant la crise de la survie que ça me semblait de la folie de gaspiller des forces à faire de la recherche scientifique pure.

    Au moment où j’ai pris cette décision, je pensais consacrer plusieurs années à faire de la recherche, à acquérir certaines connaissances de base en biologie, avec l’idée d’appliquer et de développer des techniques mathématiques, des méthodes mathématiques pour traiter des problèmes de biologie.

    C’est une chose absolument fascinante pour moi et, néanmoins, à partir du moment où des amis et moi avons démarré un groupe qui s’appelle Survivre, pour précisément nous occuper des questions de la survie, à partir de ce moment, du jour au lendemain, l’intérêt pour une recherche scientifique désintéressée s’est complètement évanoui pour moi et je n’ai jamais eu une minute de regret depuis.

    Et j’oubliais aussi de signaler l’excelente tribune de Céline Pessis dans CQFD :

    https://sniadecki.wordpress.com/2015/02/11/pessis-grothendieck

    Yo !

  • La revue scientifique Nature rejette un texte en hommage au mathématicien Alexander Grothendieck pour des raisons de culture générale...
    David Mumford | Can one explain schemes to biologists
    http://www.dam.brown.edu/people/mumford/blog/2014/Grothendieck.html

    The sad thing is that this was rejected as much too technical for their readership. Their editor wrote me that ’higher degree polynomials’, ’infinitesimal vectors’ and ’complex space’ (even complex numbers) were things at least half their readership had never come across.

  • Après Grothendieck, Thierry Sallantin rend hommage à Moscovici (père).

    Grothendieck, Jaulin, Serge Moscovici
    http://ocparis.canalblog.com/archives/2014/11/21/31000518.html

    Incroyable, juste après le décès d’Alexandre Grothendieck survenue le 13 novembre, voilà que mon professeur à la faculté de Jussieu- ethnologie, dirigée par Robert Jaulin, lui décédé en 1996, Serge Moscovici, vient de mourir lui aussi (ce 15 novembre 2014 à 89 ans, voir l’article que lui consacre Le Monde ).
    Jaulin, Grothendieck, Moscovici et le documentariste Yves Billon (désormais seul survivant de cette équipée), avaient l’été 1974 sillonné le sud de la France avec une expo photo intitulée : « Occitanie, Amazonie, même combat », voulant dire par là qu’ici en Europe comme là-bas en Amazonie, les États, les Puissants, les Riches, pratiquent l’ethnocide des petits peuples locaux et traditionnels, et ont fait disparaître les langues et cultures locales, langues et traditions des paysans en Occitanie, langues des Amérindiens en Amazonie...
    La modernité (la Société spectaculaire-marchande comme disent les situationnistes) envahit tout et s’attaque partout à la vie tribale en pratiquant le génocide culturel que Jaulin fut le premier à appeler « ethnocide »...

    #Moscovici #Serge_Moscovici #Thierre_Sallantin #écologie #témoignage #ethnocide

  • Un nouveau témoignage sur Grothendieck par Thierry Sallantin qui lui aussi l’a connu à Survivre et Vivre. Bon c’était il y a un mois, je l’avais raté mais je le découvre en cherchant les dernières traces de Sallantin.

    Alexandre Grothendieck, mort d’un de nos pères
    http://fabrice-nicolino.com/index.php/?p=1828

    J’ai été un des derniers à être reçu de façon amicale par lui, dans sa cachette à Lasserre, car il m’a de suite reconnu, (je militais à “Survire et Vivre” en 1972-1975) et nous avions comme ami commun Robert Jaulin. L’été 1974, avec le sociologue Serge Moscovici et le documentariste Yves Billon, Grothendieck et Jaulin feront un tour militant avec une exposition de photos dans plein de villages du sud de la France sur le thème : “Occitanie, Amazonie, même combat” = pour dénoncer l’ethnocide et l’écocide ici et là-bas : la destruction des communautés paysannes traditionnelles au nom de “progrès”, pour les mêmes raisons qui poussent à la destruction des peuples amérindiens en Amazonie. On réécoutera à ce sujet l’émission de France-Culture de (?) 1974 = débat entre Robert Jaulin et Pierre Samuel = “Ethnocide et écocide” émission “Les Mardis de France-Culture”…

    C’est lui qui avait lancé en France la subversion écologique, donc l’écologie au sens révolutionnaire du terme, dans la suite logique des remises en causes profondes de la société industrielle provoquées par “Mai 68″. Aux Etats-Unis où Alexandre Grothendieck avait été invité suite à son prix international : la Médaille Fields en 1966, il découvrira le mouvement écolo, bien connu depuis l’article fondateur du biologiste Paul Sears : Ecology, a Subversive Subject (revue BioSciences, 1965), et c’est alors qu’il ramènera cette subversion en France, en créant avec deux autres mathématiciens : Pierre Samuel (futur cofondateur de la branche française des Amis de la Terre) et Claude Chevalley (qui fut à Bordeaux proche d’Ellul et Charbonneau) la revue et le mouvement “Survivre et Vivre”.

    #Thierry_Sallantin #Grothendieck #Survivre_et_vivre #écologie #témoignage

    cc @intempestive, si t’arrives à retrouver l’émission dont il parle… :D

  • « Pour #Grothendieck, l’urgence écologique était devenue plus importante que les maths » - Reporterre
    http://www.reporterre.net/spip.php?article6576

    Reporterre publie un document exceptionnel : l’interview de Christian Escriva, qui fut pendant dix ans l’ami et le confident d’Alexandre Grothendieck, avant que le génial mathématicien ne trépasse à Lasserre, le petit village où il a vécu seul les vingt-trois dernières années de sa vie. Son témoignage éclaire d’un jour nouveau le mythe qu’est devenu Grothendieck.

  • grosse perte pour l’humanité :

    Portrait d’un génie des mathématiques - Page 1 | Mediapart
    http://www.mediapart.fr/journal/international/141114/portrait-dun-genie-des-mathematiques

    Il s’était appliqué à « rapprocher la capacité à montrer de la géométrie et la puissance de démonstration de l’algèbre », le grand et très discret mathématicien Alexandre Grothendieck est mort jeudi dans l’Ariège, à l’âge de 86 ans.

    Très beau portrait à lire sur Libération.fr