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Le Grand Mix est une scène de musiques actuelles (labellisée SMAC par le Ministère de la Culture et de la Communication) à Tourcoing. Cette salle de 650 places ouverte en 1997, est gérée par l’association La Passerelle. L’association mène un projet culturel et artistique dans la salle de spectacles (et hors les murs) [...]

  • La ville de Tourcoing lâche le Théâtre du Nord
    http://www.lemonde.fr/scenes/article/2015/02/09/la-ville-de-tourcoing-lache-le-theatre-du-nord_4572574_1654999.html

    La déconstruction du paysage culturel continue, cette fois-ci à Tourcoing, dans le Nord, l’une des nombreuses villes conquises par la droite en mars 2014. Et l’ouvrage en question est le Théâtre du Nord. Basé à Lille et à Tourcoing, ce Centre dramatique national (CDN) est dirigé par le metteur en scène Christophe Rauck. Son logo représente justement trois briques : la première pour le théâtre situé sur la Grand’Place de Lille ; la deuxième pour la salle de spectacle et berceau du CDN à Tourcoing, L’Idéal ; la troisième pour l’Ecole du Nord, à Lille, qui forme des comédiens. Sans oublier l’atelier de fabrication de décors, également situé à Tourcoing.

    Le maire, l’UMP Gérald Darmanin, assume sans complexe : c’est lui qui prend le téléphone pour expliquer au Monde les raisons qui le poussent à retirer au CDN la totalité de la subvention de la ville, soit 76 250 euros. Ce retrait peut paraître faible au regard des 3,9 millions d’euros de fonds publics reçus par le Théâtre du Nord : celui-ci est soutenu par l’Etat (1,7 million d’euros), la région (1,6 million d’euros), la ville de Lille (504 969 euros) et jusque-là, Tourcoing donc. « Notre choix ne met pas en péril le Théâtre du Nord », répète Gérald Darmanin. Et la région Nord-Pas-de-Calais, aux mains des socialistes, a elle-même diminué de 170 000 euros son soutien au CDN, en janvier 2014, alors que Christophe Rauck prenait ses fonctions.

    Un manque-à-gagner d’environ 140 000 euros
    Il n’empêche : par ce geste, le nouveau maire de Tourcoing touche au symbole de la décentralisation culturelle et des financements croisés : si cette décision est entérinée, comme prévu, le 14 février, lors du vote du budget de la ville, le CDN perdra un partenaire. De plus, Gérald Darmanin envisage à l’avenir de louer au CDN l’atelier de construction de décors de Tourcoing, jusque-là mis à disposition gratuitement (au terme d’une convention). Le montant du « bail » reste à définir mais le bâtiment est valorisé à hauteur de 63 460 euros. Au total, le CDN pourrait donc subir un manque-à-gagner d’environ 140 000 euros. Le Théâtre du Nord organise une conférence de presse, lundi 9 février, car il s’agit aussi de répondre aux propos jugés hostiles et mensongers de l’élu.

    Le premier argument du maire est d’ordre financier. « Comme ailleurs, nous souffrons à Tourcoing de la baisse de la dotation de l’Etat aux collectivités locales. Et j’hérite d’une ville endettée de 144 millions d’euros. Avec une population pauvre, puisque 25 % des habitants vivent en-dessous du seuil de pauvreté ». Voilà pour le contexte. Le deuxième motif est d’ordre politique : Gérald Darmanin ne décolère pas contre l’Etat, lequel « a supprimé son soutien au Conservatoire de Tourcoing et à celui de Roubaix, alors qu’il l’a maintenu à Lille ». Il n’y en a que pour Lille, proteste l’élu qui conclut : « J’ai donc choisi de soutenir les structures de la ville. J’ai maintenu pour 2015 les subventions aux lieux culturels tourquennois, comme le centre du Fresnoy dédié à l’image, l’Atelier lyrique, etc. ».

    Enfin, et surtout, le maire critique la gestion du CDN. « Je ne connais pas le nombre d’actions culturelles menées par le Théâtre du Nord, je ne sais pas combien de jeunes de la ville en bénéficient. En revanche, je sais que le Centre de création théâtrale, La Virgule à Tourcoing, touche 463 enfants, dont 50 % de Tourquennois », compare le maire. Pour finir, Gérald Darmanin estime que le Théâtre du Nord a de réelles marges d’économie… « Il suffit de regarder le compte des salaires du directeur et de son équipe », glisse-t-il.

    « Pour certains élus, nous sommes des danseuses ! »
    Joint par téléphone, dimanche soir, 8 février, Christophe Rauck fait part de sa consternation. « Pour certains élus, nous sommes des danseuses ! J’ai rencontré le maire, le 5 février. Pendant vingt minutes, c’était un match de boxe », raconte-t-il, en rendant coup pour coup : « Tout d’abord, il est faux de dire que nous n’avons communiqué aucun chiffre. Le maire a toutes les données. Et c’est faux de dire qu’il ne se passe rien sur le territoire. L’Idéal, à Tourcoing, est situé dans un quartier populaire, excentré. Nous travaillons avec les établissements scolaires alentour, et avec la médiathèque Andrée Chédid qui vient d’ouvrir. Nous avons fait du porte-à-porte chez les habitants pour qu’ils viennent aux représentations de la rentrée ».

    La ville a déserté, selon lui : « En janvier, nous avons eu une discussion sur le projet avec toutes les tutelles, mais la ville de Tourcoing n’est pas venue. Si on se bouche les oreilles et si on ferme les yeux, alors on ne peut pas savoir comment travaille le Théâtre du Nord ». Le fonctionnement du CDN – l’ouverture du bâtiment, les salaires des 39 permanents, etc. – absorbe 50 % des subventions, dit-il. « On est en train de diminuer la masse salariale, parce qu’il y a moins d’argent. Et tout l’argent n’est pas pour moi ! Dans un CDN, il y a des artistes associés. Et quand on ne joue pas à Tourcoing, on prête le lieu à des compagnies ».

    Enfin, dit-il, c’est grâce aux subventions que l’atelier de décors peut fabriquer à coût moindre, à l’usage du CDN et d’autres compagnies de la région. « C’est le seul atelier de décors dans le Nord de la France. Il emploie des permanents et des intermittents, serruriers, ébénistes… C’est de cet atelier qu’est sorti le décor du spectacle de Matthieu Roy, Même les chevaliers tombent dans l’oubli, créé à Avignon en 2014. En résumé, l’atelier rayonne. En face, on a un maire qui brandit le slogan étriqué « Tourcoing aux Tourquennois ». Cela ne fait pas un projet ».

    Clarisse Fabre