Bernard Pasobrola

Il a été libraire à Grenoble puis à Bruxelles avant d’effectuer une longue migration au Portugal où il a exercé la profession de plasticien indépendant. Il est l’auteur de plusieurs romans.

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    Zombifier au nom de la morale

    Dans sa Brève histoire de l’électrisation médicale (1), l’écrivain Bernard Pasobrola retrace les principales étapes de cette médecine « de choc » qui prétend, depuis le XIXe siècle, « guérir » les hommes et les femmes ou abolir leurs pulsions sexuelles en leur faisant absorber du metrazol par exemple, en les soumettant à des électrochocs, en leur prélevant des morceaux de matière cérébrale… ou en enfonçant des aiguilles d’acier dans leur cortex.
    Bien que la lobotomie ne soit plus en principe qu’un mauvais souvenir, les adeptes du Mind Control et des expériences sur le cerveau sévissent toujours. Car, écrit l’auteur, « depuis la découverte de l’influx nerveux, au XVIIIe siècle, une véritable obsession est apparue ayant pour but le contrôle mental. La possibilité de contrôler le psychisme en agissant à distance et à leur insu sur le cerveau des individus fascine depuis longtemps nombre de scientifiques et de gouvernements. » Dans sa Brève histoire de l’électrisation médicale, Bernard Pasobrola décrit certaines de ces technologies en cours d’expérimentation et d’autres qui sont encore en phase de recherche… et dont les implications sur nos libertés ont de quoi rendre paranoïaque. Mais attention, il ne s’agit pas d’un « complot, dit-il. Les choses sont plus compliquées que cela : d’une part, le développement de ces recherches obéit à une logique intrinsèque des neurosciences ; d’autre part, tout est fait pour susciter l’enthousiasme du public à l’égard des “progrès“ réalisés. » S’il faut bien se méfier de quelque chose, c’est donc avant tout de nous-même, de notre propre propension à désirer des « soins ». Soins que la médecine cérébrale est toute prête à nous donner.

    L’intrigue de son dernier roman, Sans crier gare surgit la nuit, thriller haletant et méticuleusement documenté, préfigure sinistrement l’avenir de ce type de médecine : un nouveau parti dirigé par un scientifique suscite l’adhésion populaire au projet de « reprogrammation cérébrale » des individus dits asociaux. « L’objectif, explique-t-il, est de “reprogrammer” massivement les “ cerveaux malades”, d’accroître leur sens moral et de modifier leur mémoire. » Mais ces technologies ne s’appliquent pas qu’aux délinquants. Séduits par la promesse du bonheur, « de plus en plus de gens se précipitent chez leur thérapeute, demandent qu’on soulage leur angoisse et qu’on modifie leurs sentiments au moyen des nouvelles techniques. »
    Ces techniques sont-elles déjà au point ? Peut-être oui. En tout cas bientôt. Au cas où elles vous séduiraient, n’oubliez pas dans quel contexte elles ont été élaborées : leur histoire s’est faite au fil d’expériences terrifiantes dont Bernard Pasobrola retrace ici les étapes.