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    « École de la confiance » : l’Assemblée adopte le projet de loi Blanquer
    19 février 2019 Par Faïza Zerouala

    Adopté mardi par l’Assemblée nationale, le texte fourre-tout porté par le ministre Jean-Michel Blanquer entérine l’obligation d’instruction à 3 ans, prévoit de confier des missions d’enseignement à certains surveillants volontaires ou de créer des rapprochements entre écoles et collèges. L’opposition de gauche dénonce un texte qui aggrave les inégalités.

    • Il existe deux niveaux de lecture dans le projet de loi pour une école de la confiance, adopté sans surprise en première lecture lors d’un vote solennel à l’Assemblée nationale, le 19 février, à 353 voix pour et 171 contre avec le soutien des élus LREM-MoDem et une partie des UDI-Agir. Tous les autres groupes ont majoritairement voté contre, comme le RN, tandis que la plupart des députés Libertés et Territoires (centre) se sont abstenus.

      Cette loi a donné l’impression d’être accessible au grand public, avec le débat autour des drapeaux dans les salles de classe ou la baisse de l’âge de l’instruction obligatoire à 3 ans, objet initial de cette loi. En réalité, celle-ci renferme un volet plus technique, qui entérine la disparition du Conseil national de l’évaluation scolaire (Cnesco) et veut mettre en place le prérecrutement des enseignants dès la licence 2.

      Ce projet de loi prévoit aussi la création d’« établissements publics des savoirs fondamentaux », qui regrouperaient « les classes d’un collège et d’une ou plusieurs écoles situées dans le même bassin de vie » et portent atteinte au statut des directeurs d’école.

      © Twitter / Jean-Michel Blanquer © Twitter / Jean-Michel Blanquer
      Au regard du profil du ministre de l’éducation nationale, volontiers technocrate et fin connaisseur du système, on aurait pu s’attendre à des débats de haute tenue. Il n’en a rien été. Les députés ont pu se perdre à disserter sur les uniformes ou les revêtements des cours de récréation au détriment de sujets autrement plus cruciaux et plus engageants pour l’avenir.

      Dans un hémicycle quasiment vide, la majorité des députés, faute d’opposition très ferme – malgré les efforts notables de la communiste Elsa Faucillon, du LR Patrick Hetzel et des députés insoumis –, ont adopté les 25 articles et quelque mille amendements de manière expresse, en cinq jours.

      Or cette loi, sur certains points précis, change le visage de l’école.

      Les syndicats ne s’y trompent pas et s’alarment du tournant pris par Jean-Michel Blanquer. L’ensemble des organisations syndicales – FSU, Unsa Éducation, SGEN-CFDT, Ferc-CGT et Snalc – « dénonce cette méthode verticale » dans un communiqué commun et demande aux députés de ne pas voter cette loi en l’état. Peine perdue.

      Dans les rangs parlementaires, les députés LR ont raillé une « loi d’affichage » et ont voté contre ; l’UDI-Agir dénonce une « loi bavarde », même s’ils l’ont votée. De leur côté, les trois groupes de gauche ont souligné le fait que ce texte – « autoritaire » et « rétrograde » – aggravait un peu plus les inégalités dont souffre l’école française.

      La députée Elsa Faucillon, lors des explications de vote, a déclaré à l’adresse du ministre : « Vous déstructurez le cadre national de l’éducation nationale et la fonction publique. »

      À l’issue du vote, les deux rapporteures, Anne-Christine Lang et Fanette Chevrier (LREM), ont salué « une réforme de justice sociale ».

      L’historien de l’éducation Claude Lelièvre est moins enthousiaste et juge pour sa part que Jean-Michel Blanquer apparaît tel qu’il est à la lumière de cette loi. « Il ne faut pas le surestimer, ce n’est pas un navigateur de haut vol, il ne fait que du cabotinage. Sa loi n’a aucune colonne vertébrale. Il n’a pas su mettre au centre les vrais débats. Abaisser l’obligation d’instruction de 6 à 3 ans est une absurdité au point de vue opérationnel. Cela ne peut rien changer, mais permet juste à Blanquer et Macron de récupérer du bénéfice symbolique en s’inscrivant dans le prolongement historique de Jean Zay, Jules Ferry ou Charles de Gaulle. » Il prévoit que l’imprécision de certaines dispositions vont poser problème lors de leur application.

      Voici les principaux changements à venir.

      L’abaissement de l’âge de l’instruction obligatoire à 3 ans et le cadeau au privé

      Annoncé par Emmanuel Macron en personne en mars 2018 lors des Assises de la maternelle, l’abaissement de l’âge de l’instruction obligatoire de 6 à 3 ans a été le catalyseur de cette loi. Et ce bien que cette disposition ne doive concerner que 26 000 élèves, notamment en outre-mer.

      Ces 3 % d’élèves non scolarisés à cet âge-là, Jean-Michel Blanquer a longuement expliqué ne pas vouloir les abandonner car ils viennent souvent des familles les plus fragiles. Il a assumé ce texte comme « symbolique » et a surtout voulu montrer qu’il entendait ainsi enclencher une « vraie politique publique de la petite enfance ». Un amendement renforce l’obligation de scolarisation des enfants étrangers. Le texte prévoit que la direction d’académie aura autorité pour inscrire les élèves à l’école si le maire s’y oppose.

      L’opposition a surtout pointé le coût financier de cette mesure. En effet, l’école élémentaire est la seule à être obligatoire. Les communes vont dorénavant devoir financer aussi les écoles maternelles privées sous contrat dès septembre 2019, à l’application de la mesure. Mais la compensation de l’État n’interviendra qu’en 2021. Le ministre a insisté sur le fait que ce surcoût s’élevait à 100 millions d’euros, alors que le coût global de l’instruction se chiffre à 6 milliards d’euros pour les communes.

      Un article de la loi encadre aussi de manière renforcée l’instruction à domicile, qui concernerait près de 30 000 enfants, en prévoyant que « l’autorité de l’État compétente en matière d’éducation doit au moins une fois par an faire vérifier que l’enseignement assuré est conforme au droit de l’enfant à l’instruction et que l’instruction dispensée dans un même domicile l’est pour les enfants d’une seule famille ».

      Ce qui fait dire à l’opposition de droite qu’il s’agit d’une disposition « liberticide ». Les sanctions en cas de manquements à la scolarisation seront elles aussi renforcées. Le droit garanti à la formation entre 16 et 18 ans, comme le réclamait le plan pauvreté, a été entériné.

      Le prérecrutement des enseignants

      Jean-Michel Blanquer veut trouver une solution à la crise de recrutement des enseignants. Pour ce faire, le ministre propose de mettre en place un dispositif de prérecrutement. Les assistants d’éducation qui se destinent aux concours de l’enseignement pourront dès leur deuxième année de licence effectuer deux demi-journées par semaine – six ou huit heures – dans un collège ou dans une école, près de leur université.

      Ces futurs enseignants seront encadrés par un tuteur – qui bénéficiera d’une prime – et pourront mettre en place du coenseignement. Au fur et à mesure de son avancée, le futur professeur pourra endosser des responsabilités supplémentaires. Il pourra aussi percevoir un salaire net de 693 à 980 euros, cumulable avec les bourses.

      Ainsi, un boursier de niveau 2 pourrait-il percevoir 1 231 euros net. Le ministre a insisté sur la « dimension sociale » de la mesure. Le dispositif pourra accueillir 3 000 de ces jeunes gens chaque année. L’opposition a dénoncé la « précarisation » de ces jeunes gens.

      La création des établissements publics des savoirs fondamentaux

      Cet article 6 bis apparaît comme la plus importante et la plus lourde de conséquences dans ce projet de loi. Ces « établissements publics des savoirs fondamentaux » regrouperaient « les classes d’un collège et d’une ou plusieurs écoles situées dans le même bassin de vie ».

      Après avis du recteur, ils sont créés par arrêté du représentant de l’État dans le département. Ils seront dirigés par un chef d’établissement, qui aura un adjoint du premier degré. Un conseil d’administration supervisera cette structure, qui comprendra aussi un conseil école-collège. Introduite dans le texte en commission des lois, sur une proposition de la députée Cécile Rilhac (LREM), cette mesure a été pensée pour les écoles rurales qui pourraient ainsi développer des projets communs avec le collège.

      La députée Sabine Rubin (LFI) a dénoncé ces rapprochements : « Il n’y a aucune évaluation qui montre un intérêt à ces établissements pour les élèves, mais cela permet surtout de faire des économies et de fermer des classes. » D’autres ont craint que les directeurs d’école n’aient plus un rôle très déterminé, d’autant que ceux-ci ne bénéficient pas du statut de chef d’établissement contrairement à leurs homologues de collège. Les socialistes et l’UDI ont de leur côté pointé la précipitation du gouvernement pour une telle mise en œuvre.

      La création d’établissements publics locaux d’enseignement international

      Les députés ont voté l’article 6, créant des établissements publics locaux d’enseignement international (EPLEI) sur le modèle de l’École européenne de Strasbourg. Ceux-ci seront constitués de classes du premier et du second degrés et dispenseront tout au long de la scolarité des enseignements en langue française et en langue vivante étrangère. Ils préparent soit à l’option internationale du diplôme national du brevet et à l’option internationale du baccalauréat, soit au baccalauréat européen.

      Ces établissements pourront recevoir « des dotations versées par l’Union européenne, d’autres organisations internationales et des personnes morales de droit privé, à savoir des entreprises ou des associations ». Le recteur doit donner son avis avant ouverture. Là encore, l’opposition de gauche a exprimé sa désapprobation, craignant que ces établissements ne soient réservés aux familles les plus aisées et n’entretiennent une concurrence entre établissements.

      La fin du Conseil national de l’évaluation scolaire

      Le texte de loi crée le Conseil d’évaluation de l’école, qui va remplacer le Conseil national d’évaluation du système scolaire (Cnesco), qui avait vu le jour en 2013 sous l’impulsion de Vincent Peillon. La nouvelle instance sera chargée de coordonner et de réguler l’évaluation des établissements scolaires, une nouveauté voulue par Emmanuel Macron.

      Le ministre l’a justifiée ainsi : « Il y a des enjeux de nature pédagogique, éducatifs ou encore de climat scolaire. L’auto-évaluation sera complétée par une évaluation de la part d’équipes constituées majoritairement des corps d’inspection. L’évaluation est faite pour aider l’établissement à formuler son projet éducatif […].Une évaluation aura lieu cinq ans plus tard pour mesurer les progrès accomplis. »

      Les députés ont aussi insisté sur le fait que le futur conseil s’appuierait sur « des expertises scientifiques ». Selon les détracteurs du ministre, ce conseil serait beaucoup moins indépendant que son prédécesseur, puisque placé sous sa tutelle. Le Cnesco deviendra quant à lui une chaire au Conseil national des arts et métiers (Cnam).

      L’école inclusive

      Des mesures, jugées timides par l’opposition, en faveur de l’inclusion des élèves handicapés ont été adoptées. Le statut de leurs accompagnants – les AESH –, souvent précaire, a été légèrement amélioré, par exemple avec la possibilité de bénéficier d’un CDI après un CDD de trois ans renouvelable une fois. Par ailleurs, un plan plus large est prévu sur la question en mars, ont promis Jean-Michel Blanquer et Sophie Cluzel, la secrétaire d’État chargée des personnes handicapées.

      Drapeaux et hymne national

      Hélas, il y aura eu peu de débats sur ces sujets de fond, et surtout peu de précisions. Le projecteur a été braqué sur les mesures les plus explosives, à savoir l’installation obligatoire de deux drapeaux, l’un tricolore, l’autre européen, et des paroles de l’hymne national dans les salles de classe. L’amendement émanait du député LR Éric Ciotti, obsédé par les questions identitaires.

      Ce clin d’œil appuyé à la droite n’a pas été le seul lors des premières journées d’examen du projet de loi en séance publique, débuté le 11 février. Le ministre a aussi exprimé à titre personnel son opposition au port de signes religieux pour les accompagnateurs lors des sorties scolaires, allant contre la position du président de la République sur la question.

      Les formulaires scolaires

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      La majorité s’est fendue d’une main tendue à la gauche à travers un amendement déposé par Valérie Petit, députée LREM, contre l’avis du gouvernement, qui voudrait remplacer sur les documents administratifs réclamés à l’école, comme les autorisations de sortie par exemple, les mentions « père et mère » par « parent 1 et parent 2 ».

      Interrogé le 18 février par France Info sur le sujet, Jean-Michel Blanquer a voulu déminer la controverse lancée par la droite en expliquant : « Je ne pense pas que les mentions “père” et “mère” doivent disparaître. Il y a plusieurs formules qui permettent d’avoir père et mère tout en permettant à chaque structure familiale d’être respectée. »

      Les syndicats ont expliqué par ailleurs que cette précaution était inutile, étant donné que la plupart des formulaires scolaires se contentent de mentionner les « représentants légaux ». La corapporteure Anne-Christine Lang (LREM) a expliqué qu’elle allait modifier l’amendement lors de la nouvelle lecture en laissant la possibilité d’entourer les bonnes mentions parmi « père, père, mère, mère ».

  • Mouvement lycéen : une cartographie inédite, Mattea Battaglia et Camille Stromboni
    https://www.lemonde.fr/education/article/2018/12/13/mouvement-lyceen-une-cartographie-inedite_5396741_1473685.html

    L’effervescence, partie de la province et des petites villes, ne se structure pas selon les schémas traditionnels de mobilisation de la #jeunesse. On parle d’un réveil des enfants des « #gilets_jaunes ».

    Les enseignants l’admettent volontiers : la mobilisation lycéenne qui s’est déployée dans le sillage des « gilets jaunes » les a pris de court. Pas seulement par la contagion rapide d’une académie à l’autre – jusqu’à 470 #lycées ont été perturbés sur 4 000 au total, dont 2 500 publics. Pas seulement par son installation dans la durée (deux semaines de #blocages) ou par ses excès de violence localisés [et ses #violences_policières généralisées, ndc] , d’Aubervilliers (Seine-Saint-Denis) à Orléans (Loiret) en passant par Blagnac (Haute-Garonne) ou Mantes-la-Jolie (Yvelines).

    Ce qui interpelle les observateurs de ce mouvement de jeunesse, qu’ils soient sociologues, proviseurs ou chercheurs, c’est bien sa géographie, alors qu’une nouvelle journée de #mobilisation s’annonce ce vendredi. Quelques exemples suffisent à dessiner ses contours inédits. A Paris, les grands lycées de l’Est – ceux du cours de Vincennes dans le 20e arrondissement notamment – n’ont pas joué le rôle moteur qu’ils endossent habituellement, contre la loi travail, la loi Fillon, le lycée Darcos, le contrat première embauche (CPE)… A Rouen, les chemins empruntés par les lycéens sont eux aussi venus rebattre la carte habituelle des mobilisations : plutôt que des établissements « bourgeois » de la rive droite, les premiers défilés sont partis des lycées plus populaires, de la rive gauche.

    Les « enfants des “gilets jaunes” » ?

    Les autres exemples avancés se résument, souvent, aux noms de villes de taille moyenne qui, jour après jour, ont vu leur jeunesse faire les gros titres de la presse locale : à Digne-les-Bains, chef-lieu des Alpes-de-Haute-Provence, un millier de lycéens sont descendus dans la rue. A Cambrai (Nord), ils étaient 600 à manifester. A Dijon, en Côte-d’Or, on en a recensé 200 devant le rectorat…

    Est-ce une mobilisation des « enfants des “gilets jaunes” » ? Le réveil d’une frange de la jeunesse qui partage, avec ses parents, des fins de mois difficiles et un sentiment de déclassement ? C’est l’une des grilles d’analyse retenues. « Sur les ronds-points s’observe une cohésion intergénérationnelle, défend Michelle Zancarini-Fournel, historienne. On voit des #jeunes rejoindre des #retraités, c’est suffisamment rare pour être souligné. »

    Nous l’avons vérifié dans plusieurs académies – dont Lille, Montpellier et Marseille – en épluchant la presse quotidienne régionale, en sollicitant les rectorats, mais aussi, au cas par cas, les personnels des établissements bloqués.

    Dans l’académie de Lille, aux côtés des élèves lillois – ceux du lycée international Montebello, bloqué à répétition –, la jeunesse de Denain et de Liévin a, elle aussi, donné de la voix, parfois en endossant un gilet jaune, alors que le mouvement débutait à peine, le 30 novembre. Les lycéens de Cambrai, de Coudekerque-Branche, ou, dans le Pas-de-Calais, de Lens ou d’Oignies ont ensuite rejoint le mouvement, au fil de plusieurs journées de mobilisation nationale – lundi 3 décembre, jeudi 6, vendredi 7 ou encore le « mardi noir » du 11 décembre. « Se font entendre des territoires périurbains souvent très défavorisés, qui peinent à se relever de la crise de l’industrie, constate un universitaire lillois qui a souhaité garder l’anonymat [? ndc]. C’est relativement inédit. »

    « Deux logiques se superposent »

    On assiste à une possible « inversion des déclencheurs du mouvement », avance l’historien Claude Lelièvre : « L’effervescence n’est pas à Paris. Elle est en province et dans les petites #villes, ce qui ne veut pas dire qu’elle est périphérique », souligne-t-il.

    Autour de Montpellier, parmi les premiers établissements mobilisés, se sont illustrés un #lycée_d’enseignement_professionnel agricole à Frontignan (Hérault) et un centre de #formation des #apprentis à Rodilhan (Gard). Devant ce CFA, le 5 décembre, une quarantaine d’#élèves ont installé un « barrage filtrant » en soutien aux « gilets jaunes ». Dans la foulée, plusieurs établissements nîmois se sont mobilisés. Le 7, le mouvement s’étendait, dans l’Hérault, à Montpellier, Lodève, Lunel, Agde, Sète…

    Face aux débordements, la rectrice, Béatrice Gilles – anciennement en poste à Créteil – a appelé les #lycéens au calme. « Ce sont des zones très pauvres, très désocialisées que l’on voit s’animer, confirme l’universitaire montpelliérain Yann Bisiou. Pendant ce temps-là, certains grands lycées de Montpellier ne bougent pas. »

    Il y a, depuis Mai 68, une forme de régularité dans la construction des mouvements de jeunesse qui semble aujourd’hui s’infléchir, abonde l’enseignant-chercheur Vincent Troger. « Un mouvement se déclenche toujours soit contre une réforme éducative, soit pour rejoindre une contestation sociale, explique-t-il. Dans le cas présent, les deux logiques se superposent. L’originalité est aussi là. » A Nantes, où il enseigne, Vincent Troger a ainsi le sentiment que plusieurs « lycées de la périphérie », contrairement aux mobilisations antérieures, ont joué le rôle de « moteurs ».

    « L’étincelle est partie des #filières technologiques [cf. la lutte contre le contrat d’insertion professionnel (CIP) qui prévoyait en 1994 un salaire égal à 80 % du salaire de référence pour le spas insérés", jeunes, ndc] »

    A Béziers (Hérault), Bruno Modica, professeur d’histoire, constate que la « vague » s’est élancée des lycées professionnels et polyvalents avant de gagner le centre-ville. « Ce sont les enfants des villages périphériques de Béziers qui se font entendre, dit-il, et pas les jeunes politisés ou les casseurs professionnels. »

    Des casseurs, on a pu en voir à l’œuvre dans les académies de Créteil, Versailles et Toulouse notamment, là où l’institution a comptabilisé le plus de blocages ayant dégénéré. « Que les établissements de banlieue autour de moi se mobilisent, en soi, ça ne me surprend pas, confie un enseignant d’Aubervilliers, lui-même mobilisé. Mais à ce point-là, c’est du jamais-vu en éducation prioritaire depuis une dizaine d’années. »
    Au sein même des lycées, c’est sur le profil des jeunes engagés qu’insiste Stéphane Rio, enseignant d’histoire à Marseille. « L’étincelle est partie des filières technologiques, de manière rapide et éruptive », témoigne-t-il. Ce professeur dit avoir d’abord vu sur les blocus des jeunes peu politisés, parlant autant d’eux que de leurs parents. Des adolescents qui n’ont pas toujours les codes des « bons élèves », ne réclament pas d’« AG », ne veulent pas nécessairement rejoindre les défilés. « Ils prônent le blocage pur et simple, observe-t-il, pour tenir le lycée comme on tient un rond-point. »

    A la tête d’un lycée de Liévin (Pas-de-Calais), devant lequel une centaine de jeunes se sont relayés durant huit jours, ce proviseur ne dit pas autre chose : « Ce ne sont pas nos jeunes intellos qui sont en première ligne », lâche-t-il.

    « Une crainte commune »

    Dans l’académie de Marseille, où les débordements ont poussé à la fermeture préventive d’au moins cinq établissements, la jeunesse s’est d’abord illustrée à Martigues avant de battre le pavé dans la cité phocéenne, Aix, Gardanne, etc.

    Ici comme ailleurs, disent les syndicalistes, il semble qu’un tournant ait été pris dans le sillage des interpellations de Mantes-la-Jolie (Yvelines) et des images des 151 jeunes agenouillés, les mains sur la tête, qui ont inondé les réseaux sociaux le 6 décembre.

    Depuis, à écouter les enseignants, le mot d’ordre « proprement lycéens » résonne plus haut. « Les jeunesses se sont unies, reprend Stéphane Rio, pour dire leur crainte commune : que les réformes en cours – celles du lycée, du bac, de Parcoursup – accroissent des inégalités dont ils seront les premières victimes. »
    « Le bac ne sera plus le même selon les établissements », martèlent-ils d’un blocage à l’autre. Et la sélection à l’entrée de l’université les laissera « sur le carreau ».

    Ça sent quand même ce 68 que j’ai pas vécu, la libération de la parole et la prise de parti, la découverte de ce que les singularités créent de collectif si la situation s’y prête. Ça rappelle ces belles manifs qui comme l’ouvrier marche d’atelier en atelier dans et contre l’usine lycéens et collégiens manifestaient d’un établissement scolaire à l’autre, du technique au général ; ça rappelle La horde d’or, ce moment de la fin des ’60 où ceux qui étaient confinés aux formations techniques et professionnelles ont été mêlés aux étudiants, entrainant un bordel général qui a mis en cause toutes les fonctions productives
    #scolarisés
    http://ordadoro.info/?q=content/«-un-poignard-dans-le-cœur-de-la-ville-capitaliste-»

    • Lycéens et étudiants rejoignent les « gilets jaunes » dans le rejet de la Macronie, Violaine Morin

      « Qui ne saute pas est macroniste ! » Sur le quai de la ligne 4, à la station de métro Châtelet à Paris, un groupe de lycéens survoltés bondit comme un seul homme. On croise quelques élèves de Charlemagne, un établissement du 4e arrondissement, souvent « en pointe » dans les contestations lycéennes. Direction la place Saint-Michel, où quelques groupes peignent des banderoles étalées sur le sol en attendant midi, l’heure du rassemblement à l’appel de trois syndicats, l’Union nationale lycéenne (UNL), la Fédération indépendante et démocratique lycéenne (FIDL) et le Syndicat général des lycéens (SGL).

      La bouche de métro déverse, à intervalles réguliers, des grappes de jeunes gens qui viennent grossir les rangs. Dix jours après le début de la contestation, les lycéens seront 2 600, selon la Préfecture de police, à manifester, mardi 11 décembre, pour 450 lycées perturbés dans toute la France – parmi lesquels 60 sont bloqués sur plus de 2 500, selon un bilan du ministère de l’éducation nationale communiqué à la mi-journée. Dans une ambiance festive, les manifestants entonnent des slogans classiques. Pour rappeler des souvenirs aux lycéens de n’importe quelle génération, il suffit d’insérer le nom du ministre de leur jeunesse – François Fillon, Claude Allègre – devant les mots « si tu savais, ta réforme, ta réforme… »

      Mais ici, le ministre de l’éducation, Jean-Michel Blanquer, a cédé la place à Emmanuel Macron, comme si la personne du président de la République cristallisait toutes les passions de ce mouvement qui tente de profiter de l’élan des « gilets jaunes ». « Ni les professeurs ni les étrangers, c’est Macron qu’il faut virer », scandent les jeunes, en alternant avec « Macron, t’es foutu, la jeunesse est dans la rue ». Le ministre, pourtant à la manœuvre de trois chantiers parmi ceux qui forment les points de crispation – la réforme du baccalauréat, Parcoursup et les suppressions de postes dans le second degré –, est le grand « absent » de la manifestation qui doit cheminer jusque sous ses fenêtres.

      Au-delà de ce rejet collectif, les lycéens tombent difficilement d’accord sur les mots d’ordre. « Les mouvements de jeunesse souffrent souvent de n’être pas assez clairs et pas assez unis », concède Tito, en 1re au lycée Fénelon. Pour pallier ce problème, deux assemblées générales ont été organisées dans son établissement afin de définir « pourquoi on manifeste ». L’ensemble des revendications tient donc en un slogan, répété tout l’après-midi : « Contre Parcoursup, allez allez, contre le nouveau bac, allez allez, contre le SNU [service national universel], allez allez. » Mais dans le détail, les préoccupations varient selon les profils et les âges.
      Les élèves de banlieue, venus souvent avec leurs enseignants, s’inquiètent d’un baccalauréat « dévalué » par rapport à celui des lycées de centre-ville. Younes, en 1re au lycée Angela-Davis de la Plaine Saint-Denis, craint que ses amis de 2de, qui seront les premiers à passer le nouveau bac – composé d’un contrôle continu et de quatre épreuves terminales –, n’obtiennent un diplôme au rabais. « Je viens d’un quartier défavorisé où on a la réputation de vouloir tout brûler, plaide-t-il. Notre bac ne vaudra pas la même chose que celui des beaux quartiers. »

      Chenoa, élève de 2de à Noisy-le-Grand, se sent un peu à l’abri de cette « dévaluation » dans son lycée international sélectif. Elle fera partie de la première génération du baccalauréat « nouvelle formule ». Pour elle, cette réforme est « bâclée ». La jeune fille ne « comprend même pas » comment devront s’organiser ses choix pour l’année prochaine, alors que la carte des spécialités disponibles dans chaque lycée doit être annoncée fin décembre – un calendrier accéléré, semble-t-il, pour apaiser les inquiétudes des lycéens.

      Les étudiants, eux, se sont joint au rassemblement des lycéens après une assemblée générale tenue dans la matinée sur la place de la Sorbonne. Salomé et ses camarades, inscrites en licence d’espagnol à Paris-IV, veulent « prêter main-forte » aux lycéens. Mais les étudiants tentent de mobiliser sur leurs propres dossiers, par exemple sur la hausse des frais de scolarité pour les étrangers. « On est contents que les lycéens se soient mobilisés, tempère Salomé. On ne veut pas faire passer nos revendications avant les leurs, aujourd’hui, on est là pour eux. »

      Mais pourquoi ne pas être descendus dans la rue avant ? Parcoursup a connu sa première saison cet été, la réforme du bac est sur les rails depuis le printemps… De toute évidence, l’occasion offerte par la contestation des « gilets jaunes » était trop belle pour ne pas tenter de s’en saisir, même si les manifestants se défendent de tout opportunisme. « Ils ont réussi à mobiliser et cela a créé de l’espoir », analyse Tito, le lycéen de Fénelon.
      Les plus militants s’en remettent aux précédents historiques de la convergence des luttes entre étudiants et travailleurs. « La force sociale des “gilets jaunes” est incontestable, il faut en profiter », juge Léo, étudiant en philosophie à Paris-I. Partout dans le cortège, on entend des accents communs avec les revendications des « gilets jaunes », sur ce gouvernement qui ne prête qu’aux riches, ce service public qui souffre, ces manifestants brimés.

      L’interpellation musclée des lycéens de Mantes-la-Jolie (Yvelines), alignés à genoux sur le sol, le 6 décembre, est évoquée plusieurs fois. La vidéo, qui a fait le tour des réseaux sociaux, a choqué la communauté éducative. « On ne peut pas laisser faire ça », enrage un enseignant d’Aubervilliers. A plusieurs reprises, les manifestants se mettront à genoux sur la chaussée, mains sur la tête. Julien, un élève de 1re ES de la Plaine Saint-Denis à qui l’on demande s’il n’a pas peur devant de telles images, répond que lui et ses camarades s’efforcent de maintenir un blocus pacifique. « Bien sûr que j’ai peur que ça devienne violent, ajoute-t-il après un temps de réflexion. Et en même temps, si je ne fais rien, qui va le faire pour moi ? »

  • Assises 2008-14 Rendre compte des résistances à l’égalité dans l’école
    https://www.youtube.com/watch?v=GzIUkWZ_nho


    Assises de l’IEC « Résistances à l’égalité femmes-hommes », Paris, 16 juin 2008 : Les résistances à l’égalité des sexes dans le système scolaire. Avec Michelle Zancarini-Fournel (historienne), Marlaine Cacouault-Bitaud (sociologue), Cendrine Marro (sciences de l’éducation), Claude Lelièvre (historien) ; Anne-Marie Viossat (présidente), Michel Bozon (modération).

  • Jean-Michel Blanquer, le plus macroniste des ministres (Revue de presse)

    Comme nous l’indiquions précédemment, le ministre de l’Éducation Jean-Michel Blanquer est jusqu’à présent le bon élève du gouvernement : il porte, en idéologue et sans faiblir des réformes essentielles dans un domaine qui ne l’est pas moins, applique avec soin les méthodes ultra-libérales et le bréviaire macronien, et communique habilement, ce qui fait de lui un des ministres les plus populaires.
    Cf. https://seenthis.net/messages/726234

    La rentrée est néanmoins chargée en polémiques :
    – Réforme du lycée, du baccalauréat et du lycée professionnel
    – Réforme d’instances participant à la gouvernance du ministère (CSP, CNESCO)
    – Réforme de l’organisation territoriale et des modes de recrutement des recteurs
    – Mise en place des évaluations nationales
    – Annonce de la réforme de la formation initiale et continue avec la disparition des ESPÉ qui avait remplacé les IUFM
    – Vote de la première "Loi Blanquer", alors qu’il avait promis qu’il n’y en aurait pas, et qui est accusé de contenir en outre quelques cavaliers législatifs et des cadeaux à l’enseignement privé
    et en même temps, l’agenda de destruction du service public du gouvernement s’applique notamment aux enseignant·e·s : réforme du statut des fonctionnaires et réduction de leur nombre (donc précarisation et suppressions de postes).

    Du coup, le vrai visage éducatif du gouvernement commence à apparaître, à l’image de la Macronie il est : autoritaire, vertical, idéologisé jusqu’au sectarisme, ultra-libéral, anti-social et inégalitaire… revue de presse.

    – « Jean-Michel Blanquer est bien en train de bouleverser notre modèle éducatif » (Tribune collective, Le Monde)
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/10/12/jean-michel-blanquer-est-bien-en-train-de-bouleverser-notre-modele-educatif_
    – Education : Blanquer, saison 2 (Philippe Watrelot, Alternatives Économiques)
    https://www.alternatives-economiques.fr/education-blanquer-saison-2/00086586
    – L’Éducation nationale est-elle gouvernée par des despotes ? (Louise Tourret, Slate)
    http://www.slate.fr/story/168293/education-nationale-avenir-ecole-reformes-gouvernance-absence-debat-ministere
    – Rue de Grenelle, les signes d’une gouvernance dirigiste et autoritaire s’accumulent (Lucien Marbœuf, Blog L’Instit’humeurs)
    https://blog.francetvinfo.fr/l-instit-humeurs/2018/10/07/rue-de-grenelle-les-signes-dune-gouvernance-dirigiste-et-autoritai
    – Démissions et critiques en série : que se passe-t-il au Conseil supérieur des programmes ? (Fabien Magnenou, France Info)
    https://www.francetvinfo.fr/societe/education/demissions-et-critiques-en-serie-que-se-passe-t-il-au-conseil-superieur
    – Quelques arnaques de Blanquer et de son projet de loi (Claude Lelièvre, Blog)
    https://blogs.mediapart.fr/claude-lelievre/blog/151018/quelques-arnaques-de-blanquer-et-de-son-projet-de-loi
    – Lycée Blanquer : le grand bond en arrière (Philippe Boursier, Fondation Copernic)
    http://www.fondation-copernic.org/index.php/2018/10/24/lycee-blanquer-le-grand-bond-en-arriere

    #éducation #réformes #JeanMichelBlanquer

  • Laïcité : les experts de Blanquer contredisent Macron (Mediapart)
    https://www.mediapart.fr/journal/france/050118/laicite-les-experts-de-blanquer-contredisent-macron

    Jean-Michel Blanquer l’avait promis, il y a un mois, un « conseil des sages de la laïcité » allait être créé pour faire face aux situations problématiques dans l’éducation nationale relatives à ce sujet. Selon nos informations, dix personnalités auraient été choisies par le ministre et son cabinet.

    Constitution provisoire : Dominique Schnapper, nommée présidente, Jean-Louis Auduc, Ghaleb Bencheikh, Jean-Louis Bianco, Catherine Biaggi, Abdennour Bidar, Laurent Bouvet, Rémy Brague, Patrick Kessel, Catherine Kintzler, Frédérique de La Morena, Alain Seksig et Richard Senghor.

    On peut toutefois y remarquer la présence de tenants d’une laïcité très stricte, à l’instar du politologue Laurent Bouvet, co-fondateur du Printemps républicain, ou encore Patrick Kessel, président du comité Laïcité et République et ancien journaliste. Tous deux, au cours des derniers mois, ont estimé que le président de la République ne s’engageait pas assez sur la question.
    […]
    L’instance est créée alors que l’institution scolaire est plutôt bien pourvue en la matière. Plusieurs actions ont été menées en ce sens, renforcées après les attentats de 2015. Un « chargé de mission laïcité » à la direction générale de l’enseignement scolaire, au ministère de l’éducation nationale, existe depuis 2012. Une journée de la laïcité a été créée chaque 9 décembre. Un livret laïcité est distribué à tous les chefs d’établissement afin de les aiguiller et de leur permettre de répondre à des conflits occasionnels. Par ailleurs, des référents académiques et un national ont été installés par l’Observatoire de la laïcité afin de les épauler. Cet organisme aimerait aussi renforcer la formation continue sur ces sujets et a émis, en juin dernier, un avis qui recommande la mise en place d’un module commun de formation sur la question dans les ESPE, les écoles du professorat (les anciens IUFM).

    #éducation #laïcité #institution #laïcisme

  • Pas d’accord sur les accords ? « Le Bon usage » de Grevisse (Claude Lelièvre)
    https://blogs.mediapart.fr/claude-lelievre/blog/081117/pas-daccord-sur-les-accords-le-bon-usage-de-grevisse

    Dans ce genre de situation, consultation de « La grammaire française. Le bon usage » de Maurice Grevisse (9ème édition).

    Page 314 : « Quand un adjectif qualificatif se rapporte à plusieurs noms ou pronoms, coordonnés ou juxtaposés, il se met au pluriel et prend le genre des mots qualifiés. Si les mots qualifiés sont de genres différents, l’adjectif se met au masculin pluriel (1) »

    Soit. Mais il y a le renvoi en bas de page : « (1) voir à la fin du volume l’arrêté du 26 février 1901 »

    Arrêté relatif à la simplification de l’enseignement de la syntaxe française signé le 26 février 1901 par le ministre de l’Instruction publique Georges Leygues

    VI- Adjectifs 2. Adjectif construit avec plusieurs substantifs : on tolérera toujours que l’adjectif soit construit au masculin pluriel , quel que soit le genre du substantif le plus voisin ( ex : appartements et chambres meublés). On tolérera aussi l’accord avec le substantif le plus rapproché (ex : un courage et une foi nouvelle)

    Et il y a aussi, à la page 315 du « Bon usage » de Maurice Grevisse, un « historique » : « la langue du Moyen âge faisait ordinairement l’accord de l’adjectif avec le nom le plus proche. Les auteurs du XVII° siècle suivaient encore assez souvent cet usage : « Consacrer ces trois jours et ces trois nuits entières » (Racine, Athalie, I, 2). Vaugelas préférait l’accord avec le dernier nom ; Malherbe, au contraire, voulait l’accord simultané »

    In fine, l’Académie française en perd son latin...

    Petite mise au point de l’historien de l’éducation Claude Lelièvre, face à la levée de boucliers de tout ce que l’Hexagone compte de plus réactionnaire, suite à l’appel suivant :

    « Nous n’enseignerons plus que "le masculin l’emporte sur le féminin" »
    https://www.slate.fr/story/153492/manifeste-professeurs-professeures-enseignerons-plus-masculin-emporte-sur-le-f

    #éducation #polémiques #langue_française #langage #masculin #féminin #sexisme

  • A la fac, toges et toques sont de nouveau de sortie
    http://www.lemonde.fr/campus/article/2016/07/13/a-l-universite-toges-et-toques-sont-de-nouveau-de-sortie_4968644_4401467.htm

    Comme Vincent, notre docteur en physique-chimie, de nombreux « déguisés » du jour imaginent que la cérémonie, les toges et les coiffes qui seront lancées à la fin du show, viennent tout droit des pays anglo-saxons. A tort. « Il n’y a pas d’influence américaine dans ces costumes », corrige l’historien Claude Lelièvre. Coiffes rectangulaires et toges académiques remontent en fait au… XIIIe siècle, et aux premières universités européennes. Parmi lesquelles une certaine Sorbonne.

    D’abord portés par les étudiants et les professeurs dans des bâtiments qui n’étaient pas toujours chauffés, ces costumes se sont généralisés « tout au long de l’ancien régime du XIIIe au XVIIIe siècle ». Les cérémonies de remise des diplômes ont suivi le mouvement.

    Napoléon codifie le port des toges académiques dans un décret du 31 juillet 1809. « N’ayant jamais été aboli, ce décret est en théorie toujours en usage aujourd’hui », précise l’historien. Mais entre-temps, en France, Mai 1968 est passé par là, balayant temporairement une tradition jugée passéiste, « sur fond de critique de la distinction, des honneurs, de la théâtralisation, etc. ». Mais la tradition, française à l’origine, est restée vivace à l’étranger

    #histoire #tradition #université

  • « En France, l’orthographe sert à se distinguer socialement » (Claude Lelièvre, LeMonde.fr)
    http://www.lemonde.fr/education/article/2016/02/16/en-france-l-orthographe-sert-a-se-distinguer-socialement_4866346_1473685.htm

    En France, même au XXIe siècle, l’orthographe sert à se distinguer socialement : on a le droit de ne pas maîtriser une règle de trois… mais pas de « fauter » en orthographe. La langue écrite est devenue l’un des deux totems – avec le roman national – constitutif de notre identité. Mais être français aujourd’hui, est-ce croire qu’on atteint les sommets de la culture quand on s’agrippe à la cime de l’accent circonflexe ?

    #éducation #école #orthographe #réforme_de_l'orthographe #distinction_sociale

  • « Exceptions consolantes » et « pics superbes nés du peuple ».... (Claude Lelièvre - Histoire et politiques scolaires)
    https://blogs.mediapart.fr/claude-lelievre/blog/210116/exceptions-consolantes-et-pics-superbes-nes-du-peuple

    Les bourses ne sont pas, dit-il [Ferdinand Buisson, en 1910], une solution à cette division structurelle mais constituent seulement des « exceptions consolantes ». Dans un texte paru en septembre 1921 dans le « Manuel de l’enseignement primaire », Ferdinand Buisson ajoute : « une telle différence nous devient insupportable. Nous avons, pour la masquer, imaginé le système des bourses […]. Mais ces demi-mesures ne sauveront pas la nation qui se prive chaque année de quelques milliers d’intelligences hors ligne pour réserver ses faveurs aux médiocrités de la classe riche. Elle sera bientôt dépassée par les nations qui sauront mettre en valeur la totalité de leur capital humain, le plus précieux de tous les capitaux. Il faut donc aujourd’hui, par l’unité et la gratuité de l’enseignement, ouvrir aux masses elles-mêmes l’accès de la haute culture »

    « Il semble que le professeur ait pour tâche de choisir une élite, et de décourager et rabattre tous les autres […]. Nous choisissons quelques génies et un certain nombre de talents supérieurs ; nous les estampillons, et nous faisons d’eux une aristocratie d’esprit qui s’allie à l’autre, et gouverne tyranniquement au nom de l’égalité ; admirable égalité, qui donne tout à ceux qui ont déjà beaucoup. Selon mon idée, il faudrait agir tout autrement [...].Tout l’effort des pouvoirs publics devrait s’employer à éclairer les masses par le dessous et par le dedans, au lieu de faire briller quelques pics superbes, quelques rois nés du peuple, et qui donnent un air de justice à l’inégalité. Mais qui pensent à ces choses ? Même les socialistes ne s’en font pas une idée nette . Je les vois empoisonnés de tyrannie et réclamant de bons rois. Il n’y a point de bons rois » (Alain, in « Les Cent un Propos », 1928)

    #éducation #école #collège #démocratisation #massification #élitisme

  • Vers la structuration d’une guerre scolaire inédite ? (Claude Lelièvre)
    http://blogs.mediapart.fr/blog/claude-lelievre/290914/vers-la-structuration-dune-guerre-scolaire-inedite

    De 1910 à 1913, de nombreux projets de « défense laïque » se succèdent mais ne vont pas jusqu’au bout. Finalement, fin janvier 1914, la Chambre des députés vote par 424 voix contre 131 une série de dispositions afin d’« assurer la défense de l’école laïque ». Les parents qui empêcheront leurs enfants de participer aux exercices réglementaires de l’école, ou de se servir des livres qui y sont régulièrement mis en usage, seront frappés de la même peine d’amende que dans le cas de non-fréquentation (de deux francs à quinze francs-or). D’autre part quiconque, exerçant sur les parents une pression matérielle ou morale, les aura déterminé à retirer leur enfant de l’école ou à empêcher celui-ci de participer aux exercices réglementaires de l’école, sera puni d’un emprisonnement de six jours à un mois et une amende de seize francs à deux cents francs-or (ou de l’une de ces peines seulement). Enfin quiconque aura entravé ou tenté d’entraver le fonctionnement régulier d’une école primaire publique, notamment en organisant la désertion de cette école, sera frappé des mêmes peines ( lesquelles seront sensiblement aggravées, s’il y a eu violence, injures ou menaces).

    Six mois plus tard, c’est la guerre de ’’14’’ et « l’Union sacrée ». C’était il y a tout juste 100 ans.

    #éducation #école #histoire_de_l'éducation #laïcité #vigi-gender #jre #parents_d'élèves #relations_école_familles

  • L’ABC après l’ABCD (Claude Lelièvre)
    http://blogs.mediapart.fr/blog/claude-lelievre/300614/labc-apres-labcd

    D’abord ce rappel : les stéréotypes sexués ne sont pas seulement présents dans la société, ils ont été inscrits historiquement dans l’Ecole républicaine elle-même, ses représentations et matériaux pédagogiques. Et cela fait plus d’une génération que leur remise en cause a été programmée ...et que l’on piétine.
    […]
    Le très intéressant rapport de l’Inspection générale de mai 2013 sur « Les inégalités scolaires entre filles et garçons dans les écoles et les établissements » a indiqué fort opportunément que « la focalisation initialement portée sur l’orientation et principalement sur celle des filles a durablement marqué les politiques d’égalité entre filles et garçons [..]. L’effort a porté jusqu’ici sur la diversification des choix d’orientation. Mais cet effort a rencontré ses limites en intervenant assez tard dans le processus d’orientation, en fin de collège, au moment où les représentations stéréotypées sur les métiers et les formations qui y conduisent sont déjà construites. Enfin il a ciblé prioritairement sur les filles, envoyant un message ambigu. Est-il plus dérangeant que les filles n’aillent pas assez en séries scientifiques, ou que les garçons évitent les séries littéraires ? Que les filles désertent les séries industrielles, ou les garçons les services ? Qu’il n’y ait pas assez d’ingénieures ou de puériculteurs ? »

    #éducation #sexisme #inégalités #orientation_professionnelle #stéréotypes

  • Oui, on enseigne le « genre » à l’école (même ceux qui s’y opposent) | Slate
    http://www.slate.fr/story/83745/le-genre-est-partout-ecole

    Il est difficile de savoir quel est le nombre des enseignants qui déconstruisent le genre, spontanément ou de façon militante. Mais ils dépassent bien sûr les 600 classes pilotes qui testent actuellement l’ABCD égalité, depuis la maternelle au CM2.

    « Nous n’avons pas d’outils pour les compter et les inspecteurs y sont plutôt hostiles, cela acte l’idée que l’école ne réussit pas dans sa mission d’égalité entre les sexes, ils ne peuvent pas l’entendre. Donc ces initiatives ne sont pas répertoriées. »

    D’autant plus qu’« un certain nombre de profs le font encore sans l’identifier, parce que pour eux ça va de soi », explique Isabelle Collet.

    Les enseignants en France ont toujours eu « une marge de manœuvre extraordinaire » concernant le contenu de leur cours, rappelle l’historien Claude Lelièvre, spécialiste de l’éducation.

    Cette liberté est « fondamentale pour pouvoir s’adapter au public en face de nous » estime Florence, 39 ans, qui a enseigné douze ans en primaire et trois ans en maternelle, en Seine-Saint-Denis.

    « Moi je change chaque année le contenu en fonction du degré d’éveil des élèves, des envies que je sens chez eux. »

    Cela dépend aussi des « débats provoqués par la classe », souligne Stéphanie.

    L’an dernier, en plein débat sur le mariage pour tous, elle a dû ouvrir un débat sur ce que c’était que d’avoir deux mamans, après avoir retrouvé un de ses élèves de maternelle, dont c’est le cas, en larmes : il s’était entendu dire que ce n’était « pas bien », « pas normal » et « interdit ».

    Ces débats surviennent souvent sans militantisme derrière. « Ce sont des sujets qui viennent naturellement avec les petits », précise Anne institutrice depuis dix ans, du CE1 au CM2 et qui enseigne dans le Puy-de-Dôme. Elle estime ne jamais avoir eu affaire à un sexisme très marqué, mais avoir néanmoins eu l’occasion de parler de ces sujets.

    « Mes fils les premiers ont donné le sein à leur poupée. Et dans les classes, plein d’occasions nous sont données d’aborder la question de la différence, de la tolérance, qu’elle soit sexuelle, quand un garçon ne veut pas jouer à la dînette ou autre, quand des enfants se tapent dessus. On n’a pas attendu Peillon pour en parler. »

    Florence ajoute :

    « La théorie du genre, je ne comprends pas bien ce que c’est. Mais si on parle du fait que les petites filles puissent faire des métiers comme les garçons ou que les garçons jouent à la poupée, ça bien sûr, je l’ai abordé dans ma classe. »

    Cette enseignante explique que grâce à des albums montrant des filles pompiers ou des garçons coiffeurs, elle a montré à des CE1 que chacun était libre de faire ce qui lui plaisait.

    Julie, 32 ans, qui enseigne depuis 9 ans à Salon-de-Provence (CE2/CM1) n’estime pas du tout que ce soit un enseignement prioritaire. Elle ne se considère pas du tout comme militante. Mais pour une leçon sur la météo, elle doit faire venir un scientifique pour parler de son métier. Elle s’efforce de trouver une femme « parce que les petites filles s’orientent plus difficilement vers des métiers scientifiques. Je veux leur montrer que c’est possible ».

    Ces exemples sont des enseignements sur le genre, qu’ils soient ou non appelés ainsi et à différents degrés, qu’ils ne prennent que quelques minutes par an ou occupent des sessions entières. Ils déconstruisent une norme genrée.

    #genre #féminisme #égalité #éducation #école

  • L’école et les « hommes libres » : Claude Lelièvre répond à Natacha Polony (L’Express)
    http://www.lexpress.fr/education/l-ecole-et-les-hommes-libres-claude-lelievre-repond-a-natacha-polony_147901

    Natacha Polony confond benoîtement un pourcentage d’élèves issus de milieux populaires parmi les reçus aux grandes écoles, avec un pourcentage de reçus parmi l’ensemble des enfants d’origine populaire.
    […]
    Il est vrai que se rendre compte qu’il y a deux fois plus de garçons que de filles qui n’atteignent pas en France le niveau de compétence 2 considéré comme un minimum à atteindre pour réussir son parcours personnel (26% de garçons contre 14% de filles selon l’enquête PISA 2009) ne va pas dans le sens de la réduction de cette grave question au débat sempiternel sur les méthodes d’apprentissage (un des ’’fonds de commerce’’ de Natacha Polony qu’elle ne manque pas de mettre en œuvre), même si elles peuvent avoir bien sûr leur importance.
    […]
    Par ailleurs la focalisation récurrente sur le ’’lire, écrire, compter’’ (reprise à son compte par Natacha Polony dans son interview) ne va pas non plus dans le sens réellement historique de l’ambition des fondateurs l’Ecole républicaine, et de ce qui peut faire -précisément- la différence entre une école ’’républicaine’’ et une école d’’’Ancien Régime’’ (à savoir ce qui « est vraiment éducateur », et où « réside la vertu éducative »).

    #éducation #polémique #histoire_de_l'éducation #lire_écrire_compter #statistiques #oups

    • Natacha Polony : « L’école ne fabrique plus des hommes libres, mais des incultes ! »
      http://www.lefigaro.fr/vox/societe/2014/02/14/31003-20140214ARTFIG00382-natacha-polony-l-ecole-ne-fabrique-plus-des-homme

      Rien que les questions posées par Le Figaro™ :

      Théorie du #genre, Vincent Peillon, feuille de route sur l’#intégration, Natacha Polony revient sans langue de bois sur les polémiques autour de l’école qui ont émaillé cette semaine.
      Polémique autour de la théorie du genre, dérives #communautaires, résultat catastrophique au classement #Pisa, l’école Française est en crise. Dans votre dernière chronique pour le Figaro, vous écrivez, « l’école n’instruit plus, n’éduque plus, elle rééduque ». Qu’entendez-vous par là ?
      […]
      La focalisation de l’école sur les questions de société n’est-elle pas justement un moyen de masquer son échec sur l’apprentissage des savoirs fondamentaux ?
      […]
      Hormis cette dérive sociétale, quelles sont les causes profondes de cette faillite de l’école de la République ?
      […]
      Avec le rapport puis la feuille de route sur l’intégration, la gauche a relancé le débat sur l’interdiction du #voile et plus largement sur le #multiculturalisme à l’école. Le risque n’est-il pas de faire de cette dernière l’otage de tous les communautarismes ?
      […]
      Dans une interview accordé à Libération, Vincent Peillon en appelle pourtant à la défense de l’école républicaine… Qu’en dites-vous ? Cela va-t-il dans le bon sens ?

  • Le sexisme originel de l’École républicaine (Claude Lelièvre)
    http://blogs.mediapart.fr/blog/claude-lelievre/010214/le-sexisme-originel-de-lecole-republicaine

    Très logiquement et très consciemment, Auguste Comte et Jules Ferry refusent donc la « co-éducation des sexes » ( ce qu’on appelle maintenant la « mixité » ). Les filles ne doivent pas être éduquées en commun avec les garçons puisqu’elles ne doivent pas avoir le même destin social : en principe, et par principe, les garçons doivent être formés aux fonctions de production et de direction, tandis que les filles – elles – doivent être préparées à « tempérer l’égoïsme », dans le cadre circonscrit de la famille.
    […]
    On conviendra que l’on est ainsi à des années-lumières de « l’égalité » telle que nous pouvons la concevoir actuellement. Or cela s’est inscrit dans les cursus institués et, plus profondément encore, dans le matériel pédagogique et didactique, dans les manuels scolaires ( sans qu’il y ait eu jusqu’ici un vrai et clair aggiornamento). C’est toute une culture, et elle pèse sans doute encore sur nous.

    #éducation #école #programmes #histoire_de_l'éducation #genre #sexisme #mixité

  • La « sanctuarisation de l’école », héritage historique

    « Sanctuariser l’école »... C’est ce que le ministre de l’éducation, Vincent Peillon, demandait mercredi 16 octobre, à la sortie du conseil des ministres. C’est aussi a minima ce que réclament les lycéens qui manifestent. Ils refusent qu’on vienne chercher un élève dans un établissement ou lors d’une activité périscolaire pour le renvoyer dans son pays. Interdire que des interventions de ce type se déroulent dans l’enceinte scolaire – et dans ce qui en constitue un prolongement –, c’est ce qui devrait sortir de la circulaire interministérielle en préparation. Car, si l’école sanctuaire existe dans les esprits, elle n’existe pas dans les textes.

    « C’est un héritage de l’histoire. Une très vieille idée qui remonte à la franchise des universités en 1215. A cette époque, l’université de Paris s’est élevée contre la police municipale qui voulait y faire régner l’ordre, rappelle le juriste, inspecteur général honoraire, Bernard Toulemonde. Il ne faudrait pas croire pour autant que l’université est un lieu de non-droit, puisqu’en cas de flagrant délit, de crime ou de délit la police peut entrer et que, dans d’autres cas, le président d’université peut l’y autoriser. »

    L’intéressant, aux yeux de l’historien Claude Lelièvre, professeur d’histoire de l’éducation à Paris-V, c’est que ce concept, qui n’a aucune existence juridique à l’heure actuelle pour l’enseignement scolaire, est pourtant très profondément ancré dans nos consciences. L’explication est simple : « L’idée de la sanctuarisation vient de Durkheim. Pour le philosophe, c’est d’abord parce qu’elle remplace l’Eglise que cette institution est pensée comme un sanctuaire et que ceux qui y enseignent forment un clergé. » Latent dans notre vision de l’institution, ce thème n’avait pas refait surface depuis quelque temps.

    MOT QUASI MAGIQUE

    Dans l’histoire récente, c’est le ministre de l’éducation François Bayrou (1993-1997) qui l’a ressuscité. Confronté à une épidémie de violence, il a décidé de répondre par ce mot quasi magique. Aujourd’hui, la situation est différente mais l’attente aussi forte. « Nous nous félicitons de l’intention du chef de l’Etat de sanctuariser nos établissements, note Philippe Tournier, le secrétaire général du syndicat des proviseurs. Il y a des choses qui ne se font pas dans un cadre scolaire. »

    D’autant que les affaires Leonarda et Khatchik font émerger un autre concept qui est le « droit à l’école ». "On oublie volontiers que la scolarité ne s’est installée que très récemment comme droit. Dans l’école de Jules Ferry c’est un « devoir » dont on doit s’acquitter pour être un bon citoyen. Après la seconde guerre mondiale, il y a glissement du devoir vers le droit. Aujourd’hui se pose la question de l’intégration. Est-ce qu’aller à l’école ouvre le droit de rester sur le territoire français ?", se demande M. Lelièvre. Ce serait alors le degré supérieur de la sanctuarisation.

    Maryline Baumard

  • Drôles de rythmes (Claude Lelièvre)
    http://blogs.mediapart.fr/blog/claude-lelievre/170613/droles-de-rythmes

    La semaine de 4 jours […] favorise la vie familiale en fin de semaine ; mais elle laisse certains enfants désœuvrés pendant trois jours par semaine quand il n’y a aucun accompagnement de cette mesure ; elle occasionne souvent une réduction du temps effectif d’enseignement (surtout dans les secteurs où les jours de rattrapage sur les vacances connaissent un absentéisme certain) ; elle favorise moins les rencontres entre parents et enseignants ; elle est parfois source de fatigue supplémentaire (effets chrono-biologiques maximaux au cycle II, s’estompant au cycle III). La semaine de 5 jours […] est considérée comme plus favorable à la continuité éducative, à la répartition équilibrée des charges de travail et au respect des rythmes biologiques ; elle est donnée comme la meilleure formule quand il y a réel aménagement du temps (horaires quotidiens) et des rythmes (variété des modalités de travail, alternance des activités)

    #éducation #école #réforme_rythmes_scolaires #chronobiologie

  • Et si on aimait enfin l’école ! (Histoire et politiques scolaires)
    http://blogs.mediapart.fr/blog/claude-lelievre/090112/et-si-aimait-enfin-lecole

    Les deux auteurs considèrent que durant ces dix dernières années s’est opéré un déplacement depuis le collège (considéré comme ‘’le’’ lieu des difficultés) jusqu’à la mise en cause - récente et privilégiée - de l’#école primaire. […]
    Après avoir mis en avant certaines arrières pensées foncièrement politiciennes (en particulier durant les ministères de Gilles de Robien et de Xavier Darcos) […], il n’en reste pas moins qu’ « il faut admettre que l’école primaire rencontre des difficultés réelles et qui sont plutôt en train de s’aggraver ».
    […] "Les plus grandes lacunes repérées par les #évaluations nationales et internationales se situent dans le domaine de la compréhension de l’écrit et de la production de textes. Nos écoliers s’avèrent plutôt ’’bons déchiffreurs’’, mais mauvais ’’compreneurs’’ et ’’faibles scripteurs’’. On peut échouer à comprendre un texte parce que trop de mots (bien déchiffrés) sont inconnus, parce que la syntaxe n’est pas limpide (sujet inversé, phrases négatives, passives, propositions trop longues), parce que l’effort de déchiffrage mobilise trop l’attention, parce que le contenu même du texte est trop étranger aux savoirs du jeune lecteur...".
    […] il faut aussi reconnaître le rôle fondamental que doit jouer l’école primaire. Cela n’a pas été le cas jusqu’ici si l’on en juge par la part inférieure à la moyenne des pays de l’OCDE dévolue à l’enseignement primaire en France selon quelques #indicateurs significatifs. Ainsi le coût de l’élève de l’enseignement primaire français est de 14% inférieur à celui du coût moyen de l’élève d’école primaire dans les pays de l’OCDE (alors que c’est exactement l’inverse pour ce qui concerne le coût de l’élève de lycée). Et le taux d’encadrement dans l’enseignement primaire français est inférieur de 25% au taux d’encadrement moyen de celui des pays de l’Union européenne.

    #lecture

    • C’est quoi le « on » dans « et si on aimait enfin l’école » ? Apparemment pas les enfants, car il n’en pas question dans cet article, sauf dans les statistiques de difficulté en lecture/écriture.

    • Bin "on", c’est le "ça" de la majorité silencieuse, comme dans "on a gagné" ou "on veut pas de ça chez nous"…
      Plus sérieusement, Claude Lelièvre est un "expert sur les questions d’éducation auprès du P‘S’", plus "systémique" dans ses analyses que "pédagogique" d’où l’absence des enfants dans ce billet, il a largement inspiré les propositions de M. Aubry pendant les primaires ‘socialistes’ mais, à ma connaissance, n’a pas été repris dans l’équipe de campagne de F. Hollande.
      Je précise que je référence des articles qui ne reflètent pas nécessairement mon point de vue. En l’occurrence, en dehors de certains chiffres qui vont à l’encontre de certaines idées reçues, ce qui m’intéresse c’est ce concept d’« école fondamentale », leitmotiv actuel de C. Lelièvre (cf. http://seenthis.net/messages/33477 qui t’avait déjà fait réagir).
      Le débat est toujours implicite et jamais médiatisé, mais il me semble important. Nous sommes à une fin de cycle : à la suite des trente glorieuses, il y a eu un projet de démocratisation de l’école qui n’a jamais été effectif (l’école ne s’est pas démocratisée), mais qui a vu le collège, le lycée et les universités accueillir des publics qui n’y arrivaient pas avant. Sans doute que cette "démocratisation" était portée par des nécessités économiques : besoin d’une main d’œuvre plus qualifiée. Depuis quelques années déjà, on remet en cause cette "démocratisation", la pierre angulaire étant l’officialisation du décès du "collège unique". L’école primaire est touchée aussi puisqu’elle devient "jardin d’éveil" en maternelle et machine à sélectionner les "bons" collégiens à l’élémentaire… sans doute que ce reflux idéologique s’explique en partie par les nouveaux besoins économiques, après 30 ans de délocalisation, inutile de faire des études longues pour faire les métiers qui restent : torcher les vieux et livrer des pizzas aux cadres burn-outés…
      Bref, le concept d’« école fondamentale » est ambigü comme l’était le « socle des compétences » : s’agit-il de refonder une démocratisation réelle du système scolaire ou d’acter la mort de cette ambition (l’école fondamentale sera alors l’ancien certificat d’étude) ? Et puis surtout peut-on s’en saisir pour reposer des exigences fondamentales sur l’éducation, ses finalités, son organisation, ses objectifs, la place des différents acteurs dont les enfants, etc.

    • J’avais bien compris que ce que tu référençais n’étais pas forcément de ton point de vue. Et je m’excuse pour mes commentaires parfois un peu lapidaires, j’ai tendance à avoir des réactions épidermiques sur le sujet et pas forcément le temps ou les compétences pour développer de manière intéressante... :-)

      Je suis tout à fait d’accord avec ton commentaire, qui m’a fait penser à un article dans le dernier Diplo qui parle des États-Unis et d’un discours en vogue qui dit que la solution à la pauvreté et aux inégalités c’est l’éducation, comme si la pyramide des inégalités scolaires ne correspondait pas à celle des inégalités ensuite dans le monde du travail.

      En fait ce qui m’énerve dans tous ces articles et discours sur la refondation de l’école et tout le toutim, c’est l’absence quasi totale de prise en compte de la place de l’enfant, de ce qu’il vit à l’école et qui est bien souvent assez terrible : humiliations et perte d’estime de soi pour ceux qui ne « réussissent » pas, soumission à une autorité quasi totale et à une charge de travail très élevée pour tous, etc. Je caricature mais à peine.

      Je me sens vraiment proche d’un Bernard Collot, que tu dois connaître j’imagine, sur tout ça :

      http://education3.canalblog.com

    • Concernant la vie des enfants à l’école, il y a cette phrase terrible du beau Raoul « L’école est au centre d’une zone de turbulence où les jeunes années sombrent dans la morosité, où la névrose conjuguée de l’enseignant et de l’enseigné imprime son mouvement au balancier de la résignation et de la révolte, de la frustration et de la rage. » (http://seenthis.net/messages/45989) : le fonctionnement institutionnel ne sauve personne…
      Du côté vie de classe, tu cite Bernard Collot, du côté des réflexions plus institutionnelles, j’aime beaucoup l’approche de Charlotte Nordmann (http://seenthis.net/tag/charlotte-nordmann) qui tente de concilier dans ses réflexions les deux versants - émancipateur et oppressif - de l’école.

    • Oui, tu as raison de pointer que l’école est aussi un lieu de souffrance pour ceux qui y travaillent. Néanmoins j’ai tendance à tordre un peu le bâton du côté de la souffrance des enfants, car celle-ci me semble encore plus invisible (en-dehors des cas de harcèlement par d’autres élèves). La souffrance des profs, on en parle un peu plus, ce qui ne veut évidemment pas dire qu’on fait quoi que ce soit pour y remédier...

      Merci pour la référence à Charlotte Nordmann, je ne connaissais pas, je vais jeter un coup d’oeil.

    • Non, je ne voulais ni comparer, ni opposer les souffrances. En dernière analyse, l’enseignant, dépositaire de l’autorité de l’État, reste l’oppresseur :)
      Je voulais juste noter que les dysfonctionnements se nourrissent les uns les autres en un bel effet miroir. Sans un « pas de côté », chacun s’enferme dans un dysfonctionnement renforcé par le système. Le « pas de côté » est pédagogique donc du ressort de l’enseignant…
      Réclamer des moyens en plus est nécessaire, se demander « qu’est-ce qui se vit dans la classe où j’enseigne » est essentiel…