Ventres asservis au capital
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Qu’il est difficile de parler de la « production d’enfants », en cette ère et cette région du monde où la parentalité baigne dans un luxe romantique inouï ! C’est pourtant ce à quoi s’attelle l’essayiste italienne Silvia Federici dans Caliban et la sorcière. Le fait qu’elle évoque une autre époque facilite peut-être un peu les choses. On n’a pas l’impression qu’elle parle de nous, là, maintenant. Nous poussons de hauts cris devant la politique d’enfant unique de la Chine. Cela nous paraît barbare. Ici, c’est autrement plus civilisé : la mère est « glamourisée », l’enfant esthétisé. Or, n’est-ce pas la même logique qui y préside, mais articulée différemment ? Car entre avortements forcés et avortements interdits – ou difficiles d’accès –, stérilisation forcée et procréation assistée, prenons-en acte : la reproduction est bel et bien gérée, contrôlée, comme dans « contrôle des naissances ».
Les femmes, leur spécificité reproductive, ont été asservies au projet capitaliste des nations et tous les événements et discours qui ont concouru à cet objectif ont eu des effets collatéraux sur la définition de la féminité. C’est là la thèse essentielle de Federici dans son livre Caliban et la sorcière. Si l’histoire des sorcières, de leur chasse et des horreurs qu’on leur faisait subir – on les brûlait réellement, ce n’est pas une métaphore tirée d’un conte pour enfants – est tout de même assez bien connue, la raison qui motivait cette histoire restait sans ancrage.