• #Université, service public ou secteur productif ?

    L’#annonce d’une “vraie #révolution de l’Enseignement Supérieur et la Recherche” traduit le passage, organisé par un bloc hégémonique, d’un service public reposant sur des #carrières, des #programmes et des diplômes à l’imposition autoritaire d’un #modèle_productif, au détriment de la #profession.

    L’annonce d’une « #vraie_révolution » de l’Enseignement Supérieur et la Recherche (ESR) par Emmanuel Macron le 7 décembre, a pour objet, annonce-t-il, d’« ouvrir l’acte 2 de l’#autonomie et d’aller vers la #vraie_autonomie avec des vrais contrats pluriannuels où on a une #gouvernance qui est réformée » sans recours à la loi, avec un agenda sur dix-huit mois et sans modifications de la trajectoire budgétaire. Le président sera accompagné par un #Conseil_présidentiel_de_la_science, composé de scientifiques ayant tous les gages de reconnaissance, mais sans avoir de lien aux instances professionnelles élues des personnels concernés. Ce Conseil pilotera la mise en œuvre de cette « révolution », à savoir transformer les universités, en s’appuyant sur celles composant un bloc d’#excellence, et réduire le #CNRS en une #agence_de_moyen. Les composantes de cette grande transformation déjà engagée sont connues. Elle se fera sans, voire contre, la profession qui était auparavant centrale. Notre objet ici n’est ni de la commenter, ni d’en reprendre l’historique (Voir Charle 2021).

    Nous en proposons un éclairage mésoéconomique que ne perçoit ni la perspective macroéconomique qui pense à partir des agrégats, des valeurs d’ensemble ni l’analyse microéconomique qui part de l’agent et de son action individuelle. Penser en termes de mésoéconomie permet de qualifier d’autres logiques, d’autres organisations, et notamment de voir comment les dynamiques d’ensemble affectent sans déterminisme ce qui s’organise à l’échelle méso, et comment les actions d’acteurs structurent, elles aussi, les dynamiques méso.

    La transformation de la régulation administrée du #système_éducatif, dont nombre de règles perdurent, et l’émergence d’une #régulation_néolibérale de l’ESR, qui érode ces règles, procède par trois canaux : transformation du #travail et des modalités de construction des #carrières ; mise en #concurrence des établissements ; projection dans l’avenir du bloc hégémonique (i.e. les nouveaux managers). L’action de ces trois canaux forment une configuration nouvelle pour l’ESR qui devient un secteur de production, remodelant le système éducatif hier porté par l’État social. Il s’agissait de reproduire la population qualifiée sous l’égide de l’État. Aujourd’hui, nous sommes dans une nouvelle phase du #capitalisme, et cette reproduction est arrimée à l’accumulation du capital dans la perspective de #rentabilisation des #connaissances et de contrôle des professionnels qui l’assurent.

    Le couplage de l’évolution du système d’ESR avec la dynamique de l’#accumulation, constitue une nouvelle articulation avec le régime macro. Cela engendre toutefois des #contradictions majeures qui forment les conditions d’une #dégradation rapide de l’ESR.

    Co-construction historique du système éducatif français par les enseignants et l’État

    Depuis la Révolution française, le système éducatif français s’est déployé sur la base d’une régulation administrée, endogène, co-construite par le corps enseignant et l’État ; la profession en assumant de fait la charge déléguée par l’État (Musselin, 2022). Historiquement, elle a permis la croissance des niveaux d’éducation successifs par de la dépense publique (Michel, 2002). L’allongement historique de la scolarité (fig.1) a permis de façonner la force de travail, facteur décisif des gains de productivité au cœur de la croissance industrielle passée. L’éducation, et progressivement l’ESR, jouent un rôle structurant dans la reproduction de la force de travail et plus largement de la reproduction de la société - stratifications sociales incluses.

    À la fin des années 1960, l’expansion du secondaire se poursuit dans un contexte où la détention de diplômes devient un avantage pour s’insérer dans l’emploi. D’abord pour la bourgeoisie. La massification du supérieur intervient après les années 1980. C’est un phénomène décisif, visible dès les années 1970. Rapidement cela va télescoper une période d’austérité budgétaire. Au cours des années 2000, le pilotage de l’université, basé jusque-là sur l’ensemble du système éducatif et piloté par la profession (pour une version détaillée), s’est effacé au profit d’un pilotage pour et par la recherche, en lien étroit avec le régime d’accumulation financiarisé dans les pays de l’OCDE. Dans ce cadre, l’activité économique est orientée par l’extraction de la valeur financière, c’est à dire principalement par les marchés de capitaux et non par l’activité productive (Voir notamment Clévenot 2008).
    L’ESR : formation d’un secteur productif orienté par la recherche

    La #massification du supérieur rencontre rapidement plusieurs obstacles. Les effectifs étudiants progressent plus vite que ceux des encadrants (Piketty met à jour un graphique révélateur), ce qui entrave la qualité de la formation. La baisse du #taux_d’encadrement déclenche une phase de diminution de la dépense moyenne, car dans l’ESR le travail est un quasi-coût fixe ; avant que ce ne soit pour cette raison les statuts et donc la rémunération du travail qui soient visés. Ceci alors que pourtant il y a une corrélation étroite entre taux d’encadrement et #qualité_de_l’emploi. L’INSEE montre ainsi que le diplôme est un facteur d’amélioration de la productivité, alors que la productivité plonge en France (voir Aussilloux et al. (2020) et Guadalupe et al. 2022).

    Par ailleurs, la massification entraine une demande de différenciation de la part les classes dominantes qui perçoivent le #diplôme comme un des instruments de la reproduction stratifiée de la population. C’est ainsi qu’elles se détournent largement des filières et des établissements massifiés, qui n’assurent plus la fonction de « distinction » (voir le cas exemplaire des effectifs des #écoles_de_commerce et #grandes_écoles).

    Dans le même temps la dynamique de l’accumulation suppose une population formée par l’ESR (i.e. un niveau de diplomation croissant). Cela se traduit par l’insistance des entreprises à définir elles-mêmes les formations supérieures (i.e. à demander des salariés immédiatement aptes à une activité productive, spécialisés). En effet la connaissance, incorporée par les travailleurs, est devenue un actif stratégique majeur pour les entreprises.

    C’est là qu’apparaît une rupture dans l’ESR. Cette rupture est celle de la remise en cause d’un #service_public dont l’organisation est administrée, et dont le pouvoir sur les carrières des personnels, sur la définition des programmes et des diplômes, sur la direction des établissements etc. s’estompe, au profit d’une organisation qui revêt des formes d’un #secteur_productif.

    Depuis la #LRU (2007) puis la #LPR (2020) et la vague qui s’annonce, on peut identifier plusieurs lignes de #transformation, la #mise_en_concurrence conduisant à une adaptation des personnels et des établissements. Au premier titre se trouvent les instruments de #pilotage par la #performance et l’#évaluation. À cela s’ajoute la concurrence entre établissements pour l’#accès_aux_financements (type #Idex, #PIA etc.), aux meilleures candidatures étudiantes, aux #labels et la concurrence entre les personnels, pour l’accès aux #dotations (cf. agences de programmes, type #ANR, #ERC) et l’accès aux des postes de titulaires. Enfin le pouvoir accru des hiérarchies, s’exerce aux dépens de la #collégialité.

    La généralisation de l’évaluation et de la #sélection permanente s’opère au moyen d’#indicateurs permettant de classer. Gingras évoque une #Fièvre_de_l’évaluation, qui devient une référence définissant des #standards_de_qualité, utilisés pour distribuer des ressources réduites. Il y a là un instrument de #discipline agissant sur les #conduites_individuelles (voir Clémentine Gozlan). L’important mouvement de #fusion des universités est ainsi lié à la recherche d’un registre de performance déconnecté de l’activité courante de formation (être université de rang mondial ou d’université de recherche), cela condensé sous la menace du #classement_de_Shanghai, pourtant créé dans un tout autre but.

    La remise en question du caractère national des diplômes, revenant sur les compromis forgés dans le temps long entre les professions et l’État (Kouamé et al. 2023), quant à elle, assoit la mise en concurrence des établissements qui dépossède en retour la profession au profit des directions d’établissement.

    La dynamique de #mise_en_concurrence par les instruments transforme les carrières et la relation d’#emploi, qui reposaient sur une norme commune, administrée par des instances élues, non sans conflit. Cela fonctionne par des instruments, au sens de Lascoumes et Legalès, mais aussi parce que les acteurs les utilisent. Le discours du 7 décembre est éloquent à propos de la transformation des #statuts pour assurer le #pilotage_stratégique non par la profession mais par des directions d’établissements :

    "Et moi, je souhaite que les universités qui y sont prêtes et qui le veulent fassent des propositions les plus audacieuses et permettent de gérer la #ressource_humaine (…) la ministre m’a interdit de prononcer le mot statut. (…) Donc je n’ai pas dit qu’on allait réformer les statuts (…) moi, je vous invite très sincèrement, vous êtes beaucoup plus intelligents que moi, tous dans cette salle, à les changer vous-mêmes."

    La démarche est caractéristique du #new_management_public : une norme centrale formulée sur le registre non discutable d’une prétérition qui renvoie aux personnes concernées, celles-là même qui la refuse, l’injonction de s’amputer (Bechtold-Rognon & Lamarche, 2011).

    Une des clés est le transfert de gestion des personnels aux établissements alors autonomes : les carrières, mais aussi la #gouvernance, échappent progressivement aux instances professionnelles élues. Il y a un processus de mise aux normes du travail de recherche, chercheurs/chercheuses constituant une main d’œuvre qui est atypique en termes de formation, de types de production fortement marqués par l’incertitude, de difficulté à en évaluer la productivité en particulier à court terme. Ce processus est un marqueur de la transformation qui opère, à savoir, un processus de transformation en un secteur. La #pénurie de moyen public est un puissant levier pour que les directions d’établissement acceptent les #règles_dérogatoires (cf. nouveaux contrats de non titulaires ainsi que les rapports qui ont proposé de spécialiser voire de moduler des services).

    On a pu observer depuis la LRU et de façon active depuis la LPR, à la #destruction régulière du #compromis_social noué entre l’État social et le monde enseignant. La perte spectaculaire de #pouvoir_d’achat des universitaires, qui remonte plus loin historiquement, en est l’un des signaux de fond. Il sera progressivement articulé avec l’éclatement de la relation d’emploi (diminution de la part de l’emploi sous statut, #dévalorisation_du_travail etc.).

    Arrimer l’ESR au #régime_d’accumulation, une visée utilitariste

    L’État est un acteur essentiel dans l’émergence de la production de connaissance, hier comme commun, désormais comme résultat, ou produit, d’un secteur productif. En dérégulant l’ESR, le principal appareil de cette production, l’État délaisse la priorité accordée à la montée de la qualification de la population active, au profit d’un #pilotage_par_la_recherche. Ce faisant, il radicalise des dualités anciennes entre système éducatif pour l’élite et pour la masse, entre recherche utile à l’industrie et recherche vue comme activité intellectuelle (cf. la place des SHS), etc.

    La croissance des effectifs étudiants sur une période assez longue, s’est faite à moyens constants avec des effectifs titulaires qui ne permettent pas de maintenir la qualité du travail de formation (cf. figure 2). L’existence de gisements de productivité supposés, à savoir d’une partie de temps de travail des enseignants-chercheurs inutilisé, a conduit à une pénurie de poste et à une recomposition de l’emploi : alourdissement des tâches des personnels statutaires pour un #temps_de_travail identique et développement de l’#emploi_hors_statut. Carpentier & Picard ont récemment montré, qu’en France comme ailleurs, le recours au #précariat s’est généralisé, participant par ce fait même à l’effritement du #corps_professionnel qui n’a plus été à même d’assurer ni sa reproduction ni ses missions de formation.

    C’est le résultat de l’évolution longue. L’#enseignement est la part délaissée, et les étudiants et étudiantes ne sont plus au cœur des #politiques_universitaires : ni par la #dotation accordée par étudiant, ni pour ce qui structure la carrière des universitaires (rythmée par des enjeux de recherche), et encore moins pour les dotations complémentaires (associées à une excellence en recherche). Ce mouvement se met toutefois en œuvre en dehors de la formation des élites qui passent en France majoritairement par les grandes écoles (Charle et Soulié, 2015). Dès lors que les étudiants cessaient d’être le principe organisateur de l’ESR dans les universités, la #recherche pouvait s’y substituer. Cela intervient avec une nouvelle convention de qualité de la recherche. La mise en œuvre de ce principe concurrentiel, initialement limité au financement sur projets, a été élargie à la régulation des carrières.

    La connaissance, et de façon concrète le niveau de diplôme des salariés, est devenu une clé de la compétitivité, voire, pour les gouvernements, de la perspective de croissance. Alors que le travail de recherche tend à devenir une compétence générale du travail qualifié, son rôle croissant dans le régime d’accumulation pousse à la transformation du rapport social de travail de l’ESR.

    C’est à partir du système d’#innovation, en ce que la recherche permet de produire des actifs de production, que l’appariement entre recherche et profit participe d’une dynamique nouvelle du régime d’accumulation.

    Cette dynamique est pilotée par l’évolution jointe du #capitalisme_financiarisé (primauté du profit actionnarial sur le profit industriel) et du capitalisme intensif en connaissance. Les profits futurs des entreprises, incertains, sont liés d’une part aux investissements présents, dont le coût élevé repose sur la financiarisation tout en l’accélérant, et d’autre part au travail de recherche, dont le contrôle échappe au régime historique de croissance de la productivité. La diffusion des compétences du travail de recherche, avec la montée des qualifications des travailleurs, et l’accumulation de connaissances sur lequel il repose, deviennent primordiaux, faisant surgir la transformation du contenu du travail par l’élévation de sa qualité dans une division du travail qui vise pourtant à l’économiser. Cela engendre une forte tension sur la production des savoirs et les systèmes de transmission du savoir qui les traduisent en connaissances et compétences.

    Le travail de recherche devenant une compétence stratégique du travail dans tous les secteurs d’activité, les questions posées au secteur de recherche en termes de mesure de l’#efficacité deviennent des questions générales. L’enjeu en est l’adoption d’une norme d’évaluation que les marchés soient capables de faire circuler parmi les secteurs et les activités consommatrices de connaissances.

    Un régime face à ses contradictions

    Cette transformation de la recherche en un secteur, arrimé au régime d’accumulation, suppose un nouveau compromis institutionnalisé. Mais, menée par une politique néolibérale, elle se heurte à plusieurs contradictions majeures qui détruisent les conditions de sa stabilisation sans que les principes d’une régulation propre ne parviennent à émerger.

    Quand la normalisation du travail de recherche dévalorise l’activité et les personnels

    Durant la longue période de régulation administrée, le travail de recherche a associé le principe de #liberté_académique à l’emploi à statut. L’accomplissement de ce travail a été considéré comme incompatible avec une prise en charge par le marché, ce dernier n’étant pas estimé en capacité de former un signal prix sur les services attachés à ce type de travail. Ainsi, la production de connaissance est un travail entre pairs, rattachés à des collectifs productifs. Son caractère incertain, la possibilité de l’erreur sont inscrits dans le statut ainsi que la définition de la mission (produire des connaissances pour la société, même si son accaparement privé par la bourgeoisie est structurel). La qualité de l’emploi, notamment via les statuts, a été la clé de la #régulation_professionnelle. Avec la #mise_en_concurrence_généralisée (entre établissements, entre laboratoires, entre Universités et grandes écoles, entre les personnels), le compromis productif entre les individus et les collectifs de travail est rompu, car la concurrence fait émerger la figure du #chercheur_entrepreneur, concerné par la #rentabilisation des résultats de sa recherche, via la #valorisation sous forme de #propriété_intellectuelle, voire la création de #start-up devenu objectifs de nombre d’université et du CNRS.

    La réponse publique à la #dévalorisation_salariale évoquée plus haut, passe par une construction différenciée de la #rémunération, qui rompt le compromis incarné par les emplois à statut. Le gel des rémunérations s’accompagne d’une individualisation croissante des salaires, l’accès aux ressources étant largement subordonné à l’adhésion aux dispositifs de mise en concurrence. La grille des rémunérations statutaires perd ainsi progressivement tout pouvoir organisationnel du travail. Le rétrécissement de la possibilité de travailler hors financements sur projet est indissociable du recours à du #travail_précaire. La profession a été dépossédée de sa capacité à défendre son statut et l’évolution des rémunérations, elle est inopérante à faire face à son dépècement par le bloc minoritaire.

    La contradiction intervient avec les dispositifs de concurrence qui tirent les instruments de la régulation professionnelle vers une mise aux normes marchandes pour une partie de la communauté par une autre. Ce mouvement est rendu possible par le décrochage de la rémunération du travail : le niveau de rémunération d’entrée dans la carrière pour les maîtres de conférences est ainsi passé de 2,4 SMIC dans les années 1980 à 1,24 aujourd’hui.

    Là où le statut exprimait l’impossibilité d’attacher une valeur au travail de recherche hors reconnaissance collective, il tend à devenir un travail individualisable dont le prix sélectionne les usages et les contenus. Cette transformation du travail affecte durablement ce que produit l’université.

    Produire de l’innovation et non de la connaissance comme communs

    Durant la période administrée, c’est sous l’égide de la profession que la recherche était conduite. Définissant la valeur de la connaissance, l’action collective des personnels, ratifiée par l’action publique, pose le caractère non rival de l’activité. La possibilité pour un résultat de recherche d’être utilisé par d’autres sans coût de production supplémentaire était un gage d’efficacité. Les passerelles entre recherche et innovation étaient nombreuses, accordant des droits d’exploitation, notamment à l’industrie. Dans ce cadre, le lien recherche-profit ou recherche-utilité économique, sans être ignoré, ne primait pas. Ainsi, la communauté professionnelle et les conditions de sa mise au travail correspondait à la nature de ce qui était alors produit, à savoir les connaissances comme commun. Le financement public de la recherche concordait alors avec la nature non rivale et l’incertitude radicale de (l’utilité de) ce qui est produit.

    La connaissance étant devenue un actif stratégique, sa valorisation par le marché s’est imposée comme instrument d’orientation de la recherche. Finalement dans un régime d’apparence libérale, la conduite politique est forte, c’est d’ailleurs propre d’un régime néolibéral tel que décrit notamment par Amable & Palombarini (2018). Les #appels_à_projet sélectionnent les recherches susceptibles de #valorisation_économique. Là où la #publication fait circuler les connaissances et valide le caractère non rival du produit, les classements des publications ont pour objet de trier les résultats. La priorité donnée à la protection du résultat par la propriété intellectuelle achève le processus de signalement de la bonne recherche, rompant son caractère non rival. La #rivalité exacerbe l’effectivité de l’exclusion par les prix, dont le niveau est en rapport avec les profits anticipés.

    Dans ce contexte, le positionnement des entreprises au plus près des chercheurs publics conduit à une adaptation de l’appareil de production de l’ESR, en créant des lieux (#incubateurs) qui établissent et affinent l’appariement recherche / entreprise et la #transférabilité à la #valorisation_marchande. La hiérarchisation des domaines de recherche, des communautés entre elles et en leur sein est alors inévitable. Dans ce processus, le #financement_public, qui continue d’endosser les coûts irrécouvrables de l’incertitude, opère comme un instrument de sélection et d’orientation qui autorise la mise sous contrôle de la sphère publique. L’ESR est ainsi mobilisée par l’accumulation, en voyant son autonomie (sa capacité à se réguler, à orienter les recherches) se réduire. L’incitation à la propriété intellectuelle sur les résultats de la recherche à des fins de mise en marché est un dispositif qui assure cet arrimage à l’accumulation.

    Le caractère appropriable de la recherche, devenant essentiel pour la légitimation de l’activité, internalise une forme de consentement de la communauté à la perte du contrôle des connaissances scientifiques, forme de garantie de sa circulation. Cette rupture de la non-rivalité constitue un coût collectif pour la société que les communautés scientifiques ne parviennent pas à rendre visible. De la même manière, le partage des connaissances comme principe d’efficacité par les externalités positives qu’il génère n’est pas perçu comme un principe alternatif d’efficacité. Chemin faisant, une recherche à caractère universel, régulée par des communautés, disparait au profit d’un appareil sous doté, orienté vers une utilité de court terme, relayé par la puissance publique elle-même.

    Un bloc hégémonique réduit, contre la collégialité universitaire

    En tant que mode de gouvernance, la collégialité universitaire a garanti la participation, et de fait la mobilisation des personnels, car ce n’est pas la stimulation des rémunérations qui a produit l’#engagement. Les collectifs de travail s’étaient dotés d’objectifs communs et s’étaient accordés sur la #transmission_des_savoirs et les critères de la #validation_scientifique. La #collégialité_universitaire en lien à la définition des savoirs légitimes a été la clé de la gouvernance publique. Il est indispensable de rappeler la continuité régulatrice entre liberté académique et organisation professionnelle qui rend possible le travail de recherche et en même temps le contrôle des usages de ses produits.

    Alors que l’université doit faire face à une masse d’étudiants, elle est évaluée et ses dotations sont accordées sur la base d’une activité de recherche, ce qui produit une contradiction majeure qui affecte les universités, mais pas toutes. Il s’effectue un processus de #différenciation_territoriale, avec une masse d’établissements en souffrance et un petit nombre qui a été retenu pour former l’élite. Les travaux de géographes sur les #inégalités_territoriales montrent la très forte concentration sur quelques pôles laissant des déserts en matière de recherche. Ainsi se renforce une dualité entre des universités portées vers des stratégies d’#élite et d’autres conduites à accepter une #secondarisation_du_supérieur. Une forme de hiatus entre les besoins technologiques et scientifiques massifs et le #décrochage_éducatif commence à être diagnostiquée.

    La sectorisation de l’ESR, et le pouvoir pris par un bloc hégémonique réduit auquel participent certaines universités dans l’espoir de ne pas être reléguées, ont procédé par l’appropriation de prérogatives de plus en plus larges sur les carrières, sur la valorisation de la recherche et la propriété intellectuelle, de ce qui était un commun de la recherche. En cela, les dispositifs d’excellence ont joué un rôle marquant d’affectation de moyens par une partie étroite de la profession. De cette manière, ce bloc capte des prébendes, assoit son pouvoir par la formation des normes concurrentielles qu’il contrôle et développe un rôle asymétrique sur les carrières par son rôle dominant dans l’affectation de reconnaissance professionnelle individualisée, en contournant les instances professionnelles. Il y a là création de nouveaux périmètres par la norme, et la profession dans son ensemble n’a plus grande prise, elle est mise à distance des critères qui servent à son nouveau fonctionnement et à la mesure de la performance.

    Les dispositifs mis en place au nom de l’#excellence_scientifique sont des instruments pour ceux qui peuvent s’en emparer et définissant les critères de sélection selon leur représentation, exercent une domination concurrentielle en sélectionnant les élites futures. Il est alors essentiel d’intégrer les Clubs qui en seront issus. Il y a là une #sociologie_des_élites à préciser sur la construction d’#UDICE, club des 10 universités dites d’excellence. L’évaluation de la performance détermine gagnants et perdants, via des labels, qui couronnent des processus de sélection, et assoit le pouvoir oligopolistique et les élites qui l’ont porté, souvent contre la masse de la profession (Musselin, 2017).

    Le jeu des acteurs dominants, en lien étroit avec le pouvoir politique qui les reconnait et les renforce dans cette position, au moyen d’instruments de #rationalisation de l’allocation de moyens pénuriques permet de définir un nouvel espace pour ceux-ci, ségrégué du reste de l’ESR, démarche qui est justifié par son arrimage au régime d’accumulation. Ce processus s’achève avec une forme de séparatisme du nouveau bloc hégémonique composé par ces managers de l’ESR, composante minoritaire qui correspond d’une certaine mesure au bloc bourgeois. Celles- et ceux-là même qui applaudissent le discours présidentiel annonçant la révolution dont un petit fragment tirera du feu peu de marrons, mais qui seront sans doute pour eux très lucratifs. Toutefois le scénario ainsi décrit dans sa tendance contradictoire pour ne pas dire délétère ne doit pas faire oublier que les communautés scientifiques perdurent, même si elles souffrent. La trajectoire choisie de sectorisation déstabilise l’ESR sans ouvrir d’espace pour un compromis ni avec les personnels ni pour la formation. En l’état, les conditions d’émergence d’un nouveau régime pour l’ESR, reliant son fonctionnement et sa visée pour la société ne sont pas réunies, en particulier parce que la #rupture se fait contre la profession et que c’est pourtant elle qui reste au cœur de la production.

    https://laviedesidees.fr/Universite-service-public-ou-secteur-productif
    #ESR #facs #souffrance

  • On veille, on pense à tout à rien
    On écrit des vers, de la prose
    On doit trafiquer quelque chos’
    En attendant le jour qui vient

    Presentazione del libro di Paolo Virno « Dell’impotenza. La vita nell’epoca della sua paralisi frenetica » (Bollati Boringhieri) (21.03.2022) - Radio Radicale
    https://www.radioradicale.it/scheda/663613/presentazione-del-libro-di-paolo-virno-dellimpotenza-la-vita-nellepoca

    De l’impuissance - La vie à l’époque de sa paralysie frénétique
    http://www.lyber-eclat.net/livres/de-limpuissance

    Les formes de vie contemporaines sont marquées par l’impuissance, hôte importun de nos journées infinies. Que ce soit en amour ou dans la lutte contre le travail précaire, l’amitié ou la politique, une paralysie frénétique saisit l’action ou le discours quand il s’agit de faire ou de dire ce qu’il conviendrait de dire et faire. Mais, paradoxalement, cette impuissance semble due non pas à un déficit de nos compétences, mais plutôt à un excès désordonné de puissance, à l’accumulation oppressante de capacités que la société contemporaine arbore comme autant de trophées de chasse accrochés aux murs de ses antichambres. Virno poursuit ici son étude systématique du langage contemporain où s’exprime toute la complexité de notre modernité et qui témoigne de cette inversion des sens qui attribue la puissance au renoncement, ou la détermination au fait de taire ce qu’il nous faudrait dire. Livre sur le langage, De l’impuissance indique de loin les formes possibles d’un antidote, d’une voie de salut, qui nous ferait « renoncer à renoncer », et « effacer l’effacement de notre propre dignité ».

    LA PUISSANCE SANS ACTE, Stefano Oliva
    https://lundi.am/La-puissance-sans-acte

    À parcourir l’œuvre singulière de Paolo Virno (...), on a l’impression qu’il a suivi deux chemins distincts, depuis ses premiers écrits des années 80, au sortir des années de préventive passées dans la cellule 11 du secteur des « politiques » de la prison de Rebibbia, sous le chef d’inculpation d’« association subversive » et « constitution de bande armée », jusqu’aux récents volumes, plus concentrés sur les questions du langage. Mais à s’y pencher de plus près, une fois qu’on l’a suivi sur l’un et l’autre chemin, il semble évident que, comme dit l’autre, « le chemin est un seul et le même ».

    De l’impuissance. La vie à l’époque de sa paralysie frénétique, traduit de l’italien par Jean-Christophe Weber, qui vient de paraître aux éditions de l’éclat, rend bien compte à la fois de ces deux chemins et du moment où ils se confondent. En témoigne peut-être, sous la forme d’une étonnante confession, cette phrase du troisième chapitre : « À partir de là, que la fête commence, en même temps que la question la plus difficile, à savoir un de ces casse-tête qui exaspèrent et fascinent ceux qui, après l’échec de la première et unique tentative de révolution communiste au sein du capitalisme pleinement développé, n’ont rien trouvé de mieux à faire pour tuer le temps. » Paru en italien sur le site fatamorganaweb.it, voici la traduction d’un compte rendu de Stefano Oliva, philosophe et guitariste, actuellement chercheur à l’Université romaine Guglielmo Marconi, sur ce livre important qui décrit cet état d’impuissance par « excès de puissance » et de renoncement généralisé dans lequel nous nous trouvons, et auquel Virno suggère de répondre par un « renoncement au renoncement », qui ouvrirait la voie à un mode d’action non frénétique.

    #Paolo_Virno #livre #travail_précaire #précariat #general_intellect #langage #capitalisme

  • Nintendo hit with National Labor Relations Board complaint
    https://www.axios.com/2022/04/19/nintendo-nlrb-complaint

    An unnamed worker is alleging that Nintendo, and a firm it uses for hiring contractors, violated their legally protected right to unionize, according to a new filing with the National Labor Relations Board.

    Nintendo Of America Workers Speak Up After Years Of Silence
    https://kotaku.com/nintendo-america-switch-employee-treatment-unionize-nlr-1848828975

    A union-busting complaint recently filed with the National Labor Relations Board accused Nintendo of America and contract worker agency Aston Carter of surveillance, retaliation, and other unfair labor practices. According to four sources familiar with the incident, that complaint, first reported by Axios, comes after a part-time employee spoke about unions in a business meeting and was later fired mid-contract. In an unprecedented move, others are now speaking up about feeling disrespected and exploited at the notoriously secretive Mario maker.

    Nintendo contractors say company unfairly exploits temporary workers
    https://www.axios.com/2022/05/12/nintendo-contractors-investigation

    Driving the news: Current and former Nintendo contractors have been speaking up over the past three weeks, since Axios first reported a complaint filed with the National Labor Relations Board against Nintendo and a contracting firm.

    #jeu_vidéo #jeux_vidéo #nintendo #nintendo_of_america #noa #business #ressources_humaines #syndicalisme #aston_carter #national_labor_relations_board #activision_blizzard #raven_software #licenciement #confidentialité #secret_des_affaires #jeu_vidéo_mario #jeu_vidéo_zelda #travail_temporaire #précarité #jeu_vidéo_call_of_duty_warzone #amazon #starbucks #jelena_džamonja #parker_staffing #assurance_qualité #console_nes #nintendo_seal_of_quality #jeu_vidéo_super_mario #shigeru_miyamoto #reggie_fils-aimé #travail_précaire #assurance_santé #heures_supplémentaires #mario_time #don_james #jeu_vidéo_the_legend_of_zelda #console_wii_u #micromanagement #elisabeth_pring #microsoft_teams #aston_carter #console_switch #console_nintendo_switch

  • #Femmes de chambre et métiers du #care, une nouvelle #classe_ouvrière ?
    https://www.franceculture.fr/emissions/le-temps-du-debat/les-metiers-du-care-une-nouvelle-classe-ouvriere


    Agent.e.s de nettoyage, femmes de chambre, aides soignant.e.s : au-delà de l’hétérogénéité de ces métiers, subsiste un #travail_précaire et éreintant. Les récentes mobilisations de ces #travailleuses, d’ordinaires invisibles et isolées, marquent-elles un renouvellement de la figure de l’ouvrier ?

  • Contro il coronavirus « estendere il reddito di cittadinanza a precari e freelance » | il manifesto
    https://ilmanifesto.it/contro-il-coronavirus-estendere-il-reddito-di-cittadinanza-a-precari-e-f

    Ce que l’idée d’un "revenu de quarantaine" nous dit de l’évolution du travail et des droits afférents.

    Devono restare a casa per rallentare il contagio da coronavirus ma non hanno un reddito che gli permette di sopravvivere. In questa situazione si trovano i lavoratori autonomi e freelance, chi è sospeso nella zona grigia tra lavoro subordinato e autonomo, tra la partita Iva e l’impresa personale nell’editoria, gli intermittenti dello spettacolo, le guide turistiche, i consulenti, i traduttori, formatori, consulenti, interpreti, grafici, educatori e anche i riders. Nella maggioranza dei casi questi lavoratori non hanno un contratto e per questo, già in tempi ordinari, non possono accedere agli ammortizzatori sociali previsti per il lavoro dipendente. In tempi straordinari, sono costretti a vivere una doppia pena: non lavorare e non essere tutelati in nessun modo. Solo una parte di questo continente del quinto stato che lavora a partita Iva, ma può anche lavorare a contratto per brevi periodi, sarà interessato a una delle misure alle quali sta pensando il governo in un decreto che, oltre alla sospensione di mutui e bollette o voucher per baby sitter, dovrebbe estendere in via straordinaria la cassa integrazione in deroga per le imprese sotto i cinque dipendenti. Quest’ultima richiesta è avanzata per i lavoratori dello spettacolo da Fistel Cisl, Uilcom Uil, Slc Cgil, Alleanza delle cooperative, Anica, Agis, Confartigianato, tra gli altri. Per le partite Iva il governo ha ipotizzato anche un indennizzo di 500 euro per un massimo di tre mesi, oltre alla sospensione di tasse e contributi. Considerata l’eterogeneità delle tipologie lavorative coinvolte, e la pluralità dei loro rapporti lavorativi, è purtroppo possibile che saranno in molti a non essere interessati da una misura che sembra essere insufficiente per contrastare una crisi di lunga durata.

    L’ espressione «reddito di quarantena» sta circolando da qualche giorno e ha riscosso un certo interesse fino al punto da diventare l’oggetto di una rivendicazione in un presidio di riders e precari a Bologna davanti alla regione Emilia Romagna il 3 marzo scorso. Lo ha proposto anche il movimento Ambiente diritti e uguaglianza in Valle d’Aosta. Gli educatori scolastici dipendenti di cooperative sociali a Reggio Emilia lo ritengono uno strumento indispensabile contro il «virus della precarietà».

    #Revenu_quarantaine #Gig_economy #Travail_précaire #Coronavirus

  • Travail, nom féminin - Vacarme
    https://vacarme.org/article3260.html

    L’histoire de Konstantína Koúneva, militante syndicale défigurée fin décembre 2008 dans un quartier d’Athènes à la suite d’une attaque à l’acide, est traversée par l’histoire grecque de ces dix dernières années et la traverse en retour d’une façon oblique, singulière et sensible.

    pas encore lu, je le poste pour le retrouver, mais aussi parce que je sens que ça va planter des arbres.

    #Konstantína_Koúneva

  • Burning Man: Paradise for Hipster Guests — And a Nightmare for Some Workers | Alternet
    https://www.alternet.org/burning-man-paradise-hipster-guests-and-nightmare-some-workers?src=newslet

    A staggeringly high suicide rate among Burning Man’s seasonal workers is just one symptom of a toxic work environment

    Despite its transgressive spirit, the festival is expensive and increasingly off-limits to the underclass: Tickets run from $190 to $1,200 this year, while transportation to and fro and equipment add to the cost. Those who attend are expected to obey the organization’s “10 Principles of Burning Man,” which includes “radical self-reliance” — meaning attendees have to provide their own food, water and shelter for the week-long party.

    Over the years, the festival has attracted its share of celebrity fans, some of them unlikely: Grover Norquist, the anti-tax icon, attends regularly, as do many of Silicon Valley’s elite, including Elon Musk and much of the Google brass, along with Amazon chief Jeff Bezos. Burning Man’s remote desert location allows for unique experiences that one couldn’t replicate in other settings — in particular, the ritualistic burning of a giant human-shaped effigy at the end of the festival, from which it derives its name. It also means barbarous conditions for the seasonal workers who are tasked with constructing the grid upon which the festival operates.

    Preparing an inhospitable desert landscape for the equally brief and boggling surge in population that temporarily creates what is known as Black Rock City requires a coordinated effort of labor, workers and volunteers who toil in harsh conditions, often for low pay or no pay, for months on end: running electric lines, hauling equipment, cleaning up the mess at the end of it all, and dealing with the logistics of bringing thousands of vehicles and structures to the playa. (Although that word means “beach,” it is universally used to describe the festival zone.)

    Salon spoke to several former and current employees and volunteers for Burning Man, who painted a picture of a dangerous and stressful work environment and a toxic management culture that contributed to a number of suicides of seasonal employees, at a rate far greater than the national average. Those who spoke exclusively to Salon recalled tales of labor abuse, unequal wages, on-the-job-injuries including permanent blindness and a management that manipulated workers who were hurt or who tried to fight for improved conditions.

    Burning Man as a festival and a nonprofit prides itself on its “10 Principles” and promotes them rigorously — a set of values that include “radical inclusion,” gifting, decommodification and civic responsibility, which could factor into the blurred lines within the organization. Yet there is a steep differential between the salaries for the workers who make the festival run and the upper management: Romero told Salon he was offered $15 per hour to work this season. According to 2016 tax filings, salaried managers earn between $150,000 to $200,000, more than four and a half times Romero’s wage.

    “Burning Man is outside the mainstream,” Brunner added. “Like, people are lucky to be part of it, they’re lucky to work there. It’s part of the fun. It’s sort of like a community building this event for everybody. The reality is that a lot of money is made off of it and a lot of people seemed to be well-paid to run it. They do rely on this sort of communal aspect and the communal ethos that they have to get people to work for less money.”

    Arterburn explained to Salon that the unique conditions and experiences of working on the playa lead to unique personalities being attracted to the event — the kinds of people who, in Arterburn’s words, might not fit in elsewhere in society. “If one is in DPW, it’s my opinion that they’re in there for a reason,” she said. “Your average person who has a nine-to-five job and has watched their parents take two weeks off for holiday time a year probably wouldn’t be able to handle that environment for the amount of time that DPW was there.”

    Salon found that in the seven years between 2009 and 2015, there were seven DPW worker suicides in the department.

    That number is statistically significant enough to be alarming, according to Dr. Sally Spencer-Thomas, a psychologist and the lead of the Workplace Task Force for the National Action Alliance for Suicide Prevention. “To give you a benchmark, in a community of 1,000 people we would expect one suicide death in one decade,” she explained. Spencer-Thomas noted that the construction industry in the U.S. does have an elevated suicide rate.

    Because of the unique and tight-knit nature of the Burning Man worker community, getting fired can be particularly devastating, as many workers have never felt that level community or camaraderie in any other aspect of their lives. According to Romero, the experience creates potentially dangerous highs and lows.

    "There are high rates of depression because you do have the effects of institutionalization out there,” Romero said. “It is a remote location. It can be a long season. It’s mentally and physically stressful and you’ve got a lot of camaraderie and it’s a place where you feel important.”

    The kind of people who are attracted to work in such an extreme and isolated environment may already be struggling, as Brown and Close were.

    "The ethical part is that employers need to look in the mirror and ask, if you knew there was something you could do that could make a difference, why aren’t you doing it?” Spencer-Thomas of the National Action Alliance for Suicide Prevention told Salon.

    The late Larry Harvey, Burning Man’s co-founder, laid out his vision for Burning Man in the aforementioned document now known as the “The 10 Principles of Burning Man." In it, Harvey describes Burning Man as being guided by a vision of “radical inclusion,” "decommodification" and “civic responsibility." “We believe that transformative change, whether in the individual or in society, can occur only through the medium of deeply personal participation,” Harvey wrote.

    Burning Man is intended to be a utopian celebration, a break from the banal routine of a capitalist work culture, an event that is radically inclusive to all who desire to express an authentic part of themselves that is not accepted in what Burners call the “default world.” Ironically, and perhaps inevitably, the festival appears to have replicated the very problems it sought to transcend. Burning Man set out to burn “the man," but in many ways it has become the man.

    #Burning_man #Droit_travail #Travail

  • « Make Amazon pay » : entretien avec Anton Kramer sur les luttes et la logistique à Leipzig.
    http://www.platenqmil.com/blog/2017/12/19/make-amazon-pay---entretien-avec-anton-kramer-sur-les-luttes-et-la-logis

    Emblème du rêve capitaliste d’un monde sans crispations ni frictions, Amazon est l’une des plus grandes firmes existantes. Cet entretien avec Anton Kramer, militant d’une alliance de solidarité avec les travailleurs.se.s en lutte au sein de l’entreprise, revient sur le parcours de mobilisation construit depuis plusieurs années à Leipzig, dans le nord-est de l’Allemagne. Il éclaire notamment le rôle politique de la logistique dans les transformations de la production, de l’échange et de la consommation de marchandises, et indique selon quelles modalités penser aujourd’hui une opposition aux processus transnationaux parties prenantes de la domination. L’exposition des formes d’action et types d’organisation mis en place souligne l’importance pour des militant.e.s de s’implanter sur un tel lieu de travail et d’y établir des liens durables avec les travailleurs.se.s et les syndicalistes

    #Amazon #travail_précaire #ubérisation #auto-organisation

  • How the most vulnerable workers are targeted for sexual abuse | News | The Guardian

    https://www.theguardian.com/news/2018/mar/13/how-the-most-vulnerable-workers-are-targeted-for-sexual-abuse

    https://i.guim.co.uk/img/media/f94a26f2524e5a9785af6bd1144b99ec2dffa2d5/587_440_3624_2174/master/3624.png?w=1200&h=630&q=55&auto=format&usm=12&fit=crop&crop=faces%2Centrop

    How the most vulnerable workers are targeted for sexual abuse

    Isolated, unprotected and scared to speak out – some workers are particularly vulnerable to harassment. Who finds the cases of sexual assault no one else is looking for?

    By Bernice Yeung

    The southern California sky dims as Vicky Márquez zooms south along Interstate 5 in her Honda SUV, with syrupy Spanish-language love songs blasting from her stereo. The satnav on her phone is directing her through a monotonous landscape of Orange County office parks, and Márquez is racing against rush hour, dodging between lanes and swerving with inches to spare. “I’m kind of a crazy driver,” she admits.

    Márquez works for a little-known non-profit organisation with the pressing goal of fighting labour exploitation among night-shift janitors – an industry that operates in obscurity, with workers sent to anonymous buildings rarely visited by government regulators. With her glasses, curled-under fringe and pastel sweater, Márquez looks more like a retired librarian than a labour rights activist. On tiptoe, she stands under 5ft tall. On this particular late winter evening, Márquez is on the road to the first of half a dozen office parks where she will make surprise visits, making sure that cleaners are being treated fairly by their bosses.

    #viol #harcèlement_sexuel #travail_précaire #vulnérabilité

  • Uber : les nouveaux cochers de fiacre
    https://www.franceculture.fr/emissions/la-vie-numerique/uber-les-nouveaux-cochers-de-fiacre

    Il a 42 ans, il vit à Sacramento où il n’a pas assez de travail pour les VTC, alors tous les lundi matin il va à San Francisco. Là, chaque jour il conduit jsqu’à ce qu’il ait amassé 300 dollars (ça lui fait 230 quand il a payé l’essence). Il lui faut à peu près 12 heures pour y arriver. Donc quand il a terminé, il est trop crevé, il faut qu’il dorme. Et comme il gagne tout juste ce dont il a besoin, pas question de se payer un hôtel, alors il va au parking, où il dort dans sa voiture, avec quelques autres. Le phénomène n’est pas restreint à San Francisco. A Chicago ou à New York des chauffeurs Uber se partagent l’adresse de spots où ils peuvent s’installer pour la nuit, parce que les gardiens les laissent tranquille, ou parce qu’il y a du Wi-Fi. Il s’agit d’une conséquence extrême de la volonté de Uber : la plus grande flexibilité pour ses chauffeurs qui peuvent travailler où ils veulent, quand ils veulent, le temps qu’ils veulent (jusqu’à 14h d’affilée). A Chicago l’un des chauffeurs explique dormir dans sa voiture depuis presque deux ans, et y avoir été contraint quand il a quitté son emploi précédent et acquis une voiture en leasing, ce qui l’obligeait à travailler plus pour couvrir ses frais. L’hiver, ce n’est pas pratique de dormir dans sa voiture, toutes les trois heures il se réveille pour faire tourner le moteur et réchauffer l’habitacle.

    http://rf.proxycast.org/1258348130219335680/16371-25.01.2017-ITEMA_21209084-0.mp3

    On signalera aussi :
    « Germinal au royaume des plates-formes numériques ? » par Mediapart
    https://www.youtube.com/watch?v=_ztnBHZiASE

    #Cocher #GV_(entreprise) #Germinal_(roman) #Numérique #Politique #Précariat #Travail #Travail_précaire #Uber_(entreprise) #Économie

  • New Weapon in Day Laborers’ Fight Against Wage Theft: A Smartphone App - The New York Times
    http://www.nytimes.com/2016/03/02/nyregion/new-weapon-in-day-laborers-fight-against-wage-theft-a-smartphone-app.html?_

    Just past sunrise on 69th Street, near a No. 7 subway stop in Queens, men in backpacks and work boots gather in groups, many on their cellphones.

    They are workers at one of the largest day laborer stops in New York City, hoping to be hired. Most are undocumented immigrants who have reported being cheated by employers. In the fight against wage theft, their phones could soon become their biggest allies.

    After three years of planning, an immigrant rights group in Jackson Heights is set to start a smartphone app for day laborers, a new digital tool with many uses: Workers will be able to rate employers (think Yelp or Uber), log their hours and wages, take pictures of job sites and help identify, down to the color and make of a car, employers with a history of withholding wages. They will also be able to send instant alerts to other workers. The advocacy group will safeguard the information and work with lawyers to negotiate payment.

    “It will change my life and my colleagues’ lives a good deal,” Omar Trinidad, a Mexican immigrant, said in Spanish through an interpreter. Mr. Trinidad is the lead organizer who helped develop the app.

    #travail_précaire #sans_papier #salaire #résistance

  • 3,2 millions de salariés précaires en France
    http://www.inegalites.fr/spip.php?page=article&id_article=957

    11,5 % des emplois - trois millions au total - sont occupés par des indépendants : ils ne perçoivent pas de salaire, mais vendent leur production, des biens ou des services. A l’intérieur de cet ensemble - dont on parle peu -, les inégalités sont extrêmes, aussi bien en matière de précarité que de niveau de vie. Quoi de commun entre l’artisan maçon soumis aux aléas du bâtiment et le chirurgien de renom dont la clientèle est assurée ? (voir notre article Les inégalités de revenus des travailleurs indépendants). A l’évidence, il faudrait intégrer une partie des indépendants les moins qualifiés au sein des emplois précaires.

  • Center Parcs : 36 métiers, 40 misères
    http://larotative.info/center-parcs-36-metiers-40-miseres-1175.html

    Dans le cadre de la lutte contre l’installation d’un #Center_Parcs à #Roybon (Isère), des opposants se sont penchés sur les conditions d’emploi dans ces centres de vacances. Le texte qui suit, tiré du n°2 de la revue De tout bois publié en avril 2015, apporte un éclairage édifiant sur la précarité de ces boulots. Avec l’ouverture récente d’un Center Parcs aux Trois-Moutiers, dans la Vienne, à quelques kilomètres de #Chinon, on a jugé intéressant de reproduire ce texte.

    Les 700 emplois qui seraient créés pour faire fonctionner l’infrastructure touristique, apparaissent aux yeux des défenseurs du projet Center Parcs de Roybon comme l’argument essentiel et indiscutable. De quels emplois s’agit-il au juste ? Quelles sont les conditions de travail que les salariés devront supporter ? Depuis que le projet de Roybon a été rendu public, les différents Center Parcs ouverts dans le pays ont essuyé de nombreuses grèves. Parcourons chacun des quatre sites existants au moment de ces grèves et laissons les employés exprimer eux-mêmes leurs reproches.

    (...)

    « Nous travaillons presque tous les week-ends sans aucunes compensations avec des horaires pas faciles pour la vie de famille. Nous sommes actuellement plus de 280 salariés alors que nous avons été plus de 300 l’année passée pour autant de travail si ce n’est plus. Le parc de L’Ailette a pour particularité de ne pas avoir le nettoyage intégré dans les effectifs. Nous avons une société de nettoyage. Les salariés de cette boite trinquent encore plus que nous (c’est peu dire. Nombre d’entre eux sont actuellement en procédure aux Prud’hommes) ».

    Soixante-dix employées de cette société de nettoyage (du Groupe K) dont nous parlait ce délégué CGT avait en effet manifesté le 9 mai 2008 devant le Center Parcs du Lac d’Ailette contre certains cadres aux méthodes jugées dégradantes et insultantes : « Pourquoi nous fouille-t-on systématiquement dès que nous sortons du parc ? ». Et aussi : « On nous humilie, on nous rabaisse, on nous insulte plus bas que terre ». Sans oublier la question des cadences : « 118 minutes pour nettoyer une maison pour 8 personnes, c’est intenable ! », et des « retards dans le versement des salaires et des absences de régularisation pour des heures effectuées en supplément ou les jours fériés »…

    (...)

    « On est des esclaves, souffle une manifestante. On travaille trois week-ends par mois et on n’a aucune reconnaissance. » Les femmes de ménage dénonçaient :

    « On commence à la piscine à 5 h jusqu’à 9 h 30. De 10 h à 15 h, on est dans les cottages. Certains sont propres, d’autres très sales. Les temps qui nous sont donnés pour nettoyer les chalets sont trop courts. Pour que les clients aient leur logement à 15 h nous sommes obligées, la plupart du temps, de ne pas prendre notre pause de 12 h à 12 h 30. Je touche 270 € par mois pour deux jours de travail par semaine, témoigne un agent technique de nettoyage. Si on rajoute la mutuelle "obligatoire" de 30 €, il ne reste plus grand-chose à la fin du mois. »...

    #travail_précaire #travail_des_femmes

  • Libres ou prolétarisés ? Les travailleurs intellectuels précaires en Île-de-France, Cyprien Tasset, Thomas Amossé, Mathieu Grégoire

    Tous se retrouvent aux marges de la norme de l’emploi salarié, constituée au cours du XXe siècle  ; quelques-uns ont des contrats de travail en tant que tels (CDD)  ; beaucoup peuvent être indépendants, autoentrepreneurs, vacataires, bénévoles, travailleurs au noir, sous statut de portage salarial, etc. Bon nombre d’entre eux doivent recourir aux indemnités de chômage ou aux minima sociaux. Chez la plupart, il y a du libre choix et du consentement, une révolte et une soumission. (Thomas Lemahieu, L’Humanité)

    #travailleurs_intellectuels #travail_précaire #précariat #cognitariat #classe #recherche