• L’ancien chargé de la presse du président algérien Houari Boumediene revisite l’histoire du conflit entre les états arabes, les organisations palestiniennes et Israël...

    Ghaza : l’épopée et le déshonneur
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    par Mohieddine Amimour

    Les événements de Ghaza ont ressuscité dans ma mémoire un dialogue que j’avais eu un jour avec le président Houari Boumediene, un dialogue qu’était en vérité, un monologue, car je n’ai pas osé interrompre Si Boumediene qui se remémorait les origines de la confrontation arabo-israélienne. Le président s’est rappelé d’une discussion qu’il a eu avec le président égyptien Gamal Abdennacer, suite à la défaite du juin 1967. Nacer n’a pas caché son amertume en confiant à Boumediene que la capitale égyptienne était pratiquement sans défense. Aucun soldat égyptien ne se trouvait dans la région entre le Canal de Suez et Le Caire (quelques jours plus tard cette région avait accueillie un bataillon algérien, conduit, si ma mémoire ne me trahit pas, par Le Colonel Khaled Nezar).

    Boumediene a répondu que l’ennemi n’osera jamais pénétrer dans les régions à haute densité démographique. Il rappelé le président égyptien des versets du Coran qui confirment la lâcheté de ceux qui évitent le face à face, et se cachent toujours derrière leur blindage. C’est cela qui fait que la seule confrontation réussie est la guerre populaire.

    Ce point était toujours la pomme de discorde entre les deux dirigeants. Nacer, étant le fruit de l’école militaire classique qui compte sur l’armée régulière et marginalise toute participation populaire, Mais Boumediene était l’élève de la guerre de libération nationale, qui a conçu et amélioré la conception de la guerre populaire.

    L’équation est très simple. Dans toute confrontation entre une armée régulière et des groupes de résistance populaires, l’armée est considérée comme perdante si elle n’arrive pas à écraser ses adversaires. Ces derniers sont vainqueurs si simplement ils résistent, ne se plient pas à la volonté de l’ennemi, et continuent à le harceler pour rendre sa vie insupportable et son agression bien couteuse.

    La confrontation entre les armées arabes et Israël était toujours une série d’échec, malgré des exemples inoubliables d’héroïsme, un lourd tribut de sacrifice et une souffrance sans limite de la population.

    D’ailleurs, l’entrée des armées arabes en Palestine, le 15 mai 1948, était une erreur, à la fois stratégique et tactique.

    Dans la période qui a précédé cette date, les combattants palestiniens n’ont pas perdu une seule bataille. Beaucoup de moudjahidines arabes, y compris des volontaires algériens, ont épaulé leurs frères palestiniens, qui insistaient pour que les pays arabes se contentent de les approvisionner en armement et en besoins logistiques, sans aucune intervention militaire directe.

    Il faut se rappeler que les bandes sionistes étaient composé d’anciens du bataillon juif de la 2ème guerre mondiale, avec des milices terroristes tel que stern,Lehi, Irgoun, Haganah et Palmah, tous sanguinaires et spécialistes des massacres qui visent le civiles.

    Parmi les leaders de ces milices se trouvaient le sinistre Menahem Begin.

    En face, il y avait les armées arabes qui n’ont pas fait une seule guerre, composées de soldats qui n’ont pas connu un baptême du feu avec un ennemi. Les services de renseignement étaient loin d’avoir une carte opérationnelle de la future bataille. L’armée égyptienne a loué des bus d’un civil palestinien pour transporter ces troupes, qui, en route pour la Palestine, ont traversé, sans problème, la garnison anglaise stationnée au canal de suez.

    L’armée jordanienne, qui avait pour rôle principal d’assurer la garde de l’Emir Abdallah, était commandée par le général anglais, Sir John Bagot Glubb.

    C’est dire simplement que la bénédiction britannique n’était pas à exclure

    Avant mai 1948, les Moudjahidines palestiniens ont fait face brillement aux israéliens, les noms de leurs chefs sont devenus une épopée populaire. Personne ne peut oublier Abdelkader Hossini, Hassan Salama et le remarquable officier égyptien, Ahmed Abdel Aziz, tué d’ailleurs par une balle égyptienne, tiré par le sentinel égyptien du camp.

    Une fois traversée les frontières de la Palestine, les armées arabes ont désarmé les combattants palestiniens. Le mot d’ordre était : Ne craignez rien, on s’en occupe. C’est le commencement réal de la tragédie palestinienne. Il suffit de jeter un coup d’œil sur une carte qui montre la comparaison de la surface occupée par les israéliens en 1948 et en 2014.

    La guerre d’octobre 1973 était une exception qui confirma la règle. Grâce à une préparation minutieuse par Nacer et des généraux d’une valeur redoutable, tel que le Général Shazli, les premiers jours ont fait la fierté du monde arabo-musulman, mais la victoire militaire a donné lieu à une défaite politique, parce que c’est Henry Kissinger qui a pris les affaires en mains.

    Les événements de la première décennie du troisième millénaire ont donné raison à la conception algérienne de la confrontation avec l’ennemi. La victoire de Hizbollah libanais, selon la règle déjà indiquée, a défié l’orgueil israélien, et malgré les crimes perpétrés par la machine de guerre de Tel Aviv, les combattants libanais ont forcé le retrait des troupes israéliens, sans perdre ni leur armes ni leur capacité défensive.

    A la fin de la même décennie, Ghaza a donné le même exemple de sacrifice et de résistance féroce. 2014 a vue la suite logique, qui a montré comment les palestiniens ont largement profité des leçons de 2008/2009.

    Le monde entier a constaté que les tués israéliens étaient, en majorité absolue, des militaires, mais les martyres palestiniens qui se comptaient par centaines étaient des civils. Le nombre très élevé de victimes et la dimension terrible de la destruction n’ont pas affaibli la volonté et la détermination palestinienne. C’est ça la victoire. Hamas s’est confirmé comme interlocuteur incontournable, pour tout le monde, je dis bien, pour tout le monde.

    Aucun leader de Hamas n’a été tué ou même arrêté par les israéliens, malgré le fait que Ghaza n’est qu’un mouchoir de poche, contrôlé étroitement par les satellites américains et les avions de tous les modèles et les capacités. Certaines mauvaises langues murmurent que nous devons ajouter les informations fournies à l’ennemi par certains services de sécurité arabes, transmises directement ou par la CIA interposée.

    Le comportement de l’armée égyptienne est à analyser avec précaution. Cette armée avait, sous la présidence du Nasser, une doctrine qui fait d’Israël l’ennemi stratégique de la nation. Anouar El Sadate a considéré que la guerre d’octobre était la dernière guerre avec Israël. Par conséquent, l’entité hébreu est devenue l’allié régional par excellence, au même titre, ou peut être plus, que l’Arabie Saoudite. La presse égyptienne rapporte souvent, avec une fierté honteuse, le nombre d’immigrés clandestins tués par l’armé égyptienne pour les empêcher d’arriver aux frontières israélienne. Je n’ai jamais lu une information indiquant que l’armée israélienne a abattu un seul africain, ce qui montre l’efficacité de la protection assurée par les soldats de l’ennemi d’hier, l’allié d’aujourd’hui.

    L’armée d’octobre n’est plus. Elle est remplacée par l’armée de Camp David. C’est pour cette raison que Hamas devient un ennemi pour Le Caire. L’ennemi de mon ami est mon ennemi.