region:croissant fertile

  • Comment changer le cours de l’#histoire | Eurozine
    https://www.eurozine.com/comment-changer-le-cours-de-lhistoire

    Depuis des siècles, le récit expliquant les origines de l’#inégalité sociale est simple. Pendant la plus grande partie de leur histoire, les hommes vécurent dans des petits groupes égalitaires de #chasseurs-cueilleurs. Puis vint l’#agriculture, accompagnée de la #propriété privée, puis la naissance des #villes signifiant l’émergence de la #civilisation à proprement parler. Si la civilisation eut bien des aspects déplorables (les guerres, les impôts, la bureaucratie, la patriarchie, l’esclavage, etc.), elle rendit également possibles la littérature écrite, la science, la philosophie et la plupart des autres grands accomplissements humains.

    Tout le monde, ou presque, connaît les grandes lignes de cette histoire. Depuis l’époque de Jean-Jacques #Rousseau, au moins, elle a informé notre conception de la forme générale et de la direction de l’histoire humaine. Cela est d’autant plus important que ce #récit définit dans le même temps ce que nous percevons comme nos possibilités #politiques. La plupart d’entre nous considère la civilisation, et donc l’inégalité, comme une triste nécessité. Certains rêvent du retour à un #passé #utopique, de la découverte d’un équivalent industriel au “#communisme primitif” ou même, dans les cas les plus extrêmes, de la destruction complète de la civilisation et du retour à une vie de cueillette. Personne, cependant, ne remet en cause la structure élémentaire de cette histoire.

    Et pourtant, ce récit est fondamentalement problématique.

    Car il n’est pas vrai.

    • Pfiou je viens enfin de finir cet article de vulgarisation de l’actualité des connaissances archéo-anthropologiques (oui ça fait deux semaines que je le lis en plusieurs fois…). Il est vraiment super important, je trouve !

      Le premier pavé dans la mare sur notre liste concerne les origines et l’étendue de l’agriculture. La vision selon laquelle celle-ci a constitué une transition majeure dans les sociétés humaines ne repose plus sur aucun fondement solide. Dans les parties du monde où plantes et animaux furent d’abord domestiqués, il n’y eut en fait aucun “revirement” discernable du Cueilleur du Paléolithique à l’Agriculteur du Néolithique. La “transition” entre une vie reposant essentiellement sur des ressources sauvages à une autre fondée sur la production alimentaire s’étendit spécifiquement sur quelque chose comme trois mille ans. Alors que l’agriculture mit au jour la possibilité de concentrations de la richesse plus inégales, dans la plupart des cas, ceci ne commença que des millénaires après ses débuts. Entre les deux périodes, des individus dans des zones aussi retirées que l’Amazonie et le Croissant fertile du Moyen-Orient s’essayaient à l’agriculture pour voir ce qui leur convenait, une “agriculture ludique” si l’on veut, alternant annuellement entre les modes de production, autant qu’ils allaient et venaient en matière de structures sociales.

      […]

      Selon toute évidence, cela n’a plus aucun sens d’utiliser des expressions comme “la révolution agricole” lorsque l’on traite de processus aussi démesurément longs et complexes. Comme il n’y eut pas d’État semblable à l’Éden, à partir duquel les agriculteurs purent démarrer leur marche vers l’inégalité, il y a encore moins de sens à parler de l’agriculture comme ce qui donna naissance aux rangs et à la propriéte privée. S’il y a une chose à dire, c’est que c’est parmi ces populations – les peuples du “Mésolithique” – qui refusèrent l’agriculture pendant les siècles de réchauffement de l’Holocène précoce, que l’on trouve une stratification s’enracinant progressivement

      […]

      Dans au moins certains cas, comme au Moyen-Orient, les premiers agriculteurs semblent avoir consciemment développé des formes alternatives de communauté, pour accompagner leur mode de vie de plus plus intensif en travail. Ces sociétés néolithiques semblent remarquablement plus égalitaires lorsqu’on les compare à celles de leurs voisins chasseurs-cueilleurs, avec une hausse spectaculaire de l’importance économique et sociale des femmes, clairement reflétée dans leur vie rituelle et leurs arts

      […]

      Ces découvertes récentes montrent combien nos connaissances de la distribution et de l’origine des premières villes sont faibles, et combien aussi ces villes sont beaucoup plus vieilles que les systèmes de gouvernement autoritaire et d’administration par l’écrit que nous supposions jusqu’alors nécessaires à leur fondation. Et dans les centres mieux établis de l’urbanisation – la Mésopotamie, la vallée de l’Indus, le bassin de Mexico – il y a de plus en plus de preuves que les premières villes étaient organisées selon des règles consciemment égalitaires, les conseils municipaux conservant une autonomie significative par rapport au gouvernement central. Dans les deux premiers cas, les villes avec des infrastructures civiques sophistiquées fleurissaient pendant plus d’un demi-millénaire, sans aucune trace de sépultures et monuments royaux, sans grandes armées ou autres moyens de coercition à grande échelle, ni indice d’un contrôle bureaucratique direct sur la vie de la plupart des citoyens.

      […]

      Les cités égalitaires, même les régions confédérées, sont des lieux communs historiques. Ce que ne sont pas les familles et ménages égalitaires. Une fois que le verdict historique sera tombé, nous verrons que la perte la plus douloureuse des libertés humaines commença à petite échelle – au niveau des relations de genre, des groupes d’âge et de la servitude domestique – c’est-à-dire le type de relations où la plus grande intimité s’accompagne simultanément des plus profondes formes de violence structurelle. Si nous voulons vraiment comprendre comment il est devenu un jour acceptable pour les uns de transformer la richesse en pouvoir, et pour les autres de se faire dire que leurs besoins et que leurs vies ne comptaient pas, c’est bien là qu’il faudrait regarder. C’est là aussi, prédisons-nous, que le travail, le plus âpre qui soit, de création d’une société libre, devra se dérouler.

      BAM !!!

      #anthropologie #archéologie #vulgarisation #Histoire #préhistoire #structure_sociale #État #inégalité #David_Graeber #David_Wengrow #Rousseau #chasseurs-cueilleurs #agriculture
      critique de #Jared_Diammond et #Francis_Fukuyama entre autre
      @nicolasm :)

  • L’hypothèse des routes maritimes pour la colonisation de l’Europe.

    Article déjà vu ici parmi d’autres propos des gènes : https://seenthis.net/messages/702895

    Les populations néolithiques, qui ont colonisé l’Europe il y a environ 9 000 ans, ont probablement migré du Proche-Orient vers l’Anatolie et de là vers l’Europe centrale via la Thrace et les Balkans. Un itinéraire alternatif aurait été île en île à travers la côte sud de l’Europe. Pour tester cette hypothèse, nous avons analysé les polymorphismes de l’ADN du génome sur les populations riveraines de la côte méditerranéenne, d’Anatolie et d’Europe continentale. Nous observons une structure frappante corrélant les gènes avec la géographie autour de la mer Méditerranée avec des clines caractéristiques du flux de gènes d’est en ouest. En utilisant l’analyse des réseaux de population, nous avons également constaté que le flux de gènes d’Anatolie en Europe provenait du Dodécanèse, de la Crète et de la côte méridionale, ce qui est compatible avec l’hypothèse selon laquelle une route côtière maritime était principalement utilisée pour la migration d’agriculteurs néolithiques en Europe.

    Le génotypage des populations existantes et anciennes a été utilisé pour répondre à la question des origines de la population européenne. Le génome des Européens d’aujourd’hui reflète la fusion des colons paléolithiques qui ont colonisé l’Europe 35 000 à 40 000 ans avant l’ère actuelle (BPE) et du peuple néolithique qui a commencé à coloniser l’Europe environ 9 000 ans. La contribution du néolithique au pool génétique d’Européens modernes a été estimée à l’aide d’études sur les populations européennes existantes, en utilisant l’ADN mitochondrial, l’ADN du chromosome Y ou les polymorphismes de l’ADN nucléaire. Des études sur l’ADN mitochondrial estiment que la contribution du néolithique aux lignées maternelles des Européens modernes oscille entre 10 et 20%. Une étude d’environ 22% a été suggérée par une étude des polymorphismes du chromosome Y, qui a également révélé que la contribution du néolithique était plus prononcée le long de la côte méditerranéenne. Les contributions néolithiques de 50 à 70% ont été estimées avec d’autres méthodologies, y compris des marqueurs d’ADN hautement polymorphes. Les caractéristiques clinales de la diversité génétique des polymorphismes autosomiques ou du chromosome Y en Europe suggèrent que les migrants néolithiques sont originaires du Proche-Orient . Il a été proposé que ces migrants du Proche-Orient apportent en Europe leurs nouvelles technologies agricoles et peut-être la langue indo-européenne. Comment ces peuples néolithiques ont-ils atteint l’Europe du Proche-Orient ?

    Le couloir du Levant, qui s’étendait du croissant fertile aux parties sud-est du bassin anatolien central, avait pour principal centre géographique la transition du mode de vie néolithique à la recherche de nourriture. Les agriculteurs du néolithique auraient pu emprunter trois voies de migration vers l’Europe. L’une d’elles était par voie terrestre jusqu’en Anatolie du nord-est et de là, à travers la Bosphore et les Dardanelles, jusqu’à la Thrace et aux Balkans. Un deuxième itinéraire était un itinéraire maritime allant de la côte anatolienne égéenne aux îles de la Méditerranée et à la côte de l’Europe méridionale. La troisième partait de la côte du Levant jusqu’aux îles de la mer Égée et à la Grèce. La navigation à travers la Méditerranée a été active pendant le Néolithique ancien et le Paléolithique supérieur (16e – 18e), comme en témoignent la découverte d’obsidienne de l’île de Milos dans des sites paléolithiques de la partie continentale grecque et la colonisation précoce de la Sardaigne. Corse et Chypre (23 ans). Si les paysans du néolithique qui ont colonisé l’Europe ont emprunté une voie maritime, ils se sont d’abord dirigés vers l’île du Dodécanèse et de la Crète. Le Dodécanèse est très proche de la côte égéenne de l’Anatolie, tandis que les îles du Dodécanèse situées à l’extrême ouest sont très proches de la Crète. La Crète abrite l’une des plus anciennes colonies néolithiques d’Europe sur le site de Knossos, établie entre 8 500 et 9 000 BPE, et les habitants de l’île ont mis en place la première civilisation européenne avancée commençant à environ 5 000 BPE.

    Pour obtenir des informations sur la question des migrations vers l’Europe, nous avons analysé les polymorphismes de nucléotide simple (SNP) autosomiques d’un génome entier à partir d’un ensemble de données de 32 populations. Cet ensemble de données comprend des échantillons de population des îles de Crète et du Dodécanèse, un de Cappadoce en Anatolie centrale, trois sous-populations de différentes régions de la Grèce continentale, 14 autres populations d’Europe méridionale et septentrionale, cinq populations du Proche-Orient et sept de l’Afrique du Nord. . En plus des méthodes établies d’analyse génétique, nous utilisons une approche de réseau de génétique de population qui permet de définir les voies du flux de gènes entre populations. Nos données sont compatibles avec l’hypothèse qu’une route maritime reliant l’Anatolie et l’Europe du Sud à travers le Dodécanèse et la Crète était la principale route utilisée par les migrants du néolithique pour atteindre l’Europe.

    https://doi.org/10.1073/pnas.1320811111
    #Préhistoire #Néolithique #peuplement #Europe #9000BP
    #Peristera_Paschou #Université_de_Thrace

    Maritime route of colonization of Europe | PNAS
    http://www.pnas.org/content/111/25/9211

  • Découverte en Israël du plus ancien « Homo sapiens » hors d’Afrique
    http://www.lemonde.fr/sciences/article/2018/01/25/decouverte-en-israel-du-plus-ancien-homo-sapiens-hors-d-afrique_5247195_1650

    "en Israël et hors d’Afrique" pour Le Monde, juste "hors d’Afrique" pour LaTribune de Genève (dans le titre : https://www.tdg.ch/savoirs/sciences/ancien-homo-sapiens-afrique/story/24882263), et "en Terre sainte" pour El-Pais sur le site mais, le lien ouvert https://elpais.com/elpais/2018/01/25/ciencia/1516906523_905455.html, on retrouve Israël !

    #palestine n’ayons pas peur du mot !

  • Comment le chat a conquis le monde
    https://lejournal.cnrs.fr/articles/comment-le-chat-a-conquis-le-monde

    Le chat domestique actuel est un lointain descendant du chat sauvage présent au Proche-Orient au début du Néolithique. Des chercheurs de l’Institut Jacques-Monod retracent pour la première fois son parcours et montrent comment le félin a accompagné des populations d’agriculteurs depuis le Croissant fertile jusqu’à l’Europe.

  • Les Sioux et leurs terres ancestrales de nouveau menacés par l’industrie pétrolière - RipouxBlique des CumulardsVentrusGrosQ
    http://slisel.over-blog.com/2016/10/les-sioux-et-leurs-terres-ancestrales-de-nouveau-menaces-par-l-ind

    Depuis plusieurs semaines, les Sioux de la réserve de Standing Rock, dans le Dakota du Nord, résistent à un projet d’oléoduc géant. Le « Dakota Access Pipeline » menace leurs terres, leurs sources d’eau et fait peser un risque de pollution supplémentaire sur le Missouri. L’affaire est en train de prendre une envergure nationale aux États-Unis. Une décision de justice provisoire vient de faire cesser temporairement les travaux sur une partie du territoire. Voici le récit de Winona LaDuke, militante et femme politique amérindienne. « Qu’aurait fait Sitting Bull ? », s’interroge-t-elle, en référence au leader historique de la résistance à la colonisation.

    J’ai la tête plus claire à mesure que je m’approche en voiture. Ma destination est la patrie des Oceti (Sioux) Hunkpapa, la réserve de Standing Rock, dans le Dakota du Nord. C’est le début de la soirée, la lune est pleine. La route qui va vers ces contrées est peu fréquentée. La plupart des Américains ne font que passer en avion au-dessus du Dakota du Nord, sans le voir. Laissez moi vous y emmener. En fermant les yeux, 50 millions de bisons – jadis le plus important troupeau itinérant de la planète – vous reviennent à l’esprit. Le battement de leurs sabots faisait vibrer la Terre, et pousser l’herbe.

    Il y avait alors 250 espèces d’herbe. Aujourd’hui, les bisons ont disparu, remplacés par 28 millions de têtes de bétail, qui ont besoin de grain, d’eau, et de foin. Une grande partie des champs sont cultivés avec une seule variété OGM, tellement imbibée de pesticides que les papillons monarques meurent. Mais dans ma mémoire, l’ancien monde est toujours là.

    En continuant votre route, vous arrivez à la rivière Missouri. Appelée Mnisose, la grande rivière tourbillonnante, par les Lakota, c’est une puissance de la nature. Elle vous coupe le souffle. « La rivière Missouri a une place inébranlable dans l’histoire et la mythologie » des Lakota et des autres nations indigènes des Plaines du Nord, explique l’écrivain Dakota Goodhouse.

    À l’époque d’avant Sitting Bull, la rivière Missouri était l’épicentre de l’agriculture du Nord, en raison de la fertilité de son lit. La région était le Croissant fertile de l’Amérique du Nord. C’était avant que les traités ne réduisent le territoire des Lakota. Mais le Missouri continuait à figurer dans les traités : le dernier, signé en 1868, désignait la rivière comme frontière.

    C’est ainsi que l’on appauvrit un peuple

    Survinrent ensuite les vol de terres par le gouvernement des États-Unis et l’appropriation des Black Hills en 1877, en partie en guise de représailles suite à la victoire de Sitting Bull à la bataille de Little Big Horn. Bien avant le mouvement Black Lives Matter et son homologue indigène Native Lives Matter, de grands leaders comme Sitting Bull et Crazy Horse ont été assassinés par la police.

    Contraints de mener une existence confinée dans leur réserve, les Lakota s’efforcèrent de stabiliser leur société, jusqu’à ce qu’arrivent les barrages. En 1944, le projet Pick Sloan entraîna la submersion de territoires appartenant aux tribus de la rivière Missouri, prenant aux Mandan, aux Hidatsa, aux Arikara, aux Lakota et aux Dakota leurs meilleurs terres basses. Plus de 800 kilomètres carrés des réserves de Standing Rock et de Cheyenne River furent à leur tour submergées par le barrage Oahe lui-même, entraînant non seulement des déplacements de population, mais la perte d’une partie du monde Lakota. La retenue d’eau créée par les barrages Garrison, Oahe et Fort Randall contribua à la destruction de 90% du bois et 75% de la vie sauvage dans les réserves. C’est ainsi que l’on appauvrit un peuple.

    Aujourd’hui, bien plus de deux tiers de la population de Standing Rock vit au-dessous du seuil de pauvreté – la terre et la « Rivière Mère » (le Missouri) sont tout ce qui reste, la seule constante, pour ce peuple. Ce sont précisément elles qui sont aujourd’hui menacées.

    Un projet parachevant la combustion de la planète

    Cette fois, au lieu du 7e régiment de cavalerie, ou de la police indienne envoyée pour assassiner Sitting Bull, ce sont Enbridge [entreprise canadienne impliqué dans de nombreux projets d’oléoducs controversés, NdT] et le Dakota Access Pipeline, un projet d’oléoduc long de 1800 km [1] qui font monter la pression sur ces terres indiennes.

    À la mi-août, le président tribal de Standing Rock, Dave Archambault II, a été arrêté par la police de l’État, avec 27 autres personnes, pour son opposition à l’oléoduc Dakota Access. Dans le même temps, le gouverneur du Dakota du Nord Jack Dalrymple demandait des renforts de police.

    Enbridge et ses partenaires se préparent à forer sous le lit de la rivière. L’oléoduc Dakota Access a reçu les autorisations officielles du côté est comme du côté ouest. Sa portion nord a été déplacée, pour ne pas affecter l’approvisionnement en eau de la ville de Bismarck, vers les sources d’eau de Standing Rock. Pas de chance pour les Lakota.

    Malgré les recours juridiques et réglementaires de ces derniers, la construction du Dakota Access Pipeline a commencé en mai 2016. S’il est achevé, cet oléoduc sinuera à travers le Dakota du Sud et du Nord, l’Iowa et l’Illinois, où il fera sa jonction avec un autre oléoduc, long de 1200 kilomètres, jusqu’à Nederland, au Texas.

    Plus de 570 000 barils de pétrole brut en provenance du gisement de Bakken (à cheval entre les Etats-Unis et le Canada) y seraient quotidiennement acheminés, soit plus de 245 000 tonnes métriques de carbone – suffisamment pour parachever la combustion de notre planète.

    L’oléoduc doit franchir 200 cours d’eau. Dans le seul Dakota du Nord, il traverserait 33 sites historiques et archéologiques. Enbridge vient de faire l’acquisition de ce projet d’oléoduc, constatant que son autre projet – l’oléoduc Sandpiper, qui acheminerait 640 000 barils de pétrole par jour vers le Minnesota – est désormais en retard de trois ans sur les prévisions.

    Procédure d’autorisation accélérée

    Fin juillet, la tribu Sioux de Standing Rock, représentée par l’organisation Earthjustice, a déposé plainte devant un tribunal de Washington contre l’US Army Corps of Engineers [l’administration fédérale en charge de nombreux grands projets d’infrastructures, NdT]. Standing Rock a également déposé un recours auprès de l’Organisation des Nations-Unies, en coordination avec l’International Indian Treaty Council [une organisation internationale de peuples indigènes, NdT].

    Comme l’explique le président Archambault dans les colonnes du New York Times :« Aussi bien l’Agence fédérale de protection de l’environnement, le Département de l’Intérieur que le Conseil consultatif national sur le patrimoine historique ont soutenu le renforcement de la protection du patrimoine culturel de notre tribu, mais le Corps of Engineers et Energy Transfer Partners [le consortium qui porte le projet Dakota Access Pipeline, NdT] ont ignoré nos droits. La première version de l’évaluation du tracé proposé à travers nos terres ancestrales et protégées par traités, réalisée par l’entreprise, ne mentionnait même pas notre tribu. »

    « Le Dakota Access Pipeline a bénéficié d’une procédure d’autorisation accélérée dès le premier jour, appelée Nationwide Permit nº12, qui exempte l’oléoduc de toutes les évaluations environnementales requises requises par le Clean Water Act et le National Environmental Policy Act [importantes lois sur l’eau et l’environnement, NdT] en le traitant comme une série de petits chantiers. »

    « Le projet a été approuvé en un éclair, sans plus d’examen, par les quatre États concernés. »

    Dans l’Iowa, où la construction de l’oléoduc a démarré, trois incendies se sont déclarés, endommageant sérieusement les équipements, pour un coût estimé d’un million de dollars. Selon le shérif du comté, les enquêteurs soupçonnent un incendie volontaire. En octobre 2015, trois agriculteurs de l’Iowa ont déposé plainte contre l’entreprise Dakota Access LLC et l’administration de l’Iowa pour essayer d’empêcher le recours au droit d’expropriation pour utilité publique de leurs terres pour la construction de l’oléoduc.

    Menace pour la rivière Missouri

    Il n’est tenu aucun compte de la santé de la rivière Missouri. Depuis que celle-ci a été couverte de barrages, de nouveaux projets sont venus affecter davantage son état écologique. Aujourd’hui, le Missouri est la septième rivière la plus polluée des États-Unis. Les rejets agricoles et, désormais, la fracturation hydraulique ont contaminé la rivière. Ma sœur a pêché un brochet crocodile, une espèce préhistorique de poisson géant, dans cette rivière ; il était couvert de tumeurs.

    Un seul exemple : suite à un accident survenu sur un oléoduc en janvier 2015, une fuite massive d’eau saline a atteint le Missouri. Avec l’aplomb coutumier aux agences fédérales ou d’État, le directeur de la Santé du Dakota du Nord, David Glatt, a déclaré qu’il ne s’attendait pas à des effets dommageables pour la vie sauvage ou l’approvisionnement en eau potable, car cette eau serait diluée. Comme dit le dicton,« la solution à la pollution est la dilution ». Pratique. Sauf que ce n’était pas vrai. Deux rivières, Black Creek et Little Muddy River, se sont retrouvées contaminées par presque 11 millions de litres d’eau saline, présentant des taux élevés de chlorures. Tout était dilué. Mais on a tout de même trouvé ce brochet avec ses tumeurs.

    Il y a des oléoducs partout, et moins de 150 inspecteurs dans l’administration chargée de la surveillance de ces ouvrages, la Pipeline Hazardous Materials Safety Administration ou PHMSA, dans tout le pays. S’y ajoutent désormais les risques du pétrole.

    Les entreprises qui gèrent les oléoducs se vantent généralement de leur taux de sûreté de 99 %. Une ancienne éditrice du magazine Scientific American, Trudy Bell, rapporte que les données de la PHMSA de 2001 à 2011 suggère qu’en réalité, l’oléoduc moyen « présente, sur une période de dix ans, une probabilité de 57% de subir une fuite majeure, avec des conséquences se chiffrant à plus d’un million de dollars ». Les probabilités sont contre nous.

    Conseiller de campagne de Donald Trump

    À Standing Rock, alors que le nombre de manifestants passait de 200 à 2000, les forces de police de l’État décidèrent de mettre en place un checkpoint pour filtrer les arrivées et de détourner du trafic vers l’autoroute 1806 allant de Bismarck à Standing Rock, afin de dissuader les venues et mettre sous pression le Prairie Knights Casino (un casino géré par des membres de la communauté indienne, NdT), situé dans la réserve, et desservie par cette même route.

    Nous venons de dépasser celui-ci en voiture ; la route est somptueuse. Et à mesure que les soutiens arrivent en masse, l’hôtel et les restaurants du casino sont pleins à craquer.

    Tandis que les autorités du Dakota du Nord cherchent ainsi à punir les Lakota, le président Archambault, lui, exprime sa préoccupation : « Je suis ici pour informer quiconque voudra m’écouter que le projet Dakota Access Pipeline est dommageable. Il ne sera pas seulement dommageable pour mon peuple, mais son objectif et sa construction nuiront également à la qualité de l’eau dans la rivière Missouri, qui figure parmi les rivières les plus propres et les plus sûres de tous les États-Unis. Contaminer l’eau, c’est contaminer la substance de la vie. Tout ce qui bouge a besoin d’eau. Comment peut-on parler de délibérément empoisonner l’eau ? »

    Dans le même temps, le gouverneur du Dakota du Nord Jack, Dalrymple, a déclaré l’état d’urgence et mobilisé de nouvelles ressources « pour gérer les risques pour la sécurité publique liés aux manifestations actuelles contre le Dakota Access Pipeline ». Il pourrait bien avoir outrepassé ses prérogatives en violant les droits humains et civils, dont le droit à l’eau.

    Selon les termes du président Archambault, « il n’y a peut-être que dans le Dakota du Nord, où les élus bénéficient des largesses des magnats du pétrole, et dont le gouverneur, Jack Dalrymple, est un conseiller de campagne de Donald Trump, que les autorités d’un État et d’un comté peuvent jouer ainsi le rôle d’agents armés des intérêts des multinationales ».

    « Les gens se souviennent de leur histoire »

    De nombreuses personnes présentes aujourd’hui à Standing Rock se souviennent de leur histoire et notamment de la longue confrontation de Wounded Knee en 1973 (site du massacre de centaines d’hommes, de femmes et d’enfants Sioux en 1890, Wounded Knee fut occupée en 1973 pendant plus de deux mois par des militants indigènes encerclés par la police et l’armée. La confrontation a fait deux morts). De fait, il y a parmi les militants de Standing Rock des gens qui étaient déjà en 1973 à Wounded Knee, une lutte similaire pour la dignité et l’avenir d’une nation.

    Je ne sais pas à quel point le Dakota du Nord souhaite la construction de cet oléoduc. S’il doit y avoir une bataille à propos de ce projet, c’est ici qu’elle aura lieu. Face à un peuple qui n’a plus rien que sa terre et sa rivière, je ne parierai pas forcément sur ses chances.

    Le grand leader Lakota Mathew King a dit naguère que « la seule chose plus triste qu’un Indien qui n’est pas libre, c’est un Indien qui ne se souvient pas ce que c’est d’être libre ».

    Le campement de Standing Rock représente cette même lutte pour la liberté et pour l’avenir d’un peuple. De nous tous. Si je me posais la question « Que ferait Sitting Bull ? », la réponse est claire. Il nous rappellerait ce qu’il disait il y a 150 ans :« Réunissons nos esprits pour voir quel avenir nous pouvons construire pour nos enfants. » Le moment est venu.

    Winona La Duke

    Témoignage initialement paru sur le site Yes Magazine ! sous licence Creative Commons. Traduit de l’anglais par Susanna Gendall.

    Photos : Joe Brusky CC                                   

    http://www.bastamag.net

  • Un tissu péruvien vieux de 6 000 ans teint à l’indigo

    http://www.lemonde.fr/sciences/article/2016/09/16/un-tissu-peruvien-vieux-de-6-000-ans-teint-a-l-indigo_4999114_1650684.html

    L’étoffe déchirée ne paie pas de mine. Ce chiffon, retrouvé sous une colline artificielle de la côte nord du Pérou, porte pourtant témoignage de l’utilisation la plus ancienne connue de l’indigo, une teinture qui, aujourd’hui encore, est la plus utilisée au monde – elle colore les blue-jeans. La couche du site de Huaca Prieta où les pièces de tissu teintées ont été découvertes est datée de 6 000 ans. L’indigo était donc utilisé par les Péruviens environ 1 500 ans avant les Egyptiens de la Ve dynastie, dont on pensait jusqu’alors qu’ils avaient été les premiers à l’adopter.

    La découverte de Huaca Prieta rappelle en tout cas que l’invention de l’agriculture et de technologies associées n’a pas été l’apanage du croissant fertile proche-oriental : l’Amérique du Sud a elle aussi vu naître des domestications végétales anciennes, comme celle du coton. De plus, la mise en œuvre des teintures d’indigo n’est pas triviale, explique Dominique Cardon : « Il s’agit d’un pigment insoluble, qu’il faut faire revenir à l’état soluble par un traitement avec de la chaux ou de la cendre. » Une technique qui nécessite une température et un pH contrôlés. « C’est d’une complexité comparable à la maîtrise des plantes médicinales, dit-elle. Cela peut représenter des milliers d’années d’exploration. » Chacune des quinze à vingt espèces de plantes qui dans le monde contiennent des précurseurs de l’indigo suppose un traitement particulier – même si aujourd’hui, 90 % des jeans sont teintés avec de l’indigo synthétique.

    Quant à la technique textile observée à Huaca Prieta, dite « en trames cordées », elle consistait à tendre des fils de chaîne parallèles qu’on entrelaçait avec des fils de trame, explique Dominique Cardon. Elle a précédé l’invention du tissage proprement dit et était répandue dans bien des régions du monde jusqu’à une période récente.

  • Infographic: Syria Drought and Climate Change

    In March 2015, a study published in the Proceedings of the National Academy of Sciences laid out an argument for a climate-conflict link in Syria in three parts: First, a severe drought occurred that was made more likely by human-induced climate change; Second, a mass migration of drought-affected farmers fled to Syria’s cities; Third, the influx of migrants exacerbated unemployment and inequality in the cities, contributing to civic unrest over a nonresponsive government.


    http://www.circleofblue.org/2016/middle-east/infographic

    #Syrie #sécheresse #climat #changement_climatique

    • Mais combien de temps a-t-il fallu pour que l’on entende des analyses prenant en compte cette sècheresse qui a frappé les campagnes syriennes, dans la genèse de la guerre ?
      Pourtant de nombreux syriens en parlaient...

    • @cdb_77 : merci. Le document en tête du post est intéressant. Le lien vers la BD, lui, date tout de même de 2014 et elle me semble très naïve.
      Ce qui m’étonne c’est que je ne me rappelle pas d’une seule analyse évoquant cette sècheresse en 2011, dans les médias. Pas une !
      Pourtant en 2008, lors d’un voyage en Syrie, j’avais pu constater que c’était déjà un sujet de préoccupation là-bas.
      Fin 2011 dans le cadre d’une discussion de forum j’ai écrit ceci :
      http://seenthis.net/messages/471493

      De mon point de vue le régime a malgré lui apporté la flamme à la mèche. Mais le stock de poudre, que cette mèche a fait exploser, n’est pas totalement de son fait. Cette poudre explosive, c’est vrai, c’est à la fois la corruption de cercles dans le régime (les Makhlouf sont l’exemple le plus connu), une certaine forme de confessionnalisme (parfois aussi exagérée), son absence de réformes politiques réelles depuis une décennie, la brutalité réelle de ses services, l’ambiguïté de la réussite des réformes économiques de Dardari (qui maintenant se pavane au Liban et fait la retape pour les opposants), un relatif abandon des campagnes (alors qu’elles subissaient la sècheresse) …

      De mon point de vue le facteur décisif est géopolitique. Ce qui a eu lieu est une opération de changement de régime organisée largement de l’extérieur. Les preuves qui s’amoncellent depuis laissent peu de doute (les emails divulgués de H. Clinton, parmi de nombreux exemples). Mais il est clair que l’incurie du régime dans le traitement de la crise des campagnes - alors que le Baath était historiquement le parti des campagnes et des minorités - parmi d’autres facteurs, l’habituelle violence de ses moukhabarat, a créé un terrain favorable à ce genre d’opérations.
      Reste que, d’accord ou pas avec cette lecture, la question de savoir pourquoi aucune analyse proposée dans les médias n’incluait de facteurs sociaux - dont la crise affectant les campagnes et l’exode rural - reste entière. Je pense que la force de la narrative qui accompagne les évènements du type « révolution colorée » tend à réduire les modèles d’analyse proposés au public à celui d’une crise simple due aux aspirations démocratiques et qui se résoudra avec le départ du dictateur, rendu responsable de tous les maux. Or, c’est cette narrative, transfigurée dans les « Printemps arabes », qui a immédiatement dominé en 2011.
      Mais les conditions de réussite d’une révolution colorée en Syrie n’étant pas réunies - elles supposent, entre autres, un discret coup d’Etat de velours organisé de l’extérieur, impossible dans un régime syrien imperméable à la pénétration américaine et plus résilient que prévu - il a fallu passer rapidement à une guerre par proxies et donc aller à la guerre civile.
      La narrative doit alors s’adapter tout en maintenant l’essentiel : certes cela devient violent, destructeur, inquiétant, ... mais tout s’arrangera à la chute du dictateur. La BD que vous mettez en lien tente cette adaptation. Elle intègre sur le tard le facteur social mais maintient un modèle d’analyse à causalité unique : celui de la responsabilité exclusive du dictateur dans la crise et comme responsable unique de l’irruption de la violence (dans la BD : la sècheresse n’a pas été traitée par le régime qui ne se préoccupe pas de sa population, d’où la guerre).

    • @cdb_77 : sur la crise climatique l’article de 2015 de Mamarbachi sur Orient XXI est de bonne qualité, à mon avis, dans le traitement de la question de la sècheresse et de la démographie. Si la chose vous intéresse, je vous le conseille. Reste que comme la BD il vient enrichir le modèle d’analyse sur le tard (2015 !) et en l’adaptant à la narrative initiale qui s’est avérée être un fiasco absolu :
      http://orientxxi.info/magazine/comment-fonctionne-l-economie-de-guerre-en-syrie,1047

      De grenier à blé qu’elle était depuis l’Antiquité, la Syrie est en passe de se transformer en désert après plus de quatre ans de guerre sanglante qui ont succédé à des années de sécheresse et d’aléas climatiques. Alors que les combats anéantissent les vestiges des premières civilisations nées sur ces terres d’abondance, l’agriculture elle-même peine à subsister. Force est de constater que les sécheresses successives, les mouvements de population, les exodes résultant d’une démographie rampante et de la pauvreté — vidant la campagne agricole pour les villes — comptent parmi les causes premières du conflit.

    • Aux origines climatiques des conflits

      Ne pouvant plus nier les effets des activités humaines sur le climat, les dirigeants de la planète vont se retrouver à la fin de l’année à Paris pour la 21e conférence des Nations unies sur le climat (COP21). Mais ils ne semblent pas prendre toute la mesure du problème, alors que les accidents se multiplient. Les mauvaises récoltes en #Chine, par exemple, pourraient avoir attisé les « printemps arabes ».

      Et sur la Syrie :

      Entre 2006 et 2011, la Syrie a connu la plus longue #sécheresse et la plus importante perte de récoltes jamais enregistrée depuis les premières civilisations du Croissant fertile . Au total, sur les vingt-deux millions d’habitants que comptait alors le pays, près d’un million et demi ont été touchés par la désertification (1), ce qui a provoqué des migrations massives de fermiers, d’éleveurs et de leurs familles vers les villes (2). Cet exode a attisé les tensions provoquées par l’afflux de réfugiés irakiens qui avait suivi l’invasion américaine de 2003. Pendant des décennies, le régime baasiste de Damas a négligé les richesses naturelles du pays, subventionné des cultures de blé et de coton nécessitant beaucoup d’eau et encouragé des techniques d’irrigation inefficaces. Surpâturage et hausse démographique ont renforcé le processus. Les ressources hydriques ont chuté de moitié entre 2002 et 2008.

      http://www.monde-diplomatique.fr/2015/08/SINAI/53507

    • Syria and climate change: did the media get it right?

      Syria, migration and climate change will all be key issues at the World Humanitarian Summit this week, but are they interrelated, and how? Alex Randall, from the Climate and Migration Coalition, explains why media portrayal of climate driven migration as a source of conflict is both damaging and inaccurate.

      http://policy-practice.oxfam.org.uk/blog/2016/05/syria-and-climate-change-did-the-media-get-it-right

    • Climate change and the Syrian civil war revisited

      In the view of many Western policymakers and commentators, the Syrian civil war was caused, in part, by anthropogenic climate change. Former US President Barack Obama claimed that climate change-related drought ‘helped fuel the early unrest in Syria, which descended into civil war’ (Obama, 2015); former Secretary of State John Kerry argued that ‘it’s not a coincidence that immediately prior to the civil war in Syria, the country experienced its worst drought on record’ (Kerry, 2015); erstwhile Democratic presidential candidates Martin O’Malley and Bernie Sanders have claimed similarly (Democracy Now, 2015 ; Schulman, 2015); and in the UK, Prince Charles has maintained that ‘there is very good evidence indeed that one of the major reasons for this horror in Syria was a drought that lasted for five or six years’ (Mills, 2015). International organisations (e.g. the World Bank: Verme et al., 2016: p. 33), leading NGOs (e.g. Friends of the Earth: Bennett, 2015), official governmental and intergovernmental reports (e.g. Adelphi et al., 2015 ; King et al., 2015), defence think tanks (e.g. CNA Military Advisory Board, 2014: pp. 13–14), academics (e.g. Cole, 2015 ; Malm, 2016), activists (e.g. Brand, 2015) and commentators of various political persuasions (e.g. Box and Klein, 2015; Friedman, 2012 ; Friedman, 2013) – all have argued similarly.

      http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0962629816301822
      #paywall (mais avec sci-hub...)

  • Au Kurdistan d’Irak, les paysans ont perdu leur autonomie semencière
    http://www.infogm.org/au-kurdistan-d-irak-les-paysans-ont-perdu-leur-autonomie-semenciere

    Le Kurdistan d’Irak se situe dans le berceau du blé, une région connue sous le nom de Mésopotamie. C’est là qu’il y a 10 000 ans, les premières techniques de « domestication » des blés, orges et lentilles faisaient leur apparition. Et jusqu’en 1975, cette région, véritable grenier à blé irakien, produisait 45% de cette céréale [1]. Or, depuis 2004, dans ce croissant fertile qui regroupait des milliers de variétés de céréales et légumineuses seules quelques variétés sont autorisées à la mise en culture du fait des droits de propriété intellectuelle sur les semences. Les procédés qui ont participé à la mise en place d’un nouveau modèle agricole, construit sur la dépendance, tant politique que technique, sont récents et multiples. Ils se traduisent par la perte d’autonomie alimentaire, soit une alimentation basée sur 80% d’importations [2].

    Avec une carte créditée Institut Kurde de Paris :)


    #guerre_des_ressources_agricoles en attendant de trouver un tag plus court qui me convienne sur ce sujet qu’il me faudra traiter un jour #semences #agriculture #conflit

    Un article de Bénédicte Bonzi qui intervient ici
    http://seenthis.net/messages/467169

  • L’"Arche de Noé végétale" sollicitée pour la première fois du fait du conflit syrien
    AFP.com
    http://www.afp.com/fr/info/larche-de-noe-vegetale-sollicitee-pour-la-premiere-fois-du-fait-du-conflit-syri

    La Réserve mondiale de semences du #Svalbard, précieuse « Arche de Noé végétale » protégeant la #diversité_génétique des conflits et des catastrophes naturelles, a annoncé lundi qu’elle allait pour la première fois être mise à contribution, du fait du conflit syrien.

    Sa banque de gènes dans la ville syrienne d’Alep ayant été détruite, le Centre international de recherche agricole dans les zones arides (Icarda) a demandé à récupérer des graines pour reconstituer ses stocks dans les pays voisins de la #Syrie, mais pas en Syrie même, a déclaré à l’AFP Åsmund Asdal, le coordinateur de la Réserve de #semences.

  • Le paysan irakien…et Charlie - Reporterre
    http://www.reporterre.net/Le-paysan-irakien-et-Charlie

    Il y a un lien entre l’expansion du #djihadisme et les politiques menées par les Etats-Unis au Moyen-Orient. Entre le #fondamentalisme du marché, selon l’expression de Joseph Stiglitz, et le fondamentalisme islamique. Illustration avec cette histoire irakienne.

    Mohammed est un #paysan irakien, pauvre comme tous les paysans des pays « en développement ».

    Mohammed cultive du blé. Il s’agit du même blé cultivé depuis quatre millénaires, car c’est là, dans le croissant fertile, entre Tigre et Euphrate qu’a été inventée l’agriculture. Ce #blé n’est pas très productif, mais il suffit pour que Mohamme évite la #misère. Pas la #pauvreté, mais ça, il est habitué.

    Ce blé possède un petit épi, mais une grande tige. S’il offre un faible rendement, il a un mérite : sa hauteur empêche les mauvaises herbes de se développer car elle les prive de la lumière nécessaire à leur photosynthèse. Ce blé ancestral a un autre mérite : on peut resemer une partie de sa production sans diminution ultérieure du rendement.

    Tout allait bien jusqu’à la deuxième #guerre d’Irak, en 2003. Ou plutôt, tout n’allait pas plus mal. Et puis, les Etats-Unis et leurs alliés ont occupé le pays. La guerre leur avait coûté cher, il fallait bien rentrer dans les fonds investis. Alors, Paul Bremer, le responsable US du pays, a édicté un certain nombre de lois destinées à « faire entrer l’Irak dans le marché mondial ».

    Une de ces lois, parmi la centaine d’autres, concerne notre paysan Mohammed. Elle lui interdit désormais d’utiliser des semences « non homologuées », « non inscrites dans le marché mondial ». Il doit donc acheter non seulement ces #semences, mais aussi les herbicides qui les accompagnent. Car ce blé nouveau, issu de la #révolution_verte, offre des tiges courtes et de gros épis, aux rendements généreux… mais sa petite taille laisse de la lumière aux adventices qu’il faut combattre. Ce n’est pas un hasard si l’#herbicide indiqué est le plus souvent américain, élaboré par #Monsanto, le Round Up à base de #glyphosate

    Ah j’oubliais : c’est un #hybride qu’on ne peut resemer, comme toutes les semences disponibles actuellement sur le marché mondial…

    Aujourd’hui, Mohammed ne peut plus se payer ni la semence, ni l’herbicide. Il est ruiné.

    Quel choix lui reste-t-il ? On lui a fait deux propositions.

    Un passeur peut, pour une forte somme, le mettre sur un « bateau » pour l’Europe, avec probablement une chance sur trois de se noyer dans la Méditerranée, sans garantie de trouver du travail.

    L’autre option le fait hésiter. Un djihadiste lui a proposé une ceinture d’explosifs à déclencher sur le marché local. On lui garantit en échange de s’occuper de sa famille…

    On comprend son hésitation.

    À sa place, quelle option choisiriez-vous ?

    Autre question difficile : qui est responsable du #terrorisme ? Mohammed s’il accepte, le djihadiste,… ou l’occupant qui a édicté les lois ?

    L’entrée de l’Irak dans le « Marché total », avec toutes ses conséquences, n’est rien d’autre que la manifestation d’un autre fondamentalisme http://www.lesechos.fr/21/07/2008/LesEchos/20218-053-ECH_la-fin-du-neoliberalisme.htm s’opposant au fondamentalisme djihadiste. Aucun des deux ne peut être excusé.

    Ces questions devraient nous travailler en cette période troublée.

    #néolibéralisme #privatisation #agrobusiness