BigGrizzly

Groumpf

  • Je cherche un argumentaire sur la nocivité sociale des tickets restaurants. Cet argumentaire n’existe peut-être pas. Et ce serait tant mieux, et je changerais d’avis et j’arrêterais de dire que si on n’a pas de titres restaurants, c’est parce que j’estime qu’on mérite mieux collectivement que des bons d’alimentation, à la façon des foods stamps de nos modèles américains.

    Parce que j’en ai marre qu’on me dise qu’une entreprise qui a des tickets restaurants, elle est plus attractive qu’une entreprise qui n’en a pas.

    Avez-vous déjà vu ça qq part ?

    • Et bien, à l’époque où j’étais jeune, un collègue de travail refusait les chèques déj pour rentrer chez lui le midi, déclarer les km et payait moins d’impôts. Je ne sais pas ce qu’il en est aujourd’hui de cette possibilité. Je réponds un peu à côté...

    • Y-a pas de réponse à côté. Merci pour ce souvenir.

      Mon point de vue depuis des années, que je n’ai jamais vraiment tenté de construire au-delà de mon ressenti est que :

      – La participation de l’employeur aux titres-restaurants de ses salariés est exonérée des cotisations de sécurité sociale

      Dont s’il faut donner de l’argent sans retirer des moyens à la sécurité sociale, il ne faut pas le faire au moyen des titres restaurants.

      En me documentant, je constate aussi que :

      https://www.cntr.fr/un-employeur

      Les obligations de l’employeur en matière de restauration salariale

      Le Code du Travail pose une interdiction générale en matière de restauration salariale : il est interdit aux salariés de prendre leurs repas dans les locaux affectés au travail. Toutefois, dans les établissements d’au moins cinquante salariés, l’employeur met à leur disposition un local de restauration (art. R. 4228-22 du code du travail). Dans les entreprises de moins de cinquante salariés, l’employeur met à leur disposition un emplacement leur permettant de se restaurer dans de bonnes conditions de santé et de sécurité.

      Dans la pratique, pour satisfaire concrètement à cette obligation légale, plusieurs possibilités s’offrent à l’employeur :

      – soit la prise en charge, directement ou par l’intermédiaire du comité social et économique, d’une restauration collective interne à l’entreprise prenant la forme d’une mise à disposition d’une cantine ou réfectoire dont la gestion sera assurée le plus souvent par un prestataire extérieur avec lequel aura été passée une convention de fourniture de repas, ou d’un local approprié affecté à la restauration quotidienne du personnel et spécialement aménagé à cet effet pour répondre aux conditions d’hygiène et de sécurité imposées par le Code du travail.
      – soit la mise à disposition du personnel d’une structure de restauration collective partagée avec plusieurs autres entreprises. La gestion de ces restaurants inter-entreprise est alors assurée en commun par les entreprises dont les salariés sont admis à y prendre leurs repas de déjeuner.
      – soit l’attribution de titres-restaurant au personnel de l’entreprise. Bien que les dispositions légales en vigueur ne précisent pas que l’octroi de titres-restaurant aux salariés constitue un mode d’exécution de l’obligation mise à la charge de l’employeur en matière de restauration salariale, il est généralement admis par l’Administration que la mise en place au sein d’une entreprise de ce dispositif en est, de fait, libératoire.

      Je comprends que le titre-restaurant est une façon pour les grosses entreprises de ne pas se conformer à l’obligation d’avoir un espace de restauration dans l’entreprise.

    • Je pourrais poser la question au syndicat patronal du coin. Mais je crois qu’ils ne comprendraient pas le sens (la direction) de ma question. Ce qui explique d’ailleurs sans doute que je ne me sois jamais laissé tenter par une telle adhésion. Je dois sans aucun doute louper quelque chose. Je devrais sortir de ma zone de confort.

    • Dans la grande majorité des boites où je suis passée, c’était service minimum : le salaire et ta gueule. Genre, comment tu fais pour bouffer le midi, pas leur problème du tout. Ça, c’est la joie de bosser pour les PME sous les seuils légaux.

      Donc tu rentres chez toi pour bouffer et tu le passes en frais réels aux impôts.

      Deux boites au-dessus des seuils :

      1️⃣Très grosse boite avec plein d’établissement et des effectifs monstrueux. On est dans une banlieue à bureaux et trimards : il y a donc plusieurs restaurants d’entreprises autour dont 2 ont un contrat avec la boite. On a un forfait quotidien qui couvre le menu de base du resto pas top. On peut aller dans l’autre, où vont les cadres de la boite, mais pratiquement tout est à supplément pour nous. Donc, on ne mélange pas les torchons et les serviettes.

      Je m’entends bien avec l’un des cuistots du resto à trimards. Il m’apprend que sa direction leur a demandé de moins nous servir à bouffer que les autres parce que notre direction trouvait qu’on était moins productifs l’estomac plein et voulait qu’on garde la gniak. C’est là que je me suis barrée.

      2️⃣ Moyen machin semi-public en centre-ville. On ne nous demande pas notre avis : on a l’équivalent de 5€/jour de boulot en tickets resto, la moitié payée par les patrons.
      À l’époque, c’est juste le plat du jour du troquet d’en face (si, si). Comme j’habite très loin, je n’ai pas le choix. Et comme finalement, je suis de bonne compagnie, mes collègues se relaient pour que je ne bouffe jamais seule.

      Les gus sont restés des années bloqués au tarifs minimum du TR, même quand ça ne couvrait même plus le plat du jour.

      Après mon départ, ceux qui le pouvaient rentraient chez eux, les autres ont obtenu un frigo et un micro-ondes et se sont mis à bouffer leur gamelle.
      Ils gardaient les tickets pour arrondir les courses familiales : genre, il y en a un, ça lui permettait de bien compléter en viande chez le boucher.

      Depuis le changement de politique des TR, ça doit bien le faire chier de ne plus pouvoir faire ses courses avec.
      Tu ne peux même plus inviter ta femme à bouffer au resto le WE : c’est déprimant.

      Perso, ça me ferais bien chier qu’on me les impose dans ces conditions.

      Je dirais que si j’avais une boite, je demande aux autres ce qu’ils en pensent de la bouffe et ce qu’ils aimeraient. Je suppose qu’il faut se démerder pour qu’il y ait au moins un endroit sympa avec de quoi s’attabler, s’abreuver, conserver et réchauffer sa bouffe. Et si ça intéresse, voir s’il y a une cantoche correcte accessible à pinces.

    • Dans les commentaires :

      Le jour où 3 boîtes de tickets restau ont été subtilisées dans mon entreprise, de l’ordre de 60 k€ tout de même, nous avons enfin bénéficié du versement du ticket repas (’fin la moitié hein, l’autre avant elle était retirée du salaire vu qu’on avait un chèque restau…) directement sur notre salaire (alors que c’était réputé impossible depuis plus de 5 ans…).

      Bref. oui, les tickets restau ça ne m’embête plus désormais.

    • On tombe aussi sur ça :
      https://linuxfr.org/users/thamieu/journaux/histoire-des-titres-restaurant-ou-comment-les-salaires-furent-places-sous-d

      Et je constate que je ne suis pas le seul à avoir ce raisonnement.

      Pour l’employeur, c’est un surcroit de complexité qu’il faut gérer(2), et de l’argent qu’il faut donner aux émetteurs de TR. Les prix facturés dépendent de la taille de la société pour laquelle l’adhésion au système de TR est négociée. Ainsi, les très gros employeurs se voient offrir les commissions, tandis que les petits continuent des les payer. Ce système a permis l’apparition d’intermédiaires supplémentaires, achetant les TR en gros aux émetteurs pour les revendre ensuite aux employeurs.

      (...)

      Enfin viennent les salariés, qui peuvent « bénéficier » de ce « complément de rémunération ». Mais de l’avoeu même de la CNTR, ces titres « ne peuvent être détenus que par des salariés, qui les ont " achetés " auprès de leur employeur ». Il s’agit bien de faire acheter aux salariés leur propre rémunération… Grâce aux exonérations de côtisations, les salariés collectivement reçoivent moins d’argent : c’est autant d’allocations chômage ou familiales en moins. Individuellement, ils pourront le dépenser dans moins d’endroit, avec plein de conditions compliquées. Et tout ça, ça s’appelle « un avantage »(3), dans le langage de l’employeur et de l’État.

    • @biggrizzly, on s’est croisés-postés sur cette réf.

      Critique marxiste et technique des TR qui sont comparés à des DRM : clairement, ne faites pas ça à vos salariés !
      https://linuxfr.org/users/thamieu/journaux/histoire-des-titres-restaurant-ou-comment-les-salaires-furent-places-sous-d

      Avec le TR, le salarié ne peut dépenser sa rémunération que quand on le lui autorise, où on le lui autorise, et pour quoi on le lui autorise.

      Le système de TR organise une redistribution de l’argent des salaires vers le capital, par l’instauration de péages multiples au détriment des côtisations et du salaire direct.

      Le système de TR opère aussi un transfert de pouvoir symbolique. Le salaire définit les travailleurs comme producteurs de valeur, le TR les définit au contraire comme des consommateurs : on leur donne du pouvoir d’achat pour leur « permettre » de manger.

      Avec le remplacement du papier par l’électronique, on passe d’un système de paiement anonyme à un système permettant un nouvel espionnage des salariés et le fichage de leurs consommations.

      Alors qu’avec le papier le respect de la loi reposait sur l’information et le libre-arbitre des clients et restaurateurs, il sera désormais partiellement contrôlé par les dispositifs électroniques. Les émetteurs des TR en deviennent les garants.

      Nous avons vu qu’il ne s’agissait pas d’un système figé : les bénéficiaires du TR évoluent dans le temps en fonction des rapports de force. Il est donc tout à fait raisonnable d’envisager de nouvelles évolutions, cette fois en notre faveur.

    • Toujours dans les commentaires des Linuxiens 🐧💪, une proposition d’alternative :
      https://www.journaldunet.fr/management/guide-du-management/1201115-panier-repas-2024

      Mais ça a l’air pas top quand même.

      En fait, le mieux, c’est que les salariés aient un bon salaire dont ils peuvent faire ce qu’ils veulent et qui leur permettra d’avoir une bonne couverture santé, un bon logement et une bonne retraite.

      Évidemment chez les exploiteurs à bouts de SMIC, le raisonnement ne tient pas.

      En fait, beaucoup de primes sont du vol de salaire, parce qu’exonérées de cotisations sociales.

      Si les salariés se sentent floués (alors que c’est le contraire, parce qu’on leur donne la libre disposition de l’intégralité de leur salaire ), voir avec eux s’il y a des aménagements qu’ils aimeraient ou des services, etc.

    • Plus globalement, je dirait que le truc qui pourrit le plus la vie et pour lequel c’est « démerde-toi », c’est le logement.

      Même des gus proches du dernier décile connaissent des difficultés d’accès au logement à cause des règles stupides des assurances et d’un locatif qui a complètement perdu de vue la réalité salariale du pays.

      C’est un frein réel et sérieux à la mobilité salariale dont on nous rabat les oreilles depuis des décennies : en effet, pour se loger, il faut CDI révolu, c’est à dire après la période d’essai qui peut durer jusqu’à 8 mois.

      Autant un petit jeune sans attaches bien bien payé peut éventuellement trouver du meublé en attendant, autant ça devient compliqué dès que tu as une vie personnelle.

      Je sais qu’il y a le 1% logement, mais je sais seulement que ça existe et pas comment ça marche.

      Je pense que si tu en parles avec les autres patrons, @biggrizzly, il y a des chances qu’il y en a plus que se sentent concernés.

      Après, y a aussi le télétravail…

    • @biggrizzly Avant le conquis social, les gens ils crevaient la dalle 11h/jour ?
      Tu m’étonnes qu’ils n’étaient pas productifs.

      Donc, le droit de bouffer sur place, c’est surtout une question de locaux : faut un espace dédié à la bouffe.
      Je suppose qu’on rejoint la question immobilière évoquée plus haut, même si le linéaire de bureau m’a l’air bien plus abondant et bon marché que celui de logement.

    • Merci pour le retour. On veut tous du salaire brut, c’est logique.

      Aussi, j’en reste à la curiosité de ces gens qui préfèrent la boite avec les TR, vs la petite boite qui n’en propose pas. Je le sais, pourquoi. La boite avec les TR, elle paie mieux, en général, et ça n’a rien à voir avec les TR. Mais il y a mélange dans l’esprit des candidats. La boite avec TR, il y a plus de monde, plus de règles collectives, donc moins d’arbitraire potentiel. Les TR sont en quelque sorte une corrélation sans causalité :-)

      La seule solution, c’est que ma petite entreprise, elle dépasse les 50 salariés. Au moins, je n’aurais plus de soucis de candidats qui chipotent sur les TR.

    • mon expérience est (très) lointaine. Quand j’ai commencé à bosser, c’était dans une petite boîte de 7 personnes en SCOP, avec pas mal de vacataires dont les plus fidèles étaient coopérateurs. On avait choisi de mettre en place les TR comme un élément de rémunération supplémentaire sans augmentation des contributions sociales.

      Mais c’était vraiment très marginal par rapport à ce que permettait le régime de participation des salariés propre aux SCOP.

      Et, sinon, de nos jours…