• Le #périurbain d’ici et d’ailleurs

    Dans le cadre du programme PUCA « du périurbain à l’urbain », le Labex DynamiTe et l’IAU îdF ont analysé les espaces périurbains de l’Ouest francilien. Ce séminaire avait pour objectif de valoriser les résultats de recherche auprès des aménageurs et des collectivités locales, et à les confronter à d’autres contextes, en France et à l’étranger.

    http://i.embed.ly/1/display/resize?key=1e6a1a1efdb011df84894040444cdc60&url=http%3A%2F%2Fwww.iau-idf.fr%

    http://www.iau-idf.fr/savoir-faire/nos-travaux/amenagement-et-territoires/periurbain/le-periurbain-dici-et-dailleurs.html
    #urban_matter #podcast

  • Etalement #urbain : le coût résidentiel pèse sur le budget des ménages - Localtis.info - Caisse des Dépôts
    http://www.localtis.info/cs/ContentServer?pagename=Localtis/LOCActu/ArticleActualite&jid=1250270095926&cid=1250270091318

    Quel est l’impact financier de l’étalement urbain et des #mobilités qu’il induit, pour les ménages et les collectivités ? Telle est la question à laquelle se propose de répondre un travail de recherche publié par le Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (Credoc) en décembre 2015. Afin de le quantifier, le Credoc propose de bâtir un indicateur de « coût résidentiel global » qui prendrait en compte le ’coût résidentiel’ incombant directement aux habitants concernés, et le ’coût collectif’, qui est supporté par toute la population via les investissements des pouvoirs publics nationaux et territoriaux. Il s’agit ainsi, précisent les auteurs en introduction, de « nourrir la réflexion des collectivités territoriales sur la maitrise de l’urbanisation et des excès de l’étalement urbain. »

    http://www.credoc.fr/pdf/Rech/C321.pdf
    #logement

    • Ce travail de recherche s’intéresse aux questions suivantes :
      1) s’installer à une distance importante de son lieu de travail pour profiter de prix du foncier
      moins élevés est-il un bon arbitrage financier pour les ménages étant donné le poids dans le
      budget du ménage et l’augmentation tendancielle des coûts de transport ?
      2) cet arbitrage en faveur de l’éloignement des distances domicile-travail est-il favorable ou
      non à la société dans son ensemble ?

    • Et aussi, quel est le « bilan carbone » de la mobilité, de l’étalement urbain. Quand on voit les files de bagnoles qui se dirigent vers la ville au petit matin et dans l’autre sens le soir, il n’y a pas que l’aspect financier qui fait grincer des dents.

    • @sombre : oui même réaction que toi, c’est pour ça que je mettais en exergue le point 2

      2) cet arbitrage en faveur de l’éloignement des distances domicile-travail est-il favorable ou
      non à la société dans son ensemble ?

      je n’ai pas tout lu dans le détail, mais pour se faire une idée de la réponse apportée à cette question, il faut savoir que le rapport contient 0 occurrences des termes « pétrole », « embouteillages » et « pollution ».
      Et sans parler écologie, l’intérêt général économique, depuis les années 70 c’est de consommer moins de pétrole pour ménager notre balance commerciale. Mais c’est insuffisant pour nous faire remettre en cause la prédominance de la spéculation immobilière capitaliste...
      Bagnole + maison à crédit à Pétaouchnok, voilà le socle inconditionnel et incontournable du foyer moyen..
      La seule piste proposée ici serait une « étiquette » énergétique du logement par rapport aux transports

      La voiture s’imposant, en général, comme un
      équipement incontournable, son acquisition et son entretien entrent dans les grosses
      dépenses de consommation que s’impose la majorité des ménages. En revanche, les
      dépenses de carburant font partie des charges quotidiennes et sont une charge qui bien
      souvent n’est pas clairement identifiée. A partir du moment où une résidence a été choisie,
      elle s’impose, du fait du bâti, du cadre, du voisinage : les conséquences en terme d’éloignement des services et de l’emploi passent au second plan, dès lors que le ménage
      est équipé en automobile.
      L’analyse de la progression des kilomètres parcourus sur les dix dernières années montrent
      que pour les déplacements contraints du quotidien, l’élasticité entre les distances
      parcourues en automobile et le prix des carburants est très faible, en particulier dans les
      zones périphériques des agglomérations peu desservies en transport en commun (CCTN,
      2010). En revanche, les analyses de l’Insee montrent que la dépense de mobilité globale d’un
      ménage (automobile et autres transports, notamment pour les loisirs et les vacances) a une
      très forte élasticité au revenu. De fait, les cadres parcourent des distances nettement plus
      grandes que les autres catégories de salariés.
      Toutefois quand le budget du ménage se trouve amputé, la nécessité de réduire le coût des
      déplacements peut finir par s’imposer. Les années récentes de crise l’ont bien montré en
      favorisant, notamment, l’essor du covoiturage, et l’accroissement du recours aux transports
      collectifs.
      On pourrait imaginer que parallèlement à l’étiquette « énergie » qui existe aujourd’hui pour
      caractériser le logement et informer l’acheteur au moment de la vente, une étiquette
      « accessibilité » permettrait aux accédants à la propriété de mesurer la charge financière à
      anticiper, en dépense annuelle de carburant, compte tenu de l’éloignement des services
      (écoles, commerces de base), des transports collectifs et des zones d’emploi.

  • Mésologiques : Habitat insoutenable et COP21 / Augustin Berque
    http://ecoumene.blogspot.fr/2015/12/font-face-font-family-cambria-mathfont.html

    Que je l’aie écrit voici dix ans ne modifie pas l’actualité du propos de ce livre, propos qui reste de définir les origines et l’histoire des motivations qui ont poussé la société contemporaine, dans les pays riches, à idéaliser la maison individuelle au plus près de la nature, ce qui a conduit à l’éclatement des villes et au phénomène de l’urbain diffus. Les origines et l’histoire des motivations qui expliquent ce phénomène n’ont pas changé.

    #écologie #habitat

    • « fastfûdoka » le terme est très bien trouvé, il nous en faudrait un comme ça dans toutes les langues

      la forclusion d’une moitié de nous-mêmes, à savoir [l’« entrelien humain »], est la raison profonde pour laquelle les sociétés modernes, en tant que telles, resteront structurellement incapables de surmonter la crise de l’#environnement, sinon au prix d’une révision radicale de ce qui les fonde : le corps médial que forment concrètement les humains entre eux et avec les choses, sur la Terre ; autrement dit, en réinventant leur propre #médiance

      Pas mieux.
      #écoumène #déménagement_du_territoire #urbain_diffus
      Il y a quand même un grand écart assez vertigineux entre cette pensée et le mouvement pour le #climat qui nous dit (à raison) qu’on n’a plus que quelques années pour éviter les trajectoires (en termes d’émissions de gaz à effet de serre) qui nous mèneront aux seuils de non-retour et donc à un changement d’ère géologique, avec tout ce que ça impliquerait de morts humaines.
      Cette urgence rend impossible dans un tel délai le changement civilisationnel nécessaire.

  • France : Le sel de la terre accaparée - CQFD, mensuel de critique et d’expérimentation sociales
    http://cqfd-journal.org/France-Le-sel-de-la-terre

    Face à cette hydre de l’accaparement spéculatif, de nombreuses luttes paysannes, syndicales ou autonomes, souvent discrètes mais jamais découragées, ambitionnent de remettre en question la propriété privée de la terre ou de se réapproprier la production alimentaire. Ces luttes sont de moins en moins cloisonnées à la profession agricole et peut rassembler autant des jeunes paysans sans terre que des ruraux excédés par la bétonisation de leur territoire. Un terreau de résistances riches en imaginaires fertiles pour défricher de nouveaux rapports collectifs à la terre et s’émanciper d’un modèle agricole productiviste définitivement à bout de souffle.

    • Plus discret et plus complexe, en France, l’#accaparement des terres se manifeste sous de multiples visages. En 30 ans, les surfaces urbaines ont augmenté de plus de 40 %, avalant des kilomètres de terres agricoles pour toujours plus de zones pavillonnaires sordides et autres « zones d’activités ». Cette bétonisation généralisée est partie pour s’amplifier dans les années à venir. Dans leur projet de réforme territoriale, les socialistes ont voté l’an dernier la « loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des #métropoles », dite loi Mapam. Il s’agit entre autres de créer par décret des métropoles de plus de 400 000 habitants, futurs porte-avions de la croissance. Nos campagnes ne seront plus à terme que des espaces récréatifs pour urbains en mal de nature ou des zones de production industrielle au service de villes-monstres.

      C’est exactement ça. Cf le Jardin de Babylone, de Charbonneau http://seenthis.net/messages/273520
      #banlieue_totale #urbain_diffus

  • Une plaie béante | Enbata
    http://www.enbata.info/articles/une-plaie-beante

    L’élargissement de l’A63 a provoqué une onde de choc sur sa portion Bidart-Biriatou. Une saignée béante révèle au grand jour certaines erreurs commises lors du choix du tracé autoroutier et au-delà, met l’accent sur la fuite en avant dans laquelle la Côte basque est engagée. C’est l’une des tares originelles de l’A 63 tenue d’assumer la double fonction d’autoroute de liaison grande distance et de desserte locale dans une zone où l’urbanisme n’a cessé de s’intensifier sans la moindre anticipation, le coût des péages ayant subi une courbe analogue.

    https://www.youtube.com/watch?v=5BagXiXklcI

    #autoroute #A63 #Pays_Basque #Côte_Basque #Espagne #urbanisme #aménagement_du_territoire #GPII

  • L’habitat individuel, première cause d’artificialisation des terres agricoles - Le Moniteur
    http://www.lemoniteur.fr/article/l-habitat-individuel-premiere-cause-d-artificialisation-des-terres-agrico

    D’autant que les terres artificialisées sont le plus souvent imperméabilisées, ce qui pose de graves problèmes de ruissellement et d’évacuation des eaux : aux deux tiers, les champs ont cédé la place aux routes, parkings, aires de stockage, le dernier tiers correspondant aux jardins, terrains de sports, chemins… Car la première cause d’artificialisation des terrains est la poussée de l’habitat individuel, avec ses jardins et annexes (46% des 491 000 ha artificialisés sur la période). Et le choix des ménages qui préfèrent les maisons avec pelouse aux immeubles collectifs, quitte à habiter loin des villes. Pour cette raison, les réseaux routiers nécessaires à leur desserte constituent le deuxième usage du sol artificialisé (16% entre 2006 et 2014).

    Sans surprise, c’est dans le Sud-Est -Bouches-du-Rhône (+4,4%), Var et Vaucluse- que l’on a le plus bétonné, avec l’Ain et la Haute-Savoie (situés dans l’aire d’influence de Genève), et dans l’Ouest avec l’étalement de Nantes, Rennes et Bordeaux. Faute de place sans doute, malgré la croissance démographique, la petite couronne parisienne n’a guère changé.

    #agriculture #habitat #écologie

  • «Une planète trop peuplée»: anatomie d’un mythe - LeTemps.ch
    http://www.letemps.ch/Page/Uuid/f1801488-0e15-11e5-bce4-0f8872f43eca/Une_plan%C3%A8te_trop_peupl%C3%A9e_anatomie_dun_mythe

    Nourrir tout le monde implique-t-il d’aller dans le mur sur le plan écologique ? Les #populationnistes pensent que oui. Pour eux, « le monde est confronté à un choix cornélien entre l’#agriculture industrielle, qui détruit l’#environnement mais nourrit tout le monde, et l’agriculture respectueuse de l’environnement, qui protège ce dernier mais ne nourrit pas la moitié des habitants sur Terre. Heureusement, il y a tout lieu de penser qu’ils ont tort. » Le contre-exemple vient de #Cuba : « Soudain privé de ses approvisionnements en carburants, en #engrais, en #pesticides et en semences lorsque l’Union soviétique s’est effondrée en 1990, le pays a adopté à grande échelle une agriculture #biologique à faible impact. » Résultat : « l’agriculture cubaine s’est plus que redressée, en usant de procédés qui n’étaient pas censés fonctionner ». Plusieurs études ont confirmé cette possibilité. Une méta-analyse de 300 recherches, conduite en 2007 à l’Université du Michigan, comparait les rendements de l’agriculture industrielle et écologique en montrant que « l’approvisionnement en denrées biologiques estimé excédait l’approvisionnement alimentaire actuel dans toutes les catégories de produits ».

    Un modèle maintenant menacé par les #Etats-Unis

    What Cuba can teach America about organic farming
    http://www.pbs.org/newshour/bb/cuba-can-teach-america-farming

    JEFFREY BROWN: But questions loom, as diplomatic relations between the U.S. and Cuba improve, and American agriculture and food companies look for commercial opportunities on the island.

    JASON REIS: I was just talking to our guide at the farm here, and she says that genetically modified organisms are outlawed in Cuba. They’re not allowed. However, chemicals may be allowed.

    And I don’t know what will happen if the American agriculture companies get in here, and are able to sell their products, if it’s going to continue like this organic model, or if it’s going to look a lot more like what we see in the U.S. I really — I really don’t know what’s going to happen.

    JEFFREY BROWN: Miguel Salcines says farming here will change, but he hopes the focus on organic methods continues.

    MIGUEL SALCINES (through translator): The use of chemicals is inevitable. The chemists are going to return. What we have to know is to what extent, and use them as little as possible, and try to continue to emphasize organic agriculture.

  • Pour préciser le sujet de recherche doctoral, plus généralement, je traite des effets économiques sur la société, des infrastructures de transport. Cela induit l’exclusion des effets passagers (exclusifs) et des effets pour les ménages. Je traite essentiellement des effets des infrastructures de transports sur le tissu économique (entreprises, marché du travail et des biens intermédiaires).
    Donc ça c’est le sujet. Dans les traitements théoriques que j’aimerais aborder se trouve la question de l’espace/temps (vitesse, valeur du temps, accessibilité, aménagement du territoire). Je les aborde d’un point de vue économique, je ne juge donc pas des dynamiques spatiales qui à court-terme créent des inégalités et de la polarisation, et à long-terme peuvent permettre une accessibilité générale satisfaisante pour l’exercice du service public.
    Les questions de spécialisation éco-territoriale et d’attractivité spatiale (et donc de fractionnement des fonctions de production, voire de leur dématérialisation. sont au centre de l’analyse théorique puis prochainement (deuxième ou troisième année selon l’arrivée des données) économétriquement.
    Je prends de l’avance sur ces questions (je démarre à peine, et encore pas « officiellement ») mais ça vaut le coup d’y réfléchir dès maintenant pour souligner des problématiques qualitatives importantes et qui tendent à être éclipsées par les analyses statistiques dont les interprétations par les pouvoirs publics sont parfois hasardeuses. Mon objectif est d’éviter cette appropriation inexacte des résultats tant théoriques que quantitatifs.
    Aujourd’hui, en tombant sur un article du site « Mutinerie, libres ensemble » (je vais retrouver la référence), je réfléchis à la dématérialisation de l’entreprise et des tâches productives, à leur mécanisation et donc à une masse critique de chômage, masse induite par le modèle économique lui-même (perversion industrielle et technologique). Cette tendance à la numérisation (virtualisation) du travail peut avoir une incidence sur le tissu économico-spatial de n’importe quel territoire, pourtant on est face à une urbanisation croissante du fait des inégalités sociales et économiques. C’est donc que la concentration, l’agglomération et l’urbanisation des population n’est plus une décision dont la base serait la rationalité économique et industrielle. Qu’est-ce qui attire les primo-urbains ?

    (concernant la tendance à la désurbanisation, je la marginalise pour le moment dans l’analyse, car les statistiques nous montrent que plus qu’une « ruralisation » c’est à une péri-urbanisation que nous avons à faire, ce qui est l’extension de l’urbanisation des dernières années du fait de l’étalement des périmètres urbains. Je traiterais donc ce point dans une partie de la thèse que je pense appeler « les effets économiques négatifs de l’agglomération », et j’aborderai pour cela principalement les contraintes foncières).

    C’est beaucoup de blabla, on ressent bien que j’en suis aux prémices de la thèse, mais tout ceci sera peaufiné, sans aucun doute (enfin, je l’espère, sinon je n’ai rien à faire à cette place).

  • La feuille Charbinoise
    http://www.lafeuillecharbinoise.com

    Les voisins c’est pas toujours la fête.
    Quelques considérations acides sur la délocalisation des citadins à la campagne

    Ce n’est pas un hasard si je choisis le terme de « délocalisation » dans mon titre. Je voulais éviter toute confusion entre les personnes dont je vais parler et les véritables « néo-ruraux » qui sont bien souvent les acteurs dynamiques du renouveau de la vie dans nos campagnes. Non… ceux que je vais quelque peu égratigner dans ce billet, ce sont ces gens qui sont égarés dans le paysage rural, ces citadins auxquels on a fait croire que la vie en plein air c’était les barbecues à tout va, les virées en quad à gogo et autres loisirs culturels à base de moteurs pétaradants. Ils sont venus vivre à la campagne parce que « c’est moins cher » et parce qu’on leur a fait miroiter la liberté des grands espaces. Tout ce qui était difficile à gérer dans un T2 à cause – notamment – du voisinage, ne pose plus aucun problème du moment que plus personne n’habite en dessus ou en dessous. Tant pis si votre terrasse n’est qu’à trois mètres cinquante de celle de votre voisin. Tant qu’on aime les sardines grillées, il n’y a pas de soucis. Ces nouveaux arrivants colonisent peu à peu l’espace agricole par le biais des lotissements que les promoteurs peu scrupuleux font éclore à droite comme à gauche (dans tous les sens du terme). « Vous ne pouvez pas refuser une proposition aussi mirobolante, M’sieu le maire. Grâce à la construction du lotissement « les fleurettes », votre « trou », non pardon votre charmante bourgade, va gagner trois cent habitants d’un coup. Faites leur risette de temps à autre, et hop ! un bon lot de voix gagné aux prochaines élections ! Ça ne coûtera presque rien à la commune bien sûr. Tout est précisé dans le dossier de 647 pages que je vous ai remis… »

  • Entretien avec une chercheure en #sociologie #rurale | les paysans et paysannes dans la lutte des classes
    http://blogs.radiocanut.org/luttespaysannes/2015/05/22/entretien-avec-une-chercheure-en-sociologie-rurale
    http://blogs.radiocanut.org/luttespaysannes/files/2015/05/lpdllc21mai2015.mp3

    Émission du 21 mai 2015 : entretien avec Yannick Sencébé, chercheure en sociologie rurale à l’Inra. Historique de la sociologie rurale, critique des politiques d’aménagement du #territoire et réflexions sociales et politiques autour de la #ruralité.

  • Mise en ligne : Recompositions récentes dans le périurbain toulousain (Sud-Ouest Européen, n°31, 2011)
    http://soe.revues.org/796

    SOMMAIRE :
    – Pour une analyse des recompositions récentes dans le périurbain toulousain
    – Cartographier l’évolution de la périurbanisation autour de Toulouse
    – Vieillir en maison individuelle dans les espaces périurbains toulousains
    – Retour dans les espaces de la « captivité périurbaine » : diversification des parcours de vie et affirmation de logiques d’autonomisation
    – Perceptions du climat et appréhensions des enjeux climatiques dans les quartiers pavillonnaires de la périphérie toulousaine
    – L’agriculture de l’aire urbaine de Toulouse. Enseignements de la presse locale
    – Desserrement des activités et étalement urbain à Toulouse
    – L’étalement urbain à l’épreuve de la complexité intercommunale : analyse des modèles de coopérations dans l’agglomération toulousaine
    – Les services enfance-jeunesse dans le périurbain toulousain
    – Expertise et planification territoriale dans l’agglomération toulousaine : les recompositions centre-périphérie à l’œuvre
    – Toulouse et la région Midi-Pyrénées. Nouvelles lectures du « fait urbain » (1999-2010)

    VARIA :
    – Pratiques de la ville et formes des « espaces-temps de vie » des femmes à Bordeaux
    – La cartographie militaire des Pyrénées françaises et la guerre civile espagnole
    – Syncrétisme urbain et création musicale : le fado de Lisbonne

    #Géographie #Toulouse #Géographie_de_Toulouse #Périurbain #Espace_Périurbain #Espace_Urbain #Ville #Études_Urbaines #Géographie_Urbaine #Périurbanisation #Périurbain_Toulousain #Cartographie

  • Spéculation foncière sur terres agricoles
    http://mediabask.naiz.eus/eu/info_mbsk/20150430/notaires-ne-detournez-pas-nos-terres

    Une trentaine de personnes se sont réunies ce matin, jeudi 30 avril, devant le bureau du notaire Me Fagoaga situé à Saint-Jean-de-Luz. Le syndicat ELB [Confédération Paysanne NdT], Lurzaindia, les Amap, le collectif Lurra ta Etxebizitza et la ville d’Ascain étaient présents sous le slogan de « Notaires ne détournez pas nos terres ! ».

    Une colère provoquée par une transaction récente, la goutte qui a fait déborder le vase. A Ascain, un terrain de 6 300m² a été vendu à plus de 721 700 euros. Le terrain en question était une terre productive, propriété d’un maraîcher. L’acquéreur, un résident secondaire d’Ascain. Le notaire a gagné six mille euros de plus que s’il avait traité la vente d’un terrain agricole et la SAFER se voit dans l’impossibilité d’intervenir dans le processus d’acquisition.

    Effectivement, le notaire a vendu le terrain au titre de « nue propriété », sur lequel la SAFER n’a plus de droit. La loi d’Avenir Agricole ne reconnaît le droit de préemption de la SAFER que dans le cas où celle-ci est ou envisage d’être propriétaire de l’usufruit.

    La vente d’Ascain n’est pas isolée. La vente de la nue propriété de terrains agricoles est un fait fréquent qui a eu lieu à Ayherre, Arbonne ou encore Biriatou, d’après ELB. Des zones où la demande d’installation de jeunes agriculteurs ou maraîchers est grande, mais le foncier rare.

    Les manifestants dénoncent la responsabilité du notaire et du maraîcher qui, par la vente spéculée du terrain, contribuent à l’augmentation du prix de la terre et appauvrissent l’avenir des habitants du secteur.

    #accaparement #urbain_diffus #ruralité #déménagement_du_territoire #Pays_Basque

  • Quelques outils pour penser le Front National | Enbata
    http://www.enbata.info/articles/quelques-outils-pour-penser-le-front-national
    (une assez bonne synthèse je trouve)

    Dans toutes les Pyrénées Atlantiques le vote d’#extrême-droite progresse. A Pau, lors des dernières municipales de 2014 il plafonnait à 6% : aujourd’hui le #FN obtient désormais près de 17%. Sur le canton Bayonne-2, alors que l’extrême-droite a puisé dans son électorat d’illustres inconnus, elle bat des records avec 18,46 %.

    Pour autant, le parti Lepéniste reste contenu dans les PA avec 11,3% des voix (contre 25% dans l’hexagone).

    En Pays Basque, ces scores restent bas dans les cantons à forte #identité : Montagne Basque ( 8,95%) et Pays De Bidache, Amikuze Et Ostibarre (11,57%). Idem dans le Béarn. Passons rapidement sur le fait que s’il y a des résultats électoraux, la parole raciste, intolérante pour ne pas dire bête s’est aussi largement libérée.

    La faiblesse relative de l’extrême-droite dépasse largement le contexte local. L’explication de ces résultats départementaux tient aussi à ce qu’Hervé Le Bras et Emmanuel Todd exposaient dans Le mystère français (2013), à savoir que même si la France s’homogénéise, le lieu de vie produit encore du politique : depuis l’après-guerre l’#électorat catholique a basculé progressivement à gauche dans les régions de l’ouest. Ainsi le FN plafonne à 9,86 % dans le Gers, 15,92% dans les Hautes-Pyrénées ou encore à 15,76% en Ariège (présentant pourtant le PIB par habitant le plus faible de métropole). Todd n’en est pas à son coup d’essai : dans l’ouvrage « l’invention de la France », il montre comment du nord au sud, de l’est à l’ouest, dans l’Hexagone les mœurs, les structures familiales et l’ancrage religieux varient aujourd’hui comme en 1850. En ce sens, la France est une construction artificielle où les défenseurs autoproclamés de l’identité nationale ne comprennent pas l’histoire de leur propre pays. Selon Todd, les structures familiales historiquement inégalitaires du Sud-Ouest expliquent le maintien d’une conscience forte du collectif, et donc une résistance aux thèses de l’extrême-droite.

    Autre élément indispensable pour comprendre la faiblesse relative du Lepénisme en #Pays_Basque, la question des #inégalités.


    Les travaux d’Hervé le Bras ont montré que les écarts de richesse expliquent en grande partie le vote FN http://le1hebdo.fr/numero/47/les-cartes-des-ingalits-et-du-vote-fn-se-superposent-808.html. Elles provoquent l’abstention ou le vote de rejet pour les plus pauvres ; le repli sur soi pour les plus riches. On le voit les inégalités sont moins marquées dans le Sud-Ouest, à l’exception du bassin de la Garonne. Il est clair que le climat océanique très pluvieux a contenu l’installation de riches retraités, contrairement à la côte d’Azur.

    En 2013, cette étude l’IFOP http://www.lemonde.fr/politique/article/2013/08/07/face-nord-et-face-sud-les-deux-electorats-du-fn_3458468_823448.html a fait date. Elle démontre que le Front national a deux visages, deux électorats bien distincts dans le nord-est et le sud-est.

    Penser de manière globale le FN, uniquement sur le registre moral comme l’a fait le premier ministre Manuel Valls est une grave erreur.

    Dans le Sud-Est, tout particulièrement dans le Vaucluse, les Pyrénées-Orientales et la Corse, le vote d’extrême droite repose historiquement sur les français « Pieds-noirs » rapatriés d’#Algérie. La fondation du FN est en effet intimement liée à l’histoire de l’OAS. Jacques Bompard, premier maire de FN en 1995 à Orange, puis député-maire en 2012, était un militant de l’#OAS. Dans le sud-est, l’extrême-droite est dans le sillage du discours classique de Jean-Marie Le Pen : riches retraités, poujadistes, artisans et commerçants dénonçant « la pression fiscale ».

    Dans l’électorat « nordiste » les catégories populaires sont bien plus représentées et rêvent au contraire de taxer les plus #riches.

    En ce sens le discours du FN variable selon les contextes, et donc contradictoire dans son projet concret, rappelle toujours plus ce qu’Antonio Gramsci décrivait comme les mécanismes insidieux d’hégémonie politique du #fascisme.

    Que l’on voit localement lorsque le candidat FN Jean-Michel Iratchet se prononce en faveur de la langue basque https://youtu.be/mtxnvCNeTtw?t=1h39m34s

     : même stratégie fondée sur le #mensonge et la #manipulation.

    Le rôle central de la #consommation

    Autre auteur indispensable à lire, Bernard Stiegler. En 2013, dans Pharmacologie du Front National http://arsindustrialis.org/pharmacologie-du-front-national-0, Stiegler a relancé le débat en montrant que les idées dans lesquelles se reconnaissent les électeurs Lepénistes n’ont pas été produites par le Front National : ce sont celles que l’ultralibéralisme a engendrées. Selon lui, le #consumérisme aura été un dispositif de modification des conditions de l’individuation psychique et collective, c’est à dire une perte du sentiment d’exister. « La défaite idéologique de la pensée de la gauche aura consisté à abandonner toute capacité à critiquer la #société_de_consommation et à ne pas voir comment le consumérisme est devenu, en quelque sorte par intégration fonctionnelle, une machine de guerre idéologique, permettant de contrôler les représentations » explique-t-il. Avec ce logiciel, on comprend pourquoi le #Vaucluse concentre à la fois les plus grands centre commerciaux d’Europe et un électorat séduit à 37,4% par le parti de Marine Le Pen. Les centres villes y ont été délaissés au profit d’un mode individualiste où domine la vie pavillonnaire (Lire aussi Le cauchemar pavillonnaire http://www.lechappee.org/le-cauchemar-pavillonnaire ).

    Au Pays Basque ce sont les communes de zones péri-urbaines qui ont voté le plus FN aux dernières européennes : Mouguerre (20,53%), Urt (22,28%)…, définies par un mode de vie à dominance pavillonnaire. (Le dimanche à Lahonce, ce sont des dizaines de tondeuses individuelles qui tournent). Selon Stiegler, « notre responsabilité aujourd’hui, n’est pas de mettre à l’index les électeurs du Front National, ni les français qui partageraient ces idées : l’enjeu, c’est le passage d’un modèle industriel consumériste caduc, producteur d’incapacité, à un modèle industriel contributif, porteur de nouvelles solvabilités et fondé sur recapacitation généralisée ».

    En effet, le devenir de l’extrême droite n’est pas un accident de parcours ou un avatar des calculs politiciens ; c’est le résultat ultime de la contre-révolution Tatchérienne. La logique du #bouc_émissaire aura été fonctionnellement indispensable, comme inversion de causalité, à l’acceptation des dégâts de l’ultralibéralisme en France.

    Manuel Valls peut accabler publiquement le Front national, le Parti socialiste a fait le jeu de l’extrême-droite lorsqu’il s’est montré incapable de critiquer la société de consommation, de réduire les inégalités et la ségrégation sociale.

    Ravage de la #droite_décomplexée

    Il faut lire aussi le Mythe National http://www.franceculture.fr/oeuvre-le-mythe-national-l-histoire-de-france-revisit%C3%A9e-de-suzann, de Suzanne Citron, ouvrage de référence réédité récemment. Citron y déconstruit cette histoire de France idéalisée, notamment l’idée de nation, véritable emblème passe-partout qui a été enseignée sous des habillages bien différents selon les époques (Vichy, guerre d’Algérie…).

    Parmi les causes du FN en France, il faut rappeler la stratégie de la « droite décomplexée » de Nicolas Sarkozy, Eric Besson, Brice Hortefeux et Thierry Mariani…Ils ont véritablement banalisée un discours stigmatisant et xénophobe. Et comme les gens préfèrent l’original à la copie, l’électorat a basculé dans le camp du FN. Dans le Vaucluse, l’adhésion de la droite populaire à une stratégie du bouc émissaire a été précoce : le vote UMP s’y est ensuite écroulé. Thierry Mariani après avoir ouvert les vannes, a déserté le département pour la circonscription des français établis à l’étranger. En 1986, le maire de Marseille Jean-Claude Gaudin avait été le premier à s’allier au FN lors des régionales. Le Sud-est est devenu un laboratoire : le flottement de l’UMP à l’extrême droite est tel, que plus aucune alliance ne provoque l’indignation. Dernières connivences en date, l’élection du président (UMP) de l’agglomération d’Avignon avec les voix du FN, n’a provoqué aucune réaction publique. A l’inverse, dans le Sud-Ouest, le #Modem est profondément enraciné et n’a jamais cédé à la stratégie de bouc émissaire pensée par la « droite décomplexée » sarkozienne. Dès le soir du premier tour des départementales, sans ambiguïté, Jean-Jacques Lasserre, leader du Modem et président de l’assemblée départementale de 2001 à 2008 appelait à ne « pas soutenir l’extrême-droite » sur le canton Nive-Adour.

    Autre leurre serait de laisser le pouvoir au FN pour enfin le délégitimer : les prises de pouvoir successives de l’extrême-droite dans le Sud-Est, bien que caractérisées par les affaires, le grotesque et les conflits d’intérêts, n’ont pas remobilisé l’électorat. Bien au contraire, une casse méthodique du milieu associatif a entretenu une profonde apathie politique, tué la citoyenneté et la contre-culture.

    Avec tout ça, on voit que réduire le vote FN au #chômage relève de la paresse d’esprit.

    Vote frontiste désormais plus fort chez les jeunes

    Enfin, il reste la spécificité basque. « Ici on sort des réseaux traditionnels de militance. C’est une expérimentation sociale remarquable » m’expliquait au sujet d’#Alternatiba Geneviève Azam, économiste et membre du conseil scientifique d’#ATTAC. En France, la gauche française n’est plus capable de fédérer une colère légitime contre les inégalités et les dérives du capitalisme. Une gestion bureaucratique des structures est venue remplacer une #radicalité qu’incarnait par exemple le mouvement #Act-Up. Dans la bouche d’une petite caste médiatique et universitaire non représentative des classes populaires, il est juste question de mener la « bataille des idées ».

    De son coté, le Parti Socialiste n’est plus qu’une machinerie électorale : aujourd’hui, les 2/3 des affiliés sont des élus, le tiers restant couvre les attachés parlementaires et les permanents du parti. Or « comment forme-t-on les gens à la politique ? Par la participation active aux affaires de la Cité » martelait le philosphe Cornélius Castoriadis.

    Ici, le mouvement basque, au sens large (festivals musicaux, la chambre d’Agriculture #EHLG, les bars militants, la lutte contre la #spéculation foncière ou la mobilisation contre la #LGV …) a été capable de capter une jeunesse désireuse d’action et de radicalité.

    Dimanche, la gauche basque d’EHBai s’est ainsi hissé au second tour dans cinq cantons, même à Saint-Jean-de-Luz réputé conservateur.

    Malheureusement, à contrario dans beaucoup de villes de l’hexagone, le désir d’agir à été accaparé par le Bloc Identitaire, groupe d’extrême-droite très efficace dans sa communication et ses happening (Occupation très médiatisée de la mosquée de Poitiers en 2012). Contrairement à une idée reçue, le vote FN est désormais plus fort chez les 25-34 ans et les 45-59 ans, que chez les seniors, plus fidèles à l’UMP.

    En conclusion, il faut cependant se garder de penser le Pays Basque comme un territoire bucolique, où le racisme et le rejet de l’autre n’existerait pas. La croyance dans une #histoire idéalisée n’est pas propre au nationalisme français. Cette idée qui veut que les « basques étaient présents avant les autres », brandie par certains comme seul argument de légitimation politique, évoque avec force les délires d’Eric Zemmour, convaincu que « les français sont présents depuis 1000 ans » sur ce territoire. On entend aussi parfois qu’il ne faut pas critiquer la culture basque car « elle est minoritaire et que toutes ses initiatives sont positives ». Ceux qui tiennent ces propos détruisent ce qu’ils croient défendre.

    La première identité politique est ce que l’on fait, pas ce que l’on prétend être ou rejeter. Une société humaine se légitime aussi par son projet collectif, la prise en compte de sa #diversité, des pratiques fondées sur le respect des droits individuels, jamais sur une vision fantasmée du passé et de ce que l’on croit être.

    #urbain_diffus #banlieue_totale #périphéries #déménagement_du_territoire #gpii #éditocrates #catholicisme_zombie

  • Voyage dans les #gares #TGV perdues en rase #campagne

    Vous êtes arrivés à Lorraine TGV. Bienvenue en rase campagne, au milieu des champs, où s’arrêtent depuis 2007 les trains à grande vitesse. A leur arrivée dans cette gare, installée dans le petit village de Louvigny (Moselle), 840 habitants, les voyageurs n’ont d’autre choix que de prendre le volant ou de s’installer dans un bus pour rallier les villes les plus proches, Metz et Nancy, à une trentaine de kilomètres de là. Dimanche 1er février, les Lorrains étaient appelés à voter sur l’avenir de la gare, que le Conseil régional souhaite remplacer par une autre implantation, sur le territoire de Vandières (Meurthe-et-Moselle), à 20 kilomètres de là. Avec une très faible participation, les électeurs ont dit non à ce projet, toujours excentré, mais qui serait relié au réseau TER.

    Depuis trente ans, de Mâcon-Loché à Belfort-Montbéliard en passant par la Meuse ou Le Creusot, le TGV a souvent fait halte à l’écart des grands centres urbains. Francetv info a pris sa carte grand voyageur pour aller à la découverte de ces gares des champs et s’est demandé pourquoi elles avaient été préférées aux centre-villes.


    http://www.francetvinfo.fr/economie/transports/voyage-dans-les-gares-tgv-perdues-en-rase-campagne.html
    #photographie #paysage #France #train #rail #transport_ferroviaire
    cc @albertocampiphoto

  • #Crise, #métropolisation, et #aménagement

    Ce texte développe une conférence tenue à Notre-Dame-des-Landes, lors du rassemblement, le 4 août 2013, des opposants au projet d’un #aéroport international pour la métropole de #Nantes.
    La métropolisation, telle que présentée à l’opinion publique, est l’avenir urbain de l’humanité. Nous montrons ici qu’elle est d’abord le résultat de la Crise longue ouverte dans les années 1970, dans laquelle le capitalisme survit en s’adonnant à ses penchants pour la rente, l’économie prédatrice, et la « solution spatiale » de la Mondialisation. Les métropoles sont les points d’ancrage spatial de cette « nouvelle économie ». La métropolisation, dans laquelle, comme toutes les études géographiques le montrent, les déséquilibres et les #inégalités s’accroissent, est le faux-semblant urbain d’une réalité d’#inversion_spatiale et de #désurbanisation, soumise aux flux centrifuges créés par la Crise.

    http://cybergeo.revues.org/26636
    #urban_matters
    cc @reka

  • Le Jardin de Babylone - Bernard Charbonneau (Encyclopédie des nuisances, 2002)
    http://biosphere.ouvaton.org/de-1182-a-1999/1780-1969-le-jardin-de-babylone-de-bernard-charbonneau-encycloped
    Texte écrit en 1969, extrêmement visionnaire et complet

    « La #nature est à la fois la mère qui nous a engendrés, et la fille que nous avons conçue. A l’origine, il n’y avait pas encore de nature. L’homme ne s’était pas encore distingué d’elle pour la considérer. Individus et société étaient englobés dans le #cosmos. C’est en Judée que naquit la nature, avec la Création : Jahvé a profané le cosmos et l’homme peut y porter la main. Même provisoirement écrasée, la révolte de la liberté humaine était à tout jamais déchaînée. Alors grandirent parallèlement la maîtrise et le #sentiment_de_la_nature. La science pénétra le mécanisme du cosmos, et ainsi la #technique permit de la transformer. Le sentiment de la nature apparaît là où le lien avec le cosmos est rompu, quand la terre se couvre de maisons et le ciel de fumées ; là où est l’#industrie, ou bien l’#Etat. La #campagne s’urbanise, et l’Europe devient une seule banlieue. Mais quand la nature vient à disparaître, c’est l’homme qui retourne au chaos.

    1/5) Reconstruction de la nature, fin de la nature
    L’intervention puissante et aveugle de l’homme risque de rompre l’équilibre fragile dont l’homme est issu. Le souci de la #productivité s’attache trop au présent, pas assez à l’avenir ; alors vient un jour où le #rendement baisse. Si la production continue d’augmenter indéfiniment, alors se posera un autre problème, celui de l’élimination des déchets. Trop souvent, au constat de l’épuisement du milieu naturel, les fidèles du progrès opposent un acte de foi : « On trouvera bien un moyen. » Or il y a de fortes chances que nous soyons obligés de reconstituer à grand frais les biens qui nous étaient fournis par la nature ; et ceci au prix de discipline autant que d’efforts. L’homme naît de la nature comme au sein d’une mère. Là où elle disparaît, la société moderne est obligée de fabriquer une surnature, l’homme devra réempoissonner l’océan comme il empoissonne un étang. Mais alors l’homme doit imposer à l’homme toute la rigueur de l’ordre que le Créateur s’est imposé à lui-même. En substituant dans cette recréation l’inhumanité d’une police totalitaire à celle d’une nature totale.

    Si l’homme dépasse la nature, il en est aussi le fruit. Aussi voit-on se développer dans les sociétés industrielles et urbaines un « sentiment » de nature qui reflète la gravité de la rupture avec le cosmos. Ainsi au siècle de l’artifice, nous avons la passion de cette nature que nous détruisons. Le sentiment de la nature est à la fois profond et extérieur à la vie des individus ; il se nourrit d’apparences, son domaine est celui de la peinture et du spectacle. Sauf exception, nous aimons la nature, mais nous craignons d’y vivre.

    2/5) La fin des paysans
    « Là où il existe, le #paysan est l’homme du pays, il est englobé dans la pulsation du cosmos. L’Eden terrestre n’est pas un don de Dieu, mais le fruit de la peine, moissonneurs des plaines courbés sur l’horizon. Au siècle de la division du travail le paysan est l’homme des cultures et des travaux multiples. Jusqu’en 1914, il fallait prendre la carriole à la gare pour gagner le village, et parfois du village c’est à pied qu’il fallait gagner l’encart. Jusqu’en 1945 l’industrie agricole n’existait vraiment qu’aux USA et dans quelques pays neufs. Maintenant des machines toujours plus puissantes ébranlent son univers. La campagne doit se dépeupler pour accueillir le peuple des tracteurs. Il n’y a plus de nature ni d’homme qui puisse tenir devant l’impitoyable tracé des raisons de l’Etat ou de la Production. Des lois déracinent les peuples comme le bulldozer les haies.

    L’instruction primaire obligatoire fut une sorte de #colonisation bourgeoise de la campagne. En même temps qu’il apprenait à lire et à écrire, le jeune paysan devait désapprendre : sa langue et son folklore. Les instituteurs de la IIIe République participèrent d’autant plus à cette entreprise de colonisation qu’ils étaient fils de paysans, pour lesquels devenir bourgeois était une promotion sociale. On peut imaginer une évolution différente où l’école eût continué l’Eglise dans le village, s’insérant dans la nature et la tradition en leur ajoutant, avec l’instruction, la dimension de la conscience. Mais les manuels scolaires, qui se lamentaient de la « dépopulation » des campagnes, se mirent à déplorer leur surpopulation.

    Le plan Monnet a déraciné les paysans que 1789 avait enracinés en leur donnant la terre. Comment des ingénieurs auraient-ils pu concevoir la campagne autrement que comme une industrie ? Dans cette optique, la campagne française était évidemment « sous-développée ». Le plan prévoyait le passage d’une agriculture de subsistance à une agriculture de marché qui intégrait le paysan dans le cycle de l’argent et de la machine. Le paysan vivait sur la propriété de polyculture familiale, maintenant il se spécialise. La monoculture le fait dépendre du marché. Désormais il lui faut acheter pour vendre, et vendre pour acheter, le superflu dont il commence à prendre l’habitude, et le nécessaire : les machines, les engrais, et même la nourriture. Les critères du plan furent exclusivement techniques : rendements à l’hectare, consommation d’énergie, possession d’une auto ou d’un téléphone. Certains facteurs ne furent pas pris en compte : la conservation des sols, la saveur des produits, l’espace, la pureté de l’air ou de l’eau. A plus forte raison certains facteurs humains comme le fait d’être son propre maître. La vie à la campagne comportait un relatif isolement, la participation à un groupe retreint mais aux liens solides ; et voici que l’organisation administrative et syndicale, la diffusion de l’instruction et de la presse, de la TV, absorbent les paysans dans la société globale.

    La seconde révolution industrielle, celle des hydrocarbures et de la chimie, va s’imposer aux campagnes européennes. La machine va trop vite pour la pensée : son usage précède toujours la conscience de ses effets. La tronçonneuse ne laisse plus le temps de la réflexion comme la hache. Si on peut abattre un chêne en quelques secondes, il faut toujours un siècle pour le faire. Le tracteur n’est plus le monopole du très grand propriétaire, les produits chimiques diminuent le travail du paysan, mais comme il faut les payer, il faut d’autant plus travailler. La petite exploitation n’était pas rentable. Le progrès technique signifie la concentration, la mécanisation engendre la grande exploitation. Le ruisseau n’est plus que l’effluent d’un terrain saturé de chimie et il suffit de quelques pompes-canons pour le tarir. Qu’est devenue la vie secrète des vallons ? Il n’y a plus que l’eau morte des retenues collinaires. Le travail devient vraiment du travail, c’est-à-dire du travail d’usine. Avant peu, les paysans réclameront à leur tour le droit de passer leurs vacances à la campagne.

    L’électrification et l’adduction d’eau multiplient les tâches en intégrant le paysan dans le système urbain. L’#aménagement_du_territoire, ou plutôt le déménagement, étendit ses méthodes à la campagne. La grande presse, et surtout la TV, achèvent d’entraîner la campagne dans le circuit des villes. Avant la dernière guerre, la ville gagnait dans la campagne, maintenant elle la submerge. C’est ainsi qu’à la France des paysages succède celle des terrains vagues. Et bientôt la France rurale ne sera plus que la banlieue de Paris. La campagne n’est plus qu’un élément d’une seule économie dont la ville est le quartier général. Le reste n’est plus que terrain industriel, aérodromes, autostrades, terrain de jeu pour les citadins. Partout pénètrent les autos, et avec elles les masses, les murs : la ville.

    3/5) Le cancer de l’urbanisation
    Les villes anciennes étaient beaucoup moins nombreuses et beaucoup plus petites que les nôtres. Elles étaient perdues dans la nature. En hiver, la nuit, les loups venaient flairer leurs portes, et à l’aube le chant des coqs résonnait dans leurs cours. Puis un jour, avec le progrès de l’industrie, elles explosèrent, devenant un chaos. Le signe le plus voyant de la montée du chaos urbain c’est la montée des ordures. Partout où la population s’accumule, inexorablement l’air s’épaissit d’arômes, l’eau se charge de débris. La rançon du robinet, c’est l’égout. Sans cesse nous nous lavons, ce n’est plus une cuvette qui mousse, mais la Seine.

    Les villes sont une nébuleuse en expansion dont le rythme dépasse l’homme, une sorte de débâcle géologique, un raz de marée social, que la pensée ou l’action humaine n’arrive plus à dominer. Depuis 1960, il n’est plus question de limiter la croissance de Paris, mais de se préparer au Paris de vingt millions d’habitants dont les Champs-Élysées iront jusqu’au Havre. Les tentacules des nouveaux faubourgs évoquent irrésistiblement la prolifération d’un tissu cancéreux. La ville augmente parce qu’elle augmente, plus que jamais elle se définit comme une agglomération. La ville augmente parce que les hommes sont des êtres sociaux, heureux d’être nombreux et d’être ensemble. Il est bien évident qu’elle n’est pas le fruit d’un projet.

    Les hommes se sont rassemblés dans les villes pour se soustraire aux forces de la nature. Ils n’y ont que trop bien réussi ; le citadin moderne tend à être complètement pris dans un milieu artificiel. Non seulement dans la foule, mais parce que tout ce qu’il atteint est fabriqué par l’homme, pour l’utilité humaine. Au milieu des maisons, les hommes ont amené de la terre, construit un décor. Les usagers des jardins publics sont trop nombreux : regardez, mais ne touchez pas. Les coûts de Mégalopolis grandissent encore plus vite que sa taille. Il faut faire venir plus d’énergie, plus d’eau. Il faut assurer le transport des vivants, se débarrasser des cadavres et autres résidus. Il boit une eau qui n’est plus que celle, « recyclée » de ses égouts, la ville en est réduite à boire sa propre urine. Je propose en plus d’estimer en francs le mètre carré ou le mètre cube d’air pur, comme le kilowatt. Le XIXe siècle avait ses bagnes industriels, le nôtre a l’enfer quotidien du transport. Mégalopolis ne peut être sauvée que par le sacrifice, chaque jour plus poussé, de ses libertés.

    Après le style primitif, après l’ordre monarchique, le désordre de la période individualiste, la ruche monolithique d’une collectivité totalitaire. Si nous n’y prenons garde, en supposant un meilleur des mondes sans crise ni guerre, nous finirons dans une caverne climatisée, isolée dans ses propres résidus ; où nous aurons le nécessaire : la TV en couleur et en relief, et où il nous manquera seulement le superflu : l’air pur, l’eau claire et le silence. La ville pourrait bien devenir le lieu de l’inhumanité par excellence, une inhumanité sociale. Peut-être que si la science réussit à rendre l’individu aussi indifférencié qu’une goutte d’eau, la ville pourra grandir jusqu’à submerger la terre. Peut-être que le seul moyen de mettre un terme à la croissance inhumaine de certaines agglomérations est de laisser la pénurie atteindre un seuil qui, en manifestant avec éclat l’inconvénient d’y vivre, découragera les hommes d’y affluer.

    Le citadin s’est libéré en s’isolant du cosmos ; mais c’est ainsi qu’il a perdu sa liberté. Aujourd’hui, pour être libre, prendre des vacances, c’est sortir de la ville.

    4/5) Le tourisme, produit de l’industrie
    Pour les primitifs et les paysans, rien n’est plus étranger que l’idée de voyager. Ceux qui ont traversé les pays ignorés du tourisme savent à quel point leurs habitants sont surpris de voir un homme qui se déplace pour son plaisir. A l’origine, l’homme ne change de lieu que contraint par une nécessité supérieure : pour fuir un ennemi, s’enrichir, ou obéir à l’ordre d’un dieu. Pour le Moyen Age, le voyageur, c’est le pèlerin ou le trafiquant. Le voyage généralisé apparaît lorsque les conditions économiques et sociales permettent à l’individu de rompre avec son milieu. Il naît avec la richesse, la sécurité des routes, la curiosité et l’ennui. Le premier touriste, ce fut peut-être l’empereur Hadrien. Au contraire, le goût des voyages décroît avec la misère et l’insécurité. Le temps des invasions n’est jamais celui du tourisme ; alors l’individu se cramponne au sol pour subsister. Comme autrefois, il n’est pas assez d’une existence pour connaître vraiment son canton, parce qu’il lui faut avancer pas à pas. Et le quitter pour un autre, c’est le perdre.

    Le #tourisme commence au XVIIIe siècle, et d’Angleterre il gagne l’Europe. Le voyage n’est plus le fait d’une aristocratie, il devient celui d’une classe sociale tout entière : la bourgeoisie, et finalement les masses populaires. Pour un homme des villes, vivre physiquement et spirituellement, c’est retourner à la nature. Accablés de vêtements et d’artifices, nous nous étendons nus sur le sable. Ce sont les hommes de l’auto et de l’avion qui escaladent à pied les montagnes. La sympathie pour les sociétés indigènes aboutira tout au plus à un folklore pour touristes plaqué sur un abîme d’uniformité. On enfermera les derniers hommes sauvages, comme les derniers grands mammifères, dans des réserves soigneusement protégées, où ils joueront le rôle du primitif devant un public de civilisés. Le parc national n’est pas la nature, mais un parc, un produit de l’organisation sociale : le jardin public de la ville totale. C’est la terre entière qui devrait devenir un parc national ; tandis que la masse humaine irait vivre sous cloche dans quelque autre planète.

    La nature reste l’indispensable superflu de la société industrielle. La nature est photogénique ; notre civilisation de l’image est portée à l’exploiter pour compenser la rationalité de son infrastructure mathématique. Les mass media diffusent quotidiennement les mythes de la Mer, de la Montagne ou de la Neige. Le touriste n’est qu’un voyeur pour lequel le voyage se réduit au monument ou au site classé. Partout l’artifice cherche à nous restituer la nature. Isolé de la nature dans son auto, le touriste considère d’un œil de plus en plus blasé le plat documentaire qui se déroule derrière le miroir. Admirer les glaciers à travers les vitres d’un palace n’empêche pas de se plaindre de la faiblesse du chauffage. Un touriste ne vit pas, il voyage ; à peine a-t-il mis pied à terre que le klaxon du car le rappelle à l’ordre ; le tourisme et la vraie vie ne se mélangent pas plus que l’huile et l’eau. Avec la société capitaliste, le tourisme est devenu une industrie lourde. L’agence de tourisme fabrique à la chaîne quelques produits standard, dont la valeur est cotée en bourse. Il n’y aura plus de nature dans la France de cent millions d’habitants, mais des autoroutes qui mèneront de l’usine à l’usine – chimique ou touristique.

    L’auto, qui nous permet de nous déplacer aisément, par ailleurs nous enferme. Certains massifs de Pyrénées dépourvus de routes sont moins fréquentés qu’à l’époque de Russel et de Chausenque. Mais demain, le bulldozer permettra aux modernes centaures d’envahir partout la montagne, sans risque d’abîmer leurs délicats sabots de caoutchouc. Il faut du nouveau à l’individu moderne, n’en fût-il plus au monde. Le touriste change de lieu chaque fois plus vite – jusqu’au moment où le voyageur n’est plus qu’un passager affalé qui ronfle dans le fauteuil d’un avion lancé à mille à l’heure. Ce qui rend les voyages si faciles les rend inutiles. L’avion fait de Papeete un autre Nice, c’est-à-dire un autre Neuilly. Les temps sont proches où l’avion pour Honolulu n’aura pas plus de signification que le métro de midi. Tourisme ? Exactement un circuit fermé qui ramène le touriste exactement à son point de départ. A quoi bon l’auto qui permet de sortir de la ville, si elle nous mène au bord d’un autre égout ? Sur deux cents kilomètres de plage landaise, il n’est pas un feston de la frange des vagues qui ne soient ourlé par les perles noires du mazout. Et le soir, à la villa, le bain d’essence devient le rite complémentaire du bain de mer. On pouvait voir les bancs de perche évoluer dans les algues par trois mètres de fond dans l’étang de Biscarosse ; selon un rapport du Muséum il est aujourd’hui classé dans la quatrième catégorie, le maximum de pollution. La paix de l’hiver est rompue par les skieurs, le blanc des neiges, piétiné et balafré, n’est plus qu’un terrain vague maculé de débris et de traces. La montagne est mise à la portée des masses payantes. Mais est-elle encore la montagne ? Il n’y a plus de montagne ; il ne reste qu’un terrain de jeu. Le domaine du loisir étant celui de la liberté, pourquoi dépenser des milliards à couvrir les montagnes de téléphériques pour hisser le bétail humain sur les crêtes ? Aujourd’hui sites et monuments sont plus menacés par l’admiration des masses que par les ravages du temps. On voit venir le moment où les lieux les plus célèbres se reconnaîtront au fait que la visite en est interdite.

    Rien n’empêche la société industrielle d’enfermer la momie de Thoreau dans la vitrine de la littérature bucolique. Si nous voulons retrouver la nature, nous devons d’abord apprendre que nous l’avons perdue.

    5/5) Conclusion : échec et résurrection du sentiment de la nature
    Il n’est pas de lieu plus artificiel que ceux où la nature est vendue. Si un jour elle est détruite, ce sera d’abord par les industries de la mer et de la montagne. Si un « aménagement du territoire » désintéressé et intelligent s’efforce d’empêcher le désastre, il ne pourra le faire qu’au prix d’une organisation raffinée et implacable. Or l’organisation est l’exacte antithèse de la nature. Le « sentiment de la nature » s’est laissé refouler dans le domaine du loisir, du superflu et du frivole. La révolte naturiste n’a engendré qu’une littérature et non une révolution. Le scoutisme n’a pas dépassé l’enfance.

    Les passionnés de la nature sont à l’avant-garde de sa destruction : dans la mesure où leurs explorations préparent le tracé de l’autostrade, et où ensuite pour sauver la nature ils l’organisent. Ils écrivent un livre ou font des conférences pour convier l’univers à partager leur solitude : rien de tel qu’un navigateur solitaire pour rassembler les masses. L’amoureux du désert fonde une société pour la mise en valeur du Sahara. Cousteau, pour faire connaître le « monde du silence », tourna un film qui fit beaucoup de bruit. Le campeur passionné par les plages désertes fonde un village de toile. Ainsi, réaction contre l’organisation, le sentiment de la nature aboutit à l’organisation.

    En réalité il n’y a probablement pas de solution au sein de la société industrielle telle qu’elle nous est donnée. L’organisation moderne nous assure le superflu en nous privant du nécessaire. En dehors de l’équilibre naturel dont nous sommes issus, nous n’avons qu’un autre avenir, un univers résolument artificiel, purement social. L’homme vivra de la substance de l’homme, dans une sorte d’univers souterrain. Si l’espèce humaine s’enfonçait ainsi dans les ténèbres, elle n’aurait fait qu’aboutir à la même impasse obscure que les insectes. A moins qu’on ne s’adapte pour grouiller comme des rats dans quelque grand collecteur. Que faire ?

    La nature n’est pas une mère au sens sentimental du terme, elle est la Mère : l’origine de l’homme. L’homme doit péniblement se maintenir entre ces deux abîmes : la totalité cosmique et la totalité sociale ; et c’est ce terme même de nature qui lui indique où est son étroit chemin. Il faudra dominer l’industrie comme on a dominé la nature. Il nous faut réviser nos notions de nécessaire et de superflu. Il faut affronter le standard de vie, les investissements, les fusées et la bombe atomique pour choisir l’air pur. Ce n’est que si l’homme est capable de se dominer qu’il pourra continuer de dominer la terre. La solution suppose un renversement des valeurs. Il faut que la fin : la nature pour les hommes, commande les moyens : la science, l’industrie, l’Etat. Pour nous et surtout pour nos descendants, il n’y a pas d’autres voies qu’une véritable défense de la nature. Désormais toute entreprise devrait être envisagée en tenant compte de la totalité de l’équilibre qu’elle perturbe. Les hommes qui se voueraient à une telle révolution pourraient constituer une institution, indépendante des partis ou des Etats, consacrée à la défense de la nature. Elle se considérerait comme une sorte d’ordre, imposant à ses membres un certain style de vie, qui les aiderait à prendre leurs distances vis-à-vis de la société actuelle. Ils pratiqueraient une sorte d’objection de conscience. La merveille de Babylone est ce jardin terrestre qu’il nous faut maintenant défendre contre les puissances de mort.

    #ruralité #paysannerie #urbain_diffus #banlieue_totale #administration_du_désastre #wilderness #écoumène #critique_techno #système_technicien #déracinement #effet_rebond #hors_sol #soleil_vert #contre-productivité

    • A relire ici Charbonneau, il me semble y trouver bien plus de raisons qu’il ne m’a été nécessaire d’en réunir pour chercher à cesser de penser nos existences en fétichisant comme lui la Nature - mère ou non, peu importe - et en se mettant en travers de la pensée un dualisme aussi sclérosant que nature vs culture.

      Si je fais volontiers mien ses constats historiques quant à la dévastation à laquelle il assiste, je ne suis pas du tout en accord avec la manière dont il prétend trancher -

      l’origine de l’homme. L’homme doit péniblement se maintenir entre ces deux abîmes : la totalité cosmique et la totalité sociale ; et c’est ce terme même de nature qui lui indique où est son étroit chemin.

      , etc ;
      ou des perspectives aussi clairement exprimées que celles-ci (c’est moi qui graisse ) :

      Ce n’est que si l’homme est capable de se dominer qu’il pourra continuer de dominer la terre. La solution suppose un renversement des valeurs. Il faut que la fin : la nature pour les hommes ,

      [...]

      Les hommes qui se voueraient à une telle révolution pourraient constituer une institution , indépendante des partis ou des Etats, consacrée à la défense de la nature. Elle se considérerait comme une sorte d’ordre ,

      Voilà qui me semblent quant à moi tout aussi sinistres (il y a dans un tel propos naturaliste quelque chose qui sonne banalement chrétien -

      dominer la terre, la nature pour l’homme

      - voir fasciste à mes oreilles : le naturalisme s’y donne assez vite à voir se prenant les pieds dans son propre tapis culturel) - et participer de - cela même que l’auteur croit critiquer et combattre.

      Lisant cela, l’innocence naturalisme des hétérosexistes anti-industriels (ou l’hétérosexisme innocent des naturalistes anti-industriels) dont Aude cite un morceau de choix me surprends finalement assez peu ; il procède assez clairement de vieilles carences critiques qu’il partage avec ceux dont il se réclame.

      (autres morceaux de bravoure hétérosexiste issu du même site - là encore, je graisse :

      Sur ce blog, nous n’avons aucune préférence religieuse et une seule éthique, la volonté d’être à l’écoute d’une nature … qui nous a fait homme ou femme . La volonté des gays et lesbiennes de se marier et d’avoir un enfant est une forme de discrimination envers l’autre sexe [tiens donc : mais lequel ?] : un couple hétéro est naturellement dédié à une relation sexuelle et seul capable d’assurer la reproduction nécessaire à l’espèce. L’homosexualité, c’est donc la volonté de transcender les limites naturelles et sociales en s’accaparant du mariage [sic] , une institution jusque là réservé à l’union d’un homme et d’une femme

      http://biosphere.blog.lemonde.fr/2012/11/23/mariage-des-homosexuels-lois-de-la-nature-et-socialisme
      et en commentaire, cet accès de délirium :

      la revendication d’une ultra-minorité d’activistes qui parlent le langage de l’égalitarisme idéologique, synonyme de dé-différenciation.

      - où l’on retrouve notre vieil ami Escudero dans le texte...

      .
      C’est ballot pour eux, mais je préfère de loin consacrer du temps... aux écrits des féministes matérialistes, par exemple, qu’à grenouiller en compagnie de pareil tissu d’imbécilité béate).

    • Oui il y a certains trucs qui ont mal vieilli dans le texte de Charbonneau, notamment dans les pistes qu’il propose. Aussi un autre terme que « dominer » aurait sûrement été choisi s’il avait écrit son texte aujourd’hui.
      Pour ma part sur ces questions je reste sur la grille #écoumène vs #wilderness, qui a l’avantage de trancher la fausse dichotomie nature/culture et de rappeler que l’humain et ses milieux se co-créent (partout, localement et sans avoir recours à des institutions) et que le souci est là où cette co-creation n’a plus lieu.

    • @koldobika

      Je me suis attelé depuis plusieurs mois à la découverte (passionnante) des travaux de A. Berque.
      malgré quelques limites évidentes (un ton facilement universaliste abstrait), je dois dire que j’en trouve la lecture des plus stimulantes. Son érudition est parfois à double tranchant : autant je me régale à le suivre dans ses références, ses rapprochements et ses comparaisons... et parfois, il me semble qu’il se complaît dans ce qui ressemble tout de même à du jargon. Et, par exemple, ses références à Heidegger ne sont pas de mon goût.

      Heureusement, il y a bien d’autres choses chez lui, et il a le bon goût d’en laisser plus qu’assez en libre accès.

      je disputerai volontiers un de ces jours de ce qu’il me semble apporter au débat (entre autres, il m’a fait penser à Gunther Anders comme à l’historien d’art Gombricht) mais je pense que l’originalité de son approche exige, de ma part au moins, un temps de digestion conséquent avant de prétendre commencer d’en faire quelque chose.

      Quoi qu’il en soit, merci encore de me l’avoir fait connaître !

    • Ce n’est pas de la Nature avec un grand N qu’il s’agit, cette dame est très recommandable et bien des professeurs lui font la cour. Cette « Nature » n’existe pas, nous avons vu les Landes, les Pyrénées, suivi les chemins de montagne où des générations de paysans sont allés apporter des provisions à des générations de bergers. La « Nature » nous laisse froids, mais nous connaissons ces grands caps de bois qui s’avancent dans les landes vides, les derniers tisons qui luisent pendant que dans le ciel étoilé de l’été monte de plus en plus strident le chant des grillons. Avez-vous brisé contre une roche un de ces cailloux creux remplis de cristaux violets ? Alors vous avez connu le sentiment de la nature

      Le sentiment de la nature, force révolutionnaire, 1937, Bernard Charbonneau
      ça reste assez peu défini dans les pages suivantes, il y parle de Rousseau, de la déclinaison en littérature du sentiment de la nature, ce que j’y perçois surtout c’est une aspiration à sortir de la rationalité totale et de l’industrialisation de tout, mais les catégories dont il cause ne sont pas très claires.
      J’y trouve une résonance avec Retrouver l’Océan, d’Henri Raynal http://www.peripheries.net/article3.html et avec La mystique sauvage, de Michel Hulin http://www.peripheries.net/article53.html

  • La carte de la pauvreté dans le Sud-Ouest : la prise en compte de la rurbanité ?
    http://bearniaiseries.blogspot.fr/2014/06/la-carte-de-la-pauvrete-dans-le-sud.html

    La carte de la #pauvreté, officialisée par le Gouvernement, basée sur des critères économiques objectifs, vient d’être publiée. Le constat est évident : sont désormais prises en compte tout un tas de petites villes et moyennes en complète déliquescence depuis des années, villes profondément acculturées, où le pire de la #mondialisation côtoie souvent les restes aliénés des cultures autochtones populaires. C’est la France où se développe le vote #FN depuis deux décennies.


    Contrairement à ce qu’affirment des sociologues, pour critiquer cette nouvelle carte, il est assez faux de dire qu’elle serait un signe donné aux « petits blancs » des campagnes. Ce n’est pas que ça. L’affirmer, c’est faire montre d’une vraie méconnaissance de la réalité démographique de nombreuses villes petites et moyennes, dont les thématiques rejoignent souvent celles des villes périurbaines des plus grandes agglomérations.

    Le Lot-et-Garonne est un symbole avec l’inclusion de 4 villes qui complètent Agen : Marmande, Sainte-Livrade, Tonneins, Villeneuve-sur-Lot. Tout se cumule en Lot-et-Garonne : une économie en perte de vitesse (fermeture de la manufacture des tabacs de Tonneins, dépendance à la PAC de l’agriculture locale, ...), l’autoritarisme de l’État qui a fixé arbitrairement des populations (depuis les Italiens des années 30 jusqu’aux populations nord-africaines dans la seconde partie du XXème siècle), la vocation de lieu de passage entre métropoles (effet A62, pavillonarisation extrême), ...

    Cependant, le Lot-et-Garonne, parce qu’il a été le jouet de l’État qui y a testé une politique d’aménagement depuis 100 ans sans cohérence, est un peu particulier. Les villes où ce phénomène de #paupérisation s’installe de manière naturelle sont plus intéressantes, comme c’est le cas de Saint-Gaudens ou Pamiers. Les causes sont les mêmes, mais il est impossible de blâmer l’État véritablement : les dynamiques démographiques sont le seul produit du marché #immobilier. Les #classes_moyennes paupérisées de l’agglomération toulousaine ont migré dans de lointaines villes-satellites reliées à la métropole par l’#autoroute, où elles retrouvent une population locale qui a souvent perdu son activité industrielle traditionnelle.

    La prise en compte de la réalité économique de ces villes, loin des clichés sur les pays de cocagne, est une bonne chose, mais elle ne semble pas apporter de nos élites les solutions nécessaires. En effet, la carte de la pauvreté, outre l’aspect « subvention par tête de pipe », n’ouvre au fond qu’à des programmes de réhabilitation urbaine, or le problème de ces nouvelles villes pauvres, c’est moins le délabrement du bâti que l’absence de concertation en matière d’#aménagement_du_territoire avec les métropoles.

    On en vient - toujours - à la question de la #réforme_territoriale : en favorisant la construction de #régions centrées autour de #métropoles, qui auront pour but premier de finaliser la liaison entre ces dernières, nos élites vont accélérer le caractère d’hinterland de ces villes petites et moyennes, et conforter leur vocation de déversoir de tout ce que les métropoles boboïsées ne désirent plus, par les seules règles du marché. Au #RSA, on vit mieux à Pamiers qu’à Toulouse.

    Notre pays fonctionne tout entier pour le bien-être de ses seules grandes villes, dans l’espoir naïf qu’elles sont les uniques vectrices de la croissance économique. D’une certaine manière, le schéma français se généralise : une grande métropole accumule les richesses qu’elle daigne redistribuer sous la forme d’assistanat à ses périphéries moins dynamiques dont elle absorbe les forces vives. Ce fut longtemps Paris et la province. Ce sont désormais nos métropoles et leur région. Il est temps de briser ce modèle.

    écho à ce commentaire de @monolecte http://seenthis.net/messages/264639#message264670 sur la paupérisation
    #urbain_diffus #transports #banlieue_totale #culture_vernaculaire
    #déracinement #extrême-droite #centralisme

    • Voilà, c’est exactement ce que j’observe sur place : notre statut grandissant de colonies pénitentiaires des métropoles. Parce que les campagnes sont effectivement les nouveaux lieux de bannissement de ceux dont les villes n’ont plus besoin, avec l’idée sous-jacente qu’on pourra les forcer à bosser à vil prix dans les secteurs qui s’épanouissent sur la misère humaine : le tourisme, les services aux personnes, les travaux agricoles saisonniers.
      J’ai remarqué aussi que ces dernières années, on revient un peu à quelque chose de très semblable à la nourrice rurale de la période monarchique et de la période bourgeoise. Les enfants à problème des villes sont envoyés au vert, c’est à dire placés dans des familles d’accueil d’agriculteurs ou de ruraux propriétaires en perte de vitesse financière. De complément de revenu, cette activité est en passe de devenir le revenu principal dans beaucoup de familles du coin. Nos écoles rurales accueillent ainsi de plus en plus d’enfants déplacés, au moment même où la logique colonisatrice incite à fermer de plus en plus de postes d’enseignants chez nous pour les transférer dans les zones périurbaines de forte densité où s’entassent les jeunes actifs avec enfants (repoussés des centres-villes quand la naissance d’un enfant fait que la pression immobilière devient insupportable du fait du besoin d’espace supplémentaire !).
      De la même manière, les vieux et les handicapés urbains sont déplacés vers les zones rurales où la main d’œuvre captive et le mètre carré sont moins chers, mais où l’encadrement médical disparait à toute allure.

      En fait, tout se passe comme si la ville n’était plus qu’un immense organisme cannibale qui a le contrôle et absorbe toutes les matières premières que nous produisons à vil prix (parce que les prix sont fixés par les villes !) et rejette vers nous ce qu’elle considère comme des déchets, ce dont elle n’a plus besoin et qui l’encombre. Tout en refusant de plus en plus de jouer le jeu de la péréquation et de la redistribution.
      Ce qui se passe actuellement avec la redéfinition des niveaux de gouvernance et de compétence, c’est bien l’appropriation de toutes nos ressources financières et du pouvoir de décision sur et contre les ruraux, considérés eux-mêmes que comme des ressources primitives à consommer ou à se débarrasser. Des matières premières.

      Mais cela ne s’arrête pas là, parce que dans le même temps, nous héritons des mêmes problèmes que les villes : devant l’afflux de cassos’ des villes, les ruraux modestes, mais néanmoins propriétaires (nous avons énormément de propriétaires pauvres en zone rurale) se transforment en marchands de sommeil, retapant avec trois coups de peinture des granges ou des garages qu’ils peuvent ensuite louer bien confortablement à des gens qui n’ont pas ensuite les moyens de chauffer correctement des habitats qui s’avèrent souvent indignes à l’usage. Tout en leur crachant à la gueule, le cassos’ devenant le nouvel exutoire des frustrations de toute une petite classe populaire rurale qui cumule les sous-boulots pour garder un certain standing... comme une voiture en état de rouler pour aller bosser ou simplement acheter du pain...

      Bref, merci pour ce partage, @koldobika

    • @monolecte

      tout se passe comme si la ville n’était plus qu’un immense organisme cannibale qui a le contrôle et absorbe toutes les matières premières que nous produisons à vil prix (parce que les prix sont fixés par les villes !) et rejette vers nous ce qu’elle considère comme des déchets, ce dont elle n’a plus besoin et qui l’encombre. Tout en refusant de plus en plus de jouer le jeu de la péréquation et de la redistribution.
      Ce qui se passe actuellement avec la redéfinition des niveaux de gouvernance et de compétence, c’est bien l’appropriation de toutes nos ressources financières et du pouvoir de décision sur et contre les ruraux, considérés eux-mêmes que comme des ressources primitives à consommer ou à se débarrasser. Des matières premières.

      écho avec http://seenthis.net/messages/173394

      La ville-métropole n’a pu émerger qu’avec le développement du capitalisme et de l’État : par l’établissement de grands marchés urbains aux nœuds de circulation des flux d’êtres humains et de #marchandises, permettant aussi la centralisation des capitaux, et en parallèle par la centralisation du pouvoir qui était auparavant dispersé dans les innombrables fiefs, seigneuries ou républiques villageoises. Ainsi, de même que la grande économie n’a pu se constituer comme sphère autonome que lorsqu’elle s’est « désencastrée » des autres rapports sociaux, la #ville moderne n’a pu se constituer en tant que monde qu’à partir du moment où elle a rompu avec la #ruralité qui était en elle.

      #métropolisation

    • Campagnes à vendre Le miroir aux illusions
      http://www.infokiosques.net/spip.php?article961

      « Dans le passé, la France a été l’État le plus centralisé d’Europe, dont la grande majorité de la population était composée de paysans parcellaires. Mais, n’en déplaise aux nostalgiques, le capitalisme a depuis longtemps modifié la structure de la société campagnarde. Elle n’a plus grand-chose à voir, sauf parfois dans quelque vallée enclavée de haute montagne, avec les images d’Epinal. Deux guerres mondiales, puis l’accumulation forcenée du capital dès les années 50, sous l’égide de l’Etat et par le biais des plans d’aménagement du territoire national, l’ont labourée en profondeur. »

  • 3 million hectares of farmland lost in two decades
    http://www.todayszaman.com/news-351638-3-million-hectares-of-farmland-lost-in-two-decades.html

    A total of over 3 million hectares (30,000 square kilometers) of arable land has been lost in Turkey in the last two decades due to rising housing needs and the fragmentation of agricultural land into economically nonproductive splits, according to Cevat Kır, the chairman of agricultural machinery producer LandForce.

    #Urbanisation
    #Environnement
    #Agriculture
    #Turquie

  • Comment la France est devenue moche - Le monde bouge - Télérama.fr
    http://www.telerama.fr/monde/comment-la-france-est-devenue-moche,52457.php

    Un hypermarché Leclerc s’installe au bout de la nouvelle voie express qui se cons­truit par tronçons entre Brest et Rennes. Puis viennent La Hutte, Conforama et les meubles Jean Richou... 300 hectares de terre fertile disparaissent sous le bitume des parkings et des rocades. Quelques maisons se retrouvent enclavées çà et là. La départementale devient une belle quatre-voies sur laquelle filent à vive allure R16, 504 et Ami 8. Un quartier chic voit le jour, toujours en pleine nature, qui porte un nom de rêve : la Vallée verte...

    C’est à ce moment-là que ça s’est compliqué pour les parents de Jean-Marc. Avec l’élargissement de la départementale, ils sont expropriés d’un bon bout de terrain et ne peuvent plus emmener leurs vaches de l’autre côté de la quatre-voies. Ils s’adaptent tant bien que mal, confectionnent des produits laitiers pour le centre Leclerc, avant de se reconvertir : la jolie ferme Quentel est au­jourd’hui une des salles de réception les plus courues de Bretagne.

    Les fermes voisines deviennent gîte rural ou centre équestre. La Vallée verte, elle, se retrouve cernée de rangées de pavillons moins chics : « Nous, on a eu de la chance, grâce à la proximité de l’aéroport, les terres tout autour de la ferme sont restées inconstructibles. » Aujourd’hui, quand il quitte son bout de verdure préservé pour aller à Brest, Jean-Marc contourne juste la zone de Kergaradec, tellement il trouve ça moche : « C’est à qui fera le plus grand panneau, rajoutera le plus de fanions. Comme si tout le monde hurlait en même temps ses messages publicitaires. »

    Ça s’est passé près de chez Jean-Marc, à Brest, mais aussi près de chez nous, près de chez vous, à Marseille, Toulouse, Lyon, Metz ou Lille, puis aux abords des villes moyennes, et désormais des plus petites. Avec un formidable coup d’accélérateur depuis les années 1982-1983 et les lois de décentralisation Defferre. Partout, la même trilogie – infrastructures routières, zones commerciales, lotissements – concourt à l’étalement urbain le plus spectaculaire d’Europe : tous les dix ans, l’équivalent d’un département français disparaît sous le béton, le bitume, les panneaux, la tôle.

    Lorsque apparaissent les premiers supermarchés, au début des années 60, la France ne compte que 200 kilomètres d’autoroutes, un morceau de périphérique parisien, aucune autre rocade, pas le moin­dre rond-point... et un architecte-urbaniste visionnaire, Le Corbusier ! Celui-ci a compris très tôt l’hégémonie à venir de la voiture, à laquelle il est favorable. Dès 1933, avec des confrères qu’il a réunis à Athènes, il a imaginé de découper les villes de fa­çon rationnelle, en quatre zones cor­respondant à quatre « fonctions » : la vie, le travail, les loisirs et les infrastructures routières.

    L’Etat s’empare de l’idée, on entre dans l’ère des « zones », ZUP, ZAC, etc. (1) Et puis il faut « rattraper » l’Allemagne et son insolent réseau d’autoroutes ! Du pain bénit pour notre illustre corps d’ingénieurs des Ponts et Chaussées. La France inscrit dans la loi (loi Pasqua, 1998) que tout citoyen doit se trouver à moins de quarante-cinq minutes d’une entrée ou d’une sortie d’autoroute ! Des itinéraires de contournement des villes sont construits, le territoire se couvre d’échangeurs, de bre­telles et de rocades. Vingt ans plus tard, les enfilades de ronds-points à l’anglaise, trop nombreux et trop grands, parachèvent le travail : ils jouent, constate Mangin, « le rôle de diffuseurs de l’étalement dans le nouveau Meccano urbain qui se met en place ».

    « Pourtant, le pavillon, c’est avant tout un choix contraint », constate David Mangin. Les centres-villes étant devenus inabordables, les familles pas très riches – elles sont la grande majorité – sont condamnées à l’exil périurbain. Et elles le resteront tant que manquera une bonne offre résidentielle collective. Alors, comme l’a observé l’urbaniste Bruno Fortier, « on tartine du lotissement au kilomètre », c’est facile et pas cher. Conçue par un promoteur-constructeur, la maison est un « produit », à commander sur catalogue. Où que l’on aille, le marché ne sait fournir que des lotissements avec des rues « en raquette », des parcelles de même taille, des maisons posées sur leur sous-sol de béton ; tant pis pour le raccord visuel avec la ville ancienne. Les plantes des jardins sont achetées en promotion à la jardinerie du coin ; tant pis pour la flore locale et le paysage.

    #banlieue_totale #urbain_diffus #ruralité #transports #voiture #habitat #écoumène #empreinte_écologique #grande_distribution

    http://seenthis.net/messages/166201
    http://seenthis.net/messages/173393
    http://seenthis.net/messages/173394
    http://seenthis.net/messages/194461

  • Une autre approche de la #banlieue_totale, dont parlait Bernard Charbonneau

     » [Article] Le despotisme de l’image, par Dmitry Orlov
    http://www.les-crises.fr/le-despotisme-de-l-image

    Dans de plus en plus d’endroits, le #transport public est rendu impossible par une situation appelée « l’étalement urbain », qui, plus que tout autre chose, encourage la dépendance à la #voiture. La cause de l’étalement urbain est le pavillon de #banlieue, et, tout comme ce serait une erreur de regarder la voiture strictement comme une forme de transport, c’est une erreur de regarder la maison de banlieue strictement comme une forme de #logement. Bien qu’elle fournisse un ensemble d’équipements modernes, elle doit aussi se conformer à une certaine image, et, tout comme pour la voiture, nous allons voir que c’est cette image qui explique le mieux à la fois son emplacement et sa forme typique.

    C’est une idée fausse et répandue que la fonction principale d’une maison de banlieue est de fournir un abri, alors qu’il est tout à fait évident et clair qu’elle est de fournir un stationnement. Dans une société dépendante de la voiture, l’accès est contrôlé en limitant et en contrôlant la capacité de se garer. Le stationnement public est toujours limité et souvent pas disponible, et le stationnement semi-public — dans les magasins, les centres commerciaux, les parcs de bureaux et autres institutions privées — est limité à ceux qui ont de l’argent à dépenser ou à ceux qui ont là des transactions commerciales d’une autre manière. Bien que la voiture confère la liberté de mouvement, c’est la liberté de se mouvoir, via les routes publiques, entre des lieux où l’on n’est pas libre, mais où l’on doit accomplir une fonction sociale spécifique, que ce soit travailler, acheter, ou quelque autre activité socialement autorisée. Même si vous souhaitez échapper aux restrictions de la société pendant un moment, et passer du temps dans un coin sauvage, vous vous apercevrez que, dans une société dépendante de la voiture, même la nature suit les horaires de bureau, et qu’elle ferme ses parcs de stationnement peu avant l’obscurité.

    En bref, la seule liberté que la voiture confère est la liberté d’aller et venir entre des lieux où l’on n’est pas libre, et la seule véritable exception à cette règle est sa propre allée de garage. Aucune habitation de banlieue convenable ne peut s’en passer : c’est votre propre route privée qui mène à votre propre maison privée. Cette image impose qu’elle soit coûteusement et inutilement recouverte, et non avec des pavés, car alors se serait une allée piétonne plutôt qu’une allée de garage, mais avec de l’asphalte. Les allées de garage banlieusardes ne sont pas recouvertes pour le bénéfice des voitures, qui peuvent s’accommoder de routes en terre, et clairement pas pour le bénéfice des véhicules tout terrain à présent courants, mais pour le bénéfice de satisfaire un penchant inné chez les conducteurs : le désir de posséder un bout de la route.

    La fonction symbolique de la maison de banlieue est de servir de lieu de repos final au bout du long voyage de retour chez soi. La paix et le calme sont considérés comme ses caractéristiques les plus essentielles, et bien que les préoccupations manifestes soient la sûreté et la sécurité, sa source est le désir irrationnel d’une paix ultime. Si un habitant de la banlieue devait échanger à la fois la voiture et la maison pour un appartement à l’intérieur des limites de la ville, la probabilité accrue de devenir la victime d’un crime violent serait plus que compensée par la probabilité réduite de mourir dans un accident automobile, et donc le choix n’est pas rationnel du point de vue de la sécurité.

    La véritable préoccupation n’est pas la sécurité mais l’incarnation d’une image de paix abstraite. Les plans locaux d’#urbanisme et les arrêtés municipaux restreignent les loisirs bruyants et la déviation des normes de la communauté, car il est sacrilège de violer l’éternel sommeil du banlieusard. La banlieue idéale présente une étendue ininterrompue de pelouses manucurées parsemées de petits monuments néoclassiques, tous légèrement différents et pourtant tous essentiellement pareils. C’est le décor essentiel d’un cimetière : la maison est en fait une crypte familiale. Sans surprise, la destination finale de la voiture-mort est la maison-mort.

    #habitat #urbain_diffus
    http://seenthis.net/messages/166201

  • Une série d’entretiens avec Augustin Berque, que j’ai découvert il y a quelques années grâce à @Mona http://www.peripheries.net/article184.html, et qui approfondit bien les choses concernant l’#empreinte_écologique dans sa dimension humaine (aspect qui reste dans un angle mort de la plupart des discours écolos).
    Résumé de ce que j’en retiens :

    1. Il ne faut pas réduire le problème à sa dimension écologique http://www.dailymotion.com/video/xfvyhz_il-ne-faut-pas-reduire-le-probleme-a-sa-dimension-ecologique_web


    Les écologistes ne se posent pas le problème de l’#écoumène, cela reste dans un angle mort du mouvement écolo actuel. Or notre relation à la Terre n’est pas uniquement écologique, elle est également écouménale, elle implique aussi des systèmes techniques et des systèmes symboliques. C’est cette dimension technique et symbolique qui fait notre rapport au monde en tant qu’humains. Notre monde humain repose sur les écosystèmes mais il les dépasse également, il nous faut comprendre en quoi notre monde est + que des écosystèmes.

    La technique est bel et bien une extériorisation, qui prolonge notre corporéité hors de notre corps jusqu’au bout du monde ; mais le symbole est au contraire une intériorisation, qui rapatrie le monde au sein de notre corps. Quand le robot Sojourner saisit cette pierre, là-bas sur Mars, il prolonge, grâce à la technique, le geste ancestral de l’Homo habilis, qui, voici deux millions d’années, investit dans un galet aménagé, tenu à bout de bras, une fonction jusque-là uniquement exercée par les incisives au-dedans de la bouche. Mais inversement, c’est avec ma bouche, ici et maintenant, que je parle de Mars et de Sojourner, qui sont loin dans l’espace, et d’Homo habilis, qui est loin dans le temps. Je peux le faire grâce à la fonction symbolique, laquelle, sous ce rapport, consiste donc à rendre présentes au-dedans de mon corps des choses qui en sont physiquement éloignées. Cela, ce n’est pas une projection ; c’est, tout au contraire, une introjection. La trajection, c’est ce double processus de projection technique et d’introjection symbolique. C’est le va-et-vient, la pulsation existentielle qui, animant la médiance, fait que le monde nous importe. Il nous importe charnellement, parce qu’il est issu de notre chair sous forme de techniques et qu’il y revient sous forme de symboles. C’est en cela que nous sommes humains, en cela qu’existe l’écoumène, et c’est pour cela que le monde fait sens

    extrait de « Ecoumène, introduction à l’étude des milieux humains »

    2. « Ce monde là court à la catastrophe... » http://www.dailymotion.com/video/xgp64m_ce-monde-la-court-a-la-catastrophe_webcam


    On n’a pas qu’un corps animal, on a aussi un #corps_médial, fait de projections et d’introjections. Ce corps n’existe qu’en lien avec le monde. L’humain et le monde que construit l’émergence de l’espèce humaine sont co-dépendants. C’est le rapport entre ces systèmes (techniques et symboliques) extérieurs à notre corps et leur effet en retour sur le corps animal qui explique l’émergence de l’espèce humaine. On humanise l’environnement par nos systèmes symboliques, on l’anthropise par nos systèmes techniques. C’est l’effet retour des symboles et des techniques sur notre corps qui nous fait humains.
    Cette notion de co-dépendance (ou co-suscitation) a été beaucoup plus creusée dans les traditions asiatiques que dans les traditions européennes. On pourrait avoir tendance à les rejeter car ces réflexions (dans les civilisations asiatiques) font aussi appel à des éléments religieux et mystiques, mais on aurait tort de se priver de ces sources-là car elles peuvent être des inspirations utiles pour pouvoir changer de rails.

    3. La pulsion de retour à la « nature » détruit la « nature » http://www.dailymotion.com/video/xgp786_la-pulsion-de-retour-a-la-nature-detruit-la-nature_webcam


    Une des pires façons actuelles d’habiter le monde est ce qu’il appelle « l’#urbain_diffus », ou que d’autres appellent « suburbia », soit vivre loin des centres urbains tout en continuant à avoir avoir un mode de vie urbain, sur le modèle pavillon + #voiture qui est l’idéal de beaucoup de gens. En arrière plan de cet idéal se trouve l’aspiration à vivre près de la « #nature » (même si cette « nature » se traduit factuellement par du gazon et des thuyas). C’est en partie un mode de vie de riches qui s’est plus moins démocratisé avec la société de consommation, qui chez certaines élites anciennes incluait l’observation de la nature, mais excluait (ou forcluait, pour reprendre son terme) le travail #paysan, le travail qui consiste à obtenir une production alimentaire par aménagement de la nature.
    Outre cette « démocratisation », cette aspiration à vivre près de la « nature » provient d’une pulsion très ancienne qui est celle du retour à la matrice originelle (ou nostalgie du sein maternel). Cette pulsion, dans la façon dont elle s’exprime aujourd’hui, a des résultats destructeurs tant au niveau écosystémique qu’humain.

    4. Nous assistons à la transformation de l’humain en cyborg http://www.dailymotion.com/video/xgpcuz_nous-assistons-a-la-transformation-de-l-humain-en-cyborg_webcam


    Le mode de vie campagnard et son rapport particulier à la terre subsistent aujourd’hui à l’état relictuel dans l’occident. Le développement de la société de consommation à partir des années 1950 a engendré l’extinction de la culture paysanne, laissant place à des entrepreneurs agricoles fonctionnant sur un mode civilisationnel urbain.
    L’urbain diffus défait la ville et défait la campagne, par un système mécanique qui se développe selon sa propre logique. Tout se construit en fonction de l’usage de la voiture, qui tue pourtant 1.5 millions de gens par an dans le monde. On adapte nos espaces à l’#automobile plutôt que l’inverse.
    Au-delà de cette omniprésence et ces dégâts humains causés par la voiture, les systèmes mécaniques transforment l’humain en cyborg (être ne pouvant pas vivre sans machine), dans la mesure où on pense le monde en terme de machine (pensée mécaniciste moderne issue entre autres de Descartes).

    5. « Il n’est pas certain que je veuille laisser une épitaphe » http://www.dailymotion.com/video/xgpcyt_il-n-est-pas-certain-que-je-veuille-laisser-une-epitaphe_webcam


    D’après lui il faudra sûrement une catastrophe pour servir de déclic au dépassement de l’idéal pavillon + voiture, au changement de notre rapport au monde.

    Fukushima n’a visiblement pas suffi. Ce serait peut-être bien également de chercher à rendre plus désirable, dans l’imaginaire collectif, l’urbain compact (libéré autant que possible de la voiture), et de cultiver (ou recréer là où il a disparu) le rapport particulier à la terre du mode de vie campagnard.

    EDIT du 08/09/2013 : lien avec http://seenthis.net/messages/173393 et http://seenthis.net/messages/173394

  • Campagnes à vendre - Base de données anarchistes
    http://www.non-fides.fr/?Campagnes-a-vendre

    La manifestation la plus évidente de la modification de la société rurale est la désertification rapide de régions entières. Mais, de façon plus générale, ce sont les formes de propriété, les modes de travail et les façons de vivre qui ont été bouleversés en profondeur. A sa façon, le capitalisme a surmonté l’antique opposition entre la ville et la campagne. Le même délire totalitaire des urbanistes qui détruit les villes reconstitue, sur la base de la désertification, des pseudo-campagnes désormais recouvertes de masses informes de résidus urbains et saignées par les tranchées des autoroutes et des chemins de fer à grande vitesse. A la suite des premières, transformées en centres urbains, les secondes sont devenues pour l’essentiel des zones rurales périphériques dont les locataires n’ont plus grand chose à voir avec les villageois d’antan.

    #ruralité #société #histoire #capitalisme #for:twitter