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  • Écriture inclusive : « On caricature le débat » Le Point - Baudouin Eschapasse - 27/10/2017

    Les promoteurs de l’écriture inclusive se défendent de créer une "novlangue". Raphaël Haddad et Éliane Viennot reviennent sur leur projet... Entretien.

    L’universitaire Éliane Viennot, spécialiste de l’histoire de la langue, et le chercheur Raphaël Haddad, par ailleurs fondateur du cabinet de conseil en communication MOTS-CLES http://www.motscles.net/nous-rejoindre https://seenthis.net/messages/654776 , plaident, depuis plusieurs années, pour que le français se débarrasse de traditions langagières qui perpétuent des préjugés sexistes. À l’heure où leur projet est largement débattu, Le Point.fr a souhaité les rencontrer pour qu’ils détaillent leur projet.


    Le Point : Vous promouvez, depuis plusieurs mois, une nouvelle écriture que vous qualifiez d’inclusive. Comprenez-vous la bronca suscitée par votre projet ? Et avez-vous été surpris(e) par la polémique qui l’a accompagnée ?
    Éliane Viennot  : Pour être totalement franche, cela ne m’a pas vraiment étonnée. Pour avoir étudié l’histoire de la langue, je sais combien certaines personnes deviennent hystériques dès lors qu’on leur propose d’utiliser des termes féminins pour certaines activités prestigieuses. Je me suis penchée récemment sur la manière dont l’Académie française a traité ce dossier depuis la création de la commission instituée en 1984 par Yvette Roudy (à l’époque ministre des Droits de la femme, NDLR), qui préconisait de féminiser les noms de métiers, fonctions, grades et titres. Notamment pour désigner les femmes qui accèdent à de hautes fonctions administratives ou ministérielles. La levée de boucliers avait été terrible. Et à nouveau en 1998, quand des ministres ont demandé qu’on les nomme au féminin. Dans les deux cas, certains médias ont réagi avec une incroyable violence. Je pense surtout au Figaro. Mais faut-il s’en étonner quand on sait qu’à l’époque, les académiciens avaient table ouverte dans ce journal ?

    Docteur en Sciences de l’Information et de la Communication (enseignant en communication à Paris I), Raphaël Haddad est, par ailleurs, fondateur de l’agence. Il est l’auteur du "Manuel d’écriture inclusive ».
    Raphaël Haddad  : Il est intéressant de souligner que la féminisation des métiers ne pose problème que quand il s’agit de professions intellectuelles ou de fonctions de responsabilité. Les académiciens n’ont jamais remis en cause le fait qu’on parle de boulangère ou d’infirmière. En revanche : préfète ou chancelière, cela semblait heurter leurs oreilles. De mon point de vue, cette réaction montre surtout que ces hommes se sentent en danger. L’idée même de féminiser ces termes les amène à considérer l’idée qu’ils devront un jour partager le pouvoir.
    E. V.  : J’ajouterai que les mots féminins que nous promouvons existent de longue date. On parlait au début du XVIIe siècle de philosophesse, d’écrivaine et d’autrice dans la meilleure société, et professeuse était employé au XIXe.
    Nous entendons juste renouer avec des règles grammaticales qui ont existé par le passé et existent toujours dans les autres langues romanes.

    Quand cela a-t-il changé ?
    E. V.  : Les premiers coups de boutoir datent des années 1600-1630, sous l’influence probable de personnes qui entouraient Malherbe, et qui voulaient « purifier » la langue des nombreux néologismes gascons et italianisants créés à l’époque. Mais ils en ont profité pour « masculiniser » la langue. Les résistances ont néanmoins été nombreuses jusqu’à ce que l’instruction devienne obligatoire. C’est l’école primaire obligatoire du XIXe sièce qui va achever ce mouvement.

    Votre projet n’ambitionne pas seulement de féminiser les noms de métier. Il va bien au-delà. Vous voulez débarrasser la langue française des règles grammaticales que vous présentez comme sexistes…
    E. V.  : Oui. Pour autant nous ne voulons pas créer une « novlangue » comme on l’écrit parfois. Ceux qui soutiennent cette idée caricaturent le débat. Nous entendons juste renouer avec des règles grammaticales qui ont existé par le passé et existent toujours dans les autres langues romanes. Nos détracteurs prétendent défendre la langue française. Mais la connaissent-ils vraiment ? J’en doute. Je veux par exemple réhabiliter l’accord de proximité, hérité du latin. Dans Athalie, Racine écrit : « Armez-vous d’un courage et d’une foi nouvelle. » Si l’on en croit nos bons académiciens qui veulent que le masculin l’emporte sur le féminin, nous aurions dû écrire « nouveaux ». De la même manière, Madame de Sévigné répondant à Gilles Ménage, qui se dit fatigué, lui répond : « Je la suis aussi. » Ce brave grammairien (né en 1613 et mort en 1692, NDLR) tente de la reprendre mais elle se refuse à dire « je le suis aussi ». Elle affirme que, si elle le faisait, « [elle] croirai[t] avoir de la barbe au menton » !
    Une langue « phallocentrée » (...) traduit une vision du monde dominée par les hommes

    R. H.  : Michel Foucault l’a bien dit. « Le discours n’est pas simplement ce qui traduit les luttes ou les systèmes de domination, mais ce pour quoi, ce par quoi on lutte, le pouvoir dont on cherche à s’emparer. » Une langue « phallocentrée », pour reprendre une terminologie de la chercheuse Marlène Coulomb-Gully, traduit une vision du monde dominée par les hommes.

    On vous opposera que les nations dont les langues n’ont ni masculin ni féminin, comme le persan ou le turc, ne sont pas toutes des modèles d’égalité entre hommes et femmes.
    R. H.  : C’est un sophisme extraordinaire. Le langage inclusif est une condition nécessaire mais pas suffisante pour qu’une société soit moins sexiste. Sur un plan strictement logique, la seule objection valable à l’écriture inclusive serait celle-ci : l’existence d’une société strictement égalitaire où la langue ne le serait pas. Mais ce contre-exemple n’existe pas !
    E. V.  : J’ai entendu aussi parler de la langue bantoue qui cumulerait un nombre incroyable de genres. Ces références m’amusent d’autant plus que ceux qui les utilisent ne connaissent rien à cette langue africaine. C’est un peu comme les médecins de Molière qui prétendaient en imposer avec leur latin.

    Comment est né votre projet de langage inclusif  ?
    R. H.  : Cela fait longtemps que des intellectuel(le)s, travaillé(e)s par la question féministe y réfléchissent. J’ai découvert leurs travaux au moment de mes recherches doctorales sur les discours politiques. Les choses se sont ensuite décantées. J’ai publié un manuel de réflexion sur cette question, avec Carline Baric, (téléchargeable gratuitement ici) qui s’appuie notamment sur les travaux du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCE).
    E. V.  : L’objet du langage inclusif est social et non grammatical. Nous souhaitons promouvoir une société plus égalitaire. Cela passe par la langue et par la déconstruction des stéréotypes « genrés » qu’elle véhicule. Cette démarche habite tous mes travaux…
    C’est l’Académie qui est interventionniste quand elle entend proscrire certains usages. Elle est censée enregistrer la manière dont une langue évolue...

    Cela passe par une forme d’interventionnisme difficile à supporter dès lors que cela concerne la manière de s’exprimer…
    R. H. : Cette objection de l’interventionnisme est amusante. Que fait-on d’autre chaque fois que l’on énonce un néologisme par exemple ? On intervient sur la langue ! Les jeunes, et les moins jeunes, qui parlent de « like », de « twittos » ou de « stiletto », trois termes entrés dans les dictionnaires récemment, n’ont pas attendu l’autorisation de l’Académie française. Critiquer l’écriture inclusive pour son interventionnisme, c’est lui refuser ce qu’on accepte et encourage volontiers de tout autre usage langagier.
    E. V.  : C’est l’Académie qui est interventionniste quand elle entend proscrire certains usages. Elle est censée enregistrer la manière dont une langue évolue... C’est pour cela que les dictionnaires s’enrichissent chaque année de mots nouveaux. Une langue n’est pas figée une fois pour toutes.

    Au final, ce qui choque les gens, n’est-ce pas simplement la graphie du point milieu ? Écrire les mots suivants, « chroniqueur·euse », « chercheur·e », « transporteur·euse », « président·e », ce n’est pas très esthétique.
    E. V.  : Je regrette qu’on restreigne le débat à cette simple question de point milieu. Nous préconisons simplement d’user des mots féminins chaque fois que c’est possible. Cela peut passer par la flexion (le fameux « mesdames et messieurs » lorsqu’on s’adresse à une population mixte, NDLR). Cela peut passer aussi par les termes épicènes : c’est-à-dire l’usage d’un mot neutre (exemples : « astronome » ou « membre »). Cela peut enfin passer par le point milieu ou d’autres signes graphiques. Nous ne sommes pas bloqués là-dessus. Personnellement, je suis pour « intellectuel·es » mais contre « acteur·trices ». Mais c’est un débat en cours, les protocoles vont s’affiner.
    R. H.  : L’écriture inclusive ne se limite pas au point milieu ! Ce point milieu résulte de la volonté d’abréger certaines formulations, exactement comme on écrit M. pour « Monsieur ». Quiconque a tenté de redonner de la place au féminin dans son écriture se rend compte de son utilité, surtout face à un e muet par exemple. Écrire « ami·e·s » peut paraître par exemple plus commode qu’« amis et amies ». Mais on peut appliquer pleinement l’écriture inclusive, sans ne jamais mobiliser le point milieu !
    Aucune entreprise ne peut mobiliser l’écriture inclusive (...) sans s’interroger sur les écarts de salaires entre femmes et hommes

    Vous dites que l’écriture inclusive fait progresser l’égalité. Quelles preuves en avez-vous ?
    R. H. : Sur le plan social, l’écriture inclusive produit deux effets principaux. D’abord, c’est un formidable levier de féminisation des effectifs. C’est la raison pour laquelle les écoles, les entreprises qui manquent de candidatures féminines observent cette démarche avec un intérêt prononcé. Ensuite, c’est un ancrage pratique sur les enjeux d’égalité. Aucune entreprise ne peut mobiliser l’écriture inclusive dans sa pratique institutionnelle sans s’interroger sur les écarts de salaires entre femmes et hommes, qui, rappelons-le, stagnent à 23 % en France, ou s’attaquer au « plafond de verre » qui bloque les carrières des femmes. J’en suis pour ma part convaincu : l’inconfort sémantique dans lequel on laisse les femmes produit et entretient de l’inconfort social.

    Vous expliquez que votre démarche est soutenue par 75 % de la population. En êtes-vous si sûr ?
    R. H.  : Quand on regarde les résultats de l’étude d’opinion, que constatons-nous ? Que 84 % des 1 000 personnes interrogées par l’institut Harris Interactive les 11 et 12 octobre derniers sont acquises à la féminisation des noms de métiers, de titres, de grades et de fonctions. Et que 81 % des personnes interrogées sont pour l’usage du féminin et du masculin plutôt que du masculin « générique » lorsqu’on s’adresse à la fois à des femmes et des hommes. Et 3 personnes sur 4 sont favorables aux deux dimensions simultanément, qui sont en fait les deux principes directeurs de l’écriture inclusive.
    E. V.  : Le général de Gaulle l’avait bien compris, lui qui veillait à commencer tous ses discours par la double flexion : « Françaises, Français ». Au grand dam de l’Académie !
    R. H.  : Tous les hommes politiques s’y sont mis depuis. Je m’intéresse de longue date aux discours de meetings. En 2002, Robert Hue était le seul homme à utiliser la double flexion (avec Arlette Laguiller et son célèbre « Travailleurs, Travailleuses », NDLR). En 2017, ils l’ont tous fait. C’est pleinement rentré dans les mœurs. Ce qui me fait dire que la bataille menée par nos détracteurs et nos détractrices est une bataille d’arrière-garde. Elles et ils ont déjà perdu, mais ne le savent pas encore. D’importants responsables institutionnels, comme Pierre Gattaz par exemple, utilisent aujourd’hui l’écriture inclusive ! Et les tweets vont l’imposer, puisque la place est restreinte !

     #écriture_inclusive #langage #langue #femmes #agence-de-publicité #publicitaire #lobbyistes #lobby #parole #communication #Raphaël-Haddad #Mots-Clés

    • Bah oui, on a bien compris que cette recension était dans un but anti écriture inclusive et anti féministe. C’est marrant c’est toujours quand il y a un tant soit peu de mini évolution qui va à peu près dans le bon sens (et franchement ce n’est vraiment pas énorme) que tout d’un coup ya des cris d’orfraie pour dire « ah non mais c’est ÇA qui est PLUS IMPORTANT ! » (remplacez ÇA par n’importe quoi d’autre, le racisme, la pauvreté, l’impérialisme, le « vrai féminisme », etc, etc).

      Bordel mais ça fait bien 50 ans que les luttes contre les dominations croisées existent (afro-fem, etc) et qu’on argumente qu’il n’y pas à « choisir » entre des luttes contre des dominations. Alors oui, le temps n’est pas infini, et une même personne unique ne peut pas lutter forcément sur tous les fronts à la fois ou pas autant pour chaque, mais par contre laissez à minima les personnes lutter contre les dominations qui les concernent.

      Quant à l’insinuation de merde avec « L’ORIGINE », non mais sérieux, tu crois que c’est quoi l’origine ? Tu crois que c’est une agence de com qui a inventé ces problématiques et qui a inventé l’écriture inclusive. Non c’est complètement taré. Ça fait des décennies que dans les milieux militants ya des propositions, le mec indiqué n’était même pas né, arrêtez vos conneries. Et par ailleurs, au delà de ce fait logique, dans tous les cas, actuellement la pub, c’est de l’incitation au viol permanent et l’utilisation de femmes objets partout etc. Personnellement je suis pour la suppression totale de toute publicité mais donc qu’une rare agence de com fasse son boulot en respectant les femmes, vu le nombre de personne qui voit de la pub tous les jours, et notamment les gosses, bah ça ne peut pas faire de mal dans tous les cas.

      Bref allez manger vos morts dans votre coin.

    • Personnellement, j’aimerais qu’il y ait autant d’agitation, d’indignations, de débats passionnés pour la pauvreté.

      N’empeiche que c’est toi ici qui t’agite contre la visibilité du féminin en français et qui n’est pas dans l’action ni l’indignation, ni le débat passionné pour la pauvreté. Si t’en a tellement à faire des pauvres, sans-emplois, familles (sic), etc... qu’est ce que tu fiche ici à participer à ce débat qui te détourne de tes prétendues vrai préoccupations ?

      #paternalisme #mansplanning #fraternité

    • @RastaPopoulos, je comprends pas.

      Pourquoi n’a pas tu écris ton commentaire en écriture inclusive ? Par ailleurs, qu’est qui peut te faire croire que je suis un homme ?

      Personnellement, je ne comprends pas pourquoi les partinsan(e)s de l’écriture inclusive n’aient pas diffusé cet article, il a pas mal de points valorisant.
      Elles(ils) auraient pu les mettre en valeur et parler en premier(e).
      Qui sait, une pudeur ?

      Il y a plusieurs versions d’écriture inclusive, depuis longtemps.
      Quelles sont celles (les versions) qui sont utilisées par celles et ceux qui ne sont pas militant(e)s, non pourvu(e)s d’un diplôme de conformisme universitaire ?
      Faudrait se poser des questions. Voir le dernier numéro de La Décroissance.

      Les publicitaires, pas mal de politiques, et tant d’autres, incitent au viol permanent, entièrement d’accord ! Ajoutons envers les enfants.
      Il est curieux que les défenseurs(e)s des femmes citent trés rarement les ignominies de sbires comme, (liste non exhaustive) liliane de bétancourt, elisabeth badinter, la reine d’angleterre et autres reines, margaret tadcher, martine aubry, anne hidalgo, myriam el khomri, muriel pénicaud, . . . .
      Les sous fifres sont aussi féminines, dés qu’il y a pouvoir et argent.
      La fonction de DRH en entreprise est trés féminisée.
      Le suicides en entreprises, il y en a pas pas mal, avec des DRH femmes, comme avec des DRH hommes. Egalité dans l’efficacité dans l’ignominie.

      Plus important !
      Il y a un an, presque jour pour jour, j’enregistrai sur mon magnétophone le témoignage de Fadila, d’auchan city tourcoing, qui avait perdu son bébé suite à la violence de ses conditions de son travail chez les mulliez.

      Elle a mangé son mort, elle !
      Conditions de travail des femmes mais aussi des hommes. Ce n’est hélas pas un cas unique.
      Ma gueule est sur les photos de la voix du nord, si ça intéresse quelqu’un.
      http://www.campuslille.com/index.php/l-agenda/evenement/1669-saints-innocents-en-france-le-massacre-continu-au-xxi-siecle-exemp

      A un de ces jours RastaPopoulos, je suis trés souvent content de te te lire, et de partager tes articles.
      Attention aux apparences, faut pas juger et écrire trop vite.
      La vie, la vraie, c’est pas un blog.

      Tous les jours, je passe devant la maison qui a servi à tourner « La vie est un long fleuve Tranquille », juste en face du golf utilisé pour la scène finale du film « le corps de mon ennemi »

      A propos « de débats passionnés pour la pauvreté. »
      https://www.youtube.com/watch?v=34QxDoQo6KI

    • * Video - Pour la masculinisation du langaG - Vendredi 15 décembre 2017, par RZ (Théâtre Croquemitaine) _
      http://www.theatrecroquemitaine.com/video-Pour-la-masculinisation-du-langaG.html

      Pourquoi systématiquement, lorsqu’il s’agit d’inclure les femmes dans le langage, les expertEs, académinicienNEs, intellectuelLEs de tous poils, s’attellent immédiatement à torturer les mots pour les féminiser ?

      Plaidoyer pour une masculinisation des mots.

      https://vimeo.com/247488845

      Nous, femmes, revendiquons la forme universelle.
      Qu’ils, hommes, s’arrangent avec des mots bricolés laids.

  • Ne voulant pas plus longtemps polluer la discussion de @nicod_
    https://seenthis.net/messages/652489
    et afin de lever un coin de voile sur les mystères du monde de #unicode, (welcome on the amazing world of unicorns), je partage ceci (un vieux de la vieille mais plus au fait de la chose informatique que moi).

    Codage des caracteres
    http://dg77.net/tekno/xhtml/codage.htm

    Et puisque c’est moi qui cause en premier, je tenais à faire remarquer que la lettre G avec le petit chapeau rond à l’envers correspond à une diacritique de l’alphabet turc et se prononce comme un « w » anglais mais sans trop fermer les lèvres, comme ils disent chez Wiki.
    Donc la dénomination « June », la crypto-monnaie dont il était question dans la discussion mentionnée ne correspond pas à cette orthographe turque puisqu’il faudrait alors prononcer « woune » (sans trop fermer les lèvres).
    Donc, continuant mes pérégrinations wikipédesques, j’en arrive à me dire que le caractère approprié pour « June » (djioune) serait plutôt celui-là : Ǧ (un G mais avec un petit chapeau pointu à l’envers qui semblerait se prononcer « dj » dans la transcription en caractères latins de la langue berbère, enfin si on en croit ce qu’il y a sur cette page. https://fr.wikipedia.org/wiki/%C7%A6

    Donc si @simplicissimus veut en recauser, il va lui falloir attendre un peu car mon agenda est « booké » jusqu’ au mois de « juin ». See you later ...
    (N’empêche, qu’est-ce qu’on n’est pas obligé de faire pour mourir moins bête ...)

    • C’est vrai qu’on commençait à prendre de la place là-bas. Et les diacritiques déchaînent toujours un véritable enthousiasme chez moi !

      D’ailleurs, j’avais un peu zappé la subtile différence entre la brève (˘) (dont je regrette, par souci de cohérence, qu’elle ne s’appelle pas aussi le micron pour faire fonctionner le doublet avec la longue (ˉ) dont le vrai nom est macron (cf. https://seenthis.net/messages/576912#message576937 ),et le caron (ˇ). Sachant que le g peut supporter l’un ou l’autre (brève, caron, macron et quelques autres comme le montre ce passionnant tableau de synthèse de tous les caractères latins modifiés par des diacritiques.
      https://fr.wikipedia.org/wiki/Diacritiques_de_l'alphabet_latin

      Pour en revenir à notre ğ,
      • je n’ai pas trouvé de code à taper après le Alt sous Windows
      • à défaut, le copier-coller marche bien (je suppose d’ailleurs que c’est très majoritairement ainsi qu’à été introduit ici ce caractère)
      • sinon, s’installer un clavier supplémentaire ne mange pas beaucoup de pain, que ce soit sous MacOS ou sous Windows
      • et sinon, on peut toujours utiliser le(s) clavier(s) virtuel(s) de gg:translate en ayant précisé au préalable la langue à utiliser.

      Pour finir, d’ailleurs, cette dernière solution permet aussi d’en connaître la prononciation puisqu’il est alors loisible de demander à gg de lire le texte saisi. Il est alors facile de vérifier ce que dit WP :

      [En turc,] ğ s’amuït en position intervocalique

      https://translate.google.fr/#tr/fr/erdoğan

      Rappel (toujours WP)

      Il est notable qu’en turc, le ğ suit toujours une voyelle et ne saurait être la première lettre d’un mot.

    • Et pour notre culture générale, il y a aussi le ĝ de l’espéranto qui correspond au son « dj ». Bon finalement quand on veut trouver de la place sur un agenda, pas besoin d’attendre jusqu’en « june » et pas besoin d’un avion de ligne à 350 000 boules pour se rendre ici ;-)

    • Voilà donc ce qui explique la prononciation journalistique du patronyme « Erdoğan ». je me disais (jusqu’à présent) que, comme ils ou elles ne savaient pas prononcer cette graphie, les journalistes avaient pris le parti de l’ignorer purement et simplement (Erdo’an). En fait c’était la fameuse consonne spirante vélaire voisée [ɰ] si subtile pour nos oreilles francophones...
      Je viens d’aller faire un tour sur la discussion à propos de Robert Hue :-)))

  • Robert Hue : « Pourquoi je soutiens Emmanuel Macron »
    http://www.lemonde.fr/idees/article/2017/03/10/robert-hue-pourquoi-je-soutiens-emmanuel-macron_5092418_3232.html

    Homme de gauche et fidèle aux valeurs que je n’ai cessé de porter, en toute liberté et les yeux grands ouverts, j’ai décidé de prendre mes responsabilités et d’apporter mon soutien à la candidature d’Emmanuel Macron

    #la_vieillesse_est_un_naufrage

  • La complicité et les responsabilités du #PCF
    http://mensuel.lutte-ouvriere.org//2016/01/30/face-la-decheance-de-la-gauche-defendre-les-idees-communiste

    Le PS trouva, dès 1936 et le Front populaire, le soutien du PCF pour désarmer politiquement la classe ouvrière. Et, en dépit des divers changements de politique du PCF sous l’égide de Moscou ou en fonction des intérêts de son appareil, et malgré la période de la guerre froide où le PCF fut largement ostracisé, les deux partis nés au sein du mouvement ouvrier ne cessèrent de tromper les classes populaires et sauvèrent les intérêts fondamentaux de la bourgeoisie à chaque fois qu’ils étaient menacés.

    Si le PCF ne réussit pas à récupérer les voix perdues par le Parti socialiste au pouvoir, malgré son actuelle opposition à Hollande, c’est qu’il a perdu toute sa crédibilité avec l’Union de la gauche au pouvoir. Pour les mêmes raisons, malgré les gesticulations d’un Mélenchon, le Front de gauche ne sera pas en France ce que Syriza est en Grèce ou Podemos en Espagne.

    Si le PS put revenir au pouvoir en 1981, après vingt-trois ans d’opposition et après avoir quasiment disparu  ; si Mitterrand, cet homme de droite qui avait commencé sa carrière politique sous le régime de Vichy et qui la poursuivit sous la IVè République en étant onze fois ministre, put gagner l’élection présidentielle en apparaissant comme un homme de gauche, ils le doivent au PCF. Quant Mitterrand prit le contrôle de la vieille SFIO rebaptisée PS lors du congrès d’Épinay en 1971, la SFIO recueillait 5 % des suffrages quand le PCF en recueillait plus de 21 %. Mitterrand put faire oublier son passé de ministre pro-Algérie française et prétendre incarner la rupture avec le capitalisme seulement parce que le PCF, dans l’espoir d’être associé au gouvernement, en fit le candidat unique de la gauche en 1974. Grâce au dévouement de dizaines de milliers de militants communistes, qui vendirent le Programme commun, au sens propre comme au sens figuré, aux travailleurs qui leur faisaient confiance, dans toutes les cités ouvrières et les entreprises du pays, Mitterrand devint le champion de la gauche, avant d’emporter les élections en 1981.

    Le PCF paya au prix fort le prix de cette politique d’alignement répété derrière le PS. Ses électeurs le quittèrent au profit du PS, au point que Robert Hue, candidat du PCF à la présidentielle en 2002, dépassa à peine les 3 %. Il perdit, progressivement mais inexorablement, une partie de ses militants et sympathisants, dans les entreprises et les quartiers populaires, découragés, déboussolés par les attaques et les trahisons des partis de gauche au gouvernement. La place laissée vide par le découragement d’une multitude de militants politiques, syndicaux, associatifs, liés par un bout ou par un autre au PCF et à ses organisations satellites, libéra le terrain pour l’individualisme, pour les idées et les organisations religieuses ou communautaristes et plus généralement pour les idées réactionnaires, et celle du Front national en particulier.

    Ces décennies d’alternances de la gauche au pouvoir ont achevé un processus commencé bien avant, au moins dès 1936  : faire disparaître la conscience de classe des travailleurs en remplaçant les idées de lutte des classes par les notions volontairement vagues et trompeuses de gauche et de droite  ; en laissant croire que les élections étaient le moyen de changer la société et que la gauche pourrait gouverner dans l’intérêt des classes populaires sans renverser l’État bourgeois. Elles ont achevé de faire perdre confiance aux travailleurs dans leurs propres forces et dans leurs luttes. Ces reculs dans la conscience de notre classe permettent à un parti profondément antiouvrier comme le Front national de récupérer une partie des voix ouvrières.

  • #Robert_Hue: changement, modernité, démocratie
    https://www.mediapart.fr/journal/france/180117/robert-hue-changement-modernite-democratie

    Jadis, le #parti_communiste français jouait un rôle crucial dans la formation des cadres politiques issus de la classe ouvrière. Si le #PCF a tant changé entre l’époque de Jacques Duclos ou #Georges_Marchais et celle de Robert Hue, n’est-ce pas tout simplement que le parti ouvrier a sociologiquement dégénéré ? © Mediapart

    #France #Pierre_Laurent #politique

  • L’autodestruction du Parti socialiste, par Rémi Lefebvre
    https://mensuel.framapad.org/p/diploPS
    (je publie ici cette critique interne au PS in extenso, si cela pose pb, je modifierais)

    Subjugué par les dogmes du « marché libre » et rivé aux consignes de Bruxelles, le président François Hollande s’obstine à imposer le démantèlement du code du #travail, faute de lutter efficacement contre le #chômage. Comme une majorité de syndicats, de Français et de parlementaires rechignent, il tente un passage en force, au mépris mêjme de toute logique électorale.

    Pour le Parti socialiste (#PS) français, l’heure du bilan approche. Rarement un parti aura été aussi rapidement abîmé par son passage aux affaires. En 2012, il tenait l’ensemble des pouvoirs entre ses mains. Quatre ans plus tard, il a perdu un nombre considérable d’élus et, à moins d’un an de l’élection présidentielle, la cause paraît entendue : M. François Hollande, qui se prépare à l’évidence à solliciter le renouvellement de son mandat, n’est même pas assuré de figurer au second tour. L’impopularité du président comme celle de son premier ministre battent des records historiques.

    Les défaites à toutes les élections intermédiaires n’ont en rien arrêté la fuite en avant libérale dont la « #loi_travail » marque l’apogée. Malgré la timide embellie de l’emploi, qui servira sans doute de justification à la candidature de M. Hollande, la politique de l’offre (1) engagée dès l’automne 2012 ne produit toujours pas de résultats. Pour valoriser l’action du gouvernement, que le peuple de gauche désavoue massivement, le PS reprend mot pour mot les éléments de langage de la droite en 2012 : la nécessité de la « #réforme » s’est imposée pour « préserver le modèle social français ». « La politique de l’offre n’est ni de droite ni de gauche : elle est nécessaire », a pu déclarer M. Stéphane Le Foll, porte-parole du gouvernement (2). Désormais, l’aversion suscitée dépasse de très loin les franges de la gauche radicale et la déception que provoque immanquablement l’exercice « réformiste » du pouvoir. Comment comprendre ce qui s’apparente à une autodestruction ?

    Se dirige-t-on vers la fin du PS ? Quelle rationalité électorale poursuivent les élites socialistes, par ailleurs si « raisonnables » ?
    Si leur stratégie apparaît incertaine, elle dérive d’un postulat qui fonde la cohérence et la constance du gouvernement : la politique menée, aussi suicidaire qu’elle puisse paraître, n’est pas négociable. Elle découle dans une large mesure de contraintes européennes que M. Hollande, contrairement à ce qu’il avait annoncé durant la campagne de 2012, n’a pas renégociées. Les choix idéologiques sont si marqués qu’ils prennent le pas sur les intérêts électoraux du parti. Dès lors qu’aucune inflexion n’est envisageable et que le PS n’a plus la base électorale de sa politique, il est condamné à fabriquer un improbable électorat de substitution, au centre gauche, et compte s’appuyer sur la prochaine élection présidentielle pour le faire émerger.

    Jusqu’à présent, le PS appartenait à ce type de parti que le politiste italien Angelo Panebianco a appelé « électoral-professionnel » (3), c’est-à-dire voué à un seul objectif : la maximisation des performances électorales. Entre 2002 et 2012, il est devenu un parti de professionnels de la politique locale — élus et collaborateurs d’élus (4). En 2012, quand il accède au pouvoir national, il dirige la quasi-totalité des régions, 60 % des départements, les deux tiers des villes et même, pour la première fois de son histoire, le Sénat. Quatre ans plus tard, la machine électorale est dévastée. Au cours des vingt-deux législatives partielles qui ont eu lieu dans cet intervalle, le PS a été éliminé dès le premier tour dans la moitié des circonscriptions où il présentait un candidat (5).

    Après avoir fait prospérer le socialisme municipal dans des proportions jamais atteintes, M. Hollande, lui-même ancien président du conseil général de la Corrèze, en est devenu le fossoyeur. En 2014, son parti a perdu 162 villes de plus de 9 000 habitants — un record pour des élections municipales. Il ne dirige plus que cinq régions et vingt-six départements. Le « parti des élus » a été sacrifié sur l’autel d’une politique de #compétitivité aussi inefficace qu’impopulaire. Repliés sur leurs fiefs locaux depuis 2002, les notables socialistes se sont peu à peu désintéressés des débats idéologiques nationaux. Tétanisés par les défaites, ils semblent attendre que le cycle du pouvoir se referme pour retrouver une opposition qui fut jadis confortable.
    Ces échecs électoraux massifs et répétés ont eu des effets considérables sur l’organisation partisane. L’armature du PS se désagrège dans ses profondeurs territoriales. Les assistants, collaborateurs d’élus et permanents ont été victimes de ce qui s’apparente à des plans de licenciement successifs, alors qu’ils exercent souvent des responsabilités essentielles dans l’appareil, à la direction des sections ou des fédérations. Certaines fédérations sont en cessation de paiement. L’historique fédération du Nord a perdu depuis 2012 de nombreuses villes (Roubaix, Tourcoing, Dunkerque, Maubeuge, la communauté urbaine de Lille…), le département, la région et la moitié de ses militants. Pour résorber une dette de 1 million d’euros, la direction fédérale a dû se résoudre à vendre une partie de son siège.

    La « loi travail » piétine le congrès

    Enfin, le parti dans son ensemble connaît une hémorragie de militants sans précédent. Les renouvellements de cartes au 1er décembre 2014 ne dépassaient pas 60 000 adhérents, soit largement 50 000 de moins qu’en 2012 . Le phénomène va bien au-delà des habituels flux et reflux liés à l’exercice du pouvoir.

    À quoi bon demeurer dans un parti exsangue et dévitalisé, qui n’a plus son mot à dire ? Le premier secrétaire, M. Jean-Christophe Cambadélis, donne un peu mieux le change que son prédécesseur, M. Harlem Désir, d’une remarquable passivité ; mais la démocratie interne est inexistante. Le président de la République estime n’avoir pas de comptes à rendre à un parti dont il n’a pas tiré son investiture, puisqu’il doit sa candidature à une primaire ouverte. Les résultats du congrès de Poitiers, en juin 2015, ont été complètement ignorés, alors qu’ils étaient censés définir la ligne politique du parti. Dans la motion majoritaire, dont M. Cambadélis était le premier signataire, une position par anticipation sur la loi El Khomri avait été prise. On y lit : « Il faut rétablir la #hiérarchie_des_normes : la loi est plus forte que l’accord collectif, et lui-même s’impose au contrat de travail. » Soit l’exact inverse de la proposition que le gouvernement s’acharne à défendre. S’appuyant sur le socle de légitimité du congrès, un rapport demandant une réorientation de la politique gouvernementale a été adopté par le bureau national à une très large majorité en juillet 2015. Il a été balayé d’un revers de main par le premier ministre Manuel Valls, qui n’a cessé, depuis, de radicaliser sa ligne sociale-libérale. La « loi travail », qui ne faisait pas partie des engagements de 2012, n’a jamais été discutée au PS ; elle n’a fait l’objet d’aucun vote du bureau politique. La direction du parti a même renoncé à produire un programme en vue de l’élection présidentielle. Mieux vaut orienter le futur candidat à l’aide de « cahiers » que formuler un programme qu’il n’appliquera pas : c’est, en substance, ce que le premier secrétaire a expliqué lors du conseil national du 6 février 2016.

    Comme le parti n’assure plus son rôle de régulation des différends et de production d’un point de vue commun, les débats se sont déplacés dans l’arène parlementaire, où les députés frondeurs organisent une résistance très médiatisée, mais jusqu’ici marginale. Un cap a été franchi avec leur tentative de déposer une motion de censure contre le gouvernement lors du débat sur la « loi travail », en mai 2016. Si beaucoup de députés socialistes désapprouvent sans doute la politique du gouvernement, la plupart d’entre eux, par résignation ou manque de courage, ne souhaitent pas affaiblir le président de la République, pensant que leur sort électoral dépend du sien. L’approche de la débâcle finale n’y change rien : fatalisme et #présidentialisme font leur œuvre.

    Reconnaissant que le PS est au bout d’un cycle, le premier secrétaire prône désormais son « dépassement » autour de la Belle Alliance populaire, fédération de la « gauche de transformation » regroupant associatifs, syndicalistes, intellectuels et partenaires du PS. Il s’agit de s’adresser au peuple de gauche « au-delà des appareils radicalisés contre le PS ». Lors du lancement de cette initiative, le 13 avril, M. Cambadélis s’affichait aux côtés de MM. Jean-Vincent Placé et Jean-Luc Bennahmias (6), ainsi que de responsables du Parti radical. Même M. Robert Hue, habituelle caution communiste du PS, a refusé de participer à ce replâtrage.

    La destruction du parti apparaît comme une stratégie délibérée de M. Valls, qui, avec un cynisme à peine contenu, se projette au-delà de la débâcle à venir. Le premier ministre s’emploie à créer les conditions d’une candidature de M. Hollande, vouée à l’échec, et à entériner le schisme entre « deux gauches irréconciliables (7) ». Fortement minoritaire lors de la primaire de 2011 (8), il cherche à liquider le « vieux parti », comme l’un de ses modèles, M. Anthony Blair, l’avait fait avec le Labour au Royaume-Uni, pour réinitialiser le jeu politique au centre. Selon lui, plus le parti sera dévasté, plus son œuvre aura de chances de réussir. Il est désormais débordé sur sa droite par le ministre de l’économie Emmanuel Macron, qui adopte la même stratégie hors du PS et cherche la surenchère dans la « transgression » des marqueurs politiques de gauche.

    La stratégie de M. Hollande apparaît plus obscure et incertaine. Il semble miser sur les dernières chances de réélection que lui laissent la progression du Front national (FN) et la désunion de la droite, qui s’est lancée dans l’aventure d’une primaire ouverte peu conforme à sa culture politique. L’une des lois de la Ve République est peut-être que le président doit tout sacrifier à l’essentiel, c’est-à-dire sa réélection, quel qu’en soit le prix pour son parti. M. Hollande ne peut plus jouer désormais que sur les ressources de sa fonction.

    Il cherche d’abord à sécuriser sa candidature. Les partisans d’une primaire ont voulu l’entraîner dans cette procédure pour sortir de l’impasse à gauche (9). Le PS a dans un premier temps adopté une position attentiste, avant d’en accepter le principe, mais en excluant tout préalable afin de mieux en compromettre le déclenchement. Après quelques hésitations, communistes et écologistes ont finalement refusé de s’engager dans une démarche qui pourrait les contraindre à soutenir M. Hollande s’il en sortait victorieux. Au terme de ce jeu de poker menteur, les socialistes peuvent pérorer : « Pour le moment, le seul parti qui se bat pour une primaire, c’est le Parti socialiste », déclare ainsi M. Christophe Borgel, secrétaire national chargé des élections (10). M. Cambadélis a envisagé un temps de convoquer un congrès extraordinaire pour modifier les statuts et dispenser M. Hollande de participer à une telle procédure, avant de changer d’avis et de convaincre le président en exercice d’accepter une primaire (conseil national du 18 juin). Comment interpréter ce revirement ? Distancé par la droite et l’extrême droite dans les sondages, rattrapé voire dépassé à gauche par M. Jean-Luc Mélenchon, M. Hollande ne peut espérer retrouver une certaine légitimité qu’en obtenant sa désignation par cette procédure. Il prend de court ses opposants « frondeurs », qui peineront peut-être à désigner un candidat commun. Toujours tacticien plutôt que stratège, le chef de l’État espère sans doute aussi que les électeurs de gauche se détournent de la primaire, limitée aux partis soutenant le gouvernement, ce qui permettrait une surreprésentation des plus légitimistes pouvant lui être encore favorables. D’autant plus que le PS, faute de temps et de moyens militants, sera sans doute dans l’incapacité d’ouvrir autant de bureaux de vote qu’en 2011.

    Les gardiens de la République

    Monsieur Hollande cherche à empêcher la dispersion des candidatures à gauche au premier tour. Il s’est employé à diviser les écologistes, avec un succès certain. La nomination au gouvernement de trois ministres écologistes en janvier 2016 a rempli son office. L’explosion du groupe parlementaire Europe Écologie - Les Verts (EELV) à l’Assemblée nationale en mai a mis encore un peu plus à mal l’hypothèse d’une candidature de Mme Cécile Duflot.
    Enfin, le président peut compter sur la #droitisation du jeu politique, à laquelle il a lui-même largement contribué, mais qui peut le déplacer sur la gauche dans les mois qui viennent. L’action du gouvernement a déporté le centre de gravité du pensable et du dicible vers la droite, comme en témoigne la réécriture de la « loi travail » au Sénat.

    Le président escompte que la surenchère libérale à laquelle donne lieu la primaire des Républicains, pleinement décomplexés (suppression de l’impôt sur la fortune et des trente-cinq heures, réduction massive du nombre de fonctionnaires…), réinstalle le clivage gauche-droite. Une victoire de M. Nicolas Sarkozy à la primaire serait très favorable à M. Hollande. Le PS entonne déjà le refrain des élections législatives de 1986 : « Au secours, la droite revient ! » « Les Français vont enfin comparer », s’écrie M. Le Foll. Le discours convenu sur le « tripartisme », avec la qualification annoncée de la présidente du FN, Mme Marine Le Pen, au second tour de la présidentielle, permet déjà aux dirigeants socialistes de se positionner comme les gardiens de la République. Interrogé par Les Échos (13 juin 2016) sur la stratégie de rassemblement de la gauche d’ici à l’élection, M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d’État aux relations avec le Parlement (11), croit en la capacité de rassemblement au centre gauche de M. Hollande : « Avec la tripolarisation, la présidentielle et les législatives de 2017 n’auront rien à voir avec les élections précédentes. Selon toute vraisemblance, le candidat du camp républicain, de gauche ou de droite, aura besoin d’aller chercher les électeurs de l’autre bord pour l’emporter au second tour face à Marine Le Pen. Pour moi, celui qui l’emportera au premier tour sera celui qui proposera la bonne formule de rassemblement pour le second. Ma conviction, c’est que la gravité de la situation ne permettra pas de jouer au jeu des postures traditionnelles. Aujourd’hui, c’est l’emphase, l’hystérie, le déni de la réalité. Mais tout cela va se dissoudre devant la réalité. »

    Si irréaliste que cela puisse paraître, le PS n’a donc pas encore complètement renoncé à l’idée d’une victoire en 2017. M. Mélenchon fait quant à lui le même calcul qu’en 2012 : passer devant le candidat du PS au premier tour pour lui retirer sa rente de position dominante et le « pasokiser » — c’est-à-dire le marginaliser, comme le Parti socialiste grec, en lui retirant son monopole de parti à vocation majoritaire à gauche. Mais, dans cette hypothèse, désormais plus crédible qu’il y a quatre ans, une victoire relative suffira-t-elle à passer le cap du premier tour ?

    C’est à une recomposition de grande ampleur que doit s’atteler la gauche, au-delà de ses corporatismes d’appareil mortifères. Les socialistes les plus progressistes pourraient y contribuer ; à moins qu’ils soient aspirés dans le jeu politicien et le cycle des défaites « refondatrices » au PS. Déjà, Mme Martine Aubry et les frondeurs enjambent la défaite à venir et préparent le futur congrès. Le PS est peut-être à l’agonie ; mais il a démontré au cours de sa longue histoire (le cas de la défaite cuisante de 1993 effacée dès 1997 est exemplaire) une capacité de résilience qui fonde sa longévité historique.

    (1) Politique libérale consistant à tenter de relancer l’activité économique en multipliant les avantages offerts aux entreprises.
    (2) Les Échos, Paris, 17 janvier 2014.
    (3) Angelo Panebianco, Political Parties : Organization and Power, Cambridge University Press, 1988.
    (4) Lire Rémi Lefebvre, « Faire de la politique ou vivre de la politique ? », Le Monde diplomatique, octobre 2009.
    (5) Le Monde, 13 juin 2016.
    (6) M. Placé est secrétaire d’État à la réforme de l’État et à la simplification, ancien président du groupe Europe Écologie - Les Verts au Sénat ; M. Bennahmias est ancien député européen Vert, passé par le Mouvement démocrate (MoDem) de M. François Bayrou.
    (7) Discours à Corbeil-Essonnes, 15 février 2016.
    (8) Il n’avait recueilli que 5,63 % des suffrages des sympathisants.
    (9) Dans un appel « Pour une primaire à gauche » publié par Libération, Paris, 10 janvier 2016.
    (10) L’Opinion, Paris, 23 mai 2016.
    (11) Cet ancien proche de M. Dominique Strauss-Kahn, qui a constitué un « pôle des réformateurs », s’impose au fil des mois comme le théoricien gouvernemental du social-libéralisme.

    Note : la plupart des hiérarques cités, Mélanchon compris, furent lambertistes.

  • Va-t-il falloir à nouveau appeler à voter Robert Hue ???

    http://fr.news.yahoo.com/hue-mup-veut-contr%C3%B4ler-laide-publique-entreprises-110418046.html

    « On cherche de l’argent partout et on ne contrôle pas. Sur les 110 milliards d’aides aux entreprises de l’actuelle loi de finances, ma proposition d’évaluation et de contrôle pourrait dégager un minimum de 10 à 12 milliards d’euros », a assuré le sénateur du Val-d’Oise.
    (...)
    Il préconise également « une obligation de résultat » pour les entreprises. « Sur dix ans ce sont 600 à 800 milliards d’euros attribués aux entreprises, regardez en face l’efficacité en terme d’emploi, d’investissement ! », s’est-il exclamé.

    • Il est là pour faire comprendre que la Gauche, c’est lui. Après le faux semblant « Bourget », il y a le faux semblant « Hue ». Et il n’y a que ceux qui n’ont aucune mémoire (pour ne pas se souvenir de toutes les horreurs que Hue a voté) qui vont croire à ses paroles ?

      http://www.lemonde.fr/politique/article/2013/06/29/pour-robert-hue-melenchon-est-un-des-problemes-du-front-de-gauche_3438859_82

      Jean-Luc Mélenchon « est un des problèmes du Front de gauche », a estimé vendredi 28 juin dans une interview au Journal du dimanche le sénateur Robert Hue, fondateur du Mouvement unitaire progressiste (MUP).

      « Je ne veux pas jouer avec lui la partition du solo funèbre de François Hollande », a déclaré le sénateur du Val-d’Oise à propos du coprésident du Parti de gauche.
      « Il y a des gens au sein [du Front de gauche] qui ne se retrouvent pas dans cette politique de fuite en avant véhémente » de Jean-Luc Mélenchon.

    • j’avais pas suivi son offensive contre Mélenchon.. je m’amusais juste d’entendre à nouveau parler de lui, sur un sujet avec lequel je suis d’accord... C’était plus pour illustrer l’usure de la Vè république

      Pour le reste les querelles de personnalités me lassent... si les partis voulaient bien se préoccuper de rester sur le registre des valeurs, des idées et des projets, sans qu’on s’attarde sur les individus, je m’intéresserais un peu plus à leur destinée..
      Mélenchon qui parle de VIè république, je n’y crois pas une seule seconde... c’est contraire à la religion de son ego..

    • Rhalalalala... Mélenchon ne parle que très peu de son ego, et le Front de Gauche ne cesse de devoir faire des contre feu à ces attaques ad-hominem. D’où ma référence au discours du Bourget, qui n’avait pour seul intérêt que de couper l’herbe sous le pied de tous les gauchistes critiquant le PS pour son absence d’idées/valeurs/projets vraiment de gauche.

      Faut-il te conseiller d’aller lire le blog de Mélenchon ? On ne publie que peu ses propos, par ici, pourtant, je sais que nous sommes un certain nombre à le lire très régulièrement. Et ce qui ressort, de mon point de vue, de ma lecture régulière de sa prose depuis 2005, c’est que ce gars, s’il n’est qu’un être humain parmi tous les autres, il ne joue pas la comédie, à la façon dont Hue ou Allègre nous la jouent depuis des années (avec la complicité active des médias mainstream, cf. le Monde qui relaie sans vergogne).

      Pour ma part, je le crois capable de convoquer une Constituante, pour de vrai.

    • Tant mieux si je me trompe... j’ai du mal avec sa communication clivante. Je suis souvent d’accord avec sa façon de voir les choses, mais justement, lui même accorde trop d’important aux personnes, à juger et casser à tout va, ça fait passer ses idées au second plan. C’est un cogneur, il fait le spectacle, les médias l’apprécient pour ça, et finalement son discours, qui l’entend ? je trouve ça franchement dommage..