40 000 suppressions dâemplois en 2014 : ce plan social invisible qui frappe le secteur associatif
âșhttp://www.bastamag.net/article3518.html
Ce que jâobserve sur le terrain, en plus de lâĂ©tat des lieux trĂšs intelligent de Basta !, câest aussi la contamination des associations par les mĂ©thodes de management des entreprises, avec tout ce que cela comprend comme dĂ©gradation des conditions de travail, dâanĂ©antissement du sentiment dâĆuvre utile propre aux salariĂ©s du secteur.
Jâai un cousin qui a dĂ©missionnĂ© en 2008 de la direction dâun centre de loisirs associatif. Sous la pression des rĂšglements et de la nouvelle course Ă la #rentabilitĂ©, son association, qui avait un vĂ©ritable rĂŽle social dâaccueil des enfants des parents des milieux populaires, sâest retrouvĂ©e effectivement prestataire de service en concurrence avec tout le monde : donc inflation dâactivitĂ©s plus attractives pour les enfants (et surtout pour leurs parents bourgeois : Ă©quitation, voile, etc.) et donc inflation des droits dâinscription, jusquâĂ jarcler tous les petits pauvres qui nâont plus quâĂ aller zoner dans leurs quartiers pendant que les parents triment, le tout dans une optique de compression salariale et de management « moderne » des salariĂ©s.
Pendant longtemps, les salariĂ©s du milieu associatif Ă©taient invitĂ©s Ă la modĂ©ration salariale sous prĂ©texte dâĆuvre sociale. Maintenant, câest juste dans une logique de rentabilitĂ© maximum, avec, en plus, le chantage au bĂ©nĂ©volat « volontaire » qui sâassimile de plus en plus, pour moi, Ă du travail au black sous couvert de bons sentiments. Bref, une catastrophe sociale Ă tous points de vue.
DâoĂč vient cette #restructuration ? En juin 2008, le rapport « Pour un partenariat renouvelĂ© entre lâĂtat et les associations » est remis Ă Roselyne Bachelot, alors ministre de la SantĂ©, de la Jeunesse, des Sports et de la Vie associative. « Ce dernier propose de rompre avec la culture de la subvention et suggĂšre que la distribution des subventions laisse dĂ©sormais la place Ă un systĂšme de commande publique », expliquent Viviane Tchernonog et Jean-Pierre Vercamer, auteurs dâune Ă©tude sur le sujet [2]. En janvier 2010, la circulaire Fillon enfonce le clou : elle affirme que la grande majoritĂ© des activitĂ©s exercĂ©es par les #associations peuvent ĂȘtre considĂ©rĂ©es comme des « activitĂ©s Ă©conomiques » et entrent donc dans le champ concurrentiel. En clair, une association devient une banale #entreprise, prestataire de services.
Fini le collectif, place au Social Business
AprĂšs la « modernisation » de lâĂtat, qui sâinspire des modĂšles de gestion pratiquĂ©s au sein des grandes entreprises privĂ©es (et dont la rĂ©vision gĂ©nĂ©rale des politiques publiques â RGPP â a marquĂ© le commencement), câest au tour des associations de devoir se convertir au modĂšle de gestion anglo-saxon, au « lean management » et Ă la performance chiffrable. « Câest lâidĂ©e selon laquelle les associations sont certes sympathiques, mais souffrent dâamateurisme, analyse le chercheur Jean-Louis Laville. Elles doivent donc moderniser leur fonctionnement en empruntant les formes de management des grandes entreprises privĂ©es. Pour ĂȘtre modernes, les associations doivent se convertir en ce que Mohamed Yunus a dĂ©signĂ© comme “Social business”, câest-Ă -dire des entreprises Ă but social fonctionnant comme des entreprises, adossĂ©es Ă de grands groupes privĂ©s qui vont leur permettre de gagner en performance. »