person:andré gunthert

    • Macron a compté sur l’invisibilisation médiatique des violences policières. Mais les images ressurgissent. Elles ne s’effaceront jamais. Pendant des années, des documentaires reconstruiront le film de la violence des manifestations des Gilets jaunes…

  • Le crépuscule de Branco
    https://www.arteradio.com/son/61661466/le_crepuscule_de_branco

    Cette semaine, Livo a troqué la lecture des journaux contre celle du best-seller « Crépuscule » de Juan Branco. Le pamphlet de l’avocat énervé cartonne et rend Livo à son tour hystérique. Mais alors que l’auteur avait annoncé la révolution pour le 1er mai, Livo se retrouve à combattre de grosses fake news avec son micro... DUrée : 7 min. Source : Arte Radio

    https://download.www.arte.tv/permanent/arteradio/sites/default/files/sons/7lecrepusculede_branco_hq_fr.mp3

  • Macron sur la septuagénaire blessée à Nice : « Il faut avoir un comportement responsable » | Le Huffington Post
    https://www.huffingtonpost.fr/2019/03/24/macron-sur-la-septuagenaire-blessee-a-nice-il-faut-avoir-un-comportem
    https://o.aolcdn.com/images/dims3/GLOB/crop/3240x1703+0+886/resize/1200x630!/format/jpg/quality/85/https%3A%2F%2Fmedia-mbst-pub-ue1.s3.amazonaws.com%2Fcreatr-images%2F2019-0

    « Je souhaite d’abord qu’elle se rétablisse au plus vite et sorte rapidement de l’hôpital, et je souhaite la quiétude à sa famille. Mais pour avoir la quiétude, il faut avoir un comportement responsable », a déclaré le président de la République. « Je lui souhaite un prompt rétablissement, et peut-être une forme de sagesse », a-t-il ajouté.

    « Quand on est fragile, qu’on peut se faire bousculer, on ne se rend pas dans des lieux qui sont définis comme interdits et on ne se met pas dans des situations comme celle-ci », tout en soulignant que « cette dame n’a pas été en contact avec les forces de l’ordre ».

    Emmanuel Macron a assuré que la décision de « définir des périmètres d’interdiction » était devenue « nécessaire » et avait « été mise en œuvre avec professionnalisme et mesure à Nice ».

    Les conditions encore floues de l’accident

    La garde des Sceaux a également adressé ses vœux de rétablissement à la manifestante dimanche, tout en s’étonnant de sa présence. « Je trouve tout de même curieux que lorsqu’une manifestation est interdite, comme c’était le cas à Nice, quelqu’un aille absolument avec la volonté de manifester à cet endroit-là », a déclaré Nicole Belloubet sur BFMTV. « Il y avait quelques périmètres, dans certaines villes, où les manifestations étaient interdites », avait-elle détaillé. « À la suite de sommations, une personne qui y reste est susceptible de commettre un délit et c’est dans ce cadre-là que les événements se sont passés ».

    De son côté, le procureur de Nice Jean-Michel Prêtre estime que le délit « n’est pas si net » dans le cas de la septuagénaire : « là où ça s’est passé, c’était presque en dehors de la place, dans un mouvement confus des forces de l’ordre et des manifestants ». Le procureur a indiqué que la septuagénaire "a apparemment tapé fort sur un poteau

    #gorets

  • Quand Macron nous menace à la Une de Paris-Match ...
    https://blogs.mediapart.fr/olivier-beuvelet/blog/240319/quand-macron-nous-menace-la-une-de-paris-match

    Une image vaut mille mots, cliché aussi confus que confucéen. Avec son regard d’acier, notre président l’a rendu plus clair, cette semaine en Une de Paris-Match. Il n’y est pas allé par quatre chemin : vous voulez vous battre ? Je suis prêt à me battre ! dit ce regard contondant, affiché à la une de l’hebdomadaire de l’ami Lagardère. (qui vient à nous, même si on ne veut pas venir à lui)

    On a presque l’impression que la photographie a été faite par son modèle plus que par son ou sa photographe. Ne pas rester l’objet de l’adversaire, être celui qui formule, reformule, le point de vue de référence, légitime, tel semble être l’enjeu de la lutte des images dans la crise du pouvoir néolibéral. Transposition sur le plan visuel des enjeux sociaux réels. Cependant, contrairement au modèle canonique de Flagg qui nous disait « I want you », cette image au regard appuyé ne demande rien aux spectateurs, rien d’autre que rester immobiles et sages. Elle objectifie plus qu’elle n’interpelle. Elle émane d’un sujet qui n’attend rien d’autrui, d’un sujet qui n’a besoin que de s’écouter lui-même, d’un sujet qui veut maintenant s’imposer, se montrer et cherche à en découdre sur un plan physique.

    • Cette image, qui se veut performative, fait pendant à celle-ci, qui circulait au même moment dans l’arrière-boutique des réseaux sociaux... loin des surfaces d’affichage :


      Le président se permettait récemment de reprendre le sénat qui opérait selon la loi, en lui disant de « garder la bonne hauteur »… Très bon conseil ! Cette Une de Paris-Match, dans le registre de son "Qu’il viennent me chercher !", nous montre encore une fois, qu’en bon chef, il sait s’appliquer à soi-même ce qu’il exige des autres.

    • Il veut peut-être avoir l’air méchant mais il est plutôt crispé dans une attitude apeurée : tête rentrée dans les épaules dans une position inconfortable, placement de côté comme entre deux chaises et un bras droit qui lui manque. C’est quand même symptomatique d’un manque de parole d’en arriver à décrypter des photos.
      #mal_barré

    • « Le choc des images est désastreux » | André Gunthert

      La place de la caricature, désormais réduite à la portion congrue dans les colonnes des quotidiens, est un bon indicateur des contradictions qui étouffent la presse d’information. Plus de place pour la satire, quand on rame à contre-courant pour sauver les meubles d’un libéralisme décati. Mais la caricature se nourrit des colères et des ridicules, et n’a que faire des routines du journalisme. En ces temps de tumulte et de ruine d’un pouvoir qui court à l’abîme, son énergie déborde sur internet, où le rire et la moquerie répondent aux mines apeurées des commentateurs des chaînes d’info. Alors qu’on cherche en vain une Une marquante de Libération sur la crise des Gilets jaunes, c’est Facebook et Twitter qui fournissent les images les plus cruelles de l’égarement d’un régime en coma dépassé...

      L’hebdomadaire d’Arnaud Lagardère, ami des Macron, qui leur a déjà consacré pas moins de 13 couvertures, tente de réparer les dégâts de la sortie à ski. Un portrait qui se veut martial du président fixant le peuple des Gilets jaunes, les sourcils froncés, accolé à une image du « saccage des Champs-Elysées », illustre « La riposte aux casseurs » (photo : Stephane Lemouton, Bestimage). Mais l’air furibard, la pose peu naturelle, et le registre zyva du caïd supposé impressionner les émeutiers donnent un air de caricature involontaire à ce montage. Celui-ci n’a pas tardé à être détourné à son tour, par l’ajout d’une grenade de désencerlement ou d’autres accessoires du maintien de l’ordre à la française.

      http://imagesociale.fr/7330

  • Aujourd’hui, acte 17, par André Gunthert

    Dix-sept semaines d’un conflit social qui attend toujours sa résolution. Comment mieux dire, à l’heure où l’on évoque déjà les modalités de restitution du « Grand débat », que de #débat – c’est à dire de rencontre, de dialogue, de construction d’un consensus – il n’y en a pas eu ? Ou plutôt : il n’y en a pas eu avec Eux. Eux : les Gilets jaunes, les contestataires, les abrutis, les violents, les haineux. Les méchants. Ceux dont la #médiatisation a patiemment élaboré l’altérité. Macron, président de la politesse, a dicté la règle. On discute avec ceux qui disent bonjour, qui serrent la main, et qui ne coupent pas la parole au président. Les gentils. Ceux qui suivent les règles. Pas avec les Autres. Ceux qui les refusent. Comment contester cette équation repeinte aux couleurs du formalisme républicain ?

    C’est la magie performative du : « Vous ne m’avez pas serré la main ». Donc je suis légitimé à ne pas vous adresser la parole. Ne pas s’occuper du fond, répliquer sur la forme. Une technique de base du troll moyen. Je ne tiendrai pas compte de ce que vous venez d’énoncer, parce que vous n’avez pas respecté la bienséance. Magie d’une inversion qui glisse sous le tapis la colère. Et qui permet de dire : c’est de votre faute.

    On peut tourner et retourner dans tous les sens cette formule magique du formalisme : elle n’existe que pour faire taire. Débattre avec ceux qui sont déjà d’accord, ce n’est pas débattre. Ne pas écouter ceux qui protestent, et pire : les disqualifier justement parce qu’ils ont choisi de sortir du cadre qui étouffe toute #contestation, ce n’est pas un dialogue, mais un soliloque.

    Acte 17. On attend juste qu’ils s’essouflent. Logiquement, plus on se bouche les oreilles, plus ils se fatigueront. Ils vont bien finir par voir ça ne sert à rien. Cette attitude incarnée jusqu’au sommet de l’Etat n’a qu’un nom : le déni. Des violences policières, des blessés en pagaille, des malheureux fauchés sans la moindre raison ? Il est interdit d’en parler dans un Etat de droit, intime sans sourire le monarque républicain. N’ai-je pas été élu par tous les journaux de France ? Le débat c’est moi.

    Faire taire ceux qui crient et réserver la parole aux plus polis, est-ce encore la République ? Priver de #légitimité une partie du peuple parce qu’on est du bon côté de la caméra ou du fusil, ce n’est pas la démocratie, c’est la loi du plus fort. La démocratie ne résulte pas seulement d’un comptage des voix au moment du scrutin. Elle se construit fondamentalement sur l’élaboration d’une opinion commune, par les instruments du débat public : non pas le soliloque de l’autorité organisé pour annuler toute altérité, mais la libre expression de chacun répondant à chacun, armé de sa raison, et profitant d’un espace public qui est la condition du dialogue.

    La république de la politesse n’a plus de démocratique que le nom. Lorsqu’on refuse d’entendre ceux qui ont à se plaindre, lorsqu’on manipule la #violence tout en élevant un mur de #déni, lorsqu’on nomme débat le théâtre de la leçon magistrale du pouvoir, on se livre à une parodie autoritaire et méprisante. Souhaitons que l’Acte du jour ne soit pas obscurci par la barbarie de ceux qui portent le masque de l’Etat de droit.

  • André Gunthert
    https://twitter.com/gunthert/status/1099001069651353606

    Vous avez vu, vous, une explication de la hausse de 74% des actes antisémites (AA) en 2018 ? Je veux dire une vraie explication, pas son attribution aux Gilets jaunes (peu crédible puisque le mvt démarre en décembre)…

    Revenons de préférence aux chiffres bruts (ici : https://blogs.mediapart.fr/jerome-latta/blog/140219/actes-antisemites-un-pourcentage-est-il-une-information-0 …), pour constater que celui de l’an dernier (541 AA) n’est de loin pas le plus élevé à l’échelle de la stat, (qui a connu 7 pics + élevés en 18 ans : 936 en 2002, 974 en 2004, 832 en 2009, 851 en 2014, etc.).

    Personne ne dit que c’est négligeable. Tout acte antisémite est condamnable, et 541 AA, c’est 541 de trop. Mais ce n’est pas le tsunami qui a été agité, à partir d’un seul chiffre : celui du pourcentage de progression de la stat.
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    Et si on comparait avec la courbe des AA en Allemagne ? 1er constat : les chiffres sont 3X plus élevés. Le gouvernement a annoncé qu’il veut s’inspirer des méthodes allemandes. Est-ce vraiment une bonne idée ?

    Mais ce qui est plus étrange, c’est que si on superpose les courbes, elles prennent un air de famille. Les variations apparaissent globalement cohérentes. Ce qui signifie qu’il y a bien des causes objectives (et que celles-ci ne sont pas nationales).

    Il ne faut pas chercher bien loin pour trouver des corrélations. 2000-2005 : 2e Intifada. 2008-2009 : opération Plomb durci. 2014 : opération Bordure protectrice, etc… Les courbes semblent refléter toute l’histoire de la guerre civile israélo-palestinienne. https://fr.wikipedia.org/wiki/Conflit_isra%C3%A9lo-palestinien

    Ce qui pose question : si la stat des AA enregistre aussi les réactions au conflit israélo-palestinien, il y a soit un pb de définition des actes recensés, soit un mélange des genres plus global.

    Macron propose de définir « l’antisionisme comme une forme déguisée d’antisémitisme ». De fait, c’est déjà ce qu’enregistre la statistique. Et la réception des insultes contre Finkielkraut prouve que l’on interprète facilement un propos anti-israélien comme antisémite.

    La comparaison des courbes montre qu’il faudrait aussi examiner l’hypothèse inverse. Certains actes antisémites doivent manifestement être interprétés comme des réactions de colère à l’encontre d’un Etat colonisateur. S’il y a confusion, elle fonctionne dans les deux sens.

    La conclusion ? Elle est inquiétante. Non seulement mesures du gvt ne feront pas baisser le nombre des AA, mais une corrélation plus étroite entre antisémitisme et antisionisme ne peut qu’aggraver la situation.

    Oups ! 9 pics. Et donc autant de points bas, ce qui situe le chiffre 2018 à un niveau médian.

  • Bruno Latour : « Les Gilets jaunes sont des migrants de l’intérieur quittés par leur pays »
    https://reporterre.net/Bruno-Latour-Les-Gilets-jaunes-sont-des-migrants-de-l-interieur-quittes-

    Parce que dès qu’on commence à discuter d’une maison, d’agriculture, de voitures ou de déplacements, on se rend compte que chaque sujet est attaché à beaucoup d’autres produits qui viennent de plus ou moins loin, et que tout est lié par des réseaux de dépendance. Cela permet de se rendre compte que les questions dites « écologiques » ne sont pas extérieures aux préoccupations dites « sociales » mais au contraire intérieures. Encore faut-il qu’on puisse décrire ces situations qui amènent de proche en proche à la réalisation de nos imbrications, de nos dépendances, et donc, c’est là tout l’intérêt de l’exercice, aux marges de manœuvre. Il faut arriver à trouver la politique qui soit capable de suivre un dossier comme celui de la taxe sur l’essence dans ses différentes intrications avec les groupes d’intérêt qui lui sont attachés ; or ce groupe d’intérêts, ce sont des gens qui ne correspondent ni à un département, ni à un rond-point, ni à une ONG, ni à un parti. Chaque affaire, chaque sujet de préoccupation, chaque « concernement », je ne sais pas comment dire, est ad hoc. Il lui faut un groupe d’intérêt à sa taille, qui soit spécifique. Le passage à la généralité annule toutes ces différences et donc toutes les marges de manœuvre.

  • #LigueDuLoL
    Laughing out loud
    Nous étions de sacrées merdes qui n’avions même pas la bêtise comme excuse.

    https://www.linkedin.com/pulse/laughing-out-loud-baptiste-fluzin

    Nous étions de sacrées merdes qui n’avions même pas la bêtise comme excuse. Des merdes cyniques. Des merdes bien conscientes d’avoir de fortes chances de nous en tirer. Et maintenant nous voilà devenues de sacrées merdes qui avons bien appris. Appris à parler une langue policée, à faire des excuses au conditionnel, comme les pires politiciens, producteurs de cinéma, sportifs de haut niveau... On joue le mauvais spectacle contemporain de la contrition pour pouvoir passer à la suite d’autant plus vite et la suite, c’est le retour à la normale.

    Peut-être me suis-je éloigné de ce groupe plus tôt que d’autres. Peut-être ai-je essayé, dans l’ombre, par certaines de mes actions, de compenser ce que j’avais pu faire à l’époque. Tâche impossible. Aucun mérite. Je dois tout à la patience infinie d’un couple d’amis qui m’ont éduqué, donné à lire ce que j’avais soigneusement évité de lire jusqu’ici. Je ne leur serai jamais assez reconnaissant. A eux et à toutes celles qui font le travail de documenter, expliquer, répéter inlassablement alors qu’elles auraient toutes les raisons de l’être.

    #harcelement #meute #masculinisme #domination

  • Gilets jaunes, lives et vidéos : « On assiste à l’émergence d’un contre-pouvoir médiatique important »
    André Gunthert, maître de conférence en histoire visuelle à l’Ehess, analyse pour Marianne l’influence qu’ont eu les lives et les vidéos dans le mouvement des gilets jaunes, creusant l’écart entre internautes, médias traditionnels et alternatifs.
    https://www.marianne.net/societe/gilets-jaunes-lives-et-videos-assiste-l-emergence-d-un-contre-pouvoir-medi

    Les gens qui ont confiance en leur gouvernement et leurs médias ne construisent pas de théorie du complot car celle-ci nécessite un effort, une recherche d’information, une critique. Il est beaucoup plus facile de regarder les dix minutes de synthèse des chaînes d’information, faites par des pros, consommables et prête à l’emploi. Quand les gens prennent un chemin plus difficile, c’est qu’ils ont de bonnes raisons.

    #GiletsJaunes #gilets_jaunes #decryptage #medias #theorie_du_complot #education_populaire #critique_des_medias #cultire_visuelle #contrepouvoir

  • Libé n’est pas “Gilets jaunes” – L’image sociale
    http://imagesociale.fr/7045

    par André Gunthert

    En résumé, si les Gilets jaunes se conformaient à l’avis de Laurent Joffrin, plutôt que de tourner en rond dans leur bulle de filtre non filtrée, il n’y aurait pas de gouffre ni de raison de s’émouvoir. Au passage, l’expert ès réseaux sociaux trahit le biais que l’ensemble du dossier tente de dissimuler. « Leur vérité », dit-il, laissant entendre que celle-ci ne saurait être confondue avec celle de Libération ou de la presse, dont Laurent Joffrin nous assure qu’elle n’a pas démérité.

    Question de point de vue. Pour Stéphane Delorme, rédacteur en chef des Cahiers du Cinéma : « Le récit raconté par les médias était répugnant. La TV s’est encore une fois ridiculisée face à internet. D’un côté cette image terrifiante présentée comme sécurisante au JT de 20h, le 15 décembre, de manifestants devant l’Opéra qu’on empêche de rejoindre les Champs sous l’œil de la police montée prête à charger. De l’autre la profusion sauvage des vidéos de violences policières, qui à force deviennent un genre en soi ».

    Si, malgré l’observation attentive de Vincent Glad, cette vérité, celle des violences d’un pouvoir désemparé et d’une désinformation d’un niveau rarement atteint, reste distincte de la vérité que peut admettre un quotidien des classes supérieures, ce n’est pas parce que les acteurs du mouvement se jugent mal représentés. Mais bien parce que ceux dont c’est la mission et le métier ont construit le récit de la crise en fonction d’un filtre bien plus puissant que la bulle de filtre, puisqu’il est invisible même aux yeux d’un grand professionnel comme Laurent Joffrin : le filtre de la conscience de classe.

    Ceux qui doutent que la crise des Gilets jaunes est fondamentalement un conflit de classes, miroir de l’accélération historique des inégalités et de la concentration des profits, n’ont, pour s’en convaincre, qu’à observer son accueil par les classes supérieures, qui ont rarement opposé une réaction d’une telle violence à un mouvement social quel qu’il soit. La négation de toute désinformation, telle que nous la livre candidement Libération, est encore une confirmation de cette désinformation – la manifestation, non d’un défaut des méthodes du journalisme, mais d’un barrage social, d’une impossibilité de voir.

    Ce que nous répète Libération, pour justifier la critique du mouvement – « le faible nombre de manifestants, les dérapages xénophobes ou violents de certains, la confusion née d’un refus obsessionnel de toute représentation » (Joffrin) – n’est que le récit en boucle d’une vision de classe qui a condamné d’emblée la colère des plus modestes. Pour sortir de cette impasse, encore faudrait-il que la classe médiatique aperçoive, comme on l’apprend en première année de sociologie, qu’elle ne peut pas s’exclure du champ social, qu’elle est juge et partie. Diagnostic pertinent, la « crise de la représentativité » ne saurait être seulement une crise dont les producteurs de représentation rejettent la responsabilité sur les représentés.

    #Gilets_jaunes #Médias

  • La “#Marianne” de Mai 68, ou l’effet Disneyland

    Lorsque la photographie entre dans la composition du récit de l’information, l’auteur de la narration est l’éditeur, qui procède à l’ensemble des choix signifiants – le plus souvent sans en référer au photographe, y compris dans les cas d’altération de l’image.

    Passionnant décryptage de André Gunthert pour L’image Sociale :
    http://imagesociale.fr/6887 #photographie #construction #icone #mythe

  • affordance.info : L’algorithme de la marque jaune.
    https://www.affordance.info/mon_weblog/2018/12/algorithme-marque-jaune.html
    https://www.affordance.info/.a/6a00d8341c622e53ef022ad37fa10e200c-600wi

    par Olivier Ertzscheid

    Ce qui sera visible sur votre mur sera donc (en plus des critères précédents) choisi en fonction de votre « intérêt » et de votre proximité avec la personne qui a posté un contenu ; en fonction de la « performance » du contenu en lui-même (sa viralité en gros) ; en fonction de la capacité de la personne qui a posté un contenu à poster des contenus en général très performants (ce qui explique la « prime » de visibilité et d’audience ainsi donnée à certains comptes dans le mouvement des Gilets Jaunes) ; en fonction du « type » de contenu (un post avec uniquement du texte sera moins partagé qu’un post avec des liens, qui lui-même sera moins viral qu’une bonne image qui elle-même l’est souvent moins qu’une très courte vidéo) ; et enfin en fonction de « l’actualité » du contenu, le fait qu’il soit récent et/ou qu’il renvoie à des événements récents (et donc toujours capables de mobiliser facilement notre attention).

    Si on regarde, par exemple, le fonctionnement de Google et de son algorithme Pagerank, le problème y semble assez évident et il peut être formulé comme suit :

    Dans une grande très quantité de pages indexées, comment trouver celles répondant le mieux à une requête donnée ? Réponse : les plus « pertinentes » seront les plus « populaires », et cette popularité sera déterminée par le nombre de liens hypertextes pointant vers elles.

    Simple. Basique.
    Et Facebook donc, quel problème cherche-t-il à résoudre ?

    Facebook cherche-t-il à trouver des contenus répondant le mieux à une requête ? Non puisque nous ne posons (presque) jamais de question à Facebook.

    Facebook cherche-t-il à déterminer la popularité et la pertinence d’un contenu ? Non plus. En tout cas pas fondamentalement.

    Fondamentalement, Facebook cherche à nous contraindre à interagir avec des contenus de la plateforme pour disposer de profils « qualifiés » (= décrits et caractérisés aussi finement que possible). Facebook appelle cela « l’engagement ». L’algorithme de Facebook cherche donc à résoudre le problème de l’engagement. Problème qui peut être décrit de la manière suivante :

    Comment inciter des gens à interagir avec des contenus qui ne les concernent pas et qu’ils ne recherchent pas ?

    Je répète : le problème de l’algorithme de Facebook est de savoir comment inciter des gens à interagir avec des contenus qui ne les concernent pas et qu’ils ne recherchent pas.

    Et comme il a mis en place plein d’outils pour y parvenir (souvenez-vous que ses ingénieurs ont suivi des cours de persuasion technologique), pour peu que des contenus nous concernent, même un peu, même de loin, ou que nous les recherchions, même secondairement, même anecdotiquement, le volume d’interaction monte en flèche. Et le chiffre d’affaire de Facebook avec.

    Je le répète donc une troisième (et dernière) fois, le problème de l’algorithme de Facebook est de savoir comment inciter des gens à interagir avec des contenus qui ne les concernent pas et qu’ils ne recherchent pas.

    C’est cela, le problème de Facebook. Juste cela. Et c’est parce que c’est cela le problème de Facebook que nous avons collectivement un problème avec Facebook et que Facebook a également tout un tas de nouveaux problèmes dont il faudra bien qu’il finisse par répondre devant la justice et peut-être pas uniquement devant la justice fiscale. Et si l’algorithme de Facebook cherche à résoudre ce problème particulier c’est à la fois pour entretenir son propre modèle économique et pour pallier son incapacité à produire une forme de désir de questionnement

    Et dans le cadre de ce problème, la question de la « vérité » ou même de la « véracité » est entièrement escamotée au seul profit de l’engagement :

    "Facebook est une machine à produire de l’engagement. Google est une machine à produire de la popularité. Ce qui veut dire que le régime de vérité de Google est celui de la popularité. Est « vrai » dans l’écosystème Google, au regard des critères de l’algorithme de Google, ce qui est populaire. (...) Est « vrai » dans l’écosystème Facebook ce qui permet de produire de l’engagement, d’être « atteint » (le fameux « reach ») et, par effet de bord, de « porter atteinte ». Peu importe que cela soit « vérifiable », peu importe que cela soit « populaire » (effet de l’illusion de la majorité), il suffit, dans le régime de vérité de Facebook, que cela produise de l’engagement."

    Cette vidéo et ces images sont bien sûr tout à fait authentiques. Et cette scène et ce qui a suivi c’est ... Bref. « Ces images terribles sont la preuve à charge d’un dérapage, qui tutoie les procédés de vengeance vidéo, ou revenge porn, plus proches de la loi du talion que du maintien de l’ordre », écrit André Gunthert. Mais là n’est pas mon sujet.

    Dès que cette vidéo est « sortie » (c’était en fin de matinée hier), je l’ai vue rediffusée ("partagée") par un très grand nombre de mes « amis » ou « amis d’amis » Facebook sans qu’ils aient matériellement ou intellectuellement pu prendre le temps d’en vérifier l’authenticité. Sur le coup beaucoup de titres de presse ont bien sûr immédiatement fait des « papiers » pour générer de l’audience mais l’essentiel de ces « papiers » ne comportaient aucun élément factuel sur l’authenticité, de la vidéo, sur sa date de tournage, sur son auteur, etc. Rien. A ce moment là, et « à ce moment là » est le point important de cette phrase, à ce moment là rien ne permettait d’indiquer que cette vidéo et ces images n’étaient pas fausses ou décontextualisées ou montées ou filmées dans d’autres manifestations dans d’autres contextes.

    Et pourtant des gens qui n’ont sociologiquement rien de « Gilets Jaunes », des gens qui sont par ailleurs à peu près parfaitement éduqués à l’image et à son analyse, des gens qui ne se méfient pas « des médias » ou qui n’y voient pas un ennemi, des gens parmi mes amis et mes « amis d’amis » ont instantanément partagé cette vidéo sans jamais se poser la question de son authenticité au moment où ils lui servaient de caisse de résonance. Exactement de la même manière que chez « les Gilets Jaunes », plein de gens rediffusent et partagent exactement de la même manière des vidéos et des images sans jamais se poser la question de leur authenticité au moment où ils les partagent.

    Ma démonstration s’arrête là puisqu’elle n’avait pour objet que d’essayer de vous convaincre que la question des Fake News n’est pas simplement une question « d’éducation aux médias », qu’elle n’est pas non plus une question « de classe » (sociale), mais qu’elle n’est qu’une question de biais cognitif et d’architecture technique toxique. Comme je l’avais déjà analysé ici.

    L’AFP Factuel et d’autres comptes de médias ont ensuite plus tard dans l’après-midi attesté que la vidéo était authentique et ont produit tous les éléments de contexte nécessaires. Mais même si ce temps de Fact-Checking fut très rapide (bravo d’ailleurs aux différents médias), il fut une éternité à l’échelle de la temporalité « virale ».

    #Facebook #Viralité #Culture_numérique #Algorithmes

  • Gilets jaunes : ne croyez pas la télé !
    André Gunthert 2 décembre 2018 - 9 h 06 min

    Les préoccupations de décompte du nombre de manifestants sont totalement obsolètes. Car l’occupation spatiale des gilets n’a rien à voir avec le regroupement en bataillon d’une foule sur une avenue. Si la métaphore guerrière pouvait venir à l’esprit, c’était plutôt dans sa dimension tactique. Malgré ou plutôt à cause des blocages policiers, la signature visuelle des gilets jaunes se déplaçait sans cesse, en petits groupes mobiles, inscrivant sa souveraineté sur le territoire parisien, franchissant la Seine sans souci des itinéraires balisés, et venant interrompre la circulation à la vitesse de l’éclair, malaisément suivie par le cordon policier.

    Qu’on était loin de l’obéissance syndicale, incarnée par le respect du tracé préfectoral Bastille-Répu, et par la pression des rangées de CRS venues intimider les manifestants. Grâce à cette mobilité tactique, hier, ce qui sautait aux yeux, c’est que les gilets jaunes avaient pris Paris.

    #giletsjaunes #médias #police #tactiques #répression #syndicats #gilets_jaunes #harcèlement #cortègedetête #province #campagne #nasse #techniques_policières #répression #précariat #salariat

    http://imagesociale.fr/6807?subscribe=error#blog_subscription-3

    • Comme mes amis photographes sur Facebook, aimantés par le pittoresque des situations d’affrontement et par la rassurante identification d’une figure connue – l’apocalypse sur fond d’incendie –, l’information privilégiait le schéma des violences émeutières, aplatissant l’intelligence et la nouveauté du mouvement par l’imposition du filtre de la casse. Pas étonnant qu’une mobilisation qui refuse toute médiation soit si mal traitée par les médiateurs professionnels, qui sont en réalité aussi dépassés que la police par les caractères inédits de l’action.

  • Fake news, mode d’emploi – L’image sociale
    http://imagesociale.fr/6756

    par André Gunthert

    Le cas résume les ingrédients de la recette des fake news. Loin de l’affolement suscité par les deepfakes, technologie sophistiquée d’altération vidéo, la plupart les images détournées reprennent une source documentaire, et se bornent à en modifier la contextualisation. On a ici affaire à une falsification à peine plus élaborée, mais qui revient de façon similaire à retirer de l’information plutôt qu’à altérer l’image. Confronter la version détournée à l’original suffit à rétablir les faits.

    La ressource la plus puissante de la manipulation est en réalité le contexte de réception. Si vous vous attendez à ce que les gilets jaunes se comportent comme de dangereux agitateurs d’extrême-droite, vous allez forcément lire un bras levé comme un salut nazi. Le piège généralement grossier des fakes news ne fonctionne que parce que le détournement va à la rencontre des préjugés des récepteurs.

    #Infox #Fake_news

  • La visibilité des anonymes. L’accès des images amateur à l’espace public.

    Un symptôme flagrant du nouveau statut des productions vernaculaires est la multiplication des formes d’autocensure qui accompagnent l’exposition de soi. L’exemple le plus emblématique, en contradiction avec les principes de la manifestation publique, a été la dissimulation systématique des identités par le mouvement étudiant français du printemps 2018. La célèbre séquence de la Commune de Tolbiac, autoprésentation parodique de trois portes-parole masqués, en compagnie du chien Guevara, illustrait une attitude de défiance, justifiée par la montée des violences et la réponse repressive des forces de l’ordre.

    Le recours à une éditorialisation de la photo pour masquer certaines informations manifeste donc une compréhension au second degré de l’image, qui témoigne de la conscience de son exposition publique.

    On notera que contrairement à l’idée reçue, cette modification ne fait pas perdre à l’image sa valeur documentaire. Au contraire : la mise en retrait d’une information fonctionne comme une attestation de l’authenticité de la scène enregistrée, comme c’est le cas dans les reportages d’information en caméra cachée.

    Comme l’illustre la revendication des minorités d’accéder à la sphère publique, la visibilité est un combat. La présence dans l’espace social installe de nouvelles normes, de nouvelles façons de voir. Un grand nombre d’entre nous peut aujourd’hui contribuer à le remodeler.

    Analyse de l’image sociale par André Gunthert : http://imagesociale.fr/6657

    #image #photo #photographie #representation #sociale #autoportrait #selfie #documentaire #documentation #temoignage #controle

  • Les images ont-elles un pouvoir ?

    Non, aucune image ne peut arrêter une guerre. Mais on peut parler de véritables effets d’influence lorsqu’on observe les effets sociaux des représentations. Limiter le pouvoir des images à la mobilisation des émotions est une lecture appauvrie et stéréotypée d’une gamme d’actions bien plus large, où l’attestation documentaire et la présence culturelle figurent désormais au premier plan. Plutôt que d’opposer les images aux discours, ces exemples invitent à penser le dialogue étroit des formes expressives, qui s’enrichissent de leur association, à la manière des instruments de l’orchestre.

    L’image sociale - par André Gunthert : http://imagesociale.fr/6509
    #image #photo #representation #influance #mythe #Histoire #transfert

  • L’invisibilité des monstres agresseurs de femmes | André Gunthert
    http://imagesociale.fr/5874

    Test de réception grandeur nature : la campagne contre le harcèlement des transports parisiens, qui met en scène des prédateurs agressant des femmes, a suscité des réactions de mécontentement ou de malaise, essentiellement centrées sur la critique de l’animalisation des harceleurs, ou de la criminalisation d’animaux innocents (voir mon relevé sur ce blog1). Mais aucun commentaire, à ma connaissance, n’a évoqué la proximité de ces affiches avec une figure très présente de la culture populaire : celle des monstres agresseurs de femmes. Source : L’image sociale

  • Les formats courts ne sauveront pas l’info – L’image sociale
    http://imagesociale.fr/5601

    Par André Gunthert

    Cette réduction illustre pourtant la loi du genre. Comme le suggère le titre de « Brut », soit la restitution sans filtre d’une réalité, la stylistique de l’enregistrement audiovisuel, renforcée par l’effacement des instances de l’énonciation (pas de médiation incarnée ni de commentaire en voix off), donne l’illusion au spectateur d’avoir vécu l’événement. Pourtant, derrière la signature documentaire, l’impératif de rediffusion virale qui régit la production prescrit un ensemble de choix narratifs très contraignants.

    L’autonomie de la séquence oblige à sélectionner une information autosuffisante et lisible. Sa brièveté interdit tout sujet complexe, et impose une montée en généralité qui est la clé de lecture du format. Dans le cas de l’entretien de la Nuit des idées, c’est la grille de la critique du racisme qui assure l’intelligibilité de l’anecdote, métamorphosée en conte moral. Le caractère provocant du dérapage fournit l’ingrédient indispensable de la viralité : l’indignation attisée par les apparences de la condescendance postcoloniale.

    L’irruption des formats courts, que l’on pourrait appeler docuviraux, a donné un souffle d’air frais en s’adressant à un public jeune, en bousculant la hiérarchie de l’information et en renouvelant les sujets. Contrairement aux apparences, leur économie incertaine bride le développement d’une production d’images autonome, et encourage le recyclage de séquences télévisées ou d’enregistrements existants, remis en forme par l’éditorialisation textuelle et l’illustration musicale.

    Mais les principes d’occupation parasitaire du canal de diffusion des médias sociaux et d’amplification par la viralité les soumettent plus qu’aucun autre média aux travers de l’économie de l’attention, au risque de la caricature. Alimentée par le croisement de la médiation et de l’interaction, l’industrialisation de la conflictualité n’est pas un horizon, mais bien une limite du journalisme.

    #Vidéos_virales #Journalisme

  • La fin de l’université avance masquée – L’image sociale
    http://imagesociale.fr/5210

    par André Gunthert

    Attribuer cette débâcle à la seule incompétence serait néanmoins une erreur. Comme la dégradation du système de santé, le sabotage systématique du supérieur suit le programme éprouvé de l’agenda néolibéral, qui vise à affaiblir les services publics jusqu’à ce que les usagers, lassés de leur détérioration, acceptent de les voir basculer dans les mains du privé. L’horizon américain, avec des droits universitaires qui atteignent 60.000 dollars l’an pour les meilleurs établissements, est observé avec gourmandise par les experts, qui font circuler l’idée que le chiffre d’affaires du supérieur, appuyé sur le crédit, pourrait dépasser celui de l’automobile.

    Face à la croissance des effectifs, la réponse par la sélection plutôt que par l’investissement indique clairement que la voie choisie par le gouvernement prolonge celle de ses prédécesseurs. Ajoutons que la liquidation en marche de l’université ne pourrait avoir lieu sans le soutien d’une presse indifférente à la recherche et acquise au discours de la faillite des services publics.

    #Université #Education

    • Non à la sélection !

      La seule réponse du gouvernement, c’est de faire des étudiant.e.s la variable d’ajustement d’un système défaillant. Pour pallier à son désengagement financier, il fait le choix d’instaurer une nouvelle cotisation, augmentant ainsi les frais d’inscription en allant chercher dans la poche des étudiant.e.s l’argent qu’il ne veut pas investir. Considérant que nous sommes les seul.e.s responsables de l’échec en premier cycle, le gouvernement fait le choix de la sélection pour pouvoir gérer « les flux ». Ce qu’il oublie, c’est que derrière ces « flux », ce sont des avenirs brisés sur l’autel de l’offre et de la demande. Sélectionner à l’entrée de l’Université n’est pas une réforme courageuse. C’est une solution de facilité, le meilleur moyen de ne rien changer. L’orientation imposée, résultat de la sélection, aura le même résultat que l’orientation par défaut : le renoncement et la démotivation, qui conduisent bien souvent à l’échec.

      En surfant sur le scandale du tirage au sort, que nous avons dénoncé et qui ne s’explique que par un manque de moyens chronique, le gouvernement a pensé convaincre l’opinion du bien-fondé de sa réforme. Mais en instaurant la sélection, il généralise de fait les conséquences injustes de l’aléa et de l’arbitraire. Plutôt que d’ouvrir le champ des possibles, ce sont les portes de l’Université qui vont se refermer tout au long du processus d’orientation. Plutôt que d’accompagner, cette réforme vise à décourager les lycéen.e.s, sous l’effet des « recommandations » du Conseil de classe et de « l’avis » de l’Université. Si cela ne suffit pas, la loi prévoit même la possibilité de refuser tout simplement l’inscription « dans les filières où les demandes excèdent le nombre de places ». Le baccalauréat, diplôme national, ne sera plus la garantie pour pouvoir accéder à la filière universitaire de son choix. En leur donnant la capacité de définir leurs propres critères de recrutement, et en supprimant l’obligation pour chaque université d’accueillir les étudiant.e.s originaires de la même académie, cette réforme va créer une compétition entre chaque établissement, défavorisant les plus petits, renforçant un peu plus les inégalités.

      Sans l’assumer, le gouvernement choisit cyniquement de tourner le dos à la démocratisation des études supérieures. La généralisation de la sélection à l’entrée de l’Université va empêcher toute une partie de notre génération de poursuivre ses études, notamment celles et ceux issu.e.s des milieux populaires, les bachelier.e.s sans mention, les bachelier.e.s technologiques et professionnels. Plutôt que d’organiser la démocratisation des études supérieures, le gouvernement organise son reflux en encourageant un repli conservateur et élitiste des universités, obsédées par la compétition entre elles et la course aux classements internationaux. Au final, cette réforme ne résoudra aucune des difficultés auxquelles elle prétend s’attaquer.

      Depuis de nombreuses années, nous entendons dire qu’il faudrait faire tomber certains tabous : la sélection, l’augmentation des frais d’inscription… Étonnement ce sont toujours les mêmes tabous qui tombent. A l’inverse, les tabous que nous voulons faire sauter, ce sont ceux du refus permanent de notre autonomie. Ce sont ceux des étudiant.e.s qui échouent car ils travaillent pour financer leurs études.

      Que demandons-nous ? Pouvoir décider par nous-mêmes de notre avenir. Nous refusons que des président.e.s d’université ou des enseignant.e.s fassent des choix à notre place. Nous refusons ce procès en irresponsabilité. Nous refusons qu’on nous impose notre orientation à 17 ans, que ce soit la filière dans laquelle nous devrions étudier ou même le nombre d’années d’étude que nous devrions faire. Nous refusons enfin ce projet adéquationniste où nous devenons une variable entre l’Entreprise et l’Université.

      Nous pensons que c’est à l’université de favoriser la réussite en révolutionnant sa pédagogie et en mettant les moyens dans les premiers cycles. C’est à elle d’être un rempart solide contre les inégalités et d’offrir à chacun.e une formation de qualité sur l’ensemble du territoire. C’est à l’Université de former des futur.e.s travailleurs et travailleuses qualifié.e.s, libres de leurs choix de vie, en mettant en place des cursus pluridisciplinaires. C’est enfin à l’Université de former des futur.e.s citoyen.ne.s éclairé.e.s en mettant le savoir et la connaissance à portée de toutes et tous.

      Réformer l’université, c’est donc proposer un choix de société. Il est urgent de refaire des étudiant.e.s la raison d’être de l’Enseignement Supérieur. La jeunesse refuse que la reproduction sociale soit la règle. Elle demande que ses aspirations ne soient plus méprisées. Il est tant que la République tienne ses promesses d’égalité entre tou.te.s les citoyen.ne.s. Il est temps que l’Université redevienne le levier de cette égalité, contre toutes les formes d’exclusion et de domination. Avec cette réforme, l’occasion est encore manquée. Le Gouvernement fait le choix de réformer sans nous, et même contre nous. En nous privant du choix de notre avenir, il méprise notre aspiration à maîtriser notre destin. Le pari est risqué…

      Par cette offensive sans précédent, le Gouvernement fait délibérément le choix de l’affrontement avec les jeunes. Il devrait savoir que tourner le dos à sa jeunesse en s’attaquant à nos droits et en ignorant nos aspirations ne saurait tenir lieu de politique pour l’avenir.

      Pour refuser ce projet de loi, pour une réforme ambitieuse, l’UNEF appelle les étudiant.e.s à se faire entendre, à s’organiser sur leurs universités et à se mobiliser en participant à la manifestation du 16 novembre.

      https://blogs.mediapart.fr/lila-le-bas/blog/061117/non-la-selection

  • Gardons le pouvoir médiatique (disent ceux qui l’ont déjà perdu) – L’image sociale
    http://imagesociale.fr/5042

    Par André Gunthert

    Vigilant gardien de l’exclusivité médiatique, Libération épingle le projet de communication mélenchonien – et en démontre simultanément le bien-fondé. Car il n’a échappé à personne que le traitement du responsable dans les colonnes du quotidien souffre d’un parti-pris, bien illustré par la caricature visuelle de la Une du week-end (une photo recontextualisée du 5 janvier 2017, par Boris Allin, dont la contre-plongée fait écho au titre bourbonien du journal, qui se moque de la fatuité du dirigeant).

    Difficile d’exprimer de façon plus concise à quel point, pour la rédaction du quotidien, la médiation est un pouvoir et doit rester un privilège. Difficile aussi de se tromper plus lourdement sur la fonction médiatique. Car il ne suffit pas d’ouvrir un canal de communication, moyen aujourd’hui à la portée de n’importe quel youtubeur, pour se voir octroyer le pouvoir d’influence implicitement attribué à cette exposition.

    Comparer l’état de la presse il y a un siècle avec celui d’aujourd’hui permet de vérifier le processus de gentrification qui éloigne toujours davantage les médias mainstream des classes populaires et des jeunes générations.

    Cet éloignement seul ne suffirait pas à expliquer l’audience que rencontrent les nouvelles pratiques de communication (appelées à tort nouveaux médias). C’est la prolifération des canaux d’expression individuelle surgis du web et des réseaux sociaux qui a transformé en profondeur le paysage médiatique, en compensant l’absence de recul de la communication par la manifestation d’une réception multiforme, critique horizontale venant simultanément contrebalancer la verticalité médiatique.

    #Médias #Web_médias

  • L’émoji, langage de l’émotion ou ponctuation familière ? – L’image sociale
    http://imagesociale.fr/4869

    par André Gunthert

    En dépit des exemples anecdotiques visant à rédiger exclusivement grâce à ce moyen, ce qui me semble caractériser les usages des émojis est au contraire leur intégration au sein de la conversation écrite. Comme Pierre Halté, qui les compare aux formes expressives accompagnant l’expression orale (mimique, gestuelle, intonation, etc.), je crois que raisonner sur les émojis comme s’il s’agissait d’un langage proprement dit n’a pas grand sens1. Que ce soit sous la forme de l’émoticône, groupe de caractères typographiques formant un symbole visuel, ou des imagettes normalisées au sein de jeux de caractères, le trait le plus évident de ces signes est précisément la possibilité de les associer intimement à l’expression écrite et à ses véhicules. Inséré dans le texte comme une lettre, l’émoji peut en accompagner les circulations, à la différence des photographies ou d’autres formes visuelles, qui restent des entités autonomes, juxtaposées aux énoncés.
    Or, l’écriture comporte elle aussi, sous une forme peu développée, et pourtant essentielle, des instruments paralinguistiques, dépourvus de signification en dehors de leur articulation avec les mots. La ponctuation est cet outillage complémentaire qui, associé aux signifiants, leur ajoute des informations de contexte qui en modifient le sens. Les deux points, le point d’exclamation ou le point d’interrogation constituent des modalisations proches des ajouts de smileys, qui indiquent à la fois une inflexion de l’énoncé, tout en restant adaptables à une infinité de situations.

    Il est plus pertinent de décrire les usages des émojis comme une ponctuation étendue que comme un langage autonome. On peut d’ailleurs se souvenir que l’extension des signes de ponctuation faisait partie des questions débattues par les spécialistes de typographie, comme en témoigne la proposition récurrente d’un point d’ironie – finalement matérialisé par le smiley “clin d’oeil”.

    Si l’on reprend la comparaison avec les formes gestuelles associées à la verbalisation, on constate que ce paralangage ne fait pas de l’expression de l’émotion une fin en soi, mais l’utilise au contraire pour nuancer et enrichir le message. Dans une compréhension de l’émoji qui ne le limite pas à sa nature visuelle, mais tient compte de ses usages en composition avec l’écrit, on voit bien que son rôle s’étend largement au-delà du seul registre expressif, à l’ensemble des fonctions du langage décrites par Jakobson, et notamment à ses dimensions phatiques ou poétiques.

    #Emojis #Ecriture #culture_numérique

  • Je suis surpris de la violence verbale de tous ceux qui, hier, appelaient à barrer la route au fascisme, mais qui n’hésitent pas à recourir à la scatologie pour dénoncer Hanouna. Outre que l’insulte abaisse celui qui la profère, je suis toujours gêné de constater la myopie des mécanismes de diabolisation individuelle. Le succès de TPMP s’explique avant tout par un principe de mise en spectacle réflexif et décomplexé de la PME dirigée par l’animateur, où le #patron a tous les droits sur des employés sous-payés qui s’écrasent avec le sourire. Je ne comprends pas que tous ceux qui dénoncent le ressort de l’#humiliation ne voient pas qu’il s’agit d’un mime des relations sociales du monde du #travail. Le problème n’est donc pas de glisser Hanouna sous le tapis, mais de comprendre qu’il incarne aux yeux du plus grand nombre une nouvelle image du #pouvoir, celle des chefs d’#entreprise, des Bolloré ou des Arnault, littéralement sans limites, sans éthique ni responsabilité, se moquant des lois. Mettez un de ces milliardaires à la Maison Blanche, et vous vous apercevez que leur pratique du pouvoir contredit les règles les plus élémentaires de la démocratie (heureusement, celle-ci résiste mieux que les employés de l’entreprise Trump). Hanouna, son succès et sa #violence sociale, n’est qu’un reflet du monde macronisé – celui où l’on apprend à dire « Merci patron » à celui qui vous tient la tête sous l’eau…

    https://www.facebook.com/andre.gunthert/posts/10154597069311623

    • une source hors FB ?

      #André_Gunthert

      L’image perdue du social (notes) – L’image sociale
      http://imagesociale.fr/4470
      https://i0.wp.com/imagesociale.fr/wp-content/uploads/TPMP2016.jpg?fit=994%2C746

      On ne comprend rien au succès de ce nouveau héros des classes populaires si l’on n’aperçoit pas à quel point le spectacle de Touche pas à mon poste repose sur un principe de mise en spectacle réflexif et décomplexé de la PME dirigée par l’animateur, où le patron a tous les droits sur des employés sous-payés qui s’écrasent avec le sourire.

    • Au final le billet de André Gunthert sur son blog est beaucoup moins juste, je trouve, à se perdre en intro dans l’opposition d’une laideur de Melenchon contre un talent de Macron. C’est stupide comme comparaison... bref, je voulais signaler du coup cette perle matinale qui ré-équilibre ce que j’avais trouvé dans ce fil...

      ""HanouAnal""
      (...ou la babanalisation de toutes les dominations systémiques par un gourou sans limites.)

      Billet de #Sophia_Aram, qui a l’intelligence de ne jamais le traiter directement d’homophobe, et de le ramener à ce qu’il est : un vomitif.
      https://youtu.be/cClKa_-EuFk

      #homophobie #télé-poubelle #Cyril_Hanouna #TPMP

      ( @mad_meg en fait c’est par ici que je continue la réflexion ;) )

    • ok mais ca serait plus pratique de mettre ici ce dont on parle alors.

      donc je disait là bas https://seenthis.net/messages/600252#message600321 en commencant par te cité :

      « Y’a du monde pour traiter Hanouna d’homophobe (quand il s’agit plutôt de véhiculer stupidement les clichés de l’homophobie, ce qui n’est pas pareil) »
      @val_k Je ne comprend pas comment le fait de véhiculé des clichés homophobes peut ne pas être de l’homophobie. Est-ce que par exemple si LePen véhicule des clichés racistes tu ne dirait pas qu’il est raciste parcequ’il ne fait que véhiculé des clichés ce qui ne serait pas la même chose que d’être raciste ?
      De plus il me semble avoir compris que Hanouna ne fait pas que vehiculer des clichés homophobes, il pratique le harcelement et la persécution d’un de ses chroniqueur homosexuel en raison de son homosexualité.
      Je comprend que ONPC soit de la merde et que Moix soit un abjecte misogyne mais pourquoi chercher à banaliser l’homophobie de TPMP et de Hanouna alors qu’on parle de mensonges journalistiques d’une autre émission. Sur ONPC je ne sais pas si il y a eu des pétitions mais ca m’étonnerais qu’il n’y en ai pas vu la quantité de pétitions qui existent.
      2 secondes sur google me donnent :
      http://www.mesopinions.com/petition/art-culture/contre-propos-ruquier-emission-couche/363?commentaires-list=true
      et les pétitions de toute façon à part recevoir du spam et te retrouver fiché je ne voie pas tellement l’intérêt du truc.

      tu répond alors :

      L’homophobie c’est haïr les homosexuels, et je ne minimise en rien la banalisation de l’homophobie, je trouve ça au contraire hyper grave. Mais je veux bien qu’on continue cette conversation, si tu me trouves insufisemment haineuse envers Hanouna, sur une autre conversation, sous un billet je vais poster, ici il est question des #fakenews et de Ruquier et ses chroniqueurs... Désolée d’avoir dévié la conversation, c’"tait pas très malin de ma part.

      L’homophobie du point de vue ethymologique c’est la peur des homosexuels et non la haine mais c’est aussi le mépris contre elleux et la valorisation de leur persécution qu’on persecute avec haine, peur ou autre chose. Ca porte le même nom en français : homophobie. Il n’y a pas de mot en français pour le moment pour distingué les personnes qui discriminent les homosexuel·le·s selon leur niveau de haine sur une échelle de la haine ou selon leur niveau de mépris selon une échelle du mépris.

      Ensuite je ne suis pas haineuse contre Hanouna, et je n’ai jamais appelé à aucune action contre lui. J’ai un problème avec les personnes qui utilisent leur paroles et leur actes pour valoriser la discrimination et la persécution et en particulier la persécution de groupes déjà lourdement discriminés.
      Alors je ne défend pas Ruquier et franchement je suis d’accord avec ce que tu dit sur lui et je suis d’accord avec toi sans haine et sans appel au lynchage ni rien de tout ca. Et je ne signerait certainement pas de pétitions ni contre l’un ni contre l’autre car je pense le plus grand mal des pétitions de leur pseudo utilité et des dangers qu’elle représentent au niveau du fichage et data mining.

      Il m’empeche qu’une personne qui s’amuse de dire qu’elle se sent salie par le simple contacte physique avec une personne homosexuelle comme semble le faire Hanouna ca me pause de gros problèmes. ca me semble indispensable de lui répondre qu’on est pas d’accord et que ce type de discours soit au moins contredit.

      Tu dit que c’est un vomitif, mais c’est un vomitif qui promeut la discrimination des homosexuel·le·s et aussi celle des femmes et probablement d’autres groupes que j’ignore car je n’ai pas de télévision pour me faire trouvé drôle de persécuter un homo sur son homosexualité.
      A ce compte là pas la peine de contredire les racistes puisque ce ne sont que des vomitifs et pas la peine de contredire les sexistes puisque ce ne sont que des vomitifs aussi.

      @sandburg tu disait :

      @mad_meg @val_k
      Perso, j’adère au modèle de la « mécanique raciste » [bouamama + tévanian] où c’est justement le fait de véhiculer qui est important pour renforcer le racisme. Ils vont même jusqu’à dire : une personne n’est pas raciste, c’est ses actions qui sont racistes.
      voir : ►https://seenthis.net/messages/597734
      https://seenthis.net/messages/411127

      Je ne comprend pas l’interet de cette « mécanique raciste » par rapport à Hanouna, Ca me semble evident que Hanouna n’a pas d’essence homophobe comme personne n’en a et qu’on ne nait pas homophobe. L’homophobie, le racisme, le sexisme ce sont des actes et des paroles et quant je dit « Hanouna est homophobe » il est évident pour moi que ca veux dire « Hanouna tien des propos homophobes et agit selon des actes homophobes et ses actions et ses paroles font la promotion d’actes et paroles homophobes auprès des autres » sauf que ca va plus vite de dire « Hanouna est homophobe » car ca me semble curieux d’imaginé une sorte de nature homophobe de quelqu’un ou quelqu’une. L’homophobie (ou le racisme, ou le sexisme) c’est pas une couleur de cheveux qu’on a de naissance, c’est forcement un choix politique exprimé par des actes et des paroles (textes, dessins, blagues ou n’importe).

  • Le sourire photographique, ou les révolutions du portrait expressif | André Gunthert
    http://imagesociale.fr/4275

    Pourquoi sourit-on sur les portraits photographiques au XXe siècle, et pas au XIXe siècle ? Sous cette forme élémentaire, la question est devenue une énigme prisée des études visuelles. Héritière d’une longue tradition d’analyse de l’expression des émotions, elle apparaît comme une évolution historique directement observable, documentée par des sources abondantes. Découvrir la clé de cette métamorphose paraît à portée de main. Source : L’image sociale