L’un des problèmes de la cartographie présente dans un certain nombre de lieux où l’on est confronté à elle (la télévision, les journaux, l’école), réside dans le fait qu’elle ne reflète pas la vraie place de la France dans le monde. Ainsi, l’école française utilise la carte faite sous projection de Mercator4, système de cartographie du monde qui agrandit les zones éloignées de l’Équateur, tandis qu’il minimise celles qui en sont proches. C’est pourquoi, alors que Madagascar est en réalité deux fois plus grand que la Grande Bretagne, ces deux îles apparaissent sur une telle carte quasiment identiques du point de vue de la superficie. De même, l’Inde, qui est pourtant grande comme six fois la France métropolitaine, ne représente sur ce même type de cartes pas plus de deux fois l’Hexagone.
Or, même si la carte sous projection de Mercator reste avantageuse pour les navigateurs car ses dessins des côtes sont conformes aux angles qu’ils dessinent dans la réalité, si l’on souhaite que nos écoliers prennent réellement conscience de ce qu’est le monde, et donc qu’ils connaissent la vérité sur celui-ci, nous ne pouvons passer outre le fait que cela doit passer par l’adoption d’une nouvelle cartographie pour constituer la base des cartes affichées sur les murs des salles de classe. L’on pourrait, par exemple, utiliser la carte du monde selon la projection de Peters5, beaucoup plus juste car rendant compte des véritables différences de dimension entre les zones géographiques. L’on verrait alors comment l’Afrique (qui représente en réalité l’Inde, la Chine, les États-Unis, l’Europe et le Japon réunis) est beaucoup plus longue, du Nord au Sud, que ne le laisserait supposer une carte sous projection de Mercator. Comme pour la périodisation, nous aimerions savoir ce qu’en pensent les philosophes. Ainsi, plutôt que de dénoncer, dans son dernier ouvrage (L’identité malheureuse), le fait que dans l’école primaire de son enfance, à laquelle il a rendu visite en 2009, il y avait trouvé une carte du monde sur laquelle étaient épinglées les photographies des élèves sur l’endroit où était dessiné leur pays d’origine, nous aurions aimé savoir d’Alain Finkielkraut si cette carte utilisait la projection de Mercator, celle de Peters, ou une autre. Si ce philosophe s’emparait du sujet, chercherait-il à ce que les élèves prennent connaissance de la vérité ou préfèrerait-il que la projection de Peters, pourtant plus proche de la réalité, soit mise de côté pour ne pas affecter la France, ni l’idée qu’il s’en fait, ni même a fortiori la conception de l’identité française qu’il défend ?