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  • Immigration : le Britannique Keir Starmer intéressé par les « solutions » de l’extrême droite italienne
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    Immigration : le Britannique Keir Starmer intéressé par les « solutions » de l’extrême droite italienne
    Par Cécile Ducourtieux (Londres, correspondante) et Olivier Bonnel (Rome, correspondance)
    La complicité était évidente entre le Britannique Rishi Sunak, un conservateur défendant les expulsions de demandeurs d’asile vers le Rwanda, et Giorgia Meloni, la première ministre italienne et cheffe de file du parti d’extrême droite Fratelli d’Italia. Malgré sa promesse de « changement » aux Britanniques, le travailliste Keir Starmer a multiplié, comme son prédécesseur, les démonstrations d’amitié à l’égard de son homologue italienne lors de sa première visite officielle à Rome, lundi 16 septembre.
    Sous un soleil radieux, avec, en toile de fond, la superbe Villa Doria Pamphilj, M. Starmer a trouvé « fantastique d’être ici » et a loué les « remarquables progrès » de l’Italie pour limiter les arrivées de migrants et lutter contre les gangs de passeurs. Il faut dire qu’au lendemain d’un nouveau drame dans la Manche – huit personnes ont perdu la vie dans le naufrage de leur fragile bateau, dans la nuit du samedi 14 au dimanche 15 septembre, au large du Pas-de-Calais –, le dirigeant est pressé d’apporter des réponses à l’arrivée continue de demandeurs d’asile sur le sol britannique − 801 personnes ont réussi la traversée du bras de mer, le 14 septembre, selon le Home Office.
    Avec presque 22 000 traversées, depuis le 1er janvier 2024, la migration est un sujet de préoccupation important outre-Manche. Les émeutes racistes du début d’août ont montré que des agitateurs d’extrême droite étaient capables d’exploiter les peurs et les fantasmes suscités par les migrants pour semer la violence. Downing Street s’inquiète aussi de la percée du parti antimigrants Reform UK, qui a réussi à faire élire cinq députés à la Chambre des communes aux élections générales en juillet.
    M. Starmer a donc adopté un discours dur, pas si éloigné de celui des conservateurs, à ceci près qu’il ne promet plus, comme Rishi Sunak, de « stopper » les bateaux traversant la Manche – il s’est empressé, à son arrivée à Downing Street, de mettre fin à l’« accord Rwanda », qui prévoyait d’envoyer des demandeurs d’asile à Kigali. Cet accord, initialement proposé par Boris Johnson, était « un gadget », a-t-il répété depuis Rome. Il a coûté des centaines de millions de livres sterling sans qu’aucun demandeur d’asile ait pu être expulsé, l’accord ayant été contesté en justice.
    Pour autant, la stratégie travailliste se limite, pour l’instant, à une lutte renforcée contre les passeurs avec la nomination, lundi, d’un « commandant à la sécurité des frontières », Martin Hewitt, un ex-chef de la police. Depuis le Brexit, le Royaume-Uni ne peut plus faire valoir le règlement de Dublin pour renvoyer des demandeurs d’asile ailleurs en Europe et il ne dispose plus de mécanisme pour décourager les passages − c’était le but de l’« accord Rwanda ». D’où l’intérêt de Londres pour les solutions migratoires italiennes, alors que les autorités transalpines se félicitent des derniers chiffres du ministère de l’intérieur montrant une baisse de 62 %, sur les six premiers mois de 2024, par rapport à la même période, en 2023, du nombre d’arrivées sur les côtes du pays (33 480 personnes).
    Mme Meloni vante un « modèle » transalpin, après avoir signé, fin 2023, un accord d’externalisation des demandes d’asile avec Tirana. Deux centres de rétention ont été construits en Albanie, aux frais de l’Italie, avec une capacité d’accueil de 3 000 personnes. Y seront détenus des migrants secourus par des navires militaires italiens dans les eaux internationales.
    Cet accord ressemble au britannique, en un peu moins dur : les personnes retenues en Albanie, dont la demande d’asile est acceptée, pourraient être accueillies en Italie − ceux qui auraient été envoyés au Rwanda ne pouvaient plus prétendre à l’asile au Royaume-Uni. L’accord albanais « pourrait être reproduit dans de nombreux pays et faire partie d’une solution structurelle pour l’Union européenne », se félicitait Giorgia Meloni, en juin, lors d’une visite en Albanie.
    Les centres d’accueil albanais ne sont toujours pas opérationnels et l’accord est coûteux : 800 millions d’euros sur les cinq prochaines années, selon le ministère de l’intérieur italien. Dans la Péninsule, de nombreuses voix ont dénoncé un « gâchis d’argent public ». Et l’accord avec Tirana « viole le droit d’asile inscrit dans la Constitution », a accusé la secrétaire générale du Parti démocrate (centre gauche).
    Keir Starmer est « très intéressé » par cet accord albanais, a pourtant assuré Mme Meloni, lundi, ce que le dirigeant britannique s’est bien gardé de confirmer. Il a préféré louer l’autre volet du « plan Meloni », la coopération renforcée avec les pays d’Afrique pour tenter notamment, par l’aide au développement, de traiter les causes de la migration. Lors d’un sommet Italie-Afrique, en janvier, à Rome, Giorgia Meloni a reçu les représentants de vingt-six pays africains et les autorités de l’Union européenne. Un accord bilatéral a été signé avec la Côte d’Ivoire pour lutter contre le trafic d’êtres humains. Des négociations similaires sont en cours avec la Guinée et l’Egypte. M. Starmer ne devrait pas copier la stratégie « coûteuse et inefficace » de l’Italie, surtout l’accord avec l’Albanie, a cependant mis en garde l’International Rescue Committee (IRC), une importante ONG de protection des réfugiés, présidée par David Miliband, ex-ministre des affaires étrangères de Gordon Brown et frère du ministre à l’énergie de Keir Starmer.

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