person:bernard stiegler

  • affordance.info : De l’ENA à l’ISF. Ou la fabrique de l’innommable.
    https://www.affordance.info/mon_weblog/2019/04/ena-isf-innommable.html
    https://www.affordance.info/.a/6a00d8341c622e53ef0240a47ede54200d-600wi

    J’allais écrire que j’étais sidéré mais la « sidération » est un mot qui a été vidé de son sens à force de se banaliser. Depuis un événement que j’identifie comme l’arrestation de Dominique Strauss-Kahn en 2011, en passant par l’attentat contre Charlie-Hebdo en 2015 et jusqu’au récent incendie de Notre-Dame en 2019, le mot « sidération », qui désigne quand même « l’anéantissement soudain des fonctions vitales, avec état de mort apparente, sous l’effet d’un violent choc émotionnel », est mis à tous les drames et à toutes les larmes, souvent accompagné du mot « état ». Notre état de sidération.

    Alors je vais tout de même l’employer, ce mot. Cette locution. Cet état de sidération. En lisant l’article du Parisien faisant état du projet de remplacer « l’ENA » par « l’ISF », j’ai été, une fois de plus, sidéré, dans un état de sidération. Et je me suis immédiatement souvenu - parce que nous sommes la start-up nation - de ce que Bernard Stiegler racontait à propos de la « disruption », expliquant pourquoi et comment c’était avant tout une stratégie de tétanisation de l’adversaire et ce qui faisait « que vous arriviez toujours trop tard ». La disruption expliquait encore Stiegler, ce sont « des stratégies pour prendre de vitesse ses compétiteurs et ses régulateurs. »

  • La télécratie contre la démocratie, de Bernard Stiegler. – Salimsellami’s Blog
    https://salimsellami.wordpress.com/2018/12/18/la-telecratie-contre-la-democratie-de-bernard-stiegler

    Bernard Stiegler est un penseur original (voir son parcours personnel atypique). Ses opinions politiques personnelles sont parfois un peu déroutantes, comme lorsqu’il montre sa sympathie pour Christian Blanc, un personnage qui, quels qu’aient été ses ralliements successifs, s’est toujours fort bien accommodé du système dénoncé par lui. J’ajoute qu’il y a un grand absent dans ce livre : le capitalisme financier.

    Cet ouvrage a pour but de montrer comment et pourquoi la relation politique elle-même est devenue un marché parce que l’appareil télécratique, nous dit l’auteur, a « développé un populisme industriel qui engendre, à droite comme à gauche, une politique pulsionnelle qui a détruit le désir. »

    En Europe, entre un tiers et deux tiers des enfants ont désormais la télévision dans leur chambre (les trois-quarts dans les milieux défavorisés en Angleterre). Aux États-Unis, dès l’âge de trois mois, 40% des bébés regardent régulièrement la télévision.
    En 2004, Patrick Le Lay, ancien directeur de TF1 expliquait que le populisme industriel était devenu la loi de notre époque, les citoyens s’étant effacés devant « le temps de cerveau disponible ». Les consommateurs de la télécratie sont ainsi, et se sentent, irrémédiablement tirés vers le bas, ce qui provoque une réelle souffrance. Ils souffrent d’être seuls devant leur télé, tout en ayant le sentiment d’appartenir à une « foule artificielle d’où surgissent des processus d’identification régressive. »

    Court-circuités en tant que représentants d’organisations sociales par le temps réel et le direct des médias de masse (ce qui les conduit à produire une pensée sous forme de slogans, par exemple), les représentants politiques ont tendance à court-circuiter à leur tour les organisations politiques qui les ont mandatées. Les présidentiables, nous dit Stiegler, recherchent les faveurs du quatrième pouvoir, en osmose désormais totale avec le pouvoir industriel et capitalistique, en « faisant de la télé-réalité politique, cultivant leurs personnages et leurs discours dans le sens de ce qui détruit l’opinion et avec elle la démocratie. Le peuple n’existe plus : il est remplacé par une population en attente de spectacles.

    C’est parce que les liens sociaux ont été détruits par la télécratie que la répression est vouée à proliférer. Les politiques ne traitant jamais les causes des comportements déviants » barbares » (y compris ceux des patrons voyous) mais leurs effets.
    Les blogs des politiques sont des simulacres qui imposent des modalités de fonctionnement inspirées des techniques de communication mises en oeuvre par les industries de programmes. Ces blogs ne proposent pas des programmes politiques (on utilise désormais le mot » logiciel » en lieu et place de programme), mais des réponses individualisées. Ce qui renforce tous les communautarismes, pas seulement ceux spécifiquement » ethniques » . La défense de la consommation, du » pouvoir d’achat » devient alors le commencement et la fin de la » politique » . Le marché, explique Stiegler, est désormais « l’unique horizon de toute identification collective ». La commercialisation (le marketing, pour parler la langue du dollar) crée du manque qu’il comble par un autre manque, ce qui débouche sur une consommation addictive, y compris pour la politique passée par le tamis de la télécratie. Tous les « segments de l’existence humaine » sont devenus des marchés. Les politiques ont intériorisé cet état de fait en ne voyant pas que leur « impuissance publique » n’était que la traduction de leur impuissance (acceptée) politique.

    Cette télécratie est le corollaire superstructurel de la société de marché, cette société qui, bien sûr, creuse les inégalités et qui, selon l’auteur, « pose comme principe fondamental que l’individu se fait par le marché ». Stiegler dénonce, dans ce contexte, « l’explosion de l’espace et du temps publics ». Le consommateur, qui n’est pas un citoyen, n’a plus aucune prise sur ce qu’il utilise : transports privatisés, nourriture industrielle, thérapies géniques, services médicaux etc. Il tend à ne plus y avoir, prévient Stiegler, d’action publique.

    Les privatisations (sans parler des délocalisations) renforcent la division industrielle du travail. Étant progressivement dépossédé de la responsabilité de son savoir, le travailleur n’est plus un ouvrier qui « ouvre le monde ». L’objet lui échappe en tant que sa fabrication.

    Bernard GENSANE

    La télécratie contre la démocratie, Bernard Stiegler – Paris, Flammarion, 2008URL de cet article 8461 
    https://www.legrandsoir.info/la-telecratie-contre-la-democratie-de-bernard-stiegler.html

  • Sciences. Nous avons tous une #mémoire du futur et elle serait menacée par les machines – actu.fr
    https://actu.fr/normandie/caen_14118/sciences-nous-avons-tous-une-memoire-futur-serait-menacee-par-machines_18992197


    Je ne sais pas : je n’ai aucune mémoire chronologique depuis le début, mais une très bonne mémoire spatiale et associative. Mes extensions numériques me servent essentiellement à palier mon manque de chronicité. Pareil pour le clavier qui m’a permis de me libérer d’une écriture manuscrite fastidieuse et peu lisible.
    Donc, ça me va bien comme prothèse.

    Autre exemple donné par Bernard Stiegler : « Les taxis à Paris sont devenus depuis l’avènement du GPS absolument nul. À Londres, si un plan de la ville est retrouvé dans un taxi, le chauffeur perd sa licence. Je peux vous dire que ça change tout… Ce sont de vrais artistes de la ville. »

  • La politique d’Emmanuel Macron est une politique sans valeurs

    http://www.liberation.fr/debats/2018/05/09/la-politique-d-emmanuel-macron-est-une-politique-sans-valeurs_1648855

    Avec son culte du chiffre et de la performance, le chef de l’Etat participe à un mouvement d’expropriation de la pensée, et de confiscation de la décision des citoyens.

    Un an et c’est déjà l’overdose du bilan. A longueur d’analyses, tout y passe : les aptitudes physiques du « chef » (le nouvel homme augmenté ?), les métaphores royales, voire impériales, le positionnement transcendant sur l’échiquier politique, le nombre « colossal » de déplacements internationaux, la prétendue frénésie des réformes, etc. Mais quelle idéologie peut-on déceler, en filigrane, derrière la pratique du pouvoir ?

    Depuis le début du quinquennat, chaque action de l’exécutif est soutenue par une monstration de la modernité, évoquée de manière quasi religieuse : « Un devoir d’efficacité », « un langage de vérité ». La rhétorique du management privé, les anglicismes modernisateurs sont convoqués par le « nouveau monde » politique. Les réformes ont à peine le temps d’être mises en œuvre qu’elles sont déjà dépassées par la réforme suivante, à coup de « bottom-up », « impact », « innovation », « benchmarking » ou autre « évaluation ».

    Cette invasion des normes, des outils, des standards de gestion, cette emprise grandissante des notations n’est pas nouvelle. Des sociologues (Alain Desrosières, Eve Chiapello ou encore Albert Ogien) ont en effet montré les processus historiques et sociaux de construction de ce « gouvernement par les nombres ». Précisément, on a ainsi pu souligner que la prolifération des dispositifs de quantification et d’évaluation a permis la colonisation des services publics par la langue fonctionnelle de l’entreprise, ce que l’on nomme le New Public Management, art néolibéral de démantèlement de l’Etat.

    Cette mise en mathématique du monde social fait aujourd’hui office de politique. Sous couvert d’apolitisme, de pragmatisme et de rationalisation, une idéologie gouverne les multiples réformes mises en œuvre par le pouvoir exécutif : on fait se substituer aux discours axés sur les valeurs, des discours privilégiant les techniques. Les instruments régulent, fragmentent, contrôlent et rendent conforme l’ensemble des pratiques sociales.

    Cette politique néolibérale se pare du masque de l’objectivité technique et de la neutralité ; elle ne laisse aucune place au commun, elle ne laisse aucune place à la contestation. Il faut être efficace et performant. A l’hôpital, au sein de l’université, des Ehpad, dans les activités sociales et culturelles. Aucun pan de l’action publique ne doit y échapper. Mais, on ne pose jamais la question du sens, de ce que doit être l’Etat, la puissance publique, dans une société sous tension, ce que les usagers, les citoyens veulent comme services publics au XXIe siècle.

    Au-delà du culte du chiffre, réduction des déficits publics, course pour un point de croissance ou baisse drastique du nombre de fonctionnaires, il convient aussi de réfléchir sur les mots que nous employons pour dire le monde. Nous ne les utilisons pas impunément. Par exemple, il faudrait se rappeler que disruption, mot qui obsède tant le nouveau champ politique, dérive, dixit le dictionnaire de l’Académie française, du latin disrumpere, « briser en morceaux, faire éclater ». Que certains philosophes, comme Bernard Stiegler, y voit aussi le slogan d’une nouvelle forme de barbarie. On pourrait également faire l’analyse du terme « performance » qui provient d’un vocabulaire de « turfiste ». C’est la manière dont court un cheval qui progressivement va prendre le sens de score et drainer avec elle, la compétition, la rivalité, qui fait de l’autre un adversaire.

    Toutes ces formes actuelles de mesure, d’évaluation, de gouvernementalité participent à un mouvement d’expropriation de la pensée, une confiscation de la décision des citoyens. Le politique se met en capacité de créer un espace qu’il domine et mesure, via des indicateurs. Pas de place pour le débat, la contradiction, la production d’un sens et d’une finalité. On exécute un acte par soumission à l’automatisme des procédures, il n’y a pas de pire menace pour une démocratie.

    Faute de prendre du temps pour mettre en débat les chiffres, les valeurs, c’est un mode d’emploi simplifié qui est choisi, plutôt que la pensée complexe, ouverte à l’inconnu. Comme le disait le philosophe Jean-François Lyotard : « Dans un univers où le succès est de gagner du temps, penser n’a qu’un défaut, mais incorrigible : d’en faire perdre ».

    Nicolas Matyjasik Politiste, enseignant et éditeur, Sciences-Po Lille

  • Les cheminots devant les locaux de BFMTV
    https://lemediapresse.fr/social-fr/les-cheminots-devant-les-locaux-de-bfmtv
    https://i0.wp.com/lemediapresse.fr/wp-content/uploads/2018/04/DZ28W3lXUAIjfxA-2.jpg?resize=1280%2C640&ssl=1

    Les diffuseurs de fake news ne sont pas toujours ceux que l’on croit. Aussi l’exécutif devrait-il surveiller d’un peu plus près la première chaîne d’information en continue autoproclamée. Leur traitement des mobilisations sociales, entre analyses bâclées et éditos partiaux, pose question à plus d’un titre.

    C’est pour protester contre le traitement (encore une fois) très douteux de la grève des cheminots par BFMTV, que ces derniers ont décidé d’investir les locaux de la chaîne. « BFMenteurs », pouvait-on apercevoir sur la banderole affichée devant ces mêmes locaux. Il faut dire que BFM, que l’on sait régulièrement hostile aux mouvements sociaux, n’hésite pas à piocher ses terminologies dans un répertoire lexical qui laisse peu de doute quant au regard qu’entretient la rédaction sur les mouvements sociaux. En effet, elle n’hésite pas à parler de « prise d’otage », par l’intermédiaire d’un usager interrogé dans le RER. Tellement « pris en otage » que ces pauvres bougres seraient contraints de prendre les RER « d’assaut ». Réalisons bien, tout de même, que si ces termes devaient appartenir à un champ lexical, ce serait celui de la guerre, ou de l’opération commando, au choix.

    Symboliquement, c’est comme faire passer le mouvement pour violent, alors même que celui-ci a pour but de lutter contre la violence sociale dont il est présentement la victime. Un comble de malhonnêteté intellectuelle donc…

    Malheureusement, pour BFM, ces manifestations, ces grèves, n’ont pas lieu d’être. Les cheminots ne seraient rien d’autre que des « râleurs ». Ainsi sont-ils nommés par Eric Brunet, un des éditorialistes de la chaîne… D’ailleurs, si l’on croit Apolline de Malherbe, manifestement repeinte en prophète, les « Français seraient pour la suppression du statut des cheminots ». Ne soyons pas dupes, Apolline de Malherbe n’est pas un prophète, elle se réfère seulement au dernier sondage Ifop, stipulant que seulement 46% des Français seraient favorables aux mobilisations… Il est vrai que chez BFM, ils sont toujours prompts à donner aux sondages la valeur d’une enquête sociologique, voir d’un scrutin électoral. Et quand bien même, sans sondage, peut-on aujourd’hui compter le nombre de fois où fut entendu « les Français pensent que… »

    Il semblerait aussi que Jean-Luc Mélenchon aurait été exfiltré de la mobilisation sous les insultes. Lorsqu’il devient possible de discréditer deux mouvements et faire ainsi d’une pierre deux coups, pourquoi s’en priver ? D’un côté les cheminots ne seraient ainsi que des bœufs ne connaissant nulle autre méthode de protestation que la violence et, de l’autre, Mélenchon se fait rejeter par ceux qu’il prétend défendre… L’occasion de diffuser une telle « fausse information » était trop belle.

    Maintenant, si l’on récapitule un peu ce qui caractérise le travail « journalistique » de BFM sur le sujet, nous avons : des fake news, un micro-trottoirs bâclé et pernicieux, des pseudo-analyses venant de pseudo-experts pour délégitimer la grève. Tout semble organisé pour traîner le mouvement dans la boue, faisant passer les cheminots pour des « nantis », pour des « privilégiés ». Aucune clémence ni l’ombre d’une empathie semble être exprimé à leur égard. Les avis contraires semblent y avoir une place très restreinte voir inexistante. BFM n’a d’ailleurs aucunement fait mention des cheminots qui se sont mobilisés devant leurs locaux.

    Ils étaient pourtant bien présents hier matin pour exprimer leur profond désaccord avec la chaîne, dénonçant le traitement particulièrement péjoratif dont ils font l’objet.

  • Bernard Stiegler : « <i>Pour le moment, l’intelligence artificielle produit surtout de la bêtise artificielle</i> » - Altermonde-sans-frontières
    http://www.altermonde-sans-frontiere.com/spip.php?article37261

    Bernard Stiegler : « Pour le moment, l’intelligence artificielle produit surtout de la bêtise artificielle »
    samedi 10 mars 2018
    popularité : 57%

    Par Marine Jeannin

    Mises au service de l’économie spéculative et du capitalisme de prédation, les nouvelles technologies pourraient être autant la solution que le problème, prévient le philosophe Bernard Stiegler. Loin d’être technophobe, il appelle à une réponse politique qui place les machines au service de l’homme. Et non l’inverse. Philosophe, il travaille sur les technologies numériques et les transformations qu’elles imposent à la société. Fondateur et président du groupe de réflexion Ars industrialis, il dirige également l’Institut de recherche et d’innovation (IRI), qui anime un projet d’économie contributive à Plaine Commune (Seine-Saint-Denis). Entretien

    Vous dites que la grande question est de savoir comment faire pour que l’intelligence artificielle ne crée pas de bêtise artificielle. Qu’entendez-vous par là ?

    L’intelligence artificielle aujourd’hui, c’est d’abord le calcul intensif (deep learning, big data) appliqué au capitalisme de plateformes. Cette économie prédatrice ne renouvelle pas la possibilité de produire les richesses qu’elle capte. Les technologies computationnelles — l’intelligence artificielle au sens large — ne sont utiles qu’à une condition : qu’elles ne détruisent pas le tissu social mais qu’elles permettent au contraire de le reconstruire. Pour le moment, l’intelligence artificielle produit surtout de la bêtise artificielle. Aujourd’hui les solidarités sociales sont menacées, l’atomisation est immense, le malaise universel. Cela ne concerne pas que l’Europe : aux États-Unis, où l’espérance de vie baisse, le suicide, l’overdose et l’alcoolisme sont les premières causes de mortalité des classes moyennes blanches selon l’économiste Paul Krugman.

    Que préconisez-vous ?

    Ces technologies doivent être mises réellement au service de l’intelligence, et non de l’économie spéculative et du capitalisme de prédation. L’intelligence artificielle est un pharmakon, au sens grec : c’est à la fois le poison et le remède. Je ne suis absolument pas technophobe. J’alerte simplement contre l’inconscience économique, politique et sociale de leaders moutonniers qui ne voient pas qu’ainsi on va dans le mur. En ce moment, il y a un mouvement de prise de conscience de tout cela. Il faut maintenant concrétiser des réponses très précises, à commencer par de nouvelles politiques industrielles.

    Justement, comment refonder le modèle économique pour redonner une place au travail au service de l’homme ?

    Il est acquis maintenant que l’emploi va diminuer, dans des proportions encore inconnues. L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) évalue à 9 % le nombre d’emplois qui, d’ici 10 à 20 ans, devraient disparaître dans 21 pays, mais il existe des projections encore plus pessimistes. Nous sommes déjà dans un chômage endémique totalement ruineux pour les finances publiques. Tout ce qui constitue la solidarité sociale est menacé par ce déficit structurel. L’économie est déjà insolvable et subsiste en partie sur la spéculation. Si on subit une augmentation de chômage de cette ampleur, c’est l’effondrement. Il faut donc envisager dès aujourd’hui une transformation de l’économie qui consiste à revaloriser le travail en dehors de l’emploi.

    Quelle est la distinction entre travail et emploi ?

    Selon une étude réalisée par des chercheurs d’Oxford en 2013, 47 % des emplois américains seraient automatisables d’ici 20 ans. Les gens qui les occupent travaillent, rentrent potentiellement épuisés chez eux le soir, mais ne produisent pas de changement (la situation n’est pas modifiée suite à leur action). Par exemple, une personne qui passe des produits devant un lecteur de code-barres ne change pas la situation : elle la sert, elle la consolide. Dans le langage désuet du XIXème siècle, cela s’appelle la prolétarisation. 47 % des emplois sont potentiellement automatisables parce que 47 % des emplois sont prolétarisés. Pour retrouver l’équilibre de l’offre et de la demande, l’économie de demain devra valoriser le travail hors emploi. Élever un enfant, c’est un travail. Apprendre à dribbler au foot, c’est un travail. Écrire des bouquins, c’est un travail. Même s’ils ne permettent pas de gagner sa vie. Énormément de gens travaillent sans être employés pour cela : les contributeurs de Wikipédia, par exemple, qui produisent pourtant une valeur énorme.

    À quoi ressemblerait une économie où on valoriserait le travail hors emploi ?

    À Plaine Commune, en Seine-Saint-Denis, nous travaillons, avec l’Établissement public territorial, la Fondation de France, des industriels et des banques, à expérimenter une économie contributive, fondée sur un revenu contributif qui s’inspire du logiciel libre et des intermittents du spectacle. Nous pensons que leur régime d’indemnisation pourrait être élargi à toutes sortes de domaines : la métallurgie, le bâtiment, le soin, l’alimentation… Ce revenu conditionnel, couplé aux emplois intermittents à haute qualification, peut compenser les pertes d’emploi, et donc de pouvoir d’achat. Par exemple, Anne Hidalgo a annoncé qu’à partir de 2030, les voitures thermiques ne pourront plus rentrer dans Paris. Ces voitures ne seront pas envoyées à la casse : il va falloir les remotoriser. Aujourd’hui, personne ne sait faire ça, dans les garages, les concessionnaires ne sont plus mécaniciens. Nous avons détruit les métiers : il va falloir les réinventer. C’est pourquoi nous collaborons avec de grandes entreprises qui, malgré leur bonne santé économique, savent qu’elles vont devoir évoluer. Si elles ne parviennent pas à resolvabiliser l’économie face aux plateformes prédatrices, si elles ne réinventent pas leur métier, elles seront disruptées. Ce qu’il faut produire aujourd’hui, ce n’est pas seulement de l’employabilité : c’est du savoir.

    Propos recueillis par Marine Jeannin

    (Photo de Bernard Stiegler - © E-pineuil)

    nouveau-magazine-litteraire.com

    • L’intelligence artificielle imite l’humain néolibéral.

      Elle ne peut véhiculer que la pensée officielle, c’est donc une catastrophe analogue à celle des contributeurs de Wikipédia, de Anne Hidalgo et tant d’autres.

      Ce sont nos vies et notre planéte qui sont mises au service de l’économie spéculative et du capitalisme de prédation. La soit disant intelligence artificielle n’est qu’un élément mortiphére de plus.

  • Si on savait déjà que les #Netflix et autres #gafam choisissent les suggestions qu’ils nous proposent dans le seul but de nous garder captifs, donc sans prendre de risques, on apprend ici qu’ils savent même les adapter en temps réel pour coller à notre état d’esprit du moment !

    Comment Netflix choisit les images des séries selon votre profil

    Par exemple, pour la #série #Stranger_Things, différents visuels ont été produits et s’affichent en fonction de ce que vous avez déjà vu, et donc a priori apprécié, au sein de la plateforme. Autre exemple : pour le même film, Good Will Hunting, deux illustrations sont suggérées, en fonction des préférences des abonnés. La première pour convaincre les amateurs de romances, la seconde pour celles et ceux qui préfèrent les comédies.

    https://usbeketrica.com/article/netflix-personnalisation-illustrations-algorithme

    D’où la question :

    #Algorithmes : comment sortir de sa « #bulleculturelle » ?

    Et comme l’a montré le philosophe Bernard Stiegler « la représentation que se fait un individu de lui-même est construite sur une somme de contradictions et d’idéaux. Nous avons la possibilité de changer en permanence. Or ces algorithmes détruisent notre singularité en créant un double de nous-même qui n’est qu’une image statistique."

    http://rf.proxycast.org/1378212870646407168/12814-14.12.2017-ITEMA_21524069-0.mp3

    https://www.franceculture.fr/emissions/le-billet-culturel/le-billet-culturel-jeudi-14-decembre-2017

    #deep_learning

  • Repenser l’enclosure de la connaissance (avec Bernard Stiegler et Amartya Sen) | Calimaq
    https://scinfolex.com/2017/11/25/repenser-lenclosure-de-la-connaissance-avec-bernard-stiegler-et-amartya-s

    J’ai eu la chance cette semaine de participer à l’événement « Action publique / Public en action / Controverse », organisé par la Cité du Design de Saint-Etienne dans le cadre de la semaine de l’innovation publique. La question des Communs y a été largement débattue, mais ce fut surtout l’occasion pour moi d’approfondir ma compréhension des liens entre les Communs et le design, ou plutôt, d’appréhender ce que l’approche par le design pouvait nous apporter pour la compréhension des Communs. Source : : : S.I.Lex : :

    • Cf. Et si l’on refondait le droit du travail…, par Alain Supiot (@mdiplo, octobre 2017) https://www.monde-diplomatique.fr/2017/10/SUPIOT/58009

      Il faudrait être aveugle pour disconvenir de la nécessité d’une profonde réforme du droit du travail. Toujours, dans l’histoire de l’humanité, les mutations techniques ont entraîné une refonte des institutions. Ce fut le cas des précédentes révolutions industrielles, qui, après avoir bouleversé l’ordre ancien du monde en ouvrant les vannes de la prolétarisation, de la colonisation et de l’industrialisation de la guerre et des massacres, entraînèrent la refonte des institutions internationales et l’invention de l’État social. La période de paix intérieure et de prospérité qu’ont connue les pays européens après guerre est à mettre au crédit de cette nouvelle figure de l’État et des trois piliers sur lesquels il reposait : des services publics intègres et efficaces, une Sécurité sociale étendue à toute la population et un droit du travail attachant à l’emploi un statut garantissant aux salariés un minimum de protection.

      Nées de la seconde révolution industrielle, ces institutions sont aujourd’hui déstabilisées et remises en cause. Elles le sont par les politiques néolibérales, qui entretiennent une course internationale au moins-disant social, fiscal et écologique. Elles le sont aussi par la révolution informatique, qui fait passer le monde du travail de l’âge de la main-d’œuvre à celui du « cerveau d’œuvre », c’est-à-dire du travailleur « branché » : on n’attend plus qu’il obéisse mécaniquement à des ordres, mais on exige qu’il réalise les objectifs assignés en réagissant en temps réel aux signaux qui lui parviennent. Ces facteurs politiques et techniques se conjuguent en pratique. Il ne faut cependant pas les confondre, car le néolibéralisme est un choix politique réversible tandis que la révolution informatique est un fait irréversible, susceptible de servir des fins politiques différentes.

      Cette mutation technique, qui alimente les débats actuels sur la robotisation, la fin du travail ou l’uberisation, peut tout aussi bien aggraver la déshumanisation du travail engagée sous le taylorisme que permettre l’établissement d’un « régime de travail réellement humain », comme le prévoit la Constitution de l’Organisation internationale du travail (OIT), c’est-à-dire un travail procurant à ceux qui l’exercent « la satisfaction de donner toute la mesure de leur habileté et de leurs connaissances et de contribuer le mieux au bien-être commun ». Un tel horizon serait celui du dépassement par le haut du modèle de l’emploi salarié, plutôt que du retour au « travail marchandise ».

      (…) La révolution informatique offre une chance de conférer à tous les travailleurs une certaine autonomie, en même temps qu’un risque de les soumettre tous — y compris les indépendants, les cadres ou les professions intellectuelles — à des formes aggravées de déshumanisation de leur travail. Cette révolution ne se limite pas en effet à la généralisation de l’usage de techniques nouvelles, mais déplace le centre de gravité du pouvoir économique. Ce dernier se situe moins dans la propriété matérielle des moyens de production que dans la propriété intellectuelle de systèmes d’information. Et il s’exerce moins par des ordres à exécuter que par des objectifs à atteindre.

      À la différence des précédentes révolutions industrielles, ce ne sont pas les forces physiques que les nouvelles machines épargnent et surpassent, mais les forces mentales, ou plus exactement les capacités de mémorisation et de calcul. Incroyablement puissantes, rapides et obéissantes, elles sont aussi — comme aime à le répéter le savant informaticien Gérard Berry — totalement stupides. Elles offrent donc une chance de permettre aux hommes de se concentrer sur la part « poïétique » du travail, c’est-à-dire celle qui exige imagination, sensibilité ou créativité — et donc celle qui n’est pas programmable.

  • Bernard Stiegler : lost in disruption ? - 16 septembre 2017 par Alexandre Moatti
    https://zilsel.hypotheses.org/2878

    Bernard Stiegler est depuis quelques années une figure de proue de l’académisme médiatique. Sa voix chaude, traînante et légèrement chuintante est connue des auditeurs de radio – il enchaîne aussi conférences publiques et académiques (300 vidéos sur internet depuis huit ans), en même temps qu’une intense production d’essais (plus de 30 ouvrages depuis 1994).

    Le caractère très abondant de cette production nécessiterait une analyse détaillée, portant sur la cohérence et/ou l’évolution de la pensée. Cette analyse ne semble pas avoir été faite puisque le philosophe est reçu (au sens de la réception de ses idées) au fil de l’eau. Côté médias, le rythme intense d’un livre publié tous les 9 mois[1] brouille la ligne de partage entre la promotion d’un ouvrage et l’analyse de fond. On est là dans une forme de « dévoration médiatique »[2] – de l’auteur comme du media lui-même : le rythme de production d’ouvrages s’impose au media, qui ne peut prendre de recul (à supposer que ce soit sa vocation) ; par invitations et tribunes de presse répétées, le media s’auto-dévore, en quelque sorte.

    Quant à la réception en milieu universitaire, une question se pose : Stiegler est-il encore un universitaire (ou un chercheur) ? Il semble en fait naviguer depuis quelques années dans cet entre-deux que constitue l’académisme mondain ou « zone médiane », exploitant sa « rente de visibilité »[3] et préoccupé de l’accroître. S’il existe une littérature secondaire à son sujet[4], elle semble plus se rattacher à un phénomène tribal qu’à une réelle analyse critique. Comme souvent, personne ne prend le temps de se pencher de manière critique sur pareille œuvre, et la tâche devient de plus en plus difficile au fur et à mesure que le temps passe.

    [...]

  • Notre cerveau est-il fragilisé par Internet ?

    http://www.lemonde.fr/sciences/article/2017/08/21/notre-cerveau-est-il-fragilise-par-internet_5174869_1650684.html

    Omniprésent, le numérique amplifie nos mémoires externes, au risque d’amenuiser nos mémoires biologiques.

    Comment pallier les carences de notre mémoire biologique limitée, oublieuse, aussi labile et périssable que le tissu cérébral qui l’héberge ?

    La question taraudait déjà nos ancêtres. En réponse, ils inventèrent des systèmes d’externalisation de leurs savoirs. D’abord sous la forme d’une mémoire collective, orale, transmise entre générations. Puis « il y eut les grandes ruptures comme l’écriture, l’imprimerie, la radio ou la télévision », résume Francis Eustache, neuropsychologue (Inserm-EPHE-université de Caen). Soit autant de relais externes pour préserver et amplifier nos mémoires.

    Face à la matière molle du cerveau, les disques durs des ordinateurs et le cloud offrent désormais une capacité de stockage quasi illimitée. Nous assistons à « une explosion de l’externalisation de notre mémoire sans aucun équivalent dans toute l’histoire de l’humanité », relève Francis Eustache dans Ma mémoire et les autres (Le Pommier, à paraître le 11 septembre, 176 p., 17 euros).

    Substitution des ressources

    Comment nos sociétés vont-elles s’adapter à ce bouleversement numérique ? N’y a-t-il pas un risque d’effet pervers : au lieu d’un enrichissement de notre mémoire sociale, un affaiblissement de nos fonctions cognitives ?

    L’inquiétude est loin d’être neuve. Pour Socrate déjà, l’écriture était un « pharmakon » : un remède mais aussi un poison, qui certes corrige les failles de la mémoire, mais l’affaiblit en même temps. Au IVe siècle avant notre ère, Platon a relayé cette menace : « Cette invention, en dispensant les hommes d’exercer leur mémoire, produira l’oubli… », écrit-il dans Phèdre. « Platon s’est planté : l’effort d’écriture ou de lecture, aucontraire, entraîne un effort de mémoire », juge Francis Eustache.

    De plus, sa diffusion sociale a été très progressive, au contraire de l’irruption soudaine d’Internet. « Avec Internet, le danger est là : les ordinateurs, les smartphones rendent l’information accessible à tous. Pour autant, on mesure très mal le retentissement d’Internet sur notre cerveau. » Une étude a cependant marqué les esprits. La psychologue Betsy Sparrow, de l’université Columbia (New York), a soumis des étudiants d’une université américaine à des questions difficiles. Résultat, publié en 2011 dans Science : en priorité, ces jeunes – pourtant cultivés – ont fait appel à Internet, plutôt qu’à leurs propres ressources cognitives.

    Le danger des écrans

    « Cela pose problème. La démarche devrait être inverse : pour avoir un libre arbitre, un discernement, nous devrions nous construire une mémoire interne et y faire appel. Si nous dépendons totalement d’une mémoire externe, nous devenons des coquilles vides ! », estime Francis Eustache. « La gestion collective des traces est devenue un objet de commerce industriel », avertit le philosophe Bernard Stiegler dans Mémoire et oubli (Le Pommier, 2014).

    Ce commerce est contrôlé par des moteurs de recherche. Or ces systèmes hiérarchisent l’information « selon des impératifs économiques, et non plus noétiques [de connaissance pure]. Ces machines oublient à certains égards de moins en moins, mais d’un autre point de vue elles nous rendent de plus en plus oublieux, parce que nous sommes dépendants d’elles – et cela parce qu’elles hiérarchisent et organisent selon des procédures qui nous échappent de plus en plus ». Par exemple, « accepter les conditions de Facebook, c’est accepter d’être spolié de ses archives ». Il pointe aussi un risque de « prolétarisation de nos fonctions internes de perception, d’intuition, d’entendement et d’imagination ».

    Ne dit-on pas « surfer sur Internet » ? « Plus les informations sont traitées en surface, plus on risque de ne pas les mémoriser », note Francis Eustache. Par ailleurs, une utilisation excessive des écrans altère la durée ou la qualité du sommeil, donc nos capacités cognitives. Autre risque : l’appauvrissement de nos relations sociales et familiales.

    Dernier piège, enfin : le défaitisme et le refus du progrès. Alors, quels antidotes au numérique ? « Une thérapeutique constituée par des savoir-vivre, des savoir-faire et des savoirs spirituels », rêve Bernard Stiegler.

    Les différentes formes de mémoire

    Episodique : c’est la « mémoire des souvenirs », la mémoire à long terme des événements que nous avons personnellement vécus, situés dans un contexte spatial et temporel précis. Elle n’apparaît que vers l’âge de 3 à 5 ans. Grâce à elle, nous prenons conscience de notre propre identité, avec un sentiment de continuité temporelle. Particulièrement fragile, elle dépend d’un réseau de neurones très distribué dans le cerveau. Elle s’appuie aussi sur la mémoire sémantique.

    Sémantique : c’est la « mémoire des connaissances », une mémoire à long terme des concepts, des mots, des savoirs généraux sur le monde et sur nous-mêmes. La plupart de nos souvenirs autobiographiques se transforment progressivement en connaissances générales : ils rejoignent la mémoire sémantique.

    Autobiographique : elle mêle notre mémoire épisodique à des éléments de notre mémoire sémantique [ceux qui concernent la connaissance sur nous-mêmes].

    Déclarative (explicite) : elle concerne le stockage et la récupération des données que nous pouvons faire émerger consciemment, puis exprimer par le langage.

    Procédurale : c’est la mémoire des savoir-faire et des habiletés motrices, verbales, cognitives, quand elles sont devenues automatiques [faire de la bicyclette sans y penser, par exemple]. Ce type de mémoire est relativement épargné dans les « maladies de la mémoire », comme Alzheimer.

    Implicite : c’est une mémoire inconsciente, très émotionnelle. Elle peut contrôler, à notre insu, le rappel de certains souvenirs : par exemple, en établissant un lien entre les affects du présent et ceux de la période d’acquisition du souvenir.

    Perceptive : elle s’appuie sur diverses modalités sensorielles (vue, ouïe…) pour, par exemple, reconnaître un parcours familier sans y prêter vraiment attention.

    De travail : c’est une mémoire à court terme. Elle nous offre un « espace de travail mental » qui nous permet de stocker et de manipuler des informations pendant une période de plusieurs secondes. Et, donc, de réaliser une tâche, raisonner, comprendre ce que nous lisons, suivre le fil d’un discours… Dans nos activités quotidiennes, elle est constamment sollicitée.

  • Bernard Stiegler : pensée des techniques et culture informationnelle
    https://hal.archives-ouvertes.fr/SEMINAIRE_GRCDI/sic_01468798

    Par Alexandre Serres

    Cette communication vise à montrer en quoi l’œuvre de Bernard Stiegler constitue, d’une part un apport théorique essentiel pour les problématiques de la culture informationnelle, d’autre part une source extrêmement féconde de réflexion critique sur les médias et les technologies de l’information. Autrement dit, il s’agira de montrer l’étroite proximité entre la pensée des techniques et la culture informationnelle et la dimension politique et critique de cette culture informationnelle.

    #Culture_informationnelle #Alexandre_Serres #Bernard_Stiegler

  • Conversation avec Bernard Stiegler : « Faire de Plaine Commune en Seine-Saint-Denis le premier territoire contributif de France »
    https://theconversation.com/conversation-avec-bernard-stiegler-faire-de-plaine-commune-en-seine

    Un territoire jeune et économiquement très dynamique mais confronté au chômage de masse et aux défis de la mixité sociale et culturelle. C’est ici qu’à la demande de Patrick Braouezec, le président de Plaine Commune, le philosophe Bernard Stiegler initie un projet d’expérimentation inédit et ambitieux : faire de cette communauté d’agglomération – qui réunit neuf villes de Seine-Saint-Denis – un « territoire apprenant contributif ». Y seront menés des projets de « recherche-action » contributive, c’est-à-dire incluant les habitants ; à terme, il s’agira de mettre en place un revenu contributif pour partager différemment la richesse à l’heure où l’automatisation fait vaciller l’emploi.

    #Bernard_Stiegler #Démocratie_participative #Numérique #Néguentropie #Politique #Revenu_de_base #Seine-Saint-Denis #Économie #Économie_contributive #Établissement_public_territorial_Plaine_Commune

  • Encore une tribune :

    Contre l’intimidation technologique des manifestants, pour la liberté d’expression et de manifestation
    Arié Alimi, avocat ; Pouria Amirshahi, député ; Pascal Anger, secrétaire national du SNEP-FSU ; Ariane Ascaride, actrice ; Danielle Auroi, députée ; Isabelle Attard, députée ; Étienne Balibar, professeur de philosophie ; Olivier Besancenot, facteur ; Éric Beynel, co-délégué général, Solidaires ; Laurent Binet, romancier ; Fréderic Bodin, secrétaire national, Solidaires ; Sylvain Bourmeau, journaliste ; Jean-Louis Brochen, avocat ; Dominique Cabrera, cinéaste ; Jean-Jacques Candelier, député ; Michel Cantal-Dupart, urbaniste, architecte ; Fanélie Carrey-Conte, députée ; Patrice Carvalho, député ; Pierre-Antoine Chardel, enseignant-chercheur en sciences sociales ; Pascal Cherki, député ; Hervé Christofol, secrétaire général, Snesup-FSU ; Antoine Comte, avocat ; Philippe Corcuff, maître de conférences, philosophie ; David Cormand, secrétaire national EELV ; Sergio Coronado, député ; Cécile Duflot, députée, ancienne ministre ; Pascal Durand, député européen ; Annie Ernaux, écrivaine ; Aude Évin, avocate ; Éric Fassin, sociologue ; Jean-Pierre Fraisse, conseiller municipal, père de Rémi Fraisse ; Léon Lef Forster, avocat ; Jacqueline Fraysse, députée ; Jean-Marie Gleize, écrivain ; Cécile Gondard-Lalanne, co-déléguée générale, Solidaires ; Robert Guédiguian, réalisateur ; Fréderic Hocquard, conseiller de Paris ; Leslie Kaplan, écrivaine ; Samy Johsua, professeur des universités, sciences de l’éducation ; Pierre Khalfa, coprésident, fondation Copernic ; Razmig Keucheyan, maître de conférences, sociologie ; Aude Lalande, ethnologue ; Robert Linhart, écrivain ; Virginie Linhart, auteur, réalisatrice ; Noel Mamère, député ; Philippe Marlière, politiste ; Jean-Luc Mélenchon, député européen, ancien ministre ; Marie-José Mondzain, directrice de recherches, philosophie ; Gérard Mordillat, romancier, cinéaste ; Heitor O’Dwyer de Macedo, psychanalyste ; Claude Ponti, auteur ; Philippe Queyras ; Christian Salmon, écrivain et chercheur ; Jean-Marc Salmon, chercheur en sciences sociales ; Gisèle Sapiro, directrice de recherches, sociologie ; Éva Sas, députée ; Danielle Simonnet, conseillère de Paris ; Bernard Stiegler, philosophe ; Serge Tisseron, psychiatre et psychanalyste ; Philippe Torreton, acteur ; Dominique Tricaud, avocat ; Antoine Volodine, écrivain ; Sophie Wahnich, directrice de recherches, historienne, Mediapart, le 22 juin 2016
    https://blogs.mediapart.fr/edition/les-invites-de-mediapart/article/220616/contre-l-intimidation-technologique-des-manifestants-pour-la-liberte

    #Tribune #Manifestations #France #Répression #Liberté_d'expression #NuitDebout #Crise_de_2016

  • Une soirée de soutien pour les quatre années de réclusion de #Julian_Assange
    https://www.mediapart.fr/journal/culture-idees/190616/une-soiree-de-soutien-pour-les-quatre-annees-de-reclusion-de-julian-assang

    Depuis le 19 juin 2012, le fondateur de WikiLeaks vit comme prisonnier dans les locaux de l’ambassade équatorienne à Londres. Nous diffusons la soirée de soutien organisée ce dimanche à partir de 20h30 par Ars Industrialis en partenariat avec Libération. Sur scène, et par visioconférence, de nombreux invités, dont Bernard Stiegler, Edgar Morin, Edwy Plenel ou encore Patti Smith et, bien entendu, Julian Assange.

    #Culture-Idées

  • Une tribune dans Libé pour défendre #Aude_Lancelin, responsable des pages Débats de #l'Obs :

    A « l’Obs », un #licenciement très politique
    Collectif, Libération, le 25 mai 2016
    http://www.liberation.fr/debats/2016/05/25/a-l-obs-un-licenciement-tres-politique_1455023

    Denis Podalydès Acteur Etienne Balibar Philosophe Claude Lanzmann Réalisateur Emmanuel Todd Démographe et historien Michela Marzano Philosophe Julia Cagé Economiste Alain Badiou Philosophe John MacArthur Directeur du magazine Harper’s La Rumeur Groupe Jérôme Prieur Auteur et réalisateur François Bégaudeau Ecrivain Christian Salmon Essayiste Jacques Rancière Philosophe Laurent Binet Ecrivain Raphaël Liogier Sociologue et philosophe Bernard Stiegler Philosophe Gérard Mordillat Ecrivain et réalisateur Stéphanie Chevrier Editrice André Orléan Economiste Christian Laval Sociologue Pierre Dardot Philosophe Hugues Jallon Editeur Michaël Fœssel Philosophe Cédric Durand Economiste Chloé Delaume Ecrivaine Geoffroy de Lagasnerie Sociologue Guy Walter Ecrivain et directeur de la Villa Gillet Chantal Jaquet Philosophe Razmig Keucheyan Sociologue Edouard Louis Ecrivain Frédéric Schiffter Philosophe Jacques de Saint-Victor Historien Caroline de Haas Militante féministe Christine Delphy Sociologue Benjamin Stora Historien Mathieu Terence Ecrivain Bernard Lahire Sociologue Roland Gori Psychanalyste Elsa Dorlin Philosophe Patrick Chamoiseau Ecrivain Anne Dufourmantelle Psychanalyste Annie Ernaux Ecrivaine Guillaume Le Blanc Philosophe Ollivier Pourriol Philosophe Hervé Le Bras Démographe François Gèze Editeur Sophie Wahnich Historienne Lydie Salvayre Ecrivaine Quentin Meillassoux Philosophe Romain Bertrand Historien François SchlosserAncien rédacteur en chef du Nouvel Observateur. Edwy Plenel Fondateur de Mediapart et Jean-Pierre Dupuy Philosophe.

  • "Le Management de la Sauvagerie"

    "Les différentes déclinaisons du « jihad » diffusent aujourd’hui une avalanche d’images — photos et vidéos — extrêmement choquantes, qu’il s’agisse des conséquences d’un bombardement sur une population, de corps disloqués d’ennemis tués au combat qu’on enterre par bennes dans des fosses communes, de gens qu’on décapite, brûle vifs, lapide, précipite du haut d’immeubles… La guerre est quelque chose qui relève de l’entendement — un outil destiné à atteindre des buts politiques par usage de la violence. Elle est également animée par des ressorts de nature passionnelle — le déchaînement de violence sans passion, est-ce bien envisageable… ? Maîtriser l’art de la guerre pourrait d’ailleurs bien relever d’une exploitation habile et équilibrée de ses ressorts passionnels et rationnels. Or, ceci a été théorisé au profit du jihad. Un certain Abu Bakr Naji, membre du réseau Al Qaeda, a en effet publié sur Internet en 2004, en langue arabe, un livre intitulé Le Management de la Sauvagerie : l’étape la plus critique que franchira l’Oumma . L’ouvrage a été traduit en anglais par William Mc Cants au profit de l’institut d’études stratégiques John M. Olin de l’université de Harvard. C’est sur cette traduction qu’est fondé le présent billet. On a parfois l’impression d’y lire les enseignements de l’implantation de Jabhat al Nusra en Syrie, à ceci près qu’il a été écrit avant… Et l’on y découvre des théories auxquelles ont donné corps des gens comme Abu Mussab al Zarqaoui, ou les actuels décideurs de l’organisation Etat Islamique.

    La « sauvagerie » qu’il est ici question de manager n’est absolument pas celle qui consiste à brûler des prisonniers ou à leur couper la tête. Dès sa préface, et au fil de son ouvrage, Abu Bakr Naji définit la « sauvagerie » en question comme étant la situation qui prévaut après qu’un régime politique s’est effondré et qu’aucune forme d’autorité institutionnelle d’influence équivalente ne s’y est substituée pour faire régner l’état de droit. Une sorte de loi de la jungle, en somme. Avec un pragmatisme remarquable, ce djihadiste convaincu, dont l’ouvrage est méthodiquement constellé de références à la Sunna, considère la « sauvagerie » comme une ressource, un état à partir duquel on peut modeler une société pour en faire ce sur quoi reposera un califat islamique dont la loi soit la Charia. Le management de la sauvagerie est un recueil stratégique qui théorise finement l’exploitation coordonnée de ressorts cognitifs et émotionnels au profit d’un but politique d’essence religieuse. Sa lecture marginalise les commentaires qui tendraient à faire passer les acteurs du jihad pour des aliénés mentaux ou des êtres primaires incapables de comprendre les subtilités propres à l’être humain. Elle souligne à quel point la compréhension d’un belligérant est tronquée quand on ne condescend pas à jeter un coup d’œil dans sa littérature de référence. Car les mécanismes du jihad tel qu’il est livré aujourd’hui sont bel et bien contenus dans une littérature stratégique dédiée. Le présent billet va vous en présenter certaines grandes lignes. Je vous invite, à terme, à prendre le temps de lire l’ouvrage pour en appréhender tous les ressorts (lien fourni en bas de page)."

    http://kurultay.fr/blog/?p=187

    • La disruption est un phénomène d’accélération de l’#innovation qui est à la base de la stratégie développée dans la Silicon Valley : il s’agit d’aller plus vite que les sociétés pour leur imposer des modèles qui détruisent les structures sociales et rendent la puissance publique impuissante. C’est une stratégie de tétanisation de l’adversaire.

      Dans mon ouvrage, j’analyse un texte signé Abu Bakr Al-Naji, tel que le résume Ignace Leverrier, qui désigne un collectif, dont d’anciens agents de Saddam Hussein devenus islamistes. C’est une sorte de « book » de Daech : à l’image des bibles d’entreprise qui détaillent les règles pour monter une concession, ce livre explique aux acteurs de Daech comment prendre le pouvoir. Il faut semer le chaos et à partir de là exploiter le besoin d’autorité.

      [...]

      C’est donc sur les ruines de l’#ultralibéralisme que se construit la radicalisation ?

      Oui. On ramène le radicalisme à une question de religion, et c’est scandaleux. La plupart des recrues de l’islam radical n’ont pas de culture religieuse. Ce n’est pas de religion dont il s’agit, mais de désespoir. Richard Durn, l’assassin de huit membres du conseil municipal de Nanterre en mars 2002, anticipe son acte en parlant de son sentiment de ne pas exister : il a voulu devenir quelqu’un par ce geste.

      #capitalisme

  • Introduction à la société automatique : entretien avec Bernard Stiegler - 03/10/2015 - 1ère Partie
    http://www.rfi.fr/emission/20151003-stiegler-philosophe-societe-automatique-fayard

    RFI - Atelier des médias http://telechargement.rfi.fr/rfi/francais/audio/magazines/r189/atelier_des_medias_20151003.mp3

    Le philosophe Bernard Stiegler vient de publier le premier tome de son oeuvre consacrée à la société automatique. Il s’y interroge sur l’avenir du travail.

  • le tiers livre, web & littérature : Bernard Stiegler | L’avenir du travail
    http://www.tierslivre.net/spip/spip.php?article4205

    C’était dans la logique de tout le travail de Stiegler depuis des années qu’il descende un jour dans la cave de ce qui sous-tend toute son approche, le coeur le plus tabou de la transition de notre société – le #travail.

    Non plus les techniques, non plus la communauté, mais l’#organisation_du_travail : comment fonctionnerait une société où un quart des personnes n’aurait pas d’#emploi ?

    Ça donne envie de lire.

  • Numérique, destruction d’emplois et avenir du #travail - Le Monde.fr
    http://lemonde.fr/emploi/article/2015/08/18/numerique-destruction-d-emplois-et-avenir-du-travail_4729225_1698637.html

    "D’ici 2025, 3 millions d’emplois touchant tout autant les classes moyennes, les emplois d’encadrement et les professions libérales que les métiers manuels pourraient avoir disparu en France, selon une étude de Roland Berger commandée par le Journal du Dimanche (JDD). Une transformation immense, qui annonce une nouvelle explosion d’insolvabilité généralisée, bien pire que celle de 2008, s’inquiète Bernard Stiegler dans son nouveau livre La société automatique - l’Avenir du travail."(Permalink)

    #économie #emploi

  • Bernard Stiegler : « Le marketing détruit tous les outils du savoir » - Basta !
    http://www.bastamag.net/Bernard-Stiegler-Le-marketing
    http://www.bastamag.net/IMG/arton2202.jpg?1367182468

    En 1977, au moment du mouvement punk, c’est l’enclenchement d’une catastrophe annoncée. La droite radicale pense : il faut remplacer l’État par le marketing. En 1979, arrivent Thatcher puis Reagan en Grande-Bretagne et aux États-Unis, les conservateurs tirent les conséquences de ce qu’on appelle la désindustrialisation. L’énorme RCA (Radio Corporation of America, ndlr) est rachetée une bouchée de pain par Thomson, l’électronique part au Japon, Thatcher a compris que la grande puissance du Commonwealth touche à sa fin. Donc, pour pallier à la déroute de la puissance industrielle, ils se lancent tous les deux dans la spéculation financière. Tout ce système qui s’est écroulé en 2008 a été mis en place à cette époque, c’est l’école de Chicago. Ils dérèglent tout, les puissances publiques, le système social, et de manière systématique. Ils vont tout dézinguer. La conséquence de tout cela, c’est la destruction des savoirs et une nouvelle prolétarisation généralisée.