La « morale » et la « classe ouvrière » : petite leçon d’humilité et de lucidité :
Faire la morale, une bonne stratégie politique ? - Mon blog sur l’écologie politique
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Même si elle n’a jamais abordé le sujet avec moi, j’ai de bonnes raisons de croire que la gardienne de mon immeuble vote pour le Rassemblement national. L’un de ses thèmes de prédilection est le goût du travail bien fait qui se perd, « voyez-vous madame Vidal ». Je ne mets pas en cause son constat. Locataire dans le logement social, je n’ai jamais eu de propriétaire aussi indélicat. Et si, quand j’ai emménagé, j’ai pu être choquée par certains comportements peu civiques de mes voisin·es, j’en suis venue à les voir comme des révoltes minuscules et mal ciblées contre un monstre maltraitant mais invisible. Ce bailleur, l’un des plus gros du pays, a par exemple externalisé son service d’intervention technique et l’a confié à une entreprise encore plus détestable.
Malgré tout ça, chaque fois que la gardienne peste contre ce travail d’entretien des logements mal fait, le mettant sur le compte d’un manque de vertu des personnes concernées, je tente de lui faire voir que le problème est plutôt structurel. Un prestataire qui serre les prix pour remporter un appel d’offres puis les serre encore pour faire le maximum de profit dessus ; un personnel recruté sur sa capacité à accepter les plus bas salaires et non sur ses compétences, qui a probablement une charge de travail trop élevée ; une absence de réaction de la part du bailleur qui n’a pas encore essuyé assez de poursuites judiciaires pour que ce moins-disant s’avère au fond peu rentable (1)… Dans ces conditions la vertu des personnes n’est pas déterminante – même si l’on peut saluer le zèle entièrement désintéressé d’Untelle ou Untel. Dans beaucoup de domaines, les institutions s’effondreraient sans le travail gratuit et l’intelligence pas reconnue de travailleurs et travailleuses plus dévoué·es que leurs ministres et leurs patrons à la cause commune.