person:yves-charles zarka

  • Carl Schmitt, entre tactique et théoriqe_ La vie des idées

    http://www.laviedesidees.fr/Carl-Schmitt-entre-tactique-et.html

    L’essai de Jean-François Kervégan a le grand mérite de « dépassionner » la réception de Carl #Schmitt. Cette réception houleuse s’explique évidemment par les détestables positions politiques du juriste allemand - auxquelles il faudrait ajouter le rôle historique, peu reluisant, qu’il a entendu jouer. La répugnance que Schmitt inspire a pu susciter certaines réactions aux conséquences regrettables. Ainsi, il a parfois été reproché aux « schmittologues » de faire preuve d’une complaisance hypocrite ou, comme l’écrivait Yves-Charles Zarka, de confectionner « un Schmitt de confiserie, à qui l’on a ôté sa face obscure et effrayante, et que l’on présente comme un grand penseur » [6]. Cette thèse n’était pas dépourvue de vraisemblance car certains exégètes de Schmitt ont effectivement tenté de minimiser l’importance de son engagement national-socialiste [7]. Il est de surcroît possible que d’autres se soient, en toute bonne foi, laissés prendre au piège d’un auteur habile à réécrire sa propre histoire. Malgré sa plausibilité, la thèse du « Schmitt de confiserie » a eu néanmoins des effets parfois déplaisants. Elle a fait peser un injuste soupçon sur des commentateurs qui n’avaient nullement l’intention de lénifier les positions partisanes de Schmitt, mais cherchaient simplement à expliquer son œuvre. Ces auteurs ont été ainsi placés dans une alternative inconfortable. Soit ils abandonnaient leur objet d’étude, en espérant éteindre ainsi un soupçon qu’ils savaient infondé. Soit ils poursuivaient cette étude tout en protestant de leur bonne foi, au risque d’aviver ledit soupçon, tant il est difficile d’être son propre avocat. Bien entendu, nul lecteur de bonne foi n’aurait l’idée de classer Jean-François Kervégan parmi les douteux « confiseurs » dont Yves-Charles Zarka s’est fait fort de dénoncer le vilain commerce. Dans ses précédents travaux, comme dans le présent ouvrage, Jean-François Kervégan n’a jamais manqué de condamner très fermement les positions politiques de Schmitt. Mais là n’est pas le principal intérêt de son Que faire de Carl Schmitt ? À nos yeux, l’ouvrage a d’abord le mérite de rappeler qu’une œuvre intellectuelle ne se résume pas à une série de prises de position - fussent-elles aussi lamentables que celles de Schmitt. D’autres aspects suffisent à justifier un intérêt scientifique ou philosophique parfaitement légitime : la valeur documentaire, la fertilité intellectuelle ou, tout simplement, les défis que soulève telle ou telle œuvre.