Pierre Coutil

de celles et ceux qui marchent avec… (enfin qu’essayent).

  • Empêcher... empêchés de penser
    http://www.amisdefreinet.org/lebohec/empecher.html

    Mais l’auteur des programmes a vraiment une vision nostalgique des choses. C’est simple pour lui : pour avancer vraiment, il faut revenir soixante ans en arrière. Lorsqu’on lit le programme du CP-CE1, on croirait se retrouver au milieu du siècle précédent, comme si rien n’avait bougé, comme si la vie était immuable ; alors qu’il s’est passé bien des avancées qui changent fondamentalement les choses. Les enfants sont dans les mêmes conditions qu’autrefois. Le but est le même : les empêcher de penser. Et c’est pour ça que les instructions de 1923 lui plaisent tant.

    Revenons-en à cette « magnifique » école d’autrefois : elle durait 30 heures par semaine sans compter les heures d’études pour les enfants des villes. Pour quels résultats ?
    Prenons une classe de certif (il se passait alors à 12 ans) : 55 élèves, tous fils de cheminots. 54 reçus à l’examen. Et qu’est-il sorti de cette promotion ? Trois instits, deux employés des impôts, dont un cadre, deux divers et, presque tout le reste : cheminots. Et plus de 80% des élèves de cette classe ont posé le porte-plume dès le lendemain de l’examen. Et ils ne l’ont même pas repris pour les lettres de bonne année parce que les femmes s’en chargeaient.
    Pourtant, ils savaient parfaitement écrire le français. Ils avaient passé six années de leur vie à l’apprendre. Oui, mais pour quoi faire ? On ne leur avait pas dit qu’ils pourraient avoir des choses intéressantes à exprimer. « C’est quand on commence à écrire qu’on commence à penser. » (Ricardou). On s’est bien gardé de les mettre en condition de pouvoir commencer à écrire.

    Cependant, malgré les difficultés, il existe des enfants heureux, essentiellement parce qu’on a libéré leur parole. Ils disposent de six langages, et ils s’en servent parfois de façon stupéfiante. Ils aiment venir à l’école parce qu’ils ont l’impression qu’ils vivent à plein leur enfance. Leurs parents sont étonnés de leur élan, de leur dynamisme. Mais que s’est-il donc passé pour qu’ils soient tellement différents ? C’est que, progressivement, année après année, technique après technique, ils sont devenus sujets de leurs apprentissages. C’est une sorte de révolution copernicienne face aux ridicules ambitions des programmes. On s’est installé dans de nouvelles visions des choses. En voici la formulation.
    L’enseignement doit permettre à chacun de se constituer sa propre culture, sur la base de ses données particulières de départ, par le moyen de l’expression-création et de la communication dans un groupe positif.

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