CQFD

Mensuel de critique et d’expérimentations sociales

  • Quoi de plus naturel, en sommes ?
    Par Queen Kong
    http://cqfd-journal.org/Quoi-de-plus-naturel-en-sommes

    Il y en a que ça aide pour draguer, d’autres pour qui c’est un chemin de croix. Il y a ceux qui sont si convaincus qu’ils vont jusqu’à trouver misogyne la description d’une femme laide dans un roman. Il existe mille façons d’être un homme féministe, et autant de difficultés à le revendiquer.

    Être un homme féministe implique de reconnaître qu’il y a deux camps et que l’un est moins fort que l’autre. C’est être affilié, par le biais de son genre, au camp des violeurs, des harceleurs et des clients de prostituées, mais affirmer : « Je ne suis pas comme eux » – sans endosser leur culpabilité ni en faire des monstres. C’est s’approprier le mot « féministe », dans lequel on entend « pour les femmes » plutôt que « pour l’égalité entre hommes et femmes », qui fige la dichotomie hommes-coupables / femmes-victimes. C’est traquer en soi un genre de virus si bien ancré qu’on dit souvent d’un homme, même ami, qu’il a « des restes de misogynie en lui » ; c’est porter ce combat sans confisquer la parole à des femmes déjà trop souvent muettes ; c’est faire sienne l’idée que les hommes souffrent eux aussi du patriarcat et renoncer au droit de mettre les pieds sous la table en échange du droit de pleurer si on est triste. C’est se retrouver face à des injonctions contradictoires, tâtonnements inévitables dans une redistribution des rôles d’une telle ampleur – et louvoyer au milieu des « soyez respectueux mais pas charmeurs, attentifs mais pas protecteurs » – tout en protégeant ce qu’on considère, au-delà du genre, comme constitutif de sa personnalité.