Frustration_mag

Le magazine de la guerre des classes

  • Arrêter de craindre le danger fasciste, craindre le danger Macron
    https://www.frustrationmagazine.fr/arreter-de-craindre-le-danger-fasciste-craindre-le-danger-macron

    Le barrage n’est pas simplement l’action (faiblement) politique de voter Emmanuel Macron face à Marine Le Pen une fois tous les cinq ans, c’est désormais une analyse et une pensée politique, une véritable ligne stratégique : on le voit puisqu’elle est mobilisée par avance, et pendant des années, par les médias, les partis politiques et […]

    • C’est mon analyse sur le « déjà-la fasciste » : la dictature est déjà-là, nous vivons déjà dans une politique classiquement d’extrême droite avec des éléments de fascisme, toutefois l’instauration d’un régime fasciste (à ce stade) n’est pas nécessaire pour la bourgeoisie et les vrais fascistes (minoritaires mais qui existent) n’ont pas les moyens de leur ambition.

      Etre conséquent : arrêter les injonctions morales prospectives, résister ici et maintenant

      Craindre le danger RN comme un danger d’une toute autre nature que celui que nous vivons actuellement, ici et maintenant, c’est faire preuve d’une dissonance cognitive qui nous empêche de voir la nature réelle du régime.

      Sur-diaboliser le RN c’est dédiaboliser le macronisme, c’est donc dédiaboliser l’extrême droite dans ses modalités pratiques : c’est ici et maintenant que les opposants sont arrêtés, mutilés, éborgnés, fichés S, mis dans le coma, que des médias sont censurés, des journalistes tabassés, des migrants maltraités, laissés à la mort en Méditerranée…

      La question, sommes-toute très peu intéressante et inopérante, de jouer, un jour d’élection, une fois tous les cinq ans, la carte Macron contre Le Pen (question qui par ailleurs signifie que nous avons déjà perdu et que la suite n’est donc plus vraiment dans nos cordes) n’est pas celle qui nous est posée à ce jour. C’est seulement en détruisant le macronisme que l’on peut espérer qu’il emporte le RN dans sa chute : car le RN et Macron c’est en réalité le même monde, le même socle d’idées, les mêmes héritages historiques revendiqués et – in fine – les mêmes promoteurs.


      Et puisque nous ne faisons que perdre, l’introspection peut parfois avoir du bon : la “stratégie” du barrage comme unique vision pour l’avenir, stratégie de faiblesse et de chantage moral, appartient aux causes de notre spirale de défaite, à notre absence de confiance en nous, à notre manque d’ambition, là où il est grand temps de privilégier une réelle sécession d’avec la bourgeoisie autoritaire qui s’apprête à faire bloc et à se jouer, une fois de plus, de nos insuffisances et de nos peurs.

      Il y a de quoi craindre mais il faut craindre maintenant : ce n’est pas demain que nos libertés élémentaires (manifestation, rassemblement, expression…) sont toutes remises en question, que la xénophobie la plus crasse s’exprime contre les musulmans, que nos droits sociaux sont balayés, c’est sous Macron et c’est donc contre lui qu’il nous faut riposter, de la même manière que nous le ferions sous un gouvernement labellisé d’extrême droite.

      Rob Grams

    • Les éléments cités plus haut sont donc constitutifs d’une politique d’extrême droite. Il est très improbable que Le Pen première ministre ou présidente, puisse (ou même souhaite…) mettre en place un parti unique, une propagande d’Etat totalitaire, une politique génocidaire avec déportations massives et camps d’extermination contre les juifs, les musulmans, les homosexuels, les opposants etc. – ce que désigne le fascisme (ou le nazisme). Il ne s’agit en aucun cas d’euphémiser mais de comprendre l’ennemi. Ce type de politique pourrait ré-advenir (avec des formes et des esthétiques forcément différentes) dans une situation insurrectionnelle, révolutionnaire, avec un peuple lourdement armé, et le capital menacé dans son existence même – c’était le cas en Italie, en Allemagne et ailleurs dans les années 1920 et 1930 – ce n’est pas le cas aujourd’hui (pour le moment).

    • "Cet article de Rob Grams suscite du débat et c’est bien normal. Que cela se fasse à base de citations tronquées c’est le jeu de twitter. En revanche les insultes envers son auteur et Frustration_web qui serait « collabo » sont inacceptables."
      https://twitter.com/NicolasFramont/status/1656615585696952322?cxt=HHwWhMC9raPGvf0tAAAA

      Dans cet article, Rob rappelle que le fascisme est un processus qui a de nombreux visages et qui a toujours été rendu possible par les partis bourgeois. Par conséquent, on ne peut craindre uniquement le RN, il faut craindre aussi l’extrême-droitisation de la bourgeoisie

      Dans l’affaire de la démission du maire de Saint Brévin, victoire terrible de l’extrême-droite, chacun a par exemple joué son rôle : les groupes violents, les partis d’extrême-droite et la bourgeoisie au pouvoir qui n’a rien fait.

      Mais de nombreux commentateurs de cet article semblent s’en foutre de la réalité de l’extrême-droitisation du pays, dont le gouvernement est actuellement l’un des principaux vecteurs. Leur antifascisme est une posture esthétique et morale.

      Quelle est l’efficacité opérationnelle de l’indignation morale en circuit fermée ces dernières années ? Elle est nulle. Par contre Frustration et ses allié.e.s alertent sur tous les visages de l’extrême-droite, et tous les faits qui illustrent le « déjà là fasciste ».

      Nous avons qui plus est toujours dénoncé les ambiguïtés des pseudos alliés qui nourrissent le climat idéologique actuel (cc Roussel). Nous contribuons à un contre-récit redonnant le primat à la lutte contre les dominations, concurrençant les grilles de lectures d’extrême-droite.

      Et oui, en la matière, un travail comme celui de Rob Grams est bien plus pop, accessible, percutant et donc efficace que les spécialistes de l’indignation morale vaine, de la posture, du signalement de vertu permanent de celles et ceux qui s’en prennent à lui et à nous.

      « J ’ajouterai à cet argumentaire auquel je souscris largement que, si on écoute Houria Bouteldja par ex, tout ce qui concerne le racisme systémique est aussi un deja-là... Ainsi les 1ers concernés par le racisme politique nous alertent au même titre que Grams Rob
      depuis longtemps
       »

      Oui.

      https://www.frustrationmagazine.fr/pourquoi-la-france-est-bien-une-dictature

    • « Notre temps n’est nullement immunisé contre le fascisme ». Entretien avec U. Palheta [2018]
      https://www.contretemps.eu/possibilite-fascisme-entretien-palheta

      Une autre manière de balayer le danger fasciste consiste à affirmer que cette extrême droite n’aurait plus rien de « fasciste » – j’y reviendrai plus loin. Mais certains se débarrassent parfois de la menace en prétendant que les « idées » fascistes gouverneraient déjà. Or, constater justement que les partis de gouvernement ont repris à leur compte une partie de la rhétorique ultrasécuritaire et raciste de l’extrême droite, mettant en œuvre un pan des mesures qu’elle préconise de longue date, doit amener à pointer la complicité des élites politiques dans l’ascension des forces néofascistes et l’avènement possible de régimes néofascistes, et non à minorer la spécificité du projet fasciste et le saut qualitatif dans l’oppression que constituerait la conquête du pouvoir par les fascistes.

      Donc effectivement, de ce point de vue, ce livre souhaite constituer un signal d’alarme en démontrant l’urgence qu’il y a à combattre frontalement et conjointement le fascisme, sous ses formes organisées, et tout ce qui le nourrit, en particulier les politiques néolibérales, le durcissement autoritaire des États, ainsi que la montée du racisme et de la xénophobie. Ces deux combats sont imbriqués et on ne devrait pas avoir à choisir entre un ennemi « principal » que constituerait Macron, parce que déjà au pouvoir, et un ennemi « secondaire » qui n’existerait que comme marionnette pour nous faire élire le premier.

      Au contraire, s’il est si impératif de combattre sans délai le premier, c’est parce que ses politiques contribuent hautement à l’avènement du fascisme. De même, faire reculer l’extrême droite, c’est affaiblir l’« ennemi commode » de la classe dominante, un « ennemi » dont les succès sont effectivement utilisés pour donner à peu de frais un cachet « progressiste » à un « extrême centre » engagé dans une radicalisation néolibérale, autoritaire et raciste.