Mike Lynch, magnat controversé britannique de la tech, disparaît dans un naufrage en Italie
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La vie de Mike Lynch avait basculé le 11 août 2011, quand Hewlett-Packard (HP) avait acheté pour 11,7 milliards de dollars (10,6 milliards d’euros) Autonomy, l’entreprise qu’il avait fondée quinze ans plus tôt, en 1996. Le grand groupe américain, ringardisé par la concurrence avec ses imprimantes qui fonctionnaient mal et ses ordinateurs vieillots, espérait alors se refaire une santé en pariant sur cette société qui fournissait des logiciels de gestion de bases de données énormes, ancêtres de l’intelligence artificielle.
M. Lynch, qui avait grandi dans une famille modeste, dans l’est de Londres, avant de faire de brillantes études d’ingénieur à Cambridge, devenait alors l’une des premières fortunes du pays, empochant un demi-milliard de dollars pour ses 8 % de participation dans son entreprise.
L’une des plus importantes sagas comptables de la dernière décennie avait très rapidement suivi. HP allait mal et seulement quelques semaines après l’acquisition d’Autonomy, son patron, Léo Apotheker, avait été remercié, accusé de payer trop cher l’entreprise de M. Lynch.
Chiffre d’affaires « gonflé »
Un an plus tard, sous la houlette de sa successeure, Meg Whitman, HP est allé bien plus loin, affirmant que les comptes d’Autonomy avaient été largement trafiqués. Parmi les tactiques utilisées, Autonomy gonflait son chiffre d’affaires en commandant des « services » à des entreprises qui achetaient ensuite son logiciel : une façon déguisée, d’après l’accusation, de financer discrètement ses clients.
La bataille a duré douze ans. Sushovan Hussain, le directeur financier d’Autonomy, a été condamné en Californie à cinq ans de prison pour son rôle dans la fraude. En 2023, M. Lynch a perdu sa bataille contre son extradition aux Etats-Unis et a passé plus d’un an en résidence surveillée, jusqu’à son procès. Mais en juin, à la surprise générale, le jury l’a déclaré non coupable. Il reste cependant des poursuites civiles, qui ne sont pas éteintes. M. Bloomer, ami de M. Lynch, et donc lui aussi décédé durant le naufrage, avait été témoin de la défense dans le procès HP.
A la fin de juillet, The Times publiait la première interview de M. Lynch depuis sa victoire. Le quotidien britannique décrivait un homme qui avait du mal à croire à sa chance d’être libre et riche, lui qui risquait deux mois plus tôt de finir sa vie dans une cellule californienne. L’homme, âgé de 59 ans, était cependant malade, les poumons affaiblis. Il concluait, presque incrédule : « C’est bizarre, mais j’ai maintenant une seconde vie. La question maintenant est de savoir quoi en faire. » Il n’aura pas eu le temps d’y répondre.