« Un chèque de 7 000 euros pour chaque personne majeure » : La faible taxation des super-héritages va coûter 160 milliards aux Finances publiques dans les 30 prochaines années - lindependant.fr
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Dans un rapport intitulé « Super-héritages : le jackpot fiscal des ultra-riches », l’organisation Oxfam dénonce la faible taxation des successions les plus élevées.
En France, l’héritage demeure un facteur majeur de reproduction des inégalités. Selon une nouvelle étude d’Oxfam, parue ce mardi, 7 des 9 Français devenus milliardaires en 2024 sont des super-héritiers, et un quart des milliardaires du pays provient des trois mêmes familles. Alors que près de la moitié de la population n’hérite pas ou de très peu, le top 1% des héritiers d’une génération reçoit en moyenne plus de 4,2 millions d’euros net, et le top 0,1% reçoit environ 13 millions d’euros, soit 180 fois l’héritage médian.
45%... en théorie
En théorie, les super-héritages devraient être taxés à un taux marginal de 45% au-delà de 1,8 million d’euros, rappelle l’ONG. Cependant, il a été estimé que le top 0,1% de ces super-héritiers ne s’acquittent en moyenne que de 10% de droits de succession grâce aux diverses niches fiscales et exemptions existantes.
Le pacte Dutreil est un exemple flagrant de niche fiscale bénéficiant aux super-héritiers, explique Oxfam. Il permet, sous conditions, d’exonérer 75% de la transmission des parts ou d’actions de certaines entreprises. Bien que le coût de cette niche fiscale soit officiellement estimé à 500 millions d’euros environ par les pouvoirs publics, le Conseil d’analyse économique chiffre plutôt son coût annuel pour les finances publiques à jusqu’à 3 milliards d’euros.
Dans son rapport, l’organisation internationale de développement qui milite contre la pauvreté a calculé que, dans les 30 prochaines années, les 25 milliardaires français de plus de 70 ans transmettront à leurs héritiers plus de 460 milliards d’euros, sur lesquels l’État risque de perdre 160 milliards d’euros si les niches fiscales et exemptions actuelles sont maintenues. Cette somme colossale représenterait un chèque de près de 7 000 euros pour chaque personne atteignant la majorité dans les trois prochaines décennies, soit le coût moyen d’une année d’études supérieures en France, estime l’organisation.
Fiscalité inadaptée
Le système français de taxation des successions présente aujourd’hui de grandes disparités en fonction du lien de parenté officiel avec le donateur.
En ligne directe (grands-parents ou parents et enfants), le taux moyen d’imposition est de 5% avec un abattement de 100 000 euros. Cependant, dès que l’on sort du premier cercle familial, les taux explosent. Par exemple, si l’héritage provient d’une tante ou d’un oncle, l’abattement chute à 7 967 euros et le taux de taxation s’envole à 55%.
Ainsi, tandis que les super-héritages passent sous les radars de l’imposition, certaines petites transmissions payent injustement le prix fort.
Cette situation souligne la nécessité d’une réforme fiscale plus équitable et transparente, préconise Oxfam. L’ONG appelle à une réforme ciblant les plus hauts héritages pour créer de nouvelles recettes pour l’État et financer les services publics et la transition écologique.