Le poison de la #guerre coule toujours à #Verdun
▻http://www.lemonde.fr/a-la-une/article/2014/01/20/le-poison-de-la-guerre-coule-toujours-a-verdun_4348426_3208.html
Situé à quelques kilomètres de Verdun, l’endroit semble un bout de toundra transporté dans l’est de la France. Quelques pauvres lichens, quelques mousses rabougries s’accrochent au sol quand, tout autour, la forêt lance vers le ciel ses multiples essences. La clairière a un surnom, bien connu des agents forestiers et des chasseurs qui venaient pique-niquer là depuis des générations : la « place à gaz ».
Rares sont ceux qui connaissaient encore la raison de cette toponymie. Sur ce site, après l’armistice, furent transportés puis neutralisés des centaines de milliers d’obus non explosés sur les champs de bataille environnants. Quelque 200 000 de ces munitions appartenaient à l’arsenal chimique dont la première guerre mondiale fut le triste laboratoire.
La terre garde les séquelles de cette opération. En 2004, trois chercheurs, deux Allemands de l’université Johannes-Gutenberg de Mayence, Tobias Bausinger et Johannes Preuss, et un Français de l’Office national des forêts, Eric Bonnaire, ont entrepris une analyse du terrain. Publiée en 2007, leur étude est édifiante. Le sol regorge de métaux lourds (cuivre, plomb, zinc) mais surtout d’arsenic et de perchlorate d’ammonium, qui étaient utilisés comme détonateurs des obus. La concentration d’arsenic est ainsi 1 000 à 10 000 fois plus élevée que dans le milieu naturel. Le sol est à ce point pollué et acide que seules trois plantes (Holcus lanatus, Pohlia nutans et Cladonia fimbriata) parviennent à y survivre. Finalement, les autorités françaises ont décidé en 2005 de grillager le lieu, puis, en 2012, d’en interdire formellement l’accès.