marielle 🐢🚩

« vivere vuol dire essere partigiani » Antonio Gramsci

  • L’abécédaire de Daniel Bensaïd
    https://www.revue-ballast.fr/labecedaire-de-bensaid

    Philosophe, militant et cadre de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) puis du Nouveau parti anticapitaliste (NPA), Daniel Bensaïd, né au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, a disparu un jour de janvier 2010. Le présenter comme « trotskyste » ne dirait probablement qu’une part du penseur qu’il a été : « C’est un terme réducteur, forgé par l’adversaire« , déclarait-il deux ans plus tôt. Nul besoin, donc, d’être un partisan de Trotsky pour le lire et en tirer profit. Ce que nous conservons de son œuvre ? Son exigence « du double refus et du double front » (une exigence « étroite, souvent périlleuse », qui combat d’un même élan le capitalisme et la trahison totalitaire du socialisme) ; son « pari incertain » (celui d’une lutte politique et mélancolique qui, bien qu’offrant plus de défaites que de victoires, mérite d’être menée, toujours) ; et puis son écriture (le théoricien avait à l’occasion la plume d’un écrivain). La politique comme un « art du conflit« . Une porte d’entrée en 26 lettres.

    Attente : « Opaque époque. Triste tiédeur. Ce qui est en crise, c’est pourtant moins l’utopie que les contenus de l’attente. Les raisons, au terme de ce siècle obscur, en sont multiples et assez évidentes : les désillusions du progrès, ...

    • ... la débâcle d’un futur bureaucratiquement administré,
      le souci immédiat de survie dans un présent précarisé. Bien des facteurs contribuent donc à la fermeture de l’horizon d’Attente . Mais "comment vivre sans inconnu devant soi ?". » (« L’arc tendu de l’attente », Le Monde de l’éducation, de la culture et de la formation, 1997)

      Blanqui : « Il existe, dans l’histoire du socialisme français, un courant souterrain, hérétique, marginalisé et refoulé. Il constitue une sensibilité occultée parmi les tendances qui ont prévalu dans la gauche de la fin du XIXe siècle à aujourd’hui […]. Si l’on envisage l’histoire du socialisme sous l’angle de la coupure entre une "première" et une "deuxième" gauche — l’une centraliste, étatiste, anticapitaliste, l’autre plus sociale, réformatrice, démocratique —, il s’agirait d’une "troisième gauche", beaucoup plus radicale, qui est restée, depuis toujours, hors du jeu politique, parlementaire et ministériel. Il ne s’agit pas d’un groupe ou d’une tendance organisée, encore moins d’un parti : tout au plus d’une constellation intellectuelle et politique, dont les étoiles les plus visibles sont Auguste Blanqui, Georges Sorel, Charles Péguy et Bernard Lazare. » (« Auguste Blanqui, communiste hérétique » [avec Michael Löwy], Les Socialismes français à l’épreuve du pouvoir, Textuel, 2006)

      Colonialisme : « Il hante tout particulièrement l’inconscient collectif de la puissance déchue qu’est la France, souffrant de voir son "rang" menacé dans la hiérarchie mondiale et incapable d’accomplir son travail de deuil colonial. Qu’il s’agisse de la traite ou des massacres coloniaux, de Sétif ou de Madagascar, des Antilles ou du Tonkin, de l’Algérie ou de la Françafrique, la cure est toujours nécessaire. » (Fragments mécréants, Lignes, 2005)

      Dieu : « Tout n’est donc pas permis à un athée. Surtout pas à un athée. Les autres ne sont responsables que devant Dieu. L’athée, devant lui-même. Sans repêchage ni purgatoire et autres grands pardons. » (« Les douleurs du présent », Globe Hebdo, 25 janvier 1994, sous le titre original « Éloge du Che »)

      Élections : « C’est un paradoxe pour nous : on est contre ce système, on est contre le principe d’une élection présidentielle et on est quand même obligés d’en jouer le jeu, quitte à le dénoncer, parce que c’est un élément constitutif des rapports de force et qu’on pourra ensuite en tirer parti. » (Tout est encore possible, La Fabrique, 2010)

      Fidélité : « Bientôt quarante ans de fidélité militante. Je ne me suis jamais défini comme un "intellectuel engagé", mais plutôt comme un engagé intellectuel, un activiste qui essaie de réfléchir, un militant en somme. Car militer n’a jamais évoqué à mes yeux une image d’enrôlement, d’embrigadement fusionnel, militaire ou religieux, mais plus simplement une éthique élémentaire de la politique (de même que l’enseignement devrait être l’éthique de la pensée ou de la recherche), son principe de réalité et d’humilité, le lien nourricier entre la théorie et la pratique, l’invention quotidienne d’un singulier collectif. » (« On est embarqué », archives personnelles, 26 décembre 2003)...