Lyes Benyoussef

J’écris sur l’Algérie, le Monde arabe, l’Islam.

  • L’Algérie, dans une crise générale majeure, est à la veille d’un désastre dès l’amenuisement de ses réserves constituées au temps du baril à plus de 100$. Pourtant, la société est léthargique et l’autisme du régime, à l’image d’un président longtemps mourant, semblent indiquer le contraire. Pourquoi le système politique algérien ne se réforme pas ?

    Extraits d ela première partie d’un article paru sur AnalyseDZ
    http://analysedz.blogspot.com/2016/04/pourquoi-le-systeme-politique-algerien.html

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    Bien que l’absence de projet économique et social sérieux soit manifeste, le système politique refuse toutes les leçons de l’histoire, algérienne et mondiale, en consolidant son autoritarisme comme s’il n’était pas illégitime, comme si les dirigeants étaient compétents et comme si cette attitude irrationnelle serait productive. Pourquoi donc le système politique algérien refuse-t-il de se réformer ? Esquisse d’une réponse :

    1. L’inculture
    L’impéritie et l’infériorité intellectuelle des dirigeants, tous, civils et militaires confondus, raillés à juste titre par la population et (désormais avec l’inénarrable Sellal) le monde, est un problème majeur. Les décideurs algériens, notamment les militaires, sont d’une inculture incroyablement profonde. Le sociologue Ahmed Rouadjia écrit dans une étude récente que « ce qui différencie le régime algérien des autres régimes du même acabit, c’est moins l’autoritarisme que l’inculture de la caste militaire sur laquelle il s’arcboute. En effet, le cursus, tant scolaire que militaire, de la plupart des officiers supérieurs de l’armée algérienne, sinon la majorité d’entre eux, qui ont présidé et qui continuent jusqu’à présent à présider au destin du pays, s’avère à l’examen attentif sinon affligeant, du moins assez médiocre. Beaucoup d’entre eux sont devenus en effet des généraux sous la présidence de Chadli Benjdid qui avait lui-même institué ces hautes distinctions, alors que traditionnellement ces marques distinctives sont réservées aux gens de mérite et aux soldats qui se sont illustrés aux champs de bataille, comme les généraux allemands, français, russes, ou vietnamiens, tel le fameux général Giap, le vainqueur des troupes françaises du Diên Biên Phu. Comme les officiers qu’il avait promus au grade de général, Chadli Benjdid, issu lui-même comme ses pairs de la DAF (déserteurs de l’armée française) ayant rejoint très tardivement les rangs de l’ALN et du FLN, n’avait pas ou à peine le niveau de certificat d’études primaires. »
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    En tout état de cause, si un homme comme le général Toufik, autoproclamé d’après un témoignage « dieu de l’Algérie », pouvait tirer intellectuellement des leçons, il n’y aurait pas eu la fin pitoyable ou risible (c’est selon le tempérament et l’opinion de chacun) qu’il est en train d’avoir en ce moment…

    2. Profondeur de la mentalité antidémocratique, élitisme contradictoire
    L’hostilité, par principe, des décideurs algériens à la démocratie. Dans celle-ci, c’est un élément, son « accountability » (rendement de comptes), qui les répugne. Ils partagent avec les islamistes radicaux, pour des raisons différentes, la vision selon laquelle le peuple ne peut être source de légitimité ; à leurs yeux, c’est une populace, un conglomérat de tubes digestifs à remplir de nourriture et de bras à essayer de faire travailler (et la rente pouvait garantir la nourriture et remplacer le travail). Ce qui relève du paradoxe, car la tentation de qualifier les décideurs algériens de canaille est compréhensible tant il s’agit d’un constat objectif
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    Ainsi, dans un article paru aujourd’hui sur El Watan, le politologue Rachid Tlemçani relève une confusion des laudateurs de Chakib Khelil et autres corrompus : « Le discours technocratique est mis en exergue, comme si la crise nationale n’est pas une crise de légitimité, politique, mais d’ordre technique. » Aujourd’hui comme hier, cette hostilité envers la démocratie, est enraciné dans les mentalités des dirigeants et leurs proches.

    3. La corruption
    Son ampleur parmi les groupes que sécrétés par système est effarant. En effet, Franco avait désigné le roi d’Espagne comme successeur, mais celui-ci avait consenti volontiers, sans contrainte, une monarchie constitutionnelle (voir l’étude déjà cité de Rouadjia). Dire que la culture démocratique était partagée par les élites dirigeantes d’Espagne y compris sous Franco ! Chose dont l’équivalent n’aura jamais lieu en Algérie. Comme l’écrit Rachid Tlemçani dans le même article, « pratiquement l’ensemble de la classe politique est impliquée d’une manière ou d’une autre dans des scandales financiers. » Cet universitaire estime la corruption à quelques 300 milliards de dollars. En vérité, si l’on donne au mot corruption tout sa profondeur et on ne la réduit pas aux pots-de-vin, les commissions et les rétro-commissions, l’estimation 300 milliards sera dépassée.
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    #Algérie #Bouteflika #Corruption