person:thomas deltombe

  • Afrique : Que reste-il des luttes de libération ?
    http://www.campuslille.com/index.php/entry/afrique-que-reste-il-des-luttes-de-liberation-said-bouamama-thomas-delt

    Ce Samedi 8 avril 2017, le Front Uni des Immigrations et des Quartiers Populaires (FUIQP), le Collectif Afrique, Survie et le Centre Régional de Documentation et d’Information pour le Développement et la Solidarité Internationale (CRDTM) organisaient une rencontre débat : Afrique : Que reste-t-il des luttes de libération ? C’était à Villeneuve d’Ascq. Aux micros : Saïd Bouamama, Thomas Deltombe, Armand Nwatsock. Durée : 1h59. Source : Radio Campus Lille

    http://www-radio-campus.univ-lille1.fr/ArchivesN/LibrePensee/CHDM170408.mp3

  • La guerre du Cameroun - L’invention de la Françafrique
    http://www.canalsud.net/?Thomas-Deltombe-La-guerre-du

    Thomas Deltombe était à Terra Nova le 14 février 2017 pour présenter son livre écrit avec Jacob Tatsitsa et Manuel Domergue. La légende veut que la France, « patrie des droits de l’homme », ait généreusement amené ses anciennes colonies d’Afrique noire à l’indépendance en 1960. Une décolonisation pacifique en somme qui se serait faite dans la compréhension mutuelle et l’intérêt partagé de la France et de l’Afrique. Ce livre raconte une tout autre histoire : celle d’une guerre brutale, violente, meurtrière, qui a permis à Paris d’inventer un nouveau système de domination : la Françafrique. Cette guerre secrète a pour théâtre le Cameroun des années 1950 et 1960. Durée : 1h43. Source : Canal (...)

    http://www.canalsud.net/IMG/mp3/radiolivres03-thomasdeltombe.mp3

  • Ephéméride : Sainte dernière ligne droite Radio Campus Lille - C’est l’heure de l’mettre - 12 Avril 2017

    Aujourd’hui, mercredi 12 avril 2017, c’est la Sainte Dernière ligne droite. Sainte Dernière ligne droite est la sainte patronne des ultimes mètres à parcourir avant de savoir qui sera le nouveau jockey du cheval France. Et entre nous, ça changera du capitaine de pédalo actuel...

    Ils sont donc 11 à s’être donnés rendez-vous sur l’hippodrome de Vincennes où se jouera l’événement quinquennal historique du grand prix de l’Elysée. Sur la ligne de départ et grands favoris de cette course, on retrouve Emmanuel Macron, casaque bleue et étoiles dorées sur sa chaise à porteurs et dont le propriétaire, Rotschild, a la particularité de posséder l’écurie la mieux fournie lors de ce genre d’événement. Autres favoris de ce grand prix, on retrouve, Marine le Pen, casaque brune et bras en l’air ainsi que François Fillon acconpagné de son assistante, de ses enfants et de quelques juges.

    Tout près de la corde, on retrouve Jean-Luc Mélenchon et ses amis du PCF-Front de Gauche qui d’ailleurs lui ont passé la corde autour du cou pour mieux le soutenir. Couloir 6, casaque ennemi de la finance, se trouve l’outsider Benoît Hamon, 49-3 au garrot, qui, malgré sa victoire en 2016 au grand prix des frondeurs où il avait remporté le trophée de la loi travail, courra ce grand prix de l’Elysée à pieds, puisque son cheval, tout comme son entraineur, François Hollande, ont rejoint l’écurie Macron. Ce qui devrait lui valoir d’être non-partant.

    Les 6 autres coureurs se partagent enfin les derniers couloirs appelé dans le jargon des turfistes, les couloirs à rats, où s’entassent Nathalie Arthaud et Philippe Poutou qui ont décidé d’un commun accord . . . . . .


    Le fil et la suite de l’émission
    http://www.campuslille.com/index.php/entry/ligne-droite
    – Le générique du quinquennat, il changera dans une quinzaine.
    2mn55s : Sainte dernière ligne droite
    5mn45s : Pierre Rodriguez - L’actionnaire d’abord
    9mn30s : La dernière ligne droite des élections présidentielles. La classe moyenne.
    39mn40s Que reste-t-il des luttes de libération ? Saïd Bouamama et Thomas Deltombe
    83mn30 : Rubrique cassette - Novembre 1999 Manif des sans papiers, notre premier coup de matraque

    #Audio #Radio #Radios_Libres #Radio_Campus_Lille #Ephéméride #Présidentielles #Elections #Sans_Papiers #Analyse

  • LA GRANDE INTERVIEW 27 12 2016 THOMAS DELTOMBE - YouTube
    https://www.youtube.com/watch?v=b_U8LuZRMnQ


    Longue interview (1h30) de Thomas Deltombe par Jean Bruno Tagne, pour Canal 2 international, chaîne de télévision privée camerounaise, suite à la parution de La guerre du Cameroun, l’invention de la Françafrique.

    Pour rappel pour les nordistes, Thomas Deltombe sera le samedi 1er avril à 15h à la Maison de quartier Les Moulins à Lille avec Georges Agbodjan pour parler du Cameroun et du Togo : Guerres de libération et invention de la Françafrique.

    #Afrique #françafrique #colonisation #guerre_d'independance #cameroun #togo

  • Pour celles et ceux intéressé-e-s par l’histoire coloniale et donc notre #histoire et qui sont dans la région lilloise :
    Conférence débat le 1er avril à 15h avec Thomas Deltombe et Georges Agbodjan
    Le sujet : Guerres de libération et relations de dépendance : l’invention de la #Françafrique. Regards croisés sur le #Cameroun et le #Togo
    Lieu : Maison de quartier de Moulins Métro Porte de Douai.
    Entrée gratuite

  • [ Cameroun ] Quand l’esprit du Colon hante l’ambassade - MONWAIH
    https://monwaih.com/oublies/cameroun-les-couloirs-ambassade-france

    Signalé par Thomas Deltombe sur Twitter (cette situation n’est pas propre au consulat de France du Camroun d’ailleurs, c’est à peu près partout en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale où la diplomatie française est présente)

    Le calvaire des usagers de l’ambassade de France près le Cameroun

    Les scènes précédentes sont monnaie courante à l’Ambassade de France au Cameroun. On assiste à une infantilisation des usagers du service public. Pour être traité avec bienveillance par les agents administratifs, il faut se comporter comme un esclave face à son maître, en d’autres termes il faut plier l’échine même face à un manque de respect. Diverses hypothèses tendant à expliquer ces attitudes sont souvent avancées par les victimes. Il y a tout d’abord la différence de couleur de peau entre celui qui demande le visa (Noir) et l’agent chargé de traiter la demande (Métisse). Ceci rappelle aisément le complexe de supériorité décrit par Frantz Fanon dans son œuvre phare « Peau noire, masques blancs ».

    #colonialisme #cameroun #violence #discrimination

  • Cameroun : comment sortir de l’impasse ? – Everyday Life in the Time of Paul Biya – La vie quotidienne au temps de Paul Biya

    http://archivesoftyranny.org/cameroun-comment-sortir-de-limpasse

    Achille Mbembe sur le #Cameroun, c’est décapant. Signalé comme il se doit, par l’ami Thomas Deltombe.

    Professeur d’histoire et de science politique à l’université de Witwatersrand, Johannesburg, Afrique du Sud

    Pendant très longtemps, le Cameroun a échappé aux radars de l’opinion africaine et internationale.

    Dictature à huis-clos caractérise tout autant par son opacité que par sa brutalité, il a su ne jamais faire parler de lui sur la scène mondiale qu’a l’occasion des exploits – intermittents – de son équipe nationale de football – véritable symbole à la fois des énormes potentialités de ce peuple et de l’extraordinaire gâchis érige en principe de gouvernement par une élite vénale et prédatrice, dont une très grande partie, au demeurant, possède des passeports étrangers.

  • La guerre du Cameroun, un demi-siècle de censure et d’oubli
    https://visionscarto.net/la-guerre-du-cameroun

    Parmi les épisodes refoulés de l’historiographie coloniale, la guerre que la France a menée au Cameroun dans les années 1950 et 1960 occupe une place à part. Il s’agit même d’un cas d’école puisque personne ou presque, en France, n’en connait l’existence. Cette guerre secrète, qui a pourtant fait des dizaines de milliers de victimes, est passée inaperçue à l’époque où elle se déroulait et les traces qu’elle a laissées ont été méthodiquement effacées. Au Cameroun également, la mémoire de ce conflit eut du mal à (...)

    #Billets

    • D’après un rapport confidentiel produit au milieu des années 1960 par l’ambassade du Royaume-Uni au Cameroun, qui s’est bien gardé de rendre publique cette estimation, cette guerre aurait causé la mort de 60 000 à 76 000 personnes entre 1956 et 1964. André Blanchet, journaliste au Monde, évoqua pour sa part, au cours d’une conférence prononcée en 1962, le chiffre de 120 000 morts, uniquement sur les trois années précédentes et dans la seule région bamiléké (où la population était estimée à 500 000 âmes). « Or, cela nous l’ignorâmes à peu près entièrement, même en France, l’ancienne métropole », ajouta-t-il. Et pour cause : ni lui ni aucun de ses collègues n’en informèrent jamais les lecteurs de son journal.

  • Les propos d’Emmanuel Macron sur la colonisation en trois questions - Afrique - RFI

    http://www.rfi.fr/france/20170216-algerie-propos-emmanuel-macron-colonisation-trois-questions

    Et cette ligne s’applique aux massacres commis par la France coloniale, à Thiaroye au Sénégal en 1944, à Madagascar en 1947 et au Cameroun dans les années 1950 et 1960. Lors de visites dans ces trois pays, François Hollande a rendu hommage aux victimes, mais n’a pas présenté d’excuses. Pour l’historien Thomas Deltombe (1), le chef de l’Etat français est même dans « une logique de minimisation, d’euphémisation, voire de maquillage ».

    #colonialisme #cameroun

  • The Anarchist Roots of Geography | AK Press
    https://www.akpress.org/the-anarchist-roots-of-geography.html?mc_cid=d2be082e23&mc_eid=a465e577a9

    Signalé ce matin par Thomas Deltombe

    The Anarchist Roots of Geography sets the stage for a radical politics of possibility and freedom through a discussion of the insurrectionary geographies that suffuse our daily experiences. By embracing anarchist geographies as kaleidoscopic spatialities that allow for nonhierarchical connections between autonomous entities, Simon Springer configures a new political imagination.

    Experimentation in and through space is the story of humanity’s place on the planet, and the stasis and control that now supersede ongoing organizing experiments are an affront to our survival. Singular ontological modes that favor one particular way of doing things disavow geography by failing to understand the spatial as a mutable assemblage intimately bound to temporality. Even worse, such stagnant ideas often align to the parochial interests of an elite minority and thereby threaten to be our collective undoing. What is needed is the development of new relationships with our world and, crucially, with each other.

    #anarchisme #géographie

  • What Makes a City: A Highly Subjective, Idiosyncratic New York Atlas - The New York Times
    http://www.nytimes.com/2016/12/09/books/review/nonstop-metropolis-rebecca-solnit-joshua-jelly-schapiro.html

    Déjà signalé ici, mais recension intéressante pointée par Thomas Deltombe.

    NONSTOP METROPOLIS
    A New York City Atlas
    Edited by Rebecca Solnit and Joshua Jelly-Schapiro
    Illustrated. 224 pp. University of California Press. Cloth, $49.95; paper, $29.95.

    “Cities have the capability of providing something for everybody,” Jane Jacobs wrote, “only because, and only when, they are created by everybody.” As demonstrated by “Nonstop Metropolis: A New York City Atlas,” that’s both the reward and the challenge of trying to capture an urban soul, whatever the medium. This is the final volume in an ambitious and imaginative trilogy of city atlases edited by Rebecca Solnit, this time with the assistance of Joshua Jelly-Schapiro. As in “Infinite City,” an exploration of San Francisco, and the New Orleans-focused “Unfathomable City,” the work intersperses 26 beautifully rendered maps with essays that attempt to grapple with New York as it is, was and imagines itself to be.

    #atlas #new_york #cartographie

  • En 1973, alors chef du Parti socialiste unifié, Michel Rocard insistait sur le rôle croissant des multinationales et la nécessité de leur opposer un mouvement social européen.

    Résister aux sociétés multinationales, par Michel Rocard
    http://www.monde-diplomatique.fr/1973/02/ROCARD/31334 #st

    C’est pour cette raison que la première tâche d’un gouvernement qui voudrait rompre avec l’évolution que connaît le capitalisme à l’heure actuelle devrait viser d’abord à constituer en Europe une vaste zone où les choix politiques faits par l’ensemble des populations concernées s’opposeraient aux décisions prises par les firmes multinationales en fonction de la seule loi du profit.

    Cela voudrait dire pour la France non pas sortir de la C.E.E. pour essayer de construire un système socialiste dans une autarcie qui mènerait d’avance l’expérience à l’échec. Cela signifie au contraire démontrer que le Marché commun, bien loin de viser à construire une communauté européenne (même capitaliste), ne sert qu’à faire entrer les pays d’Europe dans un ensemble capitaliste indifférencié. C’est l’idée d’Europe, le sentiment qu’il existe entre les populations vivant en Europe une solidarité suffisante pour qu’elles décident ensemble de leur destin, c’est cette idée-là qui devient révolutionnaire. Et le rôle d’un gouvernement réellement socialiste en France devrait être d’opposer aux options auxquelles conduit le Marché commun des solutions fondées sur des choix politiques (et non résultant de la logique du profit) et reflétant la volonté des populations d’Europe (par opposition aux options nationalistes ou à celles des firmes a-nationales).

    Michel Rocard et « toute la misère du monde », par Thomas Deltombe (30 septembre 2009)
    https://www.monde-diplomatique.fr/carnet/2009-09-30-Rocard

    Beaucoup de responsables politiques ont, sur leur carrière, de petites taches indélébiles : ces « petites phrases » compromettantes qui trottent dans toutes les têtes, et que les journalistes — toujours prompts à jouer leur rôle de contre-pouvoir, comme on sait… — aiment à rappeler. Les décennies 1980 et 1990, années de forte montée de l’extrême droite, furent riches en la matière. La petite phrase qui colle à la peau de Michel Rocard est celle de la « misère du monde » que la France, avait-il déclaré, ne pouvait accueillir.

    http://zinc.mondediplo.net/messages/31952 via Le Monde diplomatique

  • Est-il encore permis d’informer sur les activités du groupe Bolloré ?
    http://www.bastamag.net/Est-il-encore-permis-d-informer-sur-les-activites-du-groupe-Bollore

    L’audience du procès en diffamation que le groupe Bolloré intente à Bastamag se déroulera le jeudi 11 février, à la 17ème chambre du Tribunal de grande instance de Paris, à partir de 13h. L’audience sera publique.

    Le groupe Bolloré estime diffamatoire pas moins de huit paragraphes – ainsi que le titre et le surtitre – d’un article de synthèse publié par Bastamag en octobre 2012 et consacré à la question de l’accaparement des terres, ces appropriations de terres à grande échelle par des fonds d’investissements ou des multinationales, principalement en Afrique et en Asie.

    S’appuyant sur des rapports des Nations unies et d’organisations internationales, cet article dressait un état des lieux du mouvement d’accaparement de terres en Afrique, en Amérique latine et en Asie, et des grandes entreprises françaises qui y sont impliquées. L’article mentionne ainsi les activités du groupe Bolloré, via une holding luxembourgeoise, la Socfin, dans lequel le groupe possède de fortes participations. La Socfin possède de multiples filiales qui gèrent des plantations d’hévéas et d’huile de palme en Afrique et en Asie.

    >>>>> L’article en question dans le procès pour diffamation : "Bolloré, Crédit agricole, Louis Dreyfus : ces groupes français, champions de l’accaparement de terres", par Nadia Djabali (2012)
    http://www.bastamag.net/Bollore-Credit-agricole-Louis

    Alors que 868 millions de personnes souffrent de sous-alimentation, selon l’Onu, l’accaparement de terres agricoles par des multinationales de l’agrobusiness ou des fonds spéculatifs se poursuit. L’équivalent de trois fois l’Allemagne a ainsi été extorqué aux paysans africains, sud-américains ou asiatiques. Les plantations destinées à l’industrie remplacent l’agriculture locale. Plusieurs grandes entreprises françaises participent à cet accaparement, avec la bénédiction des institutions financières.

    Egalement sur le site Bastamag :

    >>>> Liberté de la presse : Bolloré porte de nouveau plainte contre Basta ! 2015
    http://www.bastamag.net/Liberte-de-la-presse-Bollore-porte-de-nouveau-plainte-contre-Bastamag

    >>>> Basta ! et Rue 89 mis en examen suite à une plainte du groupe Bolloré. 2013
    http://www.bastamag.net/Basta-et-Rue-89-mis-en-examen

    >>>> Deux autres journalistes de Basta ! mis en examen suite à une plainte du groupe Bolloré
    http://www.bastamag.net/Deux-autres-journalistes-de-Basta

    >>>> Voir aussi les articles au sujet de Bolloré par l’association Survie
    http://survie.org/mot/bollore

    Sierra Leone : Emprisonnement de Shiaka Sama, procès de journalistes en France, les voix critiques contre Bolloré réduites au silence . FIDH Mouvement mondial des droits humains
    https://www.fidh.org/fr/themes/mondialisation-droits-humains/sierra-leone-emprisonnement-de-shiaka-sama-proces-de-journalistes-en

    A la veille d’un nouveau procès intenté par Bolloré contre des journalistes de médias français, des organisations dénoncent l’emprisonnement le 5 février de 6 leaders des communautés locales affectées par les investissements de la SAC, une filiale de Socfin, société liée au groupe Bolloré.

    Comprendre les investissements fonciers en Afrique - Le projet SOCFIN en Sierra Leone - 2012 Oakland Institute

    http://www.oaklandinstitute.org/sites/oaklandinstitute.org/files/rapportOISocfinAvril2012enfrancais.pdf

    En 2011, Socfin Agricultural Company Sierra Leone Ltd. (Socfin SL) a pris le contrôle de 6.500 hectares (ha) de terres agricoles pour établir des plantations de palmiers à huile et d’hévéas dans la chefferie de Malen, district de Pujehun, au sud de la Sierra Leone. L’entreprise cherche maintenant à acquérir 5.000 ha supplémentaires dans la région de Malen ou des chefferies voisines.

    Promettant création d’emplois, compensation pour les exploitations agricoles perdues et la construction d’infrastructures, l’investissement initial, estimé à 100 millions de dollars, a bénéficié d’un soutien au plus haut niveau du gouvernement Sierra Léonais.

    Le bail de 50 ans a été signé par le Ministre de l’Agriculture, des Forêts et de la Sécurité Alimentaire, le Dr Sam Sesay, lui-même.Malgré ce soutien politique, le projet de Socfin SL se heurte à une forte résistance de la population locale. En octobre 2011, 40 manifestants ont été arrêtés, suite aux tensions entre les villageois et l’entreprise. Les manifestants protestaient contre le projet d’investissement, le manque de transparence de la société, l’absence de consultation des populations locales, et le manque d’information sur les perspectives de réinstallation. Ils se plaignaient également des faibles rémunérations, de la corruption d’élites locales, et de la pression exercée sur les propriétaires de terres et les chefs de villages pour la signature des accords.

    Socfin SL, est une filiale de Socfin (Société Financière des Caoutchoucs), une société holding, qui opère dans divers secteurs, dont les plantations, l’agroalimentaire, l’immobilier et la finance. Le principal actionnaire est la société Bolloré Investissement SA (Groupe Bolloré), détenue par l’homme d’affaires français Vincent Bolloré.

    L’empire Bolloré s’est développé de façon spectaculaire au cours des deux dernières décennies. En achetant des anciennes entreprises coloniales, et profitant de la vague de privatisations issue des “ajustements structurels” imposés par le Fonds Monétaire International, Bolloré est devenu un acteur clé dans la structure économique et la vie politique de nombreux pays africains.

    Le Groupe est désormais présent dans 92 pays dans le monde, dont 43 en Afrique. Il contrôle des plantations mais est aussi présent dans d’autres secteurs, comme la logistique, la manutention, les infrastructures de transport, la production de pétrole et surtout les ports africains (13 en 2012). L’emprise de Bolloré sur le continent atteint aujourd’hui de nouvelles dimensions avec l’accroissement des investissements dansles plantations d’huile de palme et d’hévéas.

    Les griefs des agriculteurs de Sierra Leone vis-à-vis des plantations de Socfin font écho à ceux de communautés rurales de plusieurs pays du Sud concernant d’autres filiales de Socfin. Des critiques similaires sont ainsi apparues ces dernières années au Libéria, au Cameroun et au Cambodge.
    Des agriculteurs et petits propriétaires sont poursuivis en Sierra Leone pour leur opposition à Socfin. Leur lutte est bien celle de David contre Goliath, Socfin étant aux mains de puissantes élites économiques et financières internationales, Vincent Bolloré et ses associés.

    >>>> Affaires, médias et humanitaire : Les guerres africaines de Vincent Bolloré, par Thomas Deltombe (2009)
    http://www.monde-diplomatique.fr/2009/04/DELTOMBE/16970

    >>>> Port, rail, plantations : le triste bilan de Bolloré au Cameroun par Thomas Deltombe (2009)
    http://www.monde-diplomatique.fr/2009/04/DELTOMBE/17037

    >>>> Bolloré : monopoles services compris. Tentacules africaines (2000) - Survie
    http://survie.org/francafrique/diplomatie-business-et-dictatures/article/bollore-monopoles-services-compris-170

    Vincent Bolloré contre Basta ! : à bas la presse libre, vive les paradis fiscaux - Attac
    https://attac.org/l/5m1

    Ce jeudi 11 février s’ouvre le procès en diffamation contre le site d’info indépendant Bastamag sur plainte de Vincent Bolloré. Après avoir normalisé Canal +, M. Bolloré veut étouffer le scandale… Bolloré en faisant taire Basta !, un site d’info qui dérange. Il devrait plutôt se méfier de la publicité : la société Socfin, épinglée par Basta ! au vu des enquêtes de terrain menées par plusieurs ONG sur l’accaparement de terres en Afrique, est aussi lourdement impliquée dans deux paradis fiscaux particulièrement nocifs, Liechtenstein et Luxembourg

    .
    #Vincent_Bolloré #Socfin #Bastamag #Nadia_Djabali #attac #fidh #Oakland_Institute #Thomas_Deltombe #procès #paradis_fiscaux #Sierra-Leone #Afrique #Multinationales #Information #survie.org

  • Est-il encore permis d’informer sur les activités du groupe Bolloré ?
    http://www.bastamag.net/Est-il-encore-permis-d-informer-sur-les-activites-du-groupe-Bollore

    L’audience du procès en diffamation que le groupe Bolloré intente à Bastamag se déroulera le jeudi 11 février, à la 17ème chambre du Tribunal de grande instance de Paris, à partir de 13h. L’audience sera publique. Ce procès pose plusieurs questions essentielles sur la liberté d’informer, en particulier sur les activités des multinationales. L’audience du procès en diffamation que le groupe Bolloré intente à Bastamag se déroulera le jeudi 11 février, à la 17ème chambre du Tribunal de grande instance de (...)

    #Chroniques

    / #Médias_libres, #Droits_fondamentaux

  • État d’urgence :

    un rappel du programme pour le ouiquende à venir à Rennes :

    VENDREDI 12 FEVRIER 18h

    –Introduction-

    Arthur Quesnay proposera un État de la guerre au Moyen-Orient et analysera les mécanismes de confessionalisation des conflits. En outre, il abordera le contexte de formation de l’Etat Islamique et le rôle de celui-ci en tant que force politique au sein de insurrection irakienne et syrienne. Enfin, il essayera de répondre à la question : Que signifie à l’heure actuelle, « être en guerre » en France ?

    Dans un second temps, échanges avec l’intervenant. Questions/discussion.

    SAMEDI 13 FEVRIER 14h – 18h

    Thomas Deltombes déconstruira les figures contemporaines de l’Islam dans les médias. Ce faisant, il dressera le tableau de l’islamophobie en France et de son usage politique.

    Moment d’échanges avec l’intervenant. Question/Discussion.

    PAUSE

    Laurent Borredon, au travers de leurs aspects techniques et juridiques, reviendra sur l’ensemble des lois « sécuritaires » et particulièrement sur l’histoire de l’état d’urgence depuis la Guerre d’Algérie.

    Moment d’échanges avec l’intervenant. Question/Discussion.

    DIMANCHE 14 FEVRIER 14h-18h

    Vanessa Codaccioni approfondira la question de l’état d’urgence par l’angle de la justice d’exception et de ses conséquences : criminalisation des oppositions politiques et tentatives de redéfinition des bornes du politique.

    Moment d’échanges avec l’intervenant. Question/Discussion.

    Des inculpés de « l’affaire de Tarnac » viendront parler de leur situation et analyseront le paradigme sécuritaire comme une nouvelle forme de gouvernement.

    Moment d’échanges avec l’intervenant. Question/Discussion.

    PAUSE

    Discussion : A l’aune de ces trois jours, et de diverses expériences présentées, comment réussir à penser ce que pourrait être une politique radicale adéquate ?

    Si vous voulez en savoir plus sur les intervenants et les détails du programme :

    Maison de la Grève - état d’urgence, état du monde
    https://maisondelagreve.boum.org/etat-d-urgence

  • « Islamophobie », un mot, un mal plus que centenaires
    Une ressource indispensable pour comprendre les polémiques que ce mot engendre,

    http://orientxxi.info/magazine/islamophobie-un-mot-un-mal-plus-que-centenaires,1155

    Historiquement, l’affrontement armé a encadré la totalité de l’histoire des rapports entre l’Occident et le monde musulman. Il fut le premier mode de contact, lors de la conquête arabe du sud de l’Europe, puis lors des Croisades, en Orient. Et si l’on s’en tient à la colonisation française à l’ère moderne, toutes les générations de Français depuis 1830 ont perçu des échos d’affrontements avec le monde arabo-musulman au sein de l’empire : prise d’Alger (1830), guerre menée par Abd el-Kader (1832-1847), révolte de Kabylie (1871), lutte contre les Kroumirs et établissement du protectorat sur la Tunisie (1880-1881), conquête du Maroc et établissement du protectorat sur ce pays (1907-1912), révolte en Algérie (1916-1917), guerre du Rif (1924-1926), révolte et répression en Algérie (mai 1945), affrontements avec l’Istiqlal et le sultan au Maroc (1952-1956), avec le Néo-Destour en Tunisie (1952-1954), cycle clos par la guerre d’Algérie (1954-1962). La parenthèse fut ensuite refermée...provisoirement, puisque le concept de « choc des civilisations » est revenu en force depuis le début du XXIe siècle.

    L’islamophobie, historiquement inséparable du racisme anti-arabe, a plusieurs siècles d’existence. N’est-il pas remarquable, par exemple, que certains éléments constitutifs de la culture historique des Français soient intimement liés à des affrontements avec le monde arabo-musulman ? Pourquoi Poitiers, bataille mineure, a-t-elle pris la dimension de prélude — victorieux — au « choc des civilisations » ? Pourquoi Charles Martel, un peu barbare sur les bords, est-il l’un des premiers héros de l’histoire de France, comme « rempart » de la civilisation ? Interrogez les « Français moyens », ceux en tout cas qui ont encore la mémoire des dates : Poitiers (732) arrive encore dans le peloton de tête, avec le couronnement de Charlemagne en 800, la bataille de Marignan en 1515 ou la prise de la Bastille en 1789.

    Pourquoi la bataille de Roncevaux en 778, où pas un seul musulman n’a combattu (les ennemis du preux Roland étaient des guerriers basques) est-elle devenue le symbole de la fourberie des Sarrazins, attaquant en traîtres à dix contre un ? Nul ancien collégien n’a oublié qu’il a fait connaissance avec la littérature française, naguère, par la Chanson de Roland. Et nul ne peut avoir chassé de sa mémoire la personnification du Bien par les chevaliers de lumière venant d’Occident et celle du Mal par les sombres guerriers de la « nation maudite / Qui est plus noire que n’est l’encre ». C’est plusieurs siècles avant les théoriciens et illustrateurs de la pensée coloniale que l’auteur écrit : « Les païens ont tort, les chrétiens ont le droit. » La guerre entre « eux » et « nous » commençait sous les auspices du manichéisme le plus candide. Oui, le racisme anti-arabe, longtemps (toujours ?) inséparable de l’islamophobie, a plusieurs siècles d’existence, remonte au Moyen-âge (croisades), puis à la Renaissance avec, notamment, les matamores, littéralement les tueurs de maures, de la Reconquista espagnole.

    Plus tard, à l’ère coloniale, l’hostilité fut énoncée avec la plus parfaite bonne conscience, sur le ton de l’évidence : « C’est évident : l’islam est une force de mort, non une force de vie »1. Persuadés d’être porteurs des vraies — des seules — valeurs civilisationnelles, les contemporains de la conquête, puis de la colonisation, allèrent de déboires en désillusions : les catholiques et les missionnaires constataient, navrés, que la religion musulmane était un bloc infissurable ; les laïques intransigeants se désolaient, rageurs, de voir que leur conception de la Raison ne pénétrait pas dans ces cerveaux obscurcis par le fanatisme… Dès lors, les notions d’« Arabes » — la majorité des Français appelaient Arabes tous les colonisés du Maghreb — et de musulmans se fondirent en une sorte de magma incompréhensible, impénétrable. Hostilité de race et hostilité de religion se mêlèrent en une seule « phobie ».

    Il revenait à Ernest Renan de synthétiser tout l’esprit d’une époque :

    L’islam est la plus complète négation de l’Europe. L’islam est le dédain de la science, la suppression de la société civile, c’est l’épouvantable simplicité de l’esprit sémitique, rétrécissant le cerveau humain, le fermant à toute idée délicate, à tout sentiment fin, à toute recherche rationnelle, pour le mettre en face d’une éternelle tautologie : “Dieu est Dieu“.

    La réforme intellectuelle et morale, Paris, Michel Lévy Frères, 1871.

    Un mot qui remonte à 1910

    Il faut nommer cet état d’esprit ; le mot « islamophobie » paraît le mieux adapté. Et contrairement à une vulgate répandue, il est plus que centenaire. La première utilisation du mot retrouvée date de 1910. Elle figure sous la plume d’un certain Alain Quellien, aujourd’hui oublié. Il proposait une définition d’une surprenante modernité :

    L’islamophobie : il y a toujours eu, et il y a encore, un préjugé contre l’islam répandu chez les peuples de civilisation occidentale et chrétienne. Pour d’aucuns, le musulman est l’ennemi naturel et irréconciliable du chrétien et de l’Européen, l’islamisme2 est la négation de la civilisation, et la barbarie, la mauvaise foi et la cruauté sont tout ce qu’on peut attendre de mieux des mahométans.

    La politique musulmane dans l’Afrique occidentale française, Paris, Émile Larose.

    Ainsi, dès sa première apparition écrite, le mot « islamophobie » était accompagné de celui de « préjugé » et du concept de « choc des civilisations ». Suivait une liste impressionnante de citations venant de tous les horizons, multipliant les reproches hostiles : l’islam était assimilé à la guerre sainte, à la polygamie, au fatalisme, enfin à l’inévitable fanatisme.

    La même année, Maurice Delafosse, étudiant lui aussi l’islam, cette fois en Afrique subsaharienne, l’emploie à son tour :

    Pris en bloc, et à l’exception de quelques groupements de Mauritanie encore hostiles à la domination européenne, l’état d’esprit des musulmans de l’Afrique occidentale n’est certainement pas opposé à notre civilisation (…). Quoi qu’en disent ceux pour qui l’islamophobie est un principe d’administration indigène, la France n’a rien de plus à craindre des musulmans en Afrique occidentale que des non musulmans (…). L’islamophobie n’a donc pas de raison d’être dans l’Afrique occidentale.

    Revue du Monde musulman, vol. XI, 1910.

    Deux ans plus tard, Delafosse publie son maître ouvrage, dans lequel il reprend mot à mot son article de 1910, en remplaçant seulement les mots « Afrique occidentale » par « Haut-Sénégal-Niger ».

    En 1912, le grand savant Louis Massignon rapporte les propos de Rachid Ridha, un intellectuel égyptien, lors du congrès international des oulémas. Évoquant les attitudes des différentes puissances à l’égard de l’islam, Massignon reprend le mot à son compte : « La politique française pourra devenir moins islamophobe » (sous-entendu : que les autres puissances coloniales). De façon significative, il titre son article « La défensive musulmane »3. On a bien lu : « défensive » et non « offensive ».

    Après guerre, Étienne Dinet, grand peintre orientaliste converti à l’islam et son ami Slimane ben Ibrahim réemploient le mot dans deux ouvrages, en 1918 puis en 19214. Dans le second, ils exécutent avec un certain plaisir un jésuite, le père Henri Lammens, qui avait publié des écrits à prétention scientifique, en fait des attaques en règle contre le Coran et Mohammed. Dinet conclut : « Il nous a semblé nécessaire de dévoiler, non seulement aux musulmans, mais aussi aux chrétiens impartiaux, à quel degré d’aberration l’islamophobie pouvait conduire un savant. »

    Le mot apparaît également dans la presse, justement dans une critique fort louangeuse du premier de ces ouvrages : « Le fanatisme de Mohammed n’est ni dans sa vie ni dans le Coran ; c’est une légende inventée par les islamophobes du Moyen Âge »5.
    Un mensonge historique qui dure

    Le mot (non la chose) va ensuite disparaître du vocabulaire jusqu’aux années 1970-1980. En 2003, deux écrivaines, Caroline Fourest et Fiametta Venner, publient dans leur revue un dossier au titre évocateur, « Islamophobes… ou simplement laïques ? »6. Le titre de l’article introductif utilise le mot « islamophobie » assorti d’un prudent — et significatif — point d’interrogation. Il commence par cette formule : « Le mot “islamophobie“ a une histoire, qu’il vaut mieux connaître avant de l’utiliser à la légère ». Certes. Mais elles se fourvoient et, exposition médiatique aidant, elles ont fourvoyé depuis des dizaines d’essayistes, probablement des milliers de lecteurs. Car elles affirment que les mots « islamophobie » et « islamophobe » ont été en quelque sorte des bombes à retardement déposées par la révolution iranienne, puis repris par des obscurantistes musulmans un peu partout en Occident. Les deux essayistes affirment en effet :

    Il [le mot « islamophobie »] a été utilisé en 1979 par les mollahs iraniens qui souhaitaient faire passer les femmes qui refusaient de porter le voile pour de “mauvaises musulmanes“ en les accusant d’être “islamophobes“. Il a été réactivité au lendemain de l’affaire Rushdie, par des associations islamistes londoniennes comme Al Muhajiroun ou la Islamic Human Rights Commission dont les statuts prévoient de “recueillir les informations sur les abus des droits de Dieu“. De fait, la lutte contre l’islamophobie rentre bien dans cette catégorie puisqu’elle englobe toutes les atteintes à la morale intégriste (homosexualité, adultère, blasphème, etc.). Les premières victimes de l’islamophobie sont à leurs yeux les Talibans, tandis que les “islamophobes“ les plus souvent cités par ces groupes s’appellent Salman Rushdie ou Taslima Nasreen !

    Cette version, qui ignore totalement l’antériorité coloniale du mot, sera reprise sans distance critique en 2010 par l’équipe du Dictionnaire historique de la langue française : « Islamophobie et islamophobe, apparus dans les années 1980… », donnant ainsi à cette datation – une « simple erreur » d’un siècle — un couronnement scientifique.

    Cette « erreur » reste très largement majoritaire, malgré les mille et un démentis. Caroline Fourest a ensuite proposé en 2004 dans son essai Frère Tariq, une filiation directe entre le khomeinisme et le penseur musulman Tariq Ramadan, qui le premier aurait tenté selon elle d’importer ce concept en Europe dans un article du Monde Diplomatique de 1998. En fait, si le mot y figure effectivement, entre guillemets, ce n’est que sous forme de reprise : « On peut parler d’une sorte d’ “islamophobie“, selon le titre de la précieuse étude commandée en Grande-Bretagne par le Runnymede Trust en 1997 »7. Il paraît difficile de faire de ce membre de phrase une tentative subreptice d’introduire un concept dans le débat français. D’autant… qu’il y figurait déjà. Un an plus tôt, dans le même mensuel, le mot était déjà prononcé par Soheib Ben Cheikh, mufti de la mosquée de Marseille : « La trentaine ardente et cultivée, il entend “adapter un islam authentique au monde moderne“, combattre l’ “islamophobie“ et, simultanément, le sentiment de rejet, de frustration et d’“enfermement“ dont souffrent les musulmans de Marseille »8.
    Le « sanglot » de l’homme blanc

    Pour les deux écrivaines déjà citées, c’est le mot même qui est pourtant à proscrire, car il est porteur de « terrorisme intellectuel », il serait une arme des intégristes dans leur lutte contre la laïcité, interdisant de fait toute critique de l’islam.

    L’essayiste Pascal Bruckner, naguère auteur du Sanglot de l’homme blanc, sous-titré Tiers-Monde, culpabilité, haine de soi (1983), pourfendeur plus récemment de la Tyrannie de la pénitence (2006), ne pouvait que partager les convictions de ses jeunes collègues :

    Forgé par les intégristes iraniens à la fin des années 70 pour contrer les féministes américaines, le terme d’“islamophobie“, calqué sur celui de xénophobie, a pour but de faire de l’islam un objet intouchable sous peine d’être accusé de racisme (…). Nous assistons à la fabrication d’un nouveau délit d’opinion, analogue à ce qui se faisait jadis dans l’Union soviétique contre les ennemis du peuple. Il est des mots qui contribuent à infecter la langue, à obscurcir le sens. “Islamophobie“ fait partie de ces termes à bannir d’urgence du vocabulaire ».

    Libération, 23 novembre 2010.

    Pour sa part, Claude Imbert, le fondateur et éditorialiste historique du Point, un hebdomadaire en pointe en ce domaine, utilisa — et même revendiqua — le mot dans une déclaration sur la chaîne de télévision LCI le 24 octobre 2003 :

    Il faut être honnête. Moi, je suis un peu islamophobe. Cela ne me gêne pas de le dire (…). J’ai le droit, je ne suis pas le seul dans ce pays à penser que l’islam — je dis bien l’islam, je ne parle même pas des islamistes — en tant que religion apporte une débilité d’archaïsmes divers, apporte une manière de considérer la femme, de déclasser régulièrement la femme et en plus un souci de supplanter la loi des États par la loi du Coran, qui en effet me rend islamophobe.

    Cette déclaration suscita diverses critiques, qui amenèrent le journaliste à répliquer, la semaine suivante, lors de la même émission : « L’islam, depuis le XIIIe siècle, s’est calcifié et a jeté sur l’ensemble des peuples une sorte de camisole, une sorte de carcan ». Il se disait « agacé » par l’accusation de racisme dont il était l’objet : « L’islamophobie (…) s’adresse à une religion, l’islam, non pas à une ethnie, une nation, un peuple, pas non plus à des individus constituant le peuple des musulmans… ».

    Est-il bien utile de poursuivre la liste de ces nouveaux combattants, de ces modernes « écraseurs de l’infâme »9 ? Chaque jour, parfois chaque heure, ils ont l’occasion de répéter leurs vérités, dans des hebdomadaires à couvertures en papier glacé, à la télévision, dans des cénacles, sans craindre des contradicteurs ultra-minoritaires… ou absents.

    Si l’utilisation du concept par certains musulmans fondamentalistes, à la moindre occasion, peut et doit irriter, il paraît cependant difficile de contester que des islamophobes existent et qu’ils agissent. Tout acte hostile, tout geste brutal, toute parole insultante contre un(e) musulman(e) parce qu’il (elle) est musulman(e), contre une mosquée ou une salle de prière, ne peut être qualifié que d’acte islamophobe. Et, puisqu’il y a des islamophobes, qu’ils constituent désormais un courant qui s’exprime au sein de la société française, comment qualifier celui-ci autrement que d’islamophobe ?

    Les musulmans de France n’ont nullement besoin d’avocats. Dans leur grande majorité hostiles à la montée — réelle — de l’intégrisme, ils placent leur combat sur le terrain de la défense d’un islam vrai, moderne, tolérant, tout en restant fidèle à la source.
    Réfuter la logique d’affrontement

    Parallèlement, une forte réaction s’est dessinée, par des auteurs ne se situant pas du tout dans une vision religieuse, pour réfuter et dénoncer la logique d’affrontement. Alors que l’usage même du mot apparaissait à beaucoup comme une concession aux terroristes (au moins de la pensée), Alain Gresh titra justement : « Islamophobie » un article novateur du Monde Diplomatique (novembre 2001). En 2004, le sociologue Vincent Geisser publiait aux éditions La Découverte la première étude synthétique sur la question, La nouvelle islamophobie. L’année suivante, un autre chercheur, Thomas Deltombe, décortiquait chez le même éditeur L’islam imaginaire. La construction médiatique de l’islamophobie en France, 1975-2005.

    Les essais plus récents d’Edwy Plenel, Pour les musulmans (La Découverte, 2013) et de Claude Askolovitch, Nos mal-aimés, ces musulmans dont la France ne veut pas( Grasset, 2013) ont entamé une contre-offensive. Ce dernier affirme, dans son chapitre de conclusion :

    Ce que la France a construit depuis vingt-cinq ans à gauche comme à droite, à force de scandales, de lois et de dénis, de mensonges nostalgiques, c’est l’idée de l’altérité musulmane, irréductible à la raison et irréductible à la République ; la proclamation d’une identité en danger, nationale ou républicaine, et tout sera licite — légalement — pour la préserver...

    Chez les catholiques progressistes, même réponse :

    Schizophrénie. Tandis que les révolutions arabes témoignent d’une soif de démocratie de la part des musulmans, la peur de l’islam empoisonne l’atmosphère en France et, à l’approche des élections, l’épouvantail est agité plus que jamais. Sarkozy n’a-t-il pas voulu un débat sur la place de l’islam dans la République ? Il reprend ainsi un des thèmes favoris du Front national.

    Revue Golias, n° 137, mars 2011.

    Autre écho contemporain, sous la plume de Jean Baubérot, spécialiste de la sociologie des religions et de la laïcité :

    De divers côtés, on assiste à la multiplication d’indignations primaires, de propos stéréotypés qui veulent prendre valeur d’évidence en étant mille fois répétés par le moyen de la communication de masse. L’évolution globale est inquiétante, et cela est dû à la fois à la montée d’extrémismes se réclamant de traditions religieuses (au pluriel) et d’un extrême centre qui veut s’imposer socialement comme la (non) pensée unique et rejette tout ce qui ne lui ressemble pas (…). L’Occident est le “monde libre“ paré de toutes les vertus face à un islam monolithique et diabolisé.

    Le Monde, 6 octobre 2006.

    Suit dans le même article un parallèle entre l’antisémitisme du temps de l’affaire Dreyfus et la montée de l’islamophobie au début du XXIe siècle : « De tels stéréotypes sont permanents : seuls changent les minorités qu’ils transforment en boucs émissaires. La lutte contre l’intolérance ne dispense pas de la lutte contre la bêtise haineuse ». En ces temps où les grands qui nous dirigent n’ont que le mot « guerre » à la bouche ou sous la plume, il est des phrases réconfortantes10.
    Alain Ruscio

    1Arnold Van Gennep, La mentalité indigène en Algérie, Mercure de France, septembre-décembre 1913.

    2À l’époque synonyme d’islam.

    3Revue du Monde musulman, vol. XIX, juin 1912.

    4La vie de Mohammed, Prophète d’Allah, H. Piazza & Cie ; L’Orient vu de l’Occident, Piazza & Geuthner.

    5Édouard Sarrazin, Journal des Débats, 6 août 1919.

    6Revue ProChoix, n° 26-27, automne-hiver 2003.

    7Commission présidée par le professeur Gordon Conway, Islamophobia : Fact Not Fiction, Runnymede Trust, octobre 1997.

    8Cité par Philippe Pons, juillet 1997.

    9NDLR. Surnom de Voltaire, pour qui l’« infâme » était le fanatisme religieux.

    10On notera la prise de position de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) qui a entériné le terme d’islamophobie dans son rapport de 201

  • « Islamophobie », un mot, un mal plus que centenaires

    http://orientxxi.info/magazine/islamophobie-un-mot-un-mal-plus-que-centenaires,1155

    Historiquement, l’affrontement armé a encadré la totalité de l’histoire des rapports entre l’Occident et le monde musulman. Il fut le premier mode de contact, lors de la conquête arabe du sud de l’Europe, puis lors des Croisades, en Orient. Et si l’on s’en tient à la colonisation française à l’ère moderne, toutes les générations de Français depuis 1830 ont perçu des échos d’affrontements avec le monde arabo-musulman au sein de l’empire : prise d’Alger (1830), guerre menée par Abd el-Kader (1832-1847), révolte de Kabylie (1871), lutte contre les Kroumirs et établissement du protectorat sur la Tunisie (1880-1881), conquête du Maroc et établissement du protectorat sur ce pays (1907-1912), révolte en Algérie (1916-1917), guerre du Rif (1924-1926), révolte et répression en Algérie (mai 1945), affrontements avec l’Istiqlal et le sultan au Maroc (1952-1956), avec le Néo-Destour en Tunisie (1952-1954), cycle clos par la guerre d’Algérie (1954-1962). La parenthèse fut ensuite refermée...provisoirement, puisque le concept de « choc des civilisations » est revenu en force depuis le début du XXIe siècle.

    L’islamophobie, historiquement inséparable du racisme anti-arabe, a plusieurs siècles d’existence. N’est-il pas remarquable, par exemple, que certains éléments constitutifs de la culture historique des Français soient intimement liés à des affrontements avec le monde arabo-musulman ? Pourquoi Poitiers, bataille mineure, a-t-elle pris la dimension de prélude — victorieux — au « choc des civilisations » ? Pourquoi Charles Martel, un peu barbare sur les bords, est-il l’un des premiers héros de l’histoire de France, comme « rempart » de la civilisation ? Interrogez les « Français moyens », ceux en tout cas qui ont encore la mémoire des dates : Poitiers (732) arrive encore dans le peloton de tête, avec le couronnement de Charlemagne en 800, la bataille de Marignan en 1515 ou la prise de la Bastille en 1789.

    Pourquoi la bataille de Roncevaux en 778, où pas un seul musulman n’a combattu (les ennemis du preux Roland étaient des guerriers basques) est-elle devenue le symbole de la fourberie des Sarrazins, attaquant en traîtres à dix contre un ? Nul ancien collégien n’a oublié qu’il a fait connaissance avec la littérature française, naguère, par la Chanson de Roland. Et nul ne peut avoir chassé de sa mémoire la personnification du Bien par les chevaliers de lumière venant d’Occident et celle du Mal par les sombres guerriers de la « nation maudite / Qui est plus noire que n’est l’encre ». C’est plusieurs siècles avant les théoriciens et illustrateurs de la pensée coloniale que l’auteur écrit : « Les païens ont tort, les chrétiens ont le droit. » La guerre entre « eux » et « nous » commençait sous les auspices du manichéisme le plus candide. Oui, le racisme anti-arabe, longtemps (toujours ?) inséparable de l’islamophobie, a plusieurs siècles d’existence, remonte au Moyen-âge (croisades), puis à la Renaissance avec, notamment, les matamores, littéralement les tueurs de maures, de la Reconquista espagnole.

    Plus tard, à l’ère coloniale, l’hostilité fut énoncée avec la plus parfaite bonne conscience, sur le ton de l’évidence : « C’est évident : l’islam est une force de mort, non une force de vie »1. Persuadés d’être porteurs des vraies — des seules — valeurs civilisationnelles, les contemporains de la conquête, puis de la colonisation, allèrent de déboires en désillusions : les catholiques et les missionnaires constataient, navrés, que la religion musulmane était un bloc infissurable ; les laïques intransigeants se désolaient, rageurs, de voir que leur conception de la Raison ne pénétrait pas dans ces cerveaux obscurcis par le fanatisme… Dès lors, les notions d’« Arabes » — la majorité des Français appelaient Arabes tous les colonisés du Maghreb — et de musulmans se fondirent en une sorte de magma incompréhensible, impénétrable. Hostilité de race et hostilité de religion se mêlèrent en une seule « phobie ».

    Il revenait à Ernest Renan de synthétiser tout l’esprit d’une époque :

    L’islam est la plus complète négation de l’Europe. L’islam est le dédain de la science, la suppression de la société civile, c’est l’épouvantable simplicité de l’esprit sémitique, rétrécissant le cerveau humain, le fermant à toute idée délicate, à tout sentiment fin, à toute recherche rationnelle, pour le mettre en face d’une éternelle tautologie : “Dieu est Dieu“.

    La réforme intellectuelle et morale, Paris, Michel Lévy Frères, 1871.

    Un mot qui remonte à 1910

    Il faut nommer cet état d’esprit ; le mot « islamophobie » paraît le mieux adapté. Et contrairement à une vulgate répandue, il est plus que centenaire. La première utilisation du mot retrouvée date de 1910. Elle figure sous la plume d’un certain Alain Quellien, aujourd’hui oublié. Il proposait une définition d’une surprenante modernité :

    L’islamophobie : il y a toujours eu, et il y a encore, un préjugé contre l’islam répandu chez les peuples de civilisation occidentale et chrétienne. Pour d’aucuns, le musulman est l’ennemi naturel et irréconciliable du chrétien et de l’Européen, l’islamisme2 est la négation de la civilisation, et la barbarie, la mauvaise foi et la cruauté sont tout ce qu’on peut attendre de mieux des mahométans.

    La politique musulmane dans l’Afrique occidentale française, Paris, Émile Larose.

    Ainsi, dès sa première apparition écrite, le mot « islamophobie » était accompagné de celui de « préjugé » et du concept de « choc des civilisations ». Suivait une liste impressionnante de citations venant de tous les horizons, multipliant les reproches hostiles : l’islam était assimilé à la guerre sainte, à la polygamie, au fatalisme, enfin à l’inévitable fanatisme.

    La même année, Maurice Delafosse, étudiant lui aussi l’islam, cette fois en Afrique subsaharienne, l’emploie à son tour :

    Pris en bloc, et à l’exception de quelques groupements de Mauritanie encore hostiles à la domination européenne, l’état d’esprit des musulmans de l’Afrique occidentale n’est certainement pas opposé à notre civilisation (…). Quoi qu’en disent ceux pour qui l’islamophobie est un principe d’administration indigène, la France n’a rien de plus à craindre des musulmans en Afrique occidentale que des non musulmans (…). L’islamophobie n’a donc pas de raison d’être dans l’Afrique occidentale.

    Revue du Monde musulman, vol. XI, 1910.

    Deux ans plus tard, Delafosse publie son maître ouvrage, dans lequel il reprend mot à mot son article de 1910, en remplaçant seulement les mots « Afrique occidentale » par « Haut-Sénégal-Niger ».

    En 1912, le grand savant Louis Massignon rapporte les propos de Rachid Ridha, un intellectuel égyptien, lors du congrès international des oulémas. Évoquant les attitudes des différentes puissances à l’égard de l’islam, Massignon reprend le mot à son compte : « La politique française pourra devenir moins islamophobe » (sous-entendu : que les autres puissances coloniales). De façon significative, il titre son article « La défensive musulmane »3. On a bien lu : « défensive » et non « offensive ».

    Après guerre, Étienne Dinet, grand peintre orientaliste converti à l’islam et son ami Slimane ben Ibrahim réemploient le mot dans deux ouvrages, en 1918 puis en 19214. Dans le second, ils exécutent avec un certain plaisir un jésuite, le père Henri Lammens, qui avait publié des écrits à prétention scientifique, en fait des attaques en règle contre le Coran et Mohammed. Dinet conclut : « Il nous a semblé nécessaire de dévoiler, non seulement aux musulmans, mais aussi aux chrétiens impartiaux, à quel degré d’aberration l’islamophobie pouvait conduire un savant. »

    Le mot apparaît également dans la presse, justement dans une critique fort louangeuse du premier de ces ouvrages : « Le fanatisme de Mohammed n’est ni dans sa vie ni dans le Coran ; c’est une légende inventée par les islamophobes du Moyen Âge »5.
    Un mensonge historique qui dure

    Le mot (non la chose) va ensuite disparaître du vocabulaire jusqu’aux années 1970-1980. En 2003, deux écrivaines, Caroline Fourest et Fiametta Venner, publient dans leur revue un dossier au titre évocateur, « Islamophobes… ou simplement laïques ? »6. Le titre de l’article introductif utilise le mot « islamophobie » assorti d’un prudent — et significatif — point d’interrogation. Il commence par cette formule : « Le mot “islamophobie“ a une histoire, qu’il vaut mieux connaître avant de l’utiliser à la légère ». Certes. Mais elles se fourvoient et, exposition médiatique aidant, elles ont fourvoyé depuis des dizaines d’essayistes, probablement des milliers de lecteurs. Car elles affirment que les mots « islamophobie » et « islamophobe » ont été en quelque sorte des bombes à retardement déposées par la révolution iranienne, puis repris par des obscurantistes musulmans un peu partout en Occident. Les deux essayistes affirment en effet :

    Il [le mot « islamophobie »] a été utilisé en 1979 par les mollahs iraniens qui souhaitaient faire passer les femmes qui refusaient de porter le voile pour de “mauvaises musulmanes“ en les accusant d’être “islamophobes“. Il a été réactivité au lendemain de l’affaire Rushdie, par des associations islamistes londoniennes comme Al Muhajiroun ou la Islamic Human Rights Commission dont les statuts prévoient de “recueillir les informations sur les abus des droits de Dieu“. De fait, la lutte contre l’islamophobie rentre bien dans cette catégorie puisqu’elle englobe toutes les atteintes à la morale intégriste (homosexualité, adultère, blasphème, etc.). Les premières victimes de l’islamophobie sont à leurs yeux les Talibans, tandis que les “islamophobes“ les plus souvent cités par ces groupes s’appellent Salman Rushdie ou Taslima Nasreen !

    Cette version, qui ignore totalement l’antériorité coloniale du mot, sera reprise sans distance critique en 2010 par l’équipe du Dictionnaire historique de la langue française : « Islamophobie et islamophobe, apparus dans les années 1980… », donnant ainsi à cette datation – une « simple erreur » d’un siècle — un couronnement scientifique.

    Cette « erreur » reste très largement majoritaire, malgré les mille et un démentis. Caroline Fourest a ensuite proposé en 2004 dans son essai Frère Tariq, une filiation directe entre le khomeinisme et le penseur musulman Tariq Ramadan, qui le premier aurait tenté selon elle d’importer ce concept en Europe dans un article du Monde Diplomatique de 1998. En fait, si le mot y figure effectivement, entre guillemets, ce n’est que sous forme de reprise : « On peut parler d’une sorte d’ “islamophobie“, selon le titre de la précieuse étude commandée en Grande-Bretagne par le Runnymede Trust en 1997 »7. Il paraît difficile de faire de ce membre de phrase une tentative subreptice d’introduire un concept dans le débat français. D’autant… qu’il y figurait déjà. Un an plus tôt, dans le même mensuel, le mot était déjà prononcé par Soheib Ben Cheikh, mufti de la mosquée de Marseille : « La trentaine ardente et cultivée, il entend “adapter un islam authentique au monde moderne“, combattre l’ “islamophobie“ et, simultanément, le sentiment de rejet, de frustration et d’“enfermement“ dont souffrent les musulmans de Marseille »8.
    Le « sanglot » de l’homme blanc

    Pour les deux écrivaines déjà citées, c’est le mot même qui est pourtant à proscrire, car il est porteur de « terrorisme intellectuel », il serait une arme des intégristes dans leur lutte contre la laïcité, interdisant de fait toute critique de l’islam.

    L’essayiste Pascal Bruckner, naguère auteur du Sanglot de l’homme blanc, sous-titré Tiers-Monde, culpabilité, haine de soi (1983), pourfendeur plus récemment de la Tyrannie de la pénitence (2006), ne pouvait que partager les convictions de ses jeunes collègues :

    Forgé par les intégristes iraniens à la fin des années 70 pour contrer les féministes américaines, le terme d’“islamophobie“, calqué sur celui de xénophobie, a pour but de faire de l’islam un objet intouchable sous peine d’être accusé de racisme (…). Nous assistons à la fabrication d’un nouveau délit d’opinion, analogue à ce qui se faisait jadis dans l’Union soviétique contre les ennemis du peuple. Il est des mots qui contribuent à infecter la langue, à obscurcir le sens. “Islamophobie“ fait partie de ces termes à bannir d’urgence du vocabulaire ».

    Libération, 23 novembre 2010.

    Pour sa part, Claude Imbert, le fondateur et éditorialiste historique du Point, un hebdomadaire en pointe en ce domaine, utilisa — et même revendiqua — le mot dans une déclaration sur la chaîne de télévision LCI le 24 octobre 2003 :

    Il faut être honnête. Moi, je suis un peu islamophobe. Cela ne me gêne pas de le dire (…). J’ai le droit, je ne suis pas le seul dans ce pays à penser que l’islam — je dis bien l’islam, je ne parle même pas des islamistes — en tant que religion apporte une débilité d’archaïsmes divers, apporte une manière de considérer la femme, de déclasser régulièrement la femme et en plus un souci de supplanter la loi des États par la loi du Coran, qui en effet me rend islamophobe.

    Cette déclaration suscita diverses critiques, qui amenèrent le journaliste à répliquer, la semaine suivante, lors de la même émission : « L’islam, depuis le XIIIe siècle, s’est calcifié et a jeté sur l’ensemble des peuples une sorte de camisole, une sorte de carcan ». Il se disait « agacé » par l’accusation de racisme dont il était l’objet : « L’islamophobie (…) s’adresse à une religion, l’islam, non pas à une ethnie, une nation, un peuple, pas non plus à des individus constituant le peuple des musulmans… ».

    Est-il bien utile de poursuivre la liste de ces nouveaux combattants, de ces modernes « écraseurs de l’infâme »9 ? Chaque jour, parfois chaque heure, ils ont l’occasion de répéter leurs vérités, dans des hebdomadaires à couvertures en papier glacé, à la télévision, dans des cénacles, sans craindre des contradicteurs ultra-minoritaires… ou absents.

    Si l’utilisation du concept par certains musulmans fondamentalistes, à la moindre occasion, peut et doit irriter, il paraît cependant difficile de contester que des islamophobes existent et qu’ils agissent. Tout acte hostile, tout geste brutal, toute parole insultante contre un(e) musulman(e) parce qu’il (elle) est musulman(e), contre une mosquée ou une salle de prière, ne peut être qualifié que d’acte islamophobe. Et, puisqu’il y a des islamophobes, qu’ils constituent désormais un courant qui s’exprime au sein de la société française, comment qualifier celui-ci autrement que d’islamophobe ?

    Les musulmans de France n’ont nullement besoin d’avocats. Dans leur grande majorité hostiles à la montée — réelle — de l’intégrisme, ils placent leur combat sur le terrain de la défense d’un islam vrai, moderne, tolérant, tout en restant fidèle à la source.
    Réfuter la logique d’affrontement

    Parallèlement, une forte réaction s’est dessinée, par des auteurs ne se situant pas du tout dans une vision religieuse, pour réfuter et dénoncer la logique d’affrontement. Alors que l’usage même du mot apparaissait à beaucoup comme une concession aux terroristes (au moins de la pensée), Alain Gresh titra justement : « Islamophobie » un article novateur du Monde Diplomatique (novembre 2001). En 2004, le sociologue Vincent Geisser publiait aux éditions La Découverte la première étude synthétique sur la question, La nouvelle islamophobie. L’année suivante, un autre chercheur, Thomas Deltombe, décortiquait chez le même éditeur L’islam imaginaire. La construction médiatique de l’islamophobie en France, 1975-2005.

    Les essais plus récents d’Edwy Plenel, Pour les musulmans (La Découverte, 2013) et de Claude Askolovitch, Nos mal-aimés, ces musulmans dont la France ne veut pas( Grasset, 2013) ont entamé une contre-offensive. Ce dernier affirme, dans son chapitre de conclusion :

    Ce que la France a construit depuis vingt-cinq ans à gauche comme à droite, à force de scandales, de lois et de dénis, de mensonges nostalgiques, c’est l’idée de l’altérité musulmane, irréductible à la raison et irréductible à la République ; la proclamation d’une identité en danger, nationale ou républicaine, et tout sera licite — légalement — pour la préserver...

    Chez les catholiques progressistes, même réponse :

    Schizophrénie. Tandis que les révolutions arabes témoignent d’une soif de démocratie de la part des musulmans, la peur de l’islam empoisonne l’atmosphère en France et, à l’approche des élections, l’épouvantail est agité plus que jamais. Sarkozy n’a-t-il pas voulu un débat sur la place de l’islam dans la République ? Il reprend ainsi un des thèmes favoris du Front national.

    Revue Golias, n° 137, mars 2011.

    Autre écho contemporain, sous la plume de Jean Baubérot, spécialiste de la sociologie des religions et de la laïcité :

    De divers côtés, on assiste à la multiplication d’indignations primaires, de propos stéréotypés qui veulent prendre valeur d’évidence en étant mille fois répétés par le moyen de la communication de masse. L’évolution globale est inquiétante, et cela est dû à la fois à la montée d’extrémismes se réclamant de traditions religieuses (au pluriel) et d’un extrême centre qui veut s’imposer socialement comme la (non) pensée unique et rejette tout ce qui ne lui ressemble pas (…). L’Occident est le “monde libre“ paré de toutes les vertus face à un islam monolithique et diabolisé.

    Le Monde, 6 octobre 2006.

    Suit dans le même article un parallèle entre l’antisémitisme du temps de l’affaire Dreyfus et la montée de l’islamophobie au début du XXIe siècle : « De tels stéréotypes sont permanents : seuls changent les minorités qu’ils transforment en boucs émissaires. La lutte contre l’intolérance ne dispense pas de la lutte contre la bêtise haineuse ». En ces temps où les grands qui nous dirigent n’ont que le mot « guerre » à la bouche ou sous la plume, il est des phrases réconfortantes10.
    Alain Ruscio

    1Arnold Van Gennep, La mentalité indigène en Algérie, Mercure de France, septembre-décembre 1913.

    2À l’époque synonyme d’islam.

    3Revue du Monde musulman, vol. XIX, juin 1912.

    4La vie de Mohammed, Prophète d’Allah, H. Piazza & Cie ; L’Orient vu de l’Occident, Piazza & Geuthner.

    5Édouard Sarrazin, Journal des Débats, 6 août 1919.

    6Revue ProChoix, n° 26-27, automne-hiver 2003.

    7Commission présidée par le professeur Gordon Conway, Islamophobia : Fact Not Fiction, Runnymede Trust, octobre 1997.

    8Cité par Philippe Pons, juillet 1997.

    9NDLR. Surnom de Voltaire, pour qui l’« infâme » était le fanatisme religieux.

    10On notera la prise de position de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) qui a entériné le terme d’islamophobie dans son rapport de 201

  • Thomas Deltombe : « L’islamophobie, un instrument de pouvoir qui permet de reformuler le #Racisme d’antan »
    http://contre-attaques.org/l-oeil-de/article/thomas

    Interview de Thomas Deltombe, journaliste et essayiste, qui pose son regard sur l’islamophobie des quarante dernières années. L’année 2015, ses deux attentats terroristes et l’islamophobie galopante marquent-ils une rupture dans le paysage historique Français en matière d’islamophobie. Thomas Deltombe y répond. Extrait. Après les attentats de Charlie Hebdo et de l’Hyper Cacher en janvier 2015, le nombre d’actes islamophobes en France s’est sensiblement accru. Dans ce pays où vivent quelque cinq (...)

    #L'œil_de_Contre-Attaques

    / #Ailleurs_sur_le_Web, #carousel, #Islam, Racisme

    "http://www.middleeasteye.net/fr/reportages/deltombe-l-islamophobie-un-instrument-de-pouvoir-qui-permet-de-reform"

  • La construction médiatique de l’islamophobie en France
    http://contre-attaques.org/l-oeil-de/article/155

    Et si les #Médias étaient aussi responsables de la montée de l’islamophobie en France . Thomas Deltombe, éditeur et auteur de l’Islam imaginaire. La construction médiatique de l’islamophobie en France (1975-2005), décrypte la construction médiatique de l’islamophobie lors d’une conférence de l’Iremmo, institut de recherche et d’études Méditérrannée Moyen-Orient, dans le cadre d’un séminaire sur l’Europe, les musulmans et la montée de l’islamophobie. Thomas Deltombe est l’auteur de l’Islam imaginaire. La (...)

    #L'œil_de_Contre-Attaques

    / #video, #Ailleurs_sur_le_Web, Médias

    « http://www.iremmo.org/spip/spip.php?article640 »

  • ▶ BBC World Service - The Documentary, Mapping the Void

    http://www.bbc.co.uk/programmes/p01wl743

    Signalé à la volée par Thomas Deltombe qui sait toujours très bien ce qui me fait plaisir !

    Mapping the Void

    Duration: 25 minutes

    Tuesday 08 April 2014

    https://dl.dropbox.com/s/nu1t1dcluh8rc16/thefallenmap.png

    Dr Kat Arney meets the people trying to change the world one map at a time. These are volunteers who use their free time to map the world’s unmapped places and people.

    She sees how being on a map affects people’s work, education and rights. She hears how in extreme weather or after a natural disaster, mappers help us find those who have fallen off the maps. She also hears from crisis mappers, people who source any information they can after tragedies to document what is happening on the ground as fast as possible.

    This story starts in January 2010, when a huge earthquake hit the island nation of Haiti. Thousands of miles away, a group of American students heard about the damage, logged onto their laptops and started mapping any post-disaster information they could find online. Their aim was to help the rescue and relief services save as many lives as possible.

    Four years on, international contingents of cartographers now deploy after every natural disaster, and in areas of political unrest and civil war. They scour the internet for cries for help on social media, then mark them on maps to try to get help to people who need it most.

    There’s also a project making a continual effort to make the most accurate physical map of the globe. Contributing could mean joining a mapping party in London. Or cycling around rural Uganda with a GPS device.

    Thousands of volunteers are now spending their spare time contributing to these efforts. Some of those who started it all have become internationally recognised in a new area of expertise. As volunteers assemble around the world, Dr Kat Arney asks how powerful these maps can be and also assesses the problems that come with them.

    #cartographie #bbc

  • La New York Public Library publie 20.000 cartes téléchargeables gratuitement | Slate.fr

    http://www.slate.fr/culture/85389/new-york-public-library-cartes-gratuit

    http://www.slate.fr/sites/default/files/imagecache/blognews-picture/france_5.jpg

    A Slate, on adore les cartes, toutes les cartes : celles qui éclairent l’actualité, celles qui racontent l’Histoire, celles qui expliquent la société. On ne pouvait donc qu’accueillir chaudement l’initiative Open Access Maps de la bibliothèque publique de New York qui vient de rendre accessibles à tous une véritable mine de cartes, plus de 20.000, rapportée par le site Open Culture.

    #cartographie

  • "L’islamophobie, « Le Monde » et une (petite) censure"

    http://blog.mondediplo.net/2013-11-05-L-islamophobie-Le-Monde-et-une-petite-censure

    sur un texte intéressant de Thomas Deltombe (comme bien souvent)

    Une idéologie rance et raciste abritée derrière un masque humaniste

    On a pu croire, en cet automne 2013, que l’ère du déni était terminée. Après la série d’agressions antimusulmanes de cet été, qui — pour la première fois — ont été médiatisées, deux livres venaient rappeler que l’islamophobie n’est pas une lubie : celui du journaliste Claude Askolovitch, dont le titre, Nos mal-aimés. Ces musulmans que la France ne veut pas, indique clairement que son auteur, jadis moins lucide, a rompu avec le petit milieu qui prospère sur la haine des musulmans ; et celui des sociologues Abdellali Hajjat et Marwan Mohammed, Islamophobie. Comment les élites françaises fabriquent le « problème musulman », qui fait le point sur les recherches académiques menées depuis une dizaine d’années, en France et ailleurs, sur ce racisme New Age. Commentant ce dernier ouvrage, un éditorial du Monde du 27 septembre admit enfin l’évidence : l’islamophobie n’est pas un « fantasme », mais bien une « réalité ».

    On dut pourtant rapidement déchanter. Car la machine islamophobe, si puissante, si violente, se remit immédiatement en branle. Après avoir reconnu — fait inédit — qu’il existait un « racisme antimusulman », la polémiste Caroline Fourest précisa que ce racisme était l’exclusivité de quelques excités et nia toute validité au concept d’« islamophobie », qu’elle incarne pourtant parfaitement (France culture, 1er octobre). Les hebdomadaires ressortirent de leurs tiroirs leurs éternels « intégristes » qui, coupables de tout, permettent aux éditorialistes de rameuter les troupes. Il est urgent de « combattre », nous exhorte Christophe Barbier en préambule du énième dossier que L’Express consacre au « communautarisme » (8 octobre). Quant à l’éditorial du Monde, il fut confirmé trois jours plus tard à la une du journal par un de ses dessins douteux dont Plantu est devenu coutumier (Le Monde, 1er octobre). Faisant une analogie entre un musulman haineux (« Islamorama ») et un syndicaliste hargneux (« Castorama »), cette « caricature » rappela à certains lecteurs — comme le rapporte le médiateur (Le Monde, 4 octobre) — l’iconographie antisémite et anticommuniste du journal Je suis partout dans les années 1940.

    Le dessin de Plantu rappelle aussi un autre événement qui mérite d’être mentionné, car il peut être considéré comme l’acte de naissance de l’islamophobie contemporaine en France. C’était il y a trente ans, en janvier 1983 : confronté à un vaste mouvement social dans une industrie automobile en crise, le gouvernement « socialiste », en pleine reconversion néolibérale et décidé à ne rien céder aux ouvriers, discrédita médiatiquement les grévistes, dont beaucoup étaient immigrés, en les assimilant aux mollahs iraniens. « Des grèves saintes d’intégristes, de musulmans, de chiites ! », s’enflamma le ministre de l’intérieur. Le stratagème provoqua quelques remous à gauche. Le Nouvel Observateur dénonça cet « anti-islamisme indistinct » qui « conduit à voir en chaque musulman un complice virtuel de Khomeyni ». Quant à Libération, il y vit le prélude d’un raz-de-marée « raciste ». Malgré ces avertissements, vite oubliés, l’entourloupe fonctionna. La presse obéissante fit ses choux gras des « intégristes » en col bleu. Satisfaites, la droite et l’extrême droite constatèrent à cette occasion qu’il était plus efficace, pour insulter les « bougnoules », de les appeler « musulmans ».

    Car telle est la fonction de l’islamophobie : encoder le racisme pour le rendre imperceptible, donc socialement acceptable. C’est cette machine à raffiner le racisme brut, lancée par les socialistes en 1983, qui tourne à plein régime depuis trente ans, à gauche comme à droite. On ne parle évidemment jamais de « bougnoules » à la télévision et dans la presse, et assez peu d’Arabes et de Noirs. Mais on diffuse à flux continu des reportages où se déverse un magma confus de « musulmans », d’« islamistes » et autres « communautaristes ». Rien de raciste, bien sûr ! C’est simplement que ces gens-là posent « problème », nous dit-on, car ils menacent la « république », la « laïcité », le « féminisme », le « vivre ensemble ». Ainsi encodé, ce racisme raffiné, produit dans les beaux quartiers, imprimé dans les journaux, mis en scène à la télévision, propagé par email et sur réseaux sociaux, se dissémine dans toute la société. Laquelle, ainsi habituée à vivre dans un mélange de peur identitaire et d’angoisse sécuritaire, est sommée de traquer les voiles litigieux, de mesurer les poils de barbe et de signaler le moindre « colis suspect ». Attentifs ensemble !

    Alimentée depuis trois décennies par des bataillons d’éditocrates sur-payés, l’islamophobie est devenue une arme psychologique redoutable. Les premières victimes sont bien sûr « musulmanes », ou supposées telles. Suspectées, disqualifiées, déshumanisées par la propagande néo-raciste, elles sont d’autant plus « légitimement », et parfois légalement, discriminées, exclues, arrêtées ou agressées qu’on en a fait des « objets phobogènes », comme disait le psychiatre Frantz Fanon. Mais derrière les musulman.e.s, la cible est plus large : l’islamophobie est devenue l’arme secrète d’une guerre sociale diffuse. Par effraction, ce racisme sans race, cette haine respectable, installe dans nos têtes l’idée d’une société assiégée, allergique à la nouveauté, à l’étrangeté, à la pluralité. Derrière son masque « humaniste », parfois même « antiraciste », cette idéologie rance ne rejette pas seulement les musulmans. Elle chasse aussi les roms, fabrique des « clandestins », protège les privilégiés contre les « parasites », quels qu’ils soient. Des musulmans d’Islamorama aux syndicalistes de Castorama : raccourci édifiant.

    En 1984, un an après la manœuvre anti-ouvrière du gouvernement socialiste, le Front national remportait ses premiers succès électoraux, lors des scrutins municipaux et européens. En 2014, le parti lepéniste est d’ores et déjà assuré d’un nouveau triomphe. Mais ceux qui nourrissent la bête immonde depuis trente ans n’y sont pour rien. C’est la faute aux « intégristes » !