Sombre

“Only the mob and the elite can be attracted by the momentum of totalitarianism itself. The masses have to be won by propaganda.” (Hannah Arendt)

  • Dans le Calaisis, la situation humanitaire devient catastrophique. Face à un afflux d’exilés, le gouvernement se contente de démultiplier les barbelés et les compagnies de CRS. Une logique sécuritaire qui, comme partout en Europe, met le feu aux poudres et provoque des violences.

    C’est en ces termes que, dans un entretien accordé jeudi à la Voix du Nord, Bernard Cazeneuve a décidé de répondre à la situation humanitaire catastrophique qui ne cesse de s’aggraver, à Calais : «  350 policiers sont déjà mobilisés (...). J’ai décidé de renforcer encore ces effectifs. Il y aura au total 450 policiers et gendarmes mobilisés, ce qui est exceptionnel pour une circonscription de police de 75 000 habitants.  » : c’est en ces termes que, dans un entretien accordé jeudi à la Voix du Nord, Bernard Cazeneuve a décidé de répondre à la situation humanitaire catastrophique qui ne cesse de s’aggraver, à Calais.

    Selon les derniers chiffres annoncés jeudi par le préfet du Pas-de-Calais, Denis Robin, 2 200 à 2 300 migrants se trouvent actuellement dans la ville et ses environs, contre 1 500 à la fin de l’été. Depuis lundi, des échauffourées entre migrants et des tentatives désespérées de prises d’assaut de poids lourds se sont répétées. Avec parfois des conséquences dramatiques. Dans la nuit de lundi à mardi, une jeune Éthiopienne de seize ans est morte renversée par une voiture en voulant traverser l’autoroute A16. Elle cherchait à rejoindre un endroit propice pour monter à bord d’un véhicule en route pour l’Angleterre. Le même jour, un peu plus tôt, un migrant a tenté de sauter d’un pont sur un camion qui roulait en direction du tunnel sous la Manche. Blessé, il a été hospitalisé. Partout en Europe, les associations d’aide aux migrants demandent l’ouverture de voies légales afin d’éviter que les personnes en quête d’asile prennent de plus en plus de risques pour fuir des situations insupportables. Mais en Espagne, en Grèce, en Bulgarie comme aujourd’hui à Calais, les États préfèrent ériger des murs de grillages et de barbelés. Les choix des pays membres de l’Union européenne (UE) se réduisent à contrôler les frontières et à organiser la répression policière. 
«  Le point commun entre tous ces points chauds en Europe, c’est le déploiement des forces de police et le renforcement des contrôles, explique Gispy Beley, chargée des questions européennes à la Cimade. À Calais, la situation dure depuis des années et on fait chaque fois la même annonce : l’augmentation des personnels de police. La réponse des autorités espagnoles est la même. Le gouvernement renforce la valla de Melilla (clôture de Mellila) et on constate de plus en plus d’expulsions illégales. Des bavures policières ont lieu tous les jours à Ceuta... » Les migrants prennent ainsi l’habitude de se confronter à la police et la violence devient un usage commun. Mercredi, à Calais, la police aux frontières organisait, sur la rocade, à proximité du terminal des ferrys, une vaste opération de contrôle au scanner, censée déceler toute présence humaine à bord des camions et entre leurs essieux. On a observé un chauffeur molestant, un à un, les migrants que les CRS faisaient sortir de son véhicule.
    Une rafle à dimension européenne

    «  De toute façon, ce qui manque c’est une réponse européenne, continue la militante de la Cimade. Les moyens sont consacrés aux contrôles des frontières et à la répression plutôt qu’à l’accueil. Il faut un réel partage des responsabilités politiques entre tous les États européens pour une vraie répartition de l’accueil.  » Pour l’instant, les demandes d’asile en Europe sont régies par le règlement Dublin 3. C’est au premier pays par lequel passe un migrant de gérer sa demande d’asile. À chacun de se débrouiller.

    Par contre, les opérations policières conjointes se multiplient. L’actualité brûlante à Calais et relatée dans tous les médias, à grands coups de sensationnalisme, intervient dans un contexte où la nouvelle présidence européenne vient de lancer l’opération «  Mos Maiorum  » (l’Humanité du 15 octobre 2014). Prévue pour se dérouler jusqu’à dimanche prochain, elle met en place, par la voie du Conseil de l’Union, une coopération des polices nationales, d’Europol et de l’agence Frontex pour l’interpellation massive de migrants, l’objectif officiellement affiché étant de glaner un maximum d’informations afin de démanteler les réseaux mafieux de passeurs. Les associations dénonçaient, en début de semaine, «  une rafle  » à dimension européenne et s’inquiétaient du nombre de violations des droits humains que l’initiative allait engendrer. «  Nous avons fait bouger l’Europe, continuait, jeudi, de s’enorgueillir Bernard Cazeneuve à propos de l’actualité calaisienne. J’ai obtenu (...) que l’on mette fin à l’opération “Mare nostrum” (...) pour lui substituer une opération de contrôle des frontières extérieures de l’Union au plus près des côtes européennes. C’est l’opération “Triton” qui débutera début novembre.  » Cependant, l’agence Frontex l’a elle-même précisé, l’opération à laquelle fait allusion le ministre français, dite aussi «  Frontex plus  », n’aura pas pour objectif les sauvetages en mer. Ce qui était le cas de «  Mare nostrum  ». Il s’agira d’une énième opération policière, voire militaire, de contrôles des frontières. «  Les routes que continueront d’emprunter les migrants n’en seront que plus dangereuses, déplorait tout récemment le collectif Migreurop. Si elle veut réellement mettre fin à l’immigration irrégulière, l’UE doit la rendre régulière en permettant l’accès au territoire européen à celles et ceux qui sont contraints à l’exil.  » Les événements de ces derniers jours, à Calais, sont un exemple de l’impasse de la gestion policière des questions migratoires. «  Les propositions françaises formulées cet été à nos partenaires sont désormais la feuille de route de l’UE  », complétait le ministre, depuis la place Beauvau. Plutôt que de rompre avec les postures sécuritaires prises dans les années Sarkozy, Paris fait le choix de la surdité face aux constats et propositions des associations de solidarité. Un pied de nez assumé en direction de tous ceux qui s’engagent pour l’arrêt des politiques menées en dépit du droit humain à la dignité et l’asile.

    JACKY HÉNIN RÉCLAME UN DÉBAT NATIONAL
    Pour Jacky Hénin, ex-maire PCF de Calais, il y a urgence à ouvrir un débat national sur la situation du Calaisis. « Il faut débattre des solidarités à mettre en placeavec les migrants mais aussi de la situation des habitants, estime le député européen. Avec un chômage à 17 %, la misère de ceux qui sont à la rue leur rappelle la leur. C’est le terreau du racisme. »

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    #émigration #forteresse_europe