Paulo

a principalement passé entre les gouttes

  • Agnès :
    « Notre nom, lui aussi, nous échoit par hasard, poursuivit-elle, sans que nous sachions quand il est apparu dans le monde, ni comment un ancêtre inconnu a bien pu l’attraper. Nous ne comprenons pas du tout ce nom, nous ne connaissons rien rien de son histoire, et pourtant nous le portons avec une fidélité exaltée, nous nous confondons avec lui, il nous plait bien, nous sommes ridiculement fier de lui comme si nous l’avions inventé nous-mêmes sous le coup d’une inspiration géniale. Pour le visage, c’est pareil.(...)un moment vient où l’on se tient devant la glace et l’on se dit : est-ce que cela c’est vraiment moi ? et pourquoi ? pourquoi devrais-je me solidariser avec ça ? que m’importe ce visage , Et à partir de là tout commence à s’effondrer. »
    (milan kundera, L’immortalité, pages 58-59, Folio)

    plus loin, Agnès poursuit sa recherche, elle juge que : « ce qui est insoutenable dans la vie, ce n’est pas d’être, mais d’être son moi. »(p381)

    tout ceci est frappant de perspicacité, mais comment être sûr ? Je me souviens d’une analyse d’un psy anglais ( Laing ? un autre ?) lequel soutenait, d’une façon aussi convaincante que le visage vous dénonce car il se façonne suivant votre vie et ses défaillances. Effectivement on croit découvrir dans les défauts d’un visage les défauts d’un être...
    sans oublier Levinas qui espérait que le visage arrête l’assassin sur le point de tuer

    reste que le nom est certes arbitraire, il nous tombe dessus comme la fiente d’une mouette. Ni plus ni moins.
    Il faut être un peu lassé, en général, pour errer là-dedans. C’était le cas de W Benjamin, probablement excédé par sa situation au monde. kundera ( homme las s’il en est) y a réfléchi :

    « après cette deuxième phase de la vie, où l’homme ne peut quitter la mort des yeux, en vient une troisième, la plus courte et la plus secrète, dont on sait très peu de chose et dont on ne parle pas. Ses forces déclinent et une désarmante fatigue s’empare de l’homme. Fatigue : pont silencieux qui mène de la rive de la vie à la rive de la mort. La mort est si proche qu’on s’ennuie à la regarder. Comme autrefois, elle est non-vue et non-visible. Non-vue, comme les objets trop familiers, trop connus. L’homme fatigué regarde par la fenêtre et contemple le feuillage des arbres dont il prononce mentalement le nom : marronnier, peuplier, érable. Ces noms sont beaux comme l’être même. » Etc

    Et là ça me frappe sinon par sa vérité du moins par la proximité d’avec ce que l’on vit, passé un certain âge.