person:ernst lohoff

  • Terreur du travail et critique du travail. La tolérance répressive et ses limites, par Ernst Lohoff
    http://www.palim-psao.fr/2019/02/terreur-du-travail-et-critique-du-travail.la-tolerance-repressive-et-ses-

    En ce qui concerne la critique et le dépassement du travail, il s’agit de bien plus que de simples exagérations polémiques. Ils doivent être pris au pied de la lettre. Ils reposent sur l’hypothèse qu’une critique théorique du capitalisme consistante et à la hauteur de notre époque ne peut plus être formulée que sous la forme d’une critique conséquente du travail.

    […]

    En ce qui concerne leur contenu sensible, en revanche, l’instruction d’enfants, la production de gaz toxiques, la représentation de performances artistiques devant un public payant et la construction de meubles n’ont pas le moindre point commun. Si l’on se concentre sur ce qui est fait, si l’on fait abstraction de la forme sociale dans laquelle tout cela est produit, l’abstraction-travail se dissout doublement. D’abord, aucun signe n’indique qu’il y aurait une affinité d’espèce au fondement de toutes les activités qu’on regarde comme du travail. Ensuite, du point de vue d’une approche purement matérielle, il est tout aussi impossible d’expliquer pourquoi une même activité — chanter des chansons ou cultiver des fleurs, par exemple — est considérée tantôt comme un travail et tantôt comme un hobby, selon qu’elle sert à gagner de l’argent ou non. En dehors de cette subsomption sous la même forme de contrainte sociale du « se vendre », il existe donc une large palette d’activités concrètes qui créent de la richesse, mais il n’existe en revanche aucune forme d’activité générale correspondant à ce qu’on appelle « travail ». Le travail est le produit d’une réduction forcée de la richesse et de la création de richesse à la production de marchandises, une réduction qui détermine l’ensemble de la structure sociale. Les sociétés pré-capitalistes n’ont jamais eu la drôle d’idée de forcer l’activité des esclaves et celle des hommes libres, celle des prêtres et celle des navigateurs à entrer sous une catégorie commune.

    […]

    La critique du travail en retire conceptuellement qu’il ne s’agit pas seulement d’en finir avec le travail abstrait, celui qui crée de la valeur. Il faut aussi que le travail concret, l’art et la manière dont le capital organise l’appropriation de la nature soit remis à disposition. Il faut dépasser le travail en général, concret et abstrait, parce qu’en tant que travail, le travail concret n’est de prime abord rien d’autre que le précipité sensible-empirique d’un processus d’abstraction qui le transcende.

    […]

    La domination du travail n’est absolument pas concevable sans un important secteur d’« activités de l’ombre » qui, à cause de leur contenu, ne peuvent être traduites que sous conditions ou ne peuvent pas l’être du tout en dépenses acycliques et linéaires de muscles, nerfs et cerveau et refusent d’intégrer l’organisation comme sources de revenus. Aucune société ne peut exister sans que des enfants soient pris en charge et que des individus s’acquittent pour eux-mêmes et pour d’autres de la reproduction quotidienne. L’ennoblissement du travail transformé en seule forme d’activité sociale valable coïncide avec la dépréciation de ces activités dites « féminines » et assignées généralement aux femmes. Elles peuvent être aussi indispensables que la respiration mais, puisqu’elles n’ont pas l’inqualifiable qualité de produire de l’argent à partir d’argent, elles sont ravalées au rang de « choses privées » et inférieures et restent du coup largement invisibles. Tant que l’existence humaine et la participation à la richesse sociale ne devront et ne pourront être qu’un résidu de la valorisation de la valeur qu’opère le grand moulin du travail, ces activités « féminines » ne seront structurellement qu’une condition tacite de la reproduction capitaliste. Les fleurs rhétoriques du jour de la fête des mères et les astucieux exercices de définition alléguant que le travail ne devrait pas être seulement synonyme de gagne-pain mais embrasser aussi les travaux domestiques ne changent rien à cet état de fait.

    #Ernst_Lohoff #critique_de_la_valeur #wertkritik #capitalisme #travail #critique_du_travail #dissociation-valeur

  • « Cette société est trop riche pour le capitalisme ! », par Ernst Lohoff et Norbert Trenkle - Critique de la valeur-dissociation. Repenser une théorie critique du capitalisme
    http://www.palim-psao.fr/2018/03/cette-societe-est-trop-riche-pour-le-capitalisme-par-ernst-lohoff-et-norb

    Deux positions apparemment inconciliables caractérisent la controverse politique autour de la bonne façon d’aborder la crise. Tandis que les uns, pour relancer la croissance économique, veulent encore et toujours ouvrir les vannes monétaires et appliquer de nouveaux programmes conjoncturels, les autres défendent une stricte orientation vers l’austérité. Les deux camps prétendent que, si on applique leur plan, la crise pourra se voir surmontée et le mode de production capitaliste pourra être restauré sur une base solide. On croirait assister une nouvelle fois au vieux débat d’orientation entre keynésiens et libéraux, ainsi qu’on l’a tant de fois vu au siècle passé. Mais là où le système de référence de cette controverse se brise, parce que la crise sape irrévocablement les fondements de la production de richesse capitaliste, elle dégénère en sinistre farce. Cependant, les protagonistes ne s’en rendent même pas compte, ou alors le refoulent-ils avec succès. Ils continuent à interpréter infatigablement la même pièce, tandis que la scène sous leurs pieds est toujours plus vermoulue. Le conflit entre leurs visions ne reste cependant pas sans conséquence, car même si aucun des deux plans n’est susceptible d’offrir une issue à la crise, ils impriment cependant leur caractère à la gestion de celle-ci, et, par là également, à ses répercussions concrètes sur la société.

    #critique_de_la_valeur #wertkritik #économie #dette #capitalisme #Allemagne

    • Si l’on s’obstine à lier ces potentiels de richesse à la forme de la richesse abstraite, une nouvelle escalade du procès de crise est inévitable, avec ses conséquences catastrophiques pour la société. Si l’on réussissait en revanche à les arracher à cette forme fétichiste, ils pourraient être mis au service de la satisfaction des besoins concrets de la société. Cela supposerait impérativement, à l’évidence, le dépassement de la production de marchandises et de l’économie monétaire. Car la production développée de marchandises est toujours déjà production capitaliste de marchandises, et à ce titre régie par la fin en soi de la valorisation. Une « production simple de marchandises » comme système social d’échange général, dans lequel l’argent ne serait qu’un moyen de paiement et d’échange et « servirait la société », n’existe que dans les pages d’introduction des manuels d’économie, ainsi que dans les fantasmes de l’entendement bourgeois commun. C’est la raison pour laquelle toutes les tentatives engagées pour « réformer » l’argent, en abolissant les intérêts, par exemple, sont non seulement régressives, en ce qu’elles célèbrent l’« économie de marché » et situent la source des maux du capitalisme dans la sphère financière, mais en outre vouées à l’échec dans la pratique. Des bons d’échanges régionaux peuvent fonctionner un temps comme monnaie parallèle, ou, lors d’une situation de crise extrême, comme ce fut le cas en Argentine en fin d’année 2001, endosser la fonction d’un argent de substitution, ce qui n’est pas sans rappeler le rôle des cigarettes sur le marché noir dans l’après-guerre ; mais dès qu’ils sortiront de cette niche, ils se transformeront en de l’argent tout à fait normal, qui n’est pas un moyen, mais une fin en soi de la production.

    • Il n’existe pas de plan directeur pour cette option. Elle ne peut être développée que par des mouvements sociaux d’émancipation, qui prendraient la forme d’une opposition à la gestion de la crise. Il sera déterminant, évidemment, de savoir comment cette opposition se définira, et quelles perspectives elle formulera. Malgré leurs efforts pour se présenter comme une option radicale, les mouvements de protestation actuels ne représentent pas grand-chose d’autre que l’aile bruyante du mainstream. Ce qui domine, c’est la personnification des origines de la crise, une célébration du « peuple » (les « 99 % »), comme si ce dernier se tenait à l’extérieur de la logique capitaliste, et une fixation sur la redistribution de la richesse monétaire. Mais seule serait radicale une critique, exprimée du point de vue de la richesse matérielle, de la prétendue « obligation de faire des économies ». Le véritable scandale n’est pas la concentration de moyens monétaires dans les mains de quelques-uns – aussi répugnante qu’elle soit par ailleurs –, mais le fait qu’une société qui a développé comme jamais auparavant des potentialités de richesse coure ainsi à sa perte, au lieu de les mettre au service de la satisfaction des besoins concrets. À l’argument selon lequel on « devrait » faire des économies il faut objecter que cet « impératif » se fonde uniquement sur la logique de la production de richesse abstraite. La contrainte suivant laquelle toute richesse matérielle devrait toujours passer par le chas de l’aiguille de la forme marchandise et de la valorisation du capital a toujours été insensée. Mais le fait de rester attaché à cette obligation, alors que le travail producteur de valeur est en fin de course, et qu’ainsi la base de la valorisation du capital se brise, aboutit à un programme de suppression massive des ressources sociales, et devient le moteur d’une gigantesque poussée de paupérisation. Tandis que la gestion de la crise poursuit la Fata Morgana d’un capitalisme sain, elle détruit progressivement les bases de la reproduction sociale.

      Face à cela, il faut rayer résolument d’un trait la question de la « viabilité financière ». La construction de logements, le fonctionnement des hôpitaux, la production de nourriture ou l’entretien du réseau ferré ne doivent pas dépendre de la question de savoir si le « pouvoir d’achat » nécessaire est disponible. Le critère à ce sujet ne peut être que la satisfaction des besoins concrets. C’est précisément là le foyer pour la formation de nouveaux mouvements sociaux d’émancipation contre la logique délirante de la gestion de la crise. Si des ressources doivent être supprimées, parce que « l’argent manque », on doit justement se les approprier, les transformer et les exploiter en consciente hostilité ouverte contre la logique fétichiste de la production moderne marchande. Le mythe libéral fondateur, selon lequel le mode de production capitaliste garantirait « le plus grand bonheur du plus grand nombre » (Jeremy Bentham), fut toujours cruellement ironique, quand on pense aux immenses sacrifices qu’il a exigés ; dans les circonstances de la crise fondamentale que nous connaissons, il confine au pur cynisme. Une vie bonne pour tous ne peut exister qu’au-delà de la forme de richesse abstraite. Il n’y a qu’une seule option face à la dévalorisation catastrophique du capital : la dévalorisation émancipatrice de la production sociale de richesse.

    • Voilà pourquoi les partis social-démocrates sont en voie de disparition. Un parti de gauche digne de ce nom est obligé de mettre en question le capitalisme et les structures sociales, juridiques et militaires mises en place pour le défendre. Sans cela il ne pourra évidemment pas tenir ses promesses.

      La tentative de co-gérer le systèm capitaliste afin de garder un minimum de justice sociale est vouée a l’échec. On assiste à ce résultat qui se propage en Europe en montant l’échelle de puissance économique. Suivant cette analyse on peut espérer encore une dizaine d’années de stabilité économique et sociale pour l’Allemagne.

      Le pouvoir est au courant de ce processus et ses défenseurs les plus intelligents et brutaux sont en train de modifier les armées et les autres institiutions afin de garantir leur survie dans les conflits à venir qui se passeront au sein de nos sociétés.

      Le conflit entre leurs visions ne reste cependant pas sans conséquence, car même si aucun des deux plans n’est susceptible d’offrir une issue à la crise, ils impriment cependant leur caractère à la gestion de celle-ci, et, par là également, à ses répercussions concrètes sur la société.

      Est-ce qu’il faut appeller au soulèvement populaire avant qu’il ne soit trop tard ? Je pense qu’au contraire il faut se concentrer sur la défense des acquis sociaux et de ce qu’on possède encore comme droits et structures démocratiques.

      Ce n’est pas une voie glorieuse et le succès de cette stratégie n’est pas garantie, mais elle a l’avantage de nous équipper avec les défenses les plus puissantes qu’on peut monter - à savoir l’amitié, la #solidarité et l’échange d’idées et de conseils aux niveau nationl et international.

      A défaut de disposer d’une boule de cristal fonctionnelle on est obligé de simplement continuer le combat et de résister le mieux possible aux manoeuvres de terre brulée des impérialistes.

      #crise #résistance #poitique #syndicalisme

  • La grande dévalorisation
    http://www.zinzine.domainepublic.net/index.php?theurl=emmission2.php&id=2353

    Entretien avec Paul Braun, un des traducteurs du livre de Ernst Lohoff, Norbert Trenkle, La grande dévalorisation, qui vient de paraître aux éditions post éditions. Pourquoi la spéculation et la dette de l’État ne sont pas les causes de la crise ? Qui porte la responsabilité de la crise financière et économique qui maintient le monde entier en haleine depuis 2008 ? Sont-ce les « banquiers cupides » ou les « États accro à l’endettement » ? D’après Ernst Lohoff et Norbert Trenkle, théoriciens allemands du groupe « Krisis », aucune de ces réponses n’est satisfaisante. Durée : 1h. Source : Radio Zinzine

  • Une introduction au dernier livre de Krisis évoqué ici http://seenthis.net/messages/253453.

    « Sur l’immense décharge du capital fictif. Les limites de l’ajournement de la crise par le capital financier et le délire des programmes d’austérité », par Ernst Lohoff et Norbert Trenkle - Critique radicale de la valeur
    http://palim-psao.over-blog.fr/article-sur-l-immense-decharge-du-capital-fictif-par-ernst-loho

    Ce n’est pas parce que les manifestations de crises auxquelles nous sommes confrontés aujourd’hui prennent leurs origines dans la sphère financière que c’est là qu’il faut chercher les causes fondamentales et structurelles de ces crises. La confusion entre déclencheur et cause ne date pas d’aujourd’hui. En 1857, lors du premier grand krach mondial, de telles explications erronées avaient déjà été avancées. Un certain Karl Marx se moquait à l’époque : « Si au bout d’une certaine période de commerce la spéculation apparaît comme annonciatrice d’un effondrement, il ne faudrait pas oublier que cette spéculation est née auparavant dans cette même période de commerce et qu’elle représente donc un résultat, une apparence et non pas une cause ou une essence. Les représentants de l’économie politique qui tentent d’expliquer les soubresauts de l’industrie et du commerce en les attribuant à la spéculation ressemblent à l’école défunte des philosophes de la nature qui considéraient la fièvre comme la cause fondamentale de toutes les maladies » (En allemand : Marx Engels Werke, tome 12, page 336).

    #critique_de_la_valeur #wertkritik #capitalisme #crise #finance #Krisis #travail #valeur #marchandise #Marx

  • « La Grande dévalorisation » de Ernst Lohoff et Norbert Trenkle [Souscription et table des matières] - Critique radicale de la valeur
    http://palim-psao.over-blog.fr/article-la-grande-devalorisation-de-ernst-lohoff-et-norbert-tre

    Il est possible de pré-commander le livre pour 19 euros avant le 20 mai grâce à la souscription suivante :
    http://sd-1.archive-host.com/membres/up/4519779941507678/La_Grande_devalorisation_SOUSCRIPTION.pdf

    Après la crise de 2008, l’effondrement catastrophique du système capitaliste mondial n’a pu être empêché que par une intervention massive des États et des banques centrales, comme jamais l’histoire n’en avait connue. Si l’on doit à présent subir les conséquences de cette crise, sous la forme de l’endettement public et des « politiques d’austérité » imposées à la société, ce n’est pas parce que nous aurions vécu « au-dessus de nos moyens » et qu’il conviendrait de se « serrer la ceinture ». Bien au contraire, affirment Lohoff et Trenkle, la société vit largement au-dessous des possibilités créées par les nouveaux potentiels de productivité. La société, telle est la thèse conclusive du livre, est désormais trop riche pour le capitalisme. L’analyse originale de la crise développée ici se fonde sur une lecture de la théorie marxienne qui s’oppose en de nombreux points au marxisme traditionnel et à l’actuelle « renaissance de Marx ». Il en résulte une analyse de la crise qui s’oppose à tout ce qui s’échange actuellement sur le marché des idées.

    Ernst Lohoff et Norbert Trenkle sont membres du comité éditorial de la revue allemande KRISIS qui élabore depuis la fin des années 1980, une théorie critique radicalisée du capitalisme habituellement qualifiée de « critique de la valeur » (Wertkritik). Ils ont été avec Robert Kurz, les co-auteurs en 1999 du « Manifeste contre le travail » (paru en France en 2002).

    #critique_de_la_valeur #wertkritik #capitalisme #crise #finance #Krisis #travail #valeur #marchandise #Marx

  • « Une vague rose qui penche vers la droite », par Ernst Lohoff (Krisis) - Critique radicale de la valeur
    http://palim-psao.over-blog.fr/article-lohoff-109506914.html

    Les eurosceptiques ne sont pas les seuls à penser que l’Europe devrait abandonner l’euro : un certain nombre d’économistes et d’intellectuels libéraux de gauche le pensent aussi. A la place d’une critique anticapitaliste, se propage ainsi à gauche une sorte de néonationalisme économique avec des bouffées de culturalisme.