• C’est à présent un crime de critiquer Israël !
    mercredi 11 mai 2016 - Abdel Bari Atwan
    http://www.info-palestine.net/spip.php?article16031

    Cela fait quarante ans que j’ai quitté ma patrie, la Palestine, et que j’ai émigré en Europe afin d’échapper à la répression, à la confiscation des libertés et aux injustices que nous infligeaient nos nouveaux voisins, les Israéliens.(...)

    Une grande partie du succès du lobby sioniste est due au travail d’une armée d’activistes électroniques qui ratissent Internet en quête de toute critique portée contre Israël. Toute critique est aussitôt contrée par des commentaires hargneux et insultants et se voit apposée l’étiquette « d’antisémitisme ». Benjamin Netanyahou alloue à cette brigade un budget annuel de 750 millions dollars. Tout ce qu’elle trouve est aussi utilisé pour persécuter toutes les personnes qui défient Israël et les empêcher de parler ou d’écrire dans les journaux. Je fais partie de celles-ci, moi qui vous souhaite longue vie, bonheur et santé.

    Avant-hier, le président de la Fédération des Sociétés d’institutions palestiniennes en France m’a envoyé un message pour me dire que l’anniversaire de la Nakba qui devait se tenir à Paris et au cours duquel je devais prendre la parole venait d’être annulé parce que des organisations sionistes auraient reçu des menaces, notamment de violences physiques sur les participants. Les services de sécurité ne voulaient pas assurer la protection de cet anniversaire du fait de « l’état d’urgence » qui est en vigueur depuis les horribles attentats de novembre 2015 dans la capitale française.

    Il y a deux semaines, des groupes sionistes ont réussi à faire annuler un autre événement palestinien : un discours de Leila Khaled, militante de la guérilla palestinienne, qualifiée de terroriste.

    Il y a trois semaines, j’étais invité en Allemagne à une célébration du Jour de la Terre organisée par un ensemble des groupes palestiniens comprenant des docteurs et des étudiants. Une fois de plus, des activistes sionistes ont réussi à faire annuler les réservations dans la salle où devait se tenir la célébration. Mais les personnes qui organisaient le concert ont trouvé un autre endroit et n’ont pas plié devant les les services de sécurité allemands qui les avaient avertis qu’ils ne pourraient pas garantir leur sécurité.

    On pourrait se demander : pourquoi n’y a-t-il aucune protestation de la part des gouvernements et des ambassades arabes et palestiniens ?

    Quand on voit que le président palestinien pleure- non pas pour des milliers d’enfants palestiniens mais pour quelques victimes israéliennes- qu’il envoie Saeb Erekat dans des camps de jeunes israéliens, qu’il se félicite de sa coordination sécuritaire avec Israël et qu’il transforme les ambassades palestiniennes à l’étranger en maisons de retraite, on se dit que ce n’est pas surprenant que le lobby sioniste ne rencontre aucune opposition en Europe.

    Il y a, par contre, de nombreux jeunes arabes et européens qui ne cèdent pas et qui résistent à l’occupation raciste israélienne, son nettoyage ethnique et sa cruauté, qui y résistent farouchement et courageusement malgré tous les efforts faits pour les faire taire. Ils sont les héros derrière le mouvement pour le boycott, le désinvestissement et les sanctions (BDS) et ils sont poussés par leur sens de la dignité et de la justice. Parmi eux se trouve Malia Bouattia, l’étudiante algérienne récemment élue Présidente de l’Union nationale des Étudiants malgré une violente campagne menée contre elle par le lobby israélien qui l’accusait, bien sûr, d’antisémitisme.

    Nous n’exagérons pas quand nous disons que de nombreux défis difficiles à relever nous attendent. Quand on voit Ken Livingstone, qui a passé sa vie entière à faire campagne contre le racisme, être accusé d’antisémitisme, que l’on voit les deux millions de personnes qui ont fait une marche au centre de Londres pour protester contre la guerre en Irak être totalement ignorées, qu’on voit David Cameron déclarer que la dernière agression contre Gaza était de l’auto-défense, agression qui a tué 2200 personnes dont 500 enfants, 76% d’entre eux étant des civils, c’est notre droit de parler haut et fort, d’être en colère et pleins de chagrin.

    Nous ne cèderons pas, même si nos autorités palestiniennes ont cédé 80% de nos terres au nom de la « modération » et un jour, même si cela doit prendre du temps, nous l’emporterons.